Numéro thématique

PrésentationLes réformes du système de santé mentale : finalité ou processus ?[Notice]

  • Marie-Josée Fleury et
  • André Delorme

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  • Marie-Josée Fleury

  • En collaboration avec
    André Delorme

Les systèmes sociosanitaires sont en évolution constante. Des transformations plus radicales structurent néanmoins les mouvements de réformes à des phases charnières de changements socioéconomiques. Le contexte actuel de pénurie des ressources publiques, de vieillissement de la population, la montée des troubles chroniques et concomitants ainsi que l’importance des innovations technologiques ont ainsi poussé les systèmes de soins à adopter des changements radicaux au cours des dernières années. Pour plusieurs pays, l’accroissement des dépenses de santé surpasse l’augmentation du produit national brut, et atteint des sommets inégalés, représentant près de 50 % du budget des États. Le dispositif de soins n’étant que l’un des déterminants de la santé (et non le plus important), cette situation impose de hausser la performance des systèmes de soins et la collaboration avec les autres secteurs tels que les milieux de l’éducation, du travail et les municipalités. À cette fin, les plus récentes réformes des systèmes sociosanitaires ont majoritairement visé : a) la consolidation des soins primaires, incluant la révision des pratiques et des modes de paiement des omnipraticiens ainsi que la valorisation de la pratique infirmière avancée ; b) l’implantation de pratiques cliniques qui ont fait l’objet de données probantes (ex. : en santé mentale : suivi intensif (SI), soins partagés ou de collaboration) ; c) l’amélioration de l’intégration du dispositif de soins, incluant la collaboration interprofessionnelle, le travail interdisciplinaire et la continuité des services à la clientèle ; et d) la bonification de l’accès aux services de santé, dont la psychothérapie en santé mentale, et l’utilisation optimale des services. La décentralisation des soins, l’approche populationnelle et la hiérarchisation des services, principes similaires à ce qui est déployé au Québec, ont souvent encadré les restructurations sur le plan international. Une responsabilisation accrue de la population envers sa santé et son bien-être, dont l’accent sur l’autogestion des soins en représente un exemple, et une meilleure reconnaissance des déterminants sociaux de la santé (ex. : soutien social, travail, réhabilitation), favorisant un accroissement de la gamme de services et le rétablissement des clientèles, balisent aussi les changements. Des indicateurs de performance ont également été développés, visant à monitorer et soutenir les réformes. D’une façon globale, la documentation et les expériences de terrains démontrent néanmoins l’inadéquation des indicateurs de performance et des efforts déployés pour soutenir et monitorer le changement. La complexité d’implantation des réformes, le nombre de changements envisagés et la résistance aux changements imposent pourtant le déploiement de mécanismes de soutien aux innovations, lesquels doivent être en nombre important, variés et soutenus, et ce à la hauteur des changements envisagés. La santé mentale s’inscrit dans ce contexte global de restructuration des systèmes sociosanitaires tant sur le plan international qu’au Québec. Étant donné la prévalence importante des troubles mentaux et les conséquences associées tant sur le plan personnel, familial, qu’économique, ce programme-service avait été priorisé dans la réforme du système sociosanitaire québécois de 2005 (Projet de loi 83 ; (MSSS, 2005b)). En effet, une personne sur quatre sera atteinte au cours de sa vie d’un trouble mental (OMS, 2001). Les troubles mentaux, incluant la dépendance aux substances psychoactives, comptent parmi les plus importantes causes d’absentéisme au travail, dépassant désormais les journées perdues pour des raisons de maladies physiques, et ce dans plusieurs pays (Kirby et Keon, 2006). Les troubles mentaux sont souvent associés aussi à des problèmes de santé physique (Schmitz, Wang, Malla et Lesage, 2007). Les problèmes d’abus ou de dépendance aux substances psychoactives sont aussi très étroitement associés aux troubles mentaux, puisque plus de 50 % des personnes ayant eu un trouble mental au cours de leur vie auront également un problème d’abus ou de dépendance …

Parties annexes