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Si le réseau de première ligne doit s’impliquer davantage dans le traitement des maladies mentales tel que le préconise le nouveau Plan d’action québécois en santé mentale, il faut d’abord solliciter les omnipraticiens (MF). Dans une telle perspective, la question suivante se pose. Quelle est la perception des MF à l’égard d’une maladie comme la schizophrénie, un trouble grave et persistant facilement pourvoyeur d’éléments de stigmatisation ? Est-ce une perception différente de la population générale (PGQ) ? Au Québec, les MF s’occupent à un moment donné de 75 à 90 % des patients souffrant d’un trouble mental (Malcolm, 2000). De plus ils sont habituellement les premiers à intervenir dès le premier épisode psychotique et avant qu’une référence ne soit faite à un spécialiste. L’attitude et la perception des MF à l’égard de la maladie mentale, comme la schizophrénie ont d’importantes répercussions sur l’organisation et la planification des soins de cette population (Bhugra, 1989 ; Buchanan et Bhugra, 1992). Des facteurs tels que la stigmatisation peuvent créer une barrière qui ralentit le rétablissement optimal et qui peut aussi augmenter le taux de morbidité chez les patients souffrant de troubles psychiatriques (Hocking, 2003). En général, les études portant sur l’attitude ont démontré que le savoir sur la maladie mentale et le contact avec un patient souffrant d’un trouble mental diminuent la stigmatisation, la crainte et augmentent l’acceptation (Britten, 1998 ; Melançon-Ouellet et Pronovost, 1980 ; O’Grady, 1996 ; Wolff, Pathare et al., 1996). Dans une étude par sondage réalisée récemment en Suisse (Simon et al, 2005) où ont participé 1089 MF, les répondants ont confirmé que leur attitude à l’égard des premiers épisodes comme ceux des patients plus chroniques étaient liées aussi à une accessibilité facile aux services des spécialistes, à des références à seuil bas vers les services spécialisés. En outre, une étude allemande réalisée par des chercheurs (Angermeyer et al., 2003 ; Angermeyer et Matschinger, 2005) a examiné le concept du processus de la stigmatisation et des attitudes de la population (n = 5025) envers la schizophrénie. En bref, ils ont conclu que le « labelling » (l’étiquetage) augmente le risque que la personne souffrant de schizophrénie soit considérée comme imprédictible et dangereuse. Aussi, ces chercheurs attirent l’attention sur les données statistiques non significatives de la relation entre la perception des cliniciens et un mauvais pronostic. Notamment, ils ont trouvé qu’il existe une différence entre les répondants avec connaissance de la maladie mentale et ceux avec des connaissances limitées (Angermeyer et Matschinger, 2005). Ainsi, le but du sondage présenté ici est d’investiguer les attitudes actuelles, positives et négatives des MF du Québec au sujet des patients souffrant de schizophrénie et de comparer ces données avec celles récemment colligées auprès de la PGQ (Stip et al., 2001 ; Stip et al., 2006).

Méthode

Instruments

Il s’agit d’un sondage très court, ponctuel et pratique qui ne nécessite que quelques minutes, ces conditions furent privilégiées pour ne pas importuner les MF déjà surchargés et parfois peu enthousiastes pour les questions de la psychiatrie.

Après la mise au point d’une fiche de renseignements sur le profil démographique et professionnel des intéressés, un court questionnaire composé de 5 items fut développé en partenariat avec la Société québécoise de schizophrénie (SQS) sur la perception et les attitudes à l’égard de cette maladie en se référant à des questions auparavant posées auprès de la PGQ. Ce partenariat obéissait à notre souci de répondre en fait à un objectif secondaire : celui visant l’implication des membres des familles de patients dans la construction des questions relatives à leur domaine d’intérêt et de préoccupation. Ainsi, outre le fait qu’ils saisissent l’occasion de réaffirmer leur préoccupation, les membres des familles exprimaient dans cet engagement leur volonté, leur souci habituel de participation dans l’élaboration de la procédure et du contenu de ce sondage. Ceci fût un atout, puisqu’on voulait avoir un contenu dont les résultats puissent être utiles à SQS. Cela a sans doute diminué quelque peu le construit scientifique pur, toutefois cela eût comme effet de faciliter l’intégration, la participation, et la non mise à distance des familles trop souvent écartées des professionnels épidémiologistes.

