Résumés
Résumé
Cet article vise à montrer, sur base d’un certain nombre d’exemples récents sélectionnés parmi d’autres possibles, qu’au-delà de la sécularisation que connaît l’Europe, le politique y recourt volontiers au religieux institué pour affronter diverses situations face auxquelles il se sent plus ou moins démuni. Cette instrumentalisation du religieux se fonde essentiellement sur trois caractéristiques de celui-ci : il est une ressource identitaire importante pour de nombreux pays ; longtemps seul référent éthique, il est encore aujourd’hui facilement regardé comme doté en la matière de compétences particulièrement significatives ; enfin, il offre tout un arsenal de rites, disponibles pour toutes les circonstances qui appellent l’une ou l’autre forme de célébration publique. De tels usages de « ressources » religieuses par le politique ne doivent toutefois pas conduire à parler d’un « retour du religieux » car c’est le plus souvent départi de ce qui en fait l’essence — une croyance en une transcendance — et en dehors de toute résurgence du pouvoir de régulation de ses autorités que ce religieux retrouve une place sur la scène publique.
Abstract
Based on a certain number of recent examples chosen among other possible cases, this paper tries to show that beyond the secularization experienced in Europe, the political sphere resorts willingly to the institutionalized religious sphere to tackle various situations in the face of which it feels more or less powerless. This instrumentalization of the religious sector is based essentially on three of its characteristics : it is an important resource of identity for numerous countries ; for a long time the sole ethical reference, it is still today easily regarded as endowed with particularly significant skills ; and lastly, it offers a whole arsenal of rites, available for all circumstances which call for some form or other of public celebration. Such uses of religious ‘resources’ by the political sector must not, however, lead us to speak of a ‘revival of religion’ for it is usually divested of its essential component — a belief in transcendance. Indeed, this religious phenomenon finds a place on the public scene without any reemergence of the power of regulation of its authorities.
Resumen
Este artículo tiene por objeto poner de manifiesto, sobre la base de una serie de recientes ejemplos seleccionados entre otros posibles, que más allá de la secularización que conoce Europa, el político recurre habitualmente a lo religioso instituido para enfrentar distintas situaciones frente a las cuales se siente más o menos desprovisto. Esta instrumentalización de lo religioso se basa esencialmente en tres características de éste : es un recurso identitario importante para numerosos países ; por mucho tiempo fue el sólo referente ético, y aún hoy es considerado como dotado en este tema de competencias particularmente significativas ; por último, ofrece todo un arsenal de ritos, disponibles para todas las circunstancias a los que recurren en una u otra forma de celebración pública. De tales usos de los “recursos” religiosos por la política no debe no obstante conducirnos a hablar de una “regreso de lo religioso” porque se abandona frecuentemente lo que hace la esencia — una creencia en una trascendencia — y fuera de todo resurgimiento del poder de regulación de sus autoridades lo religioso encuentra un lugar sobre la escena pública.
Parties annexes
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