Échantillon

Le questionnaire fut envoyé à 3500 MF du Québec sélectionnés à partir d’une liste fournie par la Fédération des médecins MF du Québec (FMOQ). Cette sélection s’est faite de façon aléatoire à partir de la liste totale des MF du Québec. Les questions étaient suivies par un choix de 4 à 8 réponses, vérifiées et validées auparavant par un organisme officiel de sondage Surveys, Opinion polls and Marketing (SOM) habitué des formulations proposées auprès de la population du Québec aussi bien en politique qu’en fait de société. Les réponses étaient anonymes. Du côté de la PGQ, un échantillonnage de 1001 personnes sélectionnées de façon aléatoire à travers la population et basé sur une stratification à 3 degrés selon la répartition suivante : 451 interviews à Montréal, 300 interviews à Québec, 250 interviews ailleurs dans la province furent réalisées. En somme, le sondage concerne les perceptions et l’attitude de la PGQ concernant deux maladies mentales : la schizophrénie et le trouble bipolaire. L’originalité de cette démarche active fût de faire participer les personnes souffrant d’une maladie mentale ou bien un membre de la famille dans le processus même de formulation des questions via SQS ou Revivre (représentant l’Association des maniaco-dépressifs au Québec), en partenariat avec Lundbeck Canada et SOM. Le détail de la méthodologie de sondage a été publié précédemment (Stip et al., 2001).

Résultats

Éléments démographiques

Les MF et la PGQ

Le taux de réponses de 29 % (N = 1003) fut raisonnable et jugé utilisable pour cette population. Parmi les 1003 réponses obtenues, 4 % furent écartées de l’analyse du sondage car les médecins n’exerçaient plus, ou bien le questionnaire retourné était incomplet. L’échantillon d’analyses comprenait ainsi 927 MF. La majorité des MF (N = 780 ; 81 %) rapportèrent ne travailler dans aucun site de santé mentale, tandis que 34 (4 %) des MF affirmèrent travailler à temps plein dans des services de santé mentale.

Âge et genre

Dans la population des MF, 46 % était des femmes. L’étendue de l’âge était de 26 ans à 75 ans.

Les questions

Les questions à la suite de nos réunions entre partenaires et des conseils de la firme SOM ont pris la forme de mises en situation concrètes. Pour aider le lecteur dans la compréhension de ces questions, nous décrirons dans la partie suivante le libellé qui a été exprimé pour chacune des 5 questions proposant ce questionnaire.

Les questions pouvaient prendre la forme d’une mise en situation.

Ainsi la question #1 était libellée de la façon suivante : supposons que des voisins que vous fréquentiez à l’occasion, vous apprennent que leur fille ou leur fils est atteint de la schizophrénie, laquelle des affirmations suivantes vous viendrait le plus spontanément ?

Ainsi, les réponses possibles se présentèrent de la façon suivante :

Seulement 559 (58 %) des MF répondants rapportèrent vouloir offrir de l’aide. De façon surprenante, 117 (12 %) exprimèrent de l’indécision face à leur réaction. Cent quatre-vingt-quinze (195) (20 %) répondirent qu’ils manifesteraient de l’indifférence face à la situation ; aucun des répondants n’aurait choisi de déménager suite à l’annonce d’une telle situation. D’un autre côté 82 (8.6 %) rapportèrent vouloir limiter désormais le contact entre leur enfant et le fils de leurs voisins.

Question #2 : Parmi les maladies suivantes, classez en ordre croissant de 1 à 7, de la plus grave à la moins grave (La schizophrénie, Le SIDA, Le cancer, Maladie cardiaque, Le trouble bipolaire, La dépression, Ne sais pas, ou ne répond pas).

À la question 2, un total de 962 répondants s’est exprimé. Quatre-vingt-deux pour cent (82 %) rapportèrent que la schizophrénie est la maladie la plus sévère des troubles mentaux. Ce jugement était suivi par celui sur la dépression (N = 22: 2 %) et les troubles bipolaires (N = 9). D’un autre côté, le sida (N = 331 ; 34 %) et le cancer (N = 322 ; 33 %) étaient perçus comme les maladies les plus sévères suivies par les troubles cardiovasculaires (N = 50 ; 5 %).

Question #3 : Parmi les sentiments suivants, lesquels décrivent ce que vous éprouvez le PLUS vis-à-vis la schizophrénie (plusieurs réponses possibles) ? (Les choix de réponses sont : Hostilité, Méfiance, Indifférence, Incompréhension, Crainte de contagion, Peur, Compassion, Attirance, Aucun, Ne sais pas, ou ne répond pas).

Les sentiments positifs de compassion et d’attirance furent exprimés par la majorité des membres de l’échantillon (N = 728 : 76 %). Un total de 306 personnes (32 %) avait des sentiments négatifs à l’égard de la schizophrénie. Une suspicion (N = 171 ; 18 %) et l’appréhension (N = 120 ; 13 %), qui traduisent donc un sentiment négatif ont été exprimées par les participants suivi par l’hostilité (N = 14 ; 1 %).

Tableau 1

Attitudes à l’égard de la schizophrénie

Attitudes à l’égard de la schizophrénie

*Significatif à (p < 0.05) ; df = 1

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Question #4 : Supposons que vous appreniez que votre conjoint est schizophrène, comment réagissez-vous ?

(Les choix de réponse sont : Vous rompez la relation, Vous continuez la relation, Vous ne dites rien à votre entourage, Vous en parlez ouvertement à votre famille et amis, Vous paniquez, Ne sais pas, ou ne répond pas).

Neuf cent cinquante-six (956) MF ont répondu à cette question. Presque la moitié de l’échantillon (47 %) exprimait une attitude positive et aurait maintenu leur relation avec leur époux, leur épouse s’il y avait eu un diagnostic de schizophrénie et aurait volontiers accepté d’en parler ouvertement avec la famille ou des amis. Inversement 15 % aurait réagi négativement soit en paniquant soit en cessant la relation avec leur conjoint, ou en ne mentionnant pas la maladie à quiconque. Le reste des MF (37 %) ne savait pas, ou n’a pas répondu à cette question.

Tableau 2

Attitudes : savoir que votre épouse(e) a la schizophrénie

Attitudes : savoir que votre épouse(e) a la schizophrénie

*Significatif à (p < 0.05) ; df = 1

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La question #5 : Dans le cas où vous suspectez une schizophrénie débutante, auriez-vous tendance à référer la famille du patient, pour information et support, à la SQS (http://www.schizophrenie.qc.ca/)?

Neuf cent cinquante-deux (952) ont répondu ; 366 (38 %) affirmèrent un « oui » à la question et 20 (2 %) exprimèrent un « non » mais un large pourcentage de l’échantillon (60 %) avouèrent ne pas connaître ce qu’était la Société québécoise de schizophrénie.

Les analyses statistiques ont montré des différences significatives entre les hommes et les femmes MF dans leurs sentiments à l’égard de la schizophrénie. Un peu plus de sentiments négatifs étaient exprimés chez les femmes (N = 78) que chez les hommes (N = 42) reliés à l’appréhension (χ2 = 19.34 ; DL = 1). Par ailleurs plus d’hommes (N = 387) comparés aux femmes (N = 304) ressentaient de la compassion à l’égard de la schizophrénie (χ2 = 5.27, DL = 1).

MF et PGQ

Comme nous avions affaire à deux populations ayant accepté de répondre à ce questionnaire, nous avons examiné la qualité et le taux des réponses dans ces deux groupes. L’une de ces populations est donc composée de professionnels médecins et l’autre est composée d’une population générale.

L’examen des réponses à la première question par des analyses de χ2 a démontré des différences significatives entre les deux populations à la fois sur les attitudes positives et négatives. Ainsi, 20 % de la PGQ versus 9 % des MF (χ2 = 46.72 ; DL = 1) ne laisseraient pas leur enfant avec les enfants des voisins si ces derniers devenaient porteur d’un diagnostic de schizophrénie. Inversement les MF se montraient plus désireux d’offrir de l’aide à leur voisin s’il y avait un diagnostic établi de schizophrénie en comparaison avec la PGQ (58 % versus 45 % ; χ2 = 91 ; DL = 1).

À la seconde question, nous n’avons pas pu mettre en évidence de différence significative entre les deux populations lorsqu’il y avait lieu de considérer la schizophrénie comme la maladie la plus sévère des troubles mentaux. On doit noter que 17 % des MF et 14 % des répondants de la PGQ affirmèrent que le regroupement de ces trois maladies psychiatriques (schizophrénie ; maladie bipolaire, dépression) représentait en fait un type d’affection plus sévère que les autres conditions médicales telles que le sida, le cancer et les maladies cardiovasculaires.

Les deux populations considéraient également la sévérité du sida comme la plus importante : la PGQ 38 % versus MF 40 %. Les MF furent significativement plus enclins à considérer le cancer comme la seconde maladie la plus sévère (31 % population en général versus 39 % MF ; χ2 = 12.2, DL = 1).

Discussion et conclusion

Dans le nouveau plan élaboré récemment par le Ministère de la santé au Québec, les MF, c’est-à-dire les médecins largement impliqués dans le travail de première ligne, vont être de plus en plus sollicités à la reconnaissance des schizophrénies débutantes, leur bonne évaluation et l’élaboration des plans de soins ou des directions à suivre dans la prise en charge. Dans ce contexte il est important d’associer durablement à la prise en charge médicale du patient, la famille et l’entourage et ce, dès les premiers signes évoquant la schizophrénie. La famille doit être entendue dans ses vraies difficultés à vivre avec un parent atteint de schizophrénie. Le soutien est une condition pour que se mettent en place une collaboration effective et une alliance thérapeutique indispensable. Dans ce contexte, il semble pertinent de pouvoir connaître davantage les résultats issus des données probantes ou issus des enquêtes concernant les soins mais aussi les attitudes à l’égard de la schizophrénie de ceux qui sont impliqués dans les soins du malade : médecin généraliste, psychiatre, infirmière, enseignant, travailleurs sociaux, etc.. On peut envisager que différents professionnels aient des attitudes ou des perceptions qui puissent être nuancées par rapport à cette maladie. Ce dont il est question ici dans ce sondage, c’est d’essayer d’entrevoir si déjà des perceptions distinctes sont envisageables entre ces MF qui seront en première ligne et la PGQ.

Dans ce sondage, les MF se sont montrés plus enclins que la PGQ à offrir de l’aide aux personnes atteintes de schizophrénie, comme par exemple des voisins. Ils ont exprimé également moins de sentiments négatifs et ont pu exprimer qu’ils ressentaient plus de compassion que la PGQ. Néanmoins, bien que la majorité des MF à 76 % avait des sentiments positifs tels que la compassion et de l’attirance vis-à-vis la schizophrénie, il existait un nombre assez élevé de praticiens (32 %) qui avaient exprimé des sentiments négatifs, notamment la suspicion et l’appréhension. De plus, il y a moins de MF qui maintiendraient une relation avec un(e) conjoint(e), si un diagnostic de schizophrénie avait été établi ; et surtout moins ils sembleraient ouverts à en discuter avec des amis proches ou de la famille. Par contre, nous n’avons pas mis en évidence de différence dans le pourcentage des répondants dans le fait qu’ils auraient pu paniquer si un diagnostic de schizophrénie était établi chez leur conjoint. La perception que la schizophrénie soit la maladie la plus sévère est semblable également dans les deux populations.

Ces résultats semblent suggérer que la proximité, la familiarité professionnelle avec la maladie n’est pas un obstacle à ce que la stigmatisation continue à opérer. Ainsi les MF, bien qu’ils aient plus d’exposition à ce domaine, plus de contacts avec les patients atteints de schizophrénie, ne sont pas à l’abri d’exprimer, lorsqu’on les questionne ouvertement, des éléments de craintes ou des difficultés par rapport à ce diagnostic.

D’un certain point de vue, la compréhension des réponses des MF est encore plus complexe. Ainsi, dans notre sondage, la compassion est plus fréquemment associée avec d’autres sentiments négatifs comme par exemple, la cohabitation de sentiments d’apparence contradictoire : 53 % des MF ressentaient à la fois de la compassion et de la suspicion, 44 % d’entre eux ressentaient également de la compassion et de l’appréhension.

Ces résultats doivent être interprétés avec prudence puisque 81 % des répondants MF affirmèrent ne pas travailler du tout dans des milieux de santé mentale. Ainsi, leur exposition et leur contact avec des patients atteints de schizophrénie pouvaient être extrêmement limités.

Ce sondage nous permet d’approcher certains domaines qui mériteraient d’être explorés davantage. On doit noter par exemple que lorsqu’il y a 20 % des MF qui semblent indifférents au fait que leur voisin soit porteur d’un diagnostic de schizophrénie, cela pourrait être lié au fait que ce voisin est justement lié à la vie privée et non à la vie professionnelle. Si ce même voisin atteint de schizophrénie était leur patient, ce sentiment d’indifférence pourrait être présent dans les réponses de façon distincte.

En fait, de manière plus générale, ce sondage exploratoire nous enseigne peut-être que la stigmatisation peut être pire dans le milieu où il existe de la recherche sur la maladie. Autrement dit, on a plus tendance à exprimer des sentiments reliés au stigma quand on connaît bien le domaine. Il est possible d’envisager qu’un omnipraticien ou même un psychiatre qui est susceptible d’en connaître beaucoup sur la schizophrénie puisse exprimer des opinions plus péjoratives : il en connaît par exemple les conséquences, parfois dramatiques comme les données reconnues sur le pourcentage de 10 % des patients qui se suicident. Ce qui appartient à son savoir académique n’est peut-être pas partagé par celui de la PGQ. Si ce savoir concerne les aspects péjoratifs et pronostiques de la maladie, cela peut conduire à une péjoration au niveau des réponses concernant les attitudes et la perception. On pourrait peut-être expliquer que 37 % des MF aient répondu à la 4e question : « ne sais pas, ne répond pas » parce que cela concernait leur réaction à l’annonce que leur conjoint était porteur du diagnostic de schizophrénie. En comparaison à la PGQ où cette difficulté à répondre ne s’exprimait que de 8 %, on peut envisager que cela puisse être relié au domaine du savoir sur la maladie.

Inversement, la stigmatisation pourrait aussi être pire lorsque le milieu où on la recherche connaît mal le domaine en question. Ainsi, par exemple, quelqu’un de la PGQ pourrait penser que les gens souffrant de schizophrénie sont systématiquement violents, alors qu’un professionnel de la santé mentale a bien la connaissance qu’un trouble de personnalité sévère avec abus de substances peut représenter un risque bien supérieur. Ceci pourrait rendre compte des réponses exprimées à la question 3 lorsqu’il fut noté plus d’hostilité, de peur et de méfiance dans la PGQ que parmi les MF.

Cette étude exploratoire invite à proposer aux MF une éducation continue pour augmenter ce savoir et cette prise de conscience sur la nature de la schizophrénie. On pourra aussi peut-être minimiser la stigmatisation et la discrimination en incluant dans les programmes d’éducation médicale continue des éléments pédagogiques centrés sur la perception de la maladie. Tel que cela a déjà été proposé dans l’étude allemande (Angermeyer et Matschinger, 2005), les interventions devraient être basées sur le niveau de connaissance des professionnels (MF non familiers avec la psychiatrie, MF oeuvrant en santé mentale) sur celui de la PGQ, qui est moins familière avec le champ psychiatrique et la clinique. Pour la PGQ des formations et interventions centrées sur les stéréotypes de dangerosité attribués aux gens souffrant de schizophrénie pourraient être préconisées. Ceci pourrait faire contrepoids aux informations largement véhiculées par les médias en regard de la schizophrénie. Il n’est pas inutile d’insister dans la formation donnée aux familles pour mieux faire connaître des organismes comme la SQS. L’important, dans un sondage, c’est que la connaissance qui en est extraite soit rapidement diffusée auprès des organismes représentant les groupes de famille et de patients pour que leur action militante soit éclairée et se répercute dans l’éducation de la PGQ. Ainsi, dans un esprit d’efficience et d’échange, le dialogue entre les professionnels (ici les médecins) et ces organismes pourra s’alimenter de ces données. Une grande partie de l’avenir du traitement du psychotique est reliée à la réhabilitation psychosociale. L’action de faire communiquer les deux mondes ; celui des familles et celui des professionnels, doit ainsi faire partie d’une nécessité sur le plan de la réhabilitation psychosociale du patient schizophrène. La vulgarisation, la déstigmatisation, l’information destinée au grand public sur les maladies et le système de soins peuvent déjà être considérés comme des stratégies thérapeutiques à elles seules. À partir du moment où les MF ont été désignés d’après les dernières décisions du Plan de santé mentale, à être des éléments clés de cette première ligne, c’est-à-dire cette ligne de contact entre la schizophrénie et l’entrée dans la psychiatrie, il y a lieu de favoriser à la fois un bon enseignement mais également une bonne transmission des savoirs entre les groupes. La formation n’aura d’efficacité que si elle ne se limite pas à la transmission verticale d’un savoir, elle doit demeurer le support d’un échange, qui doit augurer d’un partenariat, d’un pacte de transparence. En impliquant les familles à l’élaboration de questions qui servent à sonder les perceptions et les attitudes de ces intervenants clés de la première ligne, on jette un premier regard sur la crédibilisation globale d’un dispositif de soins qui devra tenir compte d’un ensemble d’attitudes et de perceptions.