Éditorial. Classicisme, néoclassicisme et autres découvertes[Notice]

  • Jean Boivin

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  • Jean Boivin
    Université de Sherbrooke

Chers lecteurs et lectrices, cette livraison des Cahiers de la Société québécoise de recherche en musique s’articule autour d’un dossier regroupant quatre textes qui font suite à une journée d’étude, intitulée «  Musique et [néo]classicisme en France (1850-1950) », organisée le 13 février 2019, à la Faculté de musique de l’Université de Montréal. L’organisation en a été assurée par les professeurs Sylvain Caron (Université de Montréal) et Steven Huebner (Université McGill), membres de l’Équipe de recherche sur la musique en France aux xixe et xxe siècles de l’Observatoire interdisciplinaire de création et de recherche en musique (OICRM), de même que par le professeur Michel Duchesneau, directeur de l’OICRM. À cette journée d’étude se greffait un séminaire, où ont été étudiées quelques-unes des multiples facettes du néoclassicisme en France entre 1850 et 1950 : généalogie, idéologie, manifestations, sources, répertoire, interprétations, etc. Il s’agissait également de mieux comprendre, à la lumière des travaux musicologiques récents, les principaux traits de ce courant musical important qui s’est développé dans l’entre-deux-guerres, et qui se veut une actualisation de formes et de techniques plutôt qu’un simple un retour vers le passé. Différents modèles s’offraient d’ailleurs aux compositeurs rattachés à ce courant, tels que la Grèce antique, le chant grégorien, les musiques de Palestrina et Bach, le classicisme français, la première École de Vienne, etc. D’où l’emphase, dans le titre de cette rencontre et de ce dossier, sur la notion de classicisme tout autant que sur celle de néoclassicisme. Les quatre textes regroupés ici sont plus ou moins directement liés à cette journée d’étude de l’hiver 2019. Compte tenu de ma participation à titre de conférencier et d’auteur, la supervision du dossier a été partagée entre moi-même et les musicologues Danick Trottier et Sylvain Caron, tous deux impliqués dans la journée d’étude de l’OICRM. Le thème proposé est vaste, la documentation récente abondante ; ce dossier ne prétend donc nullement faire le tour de la question. Les textes de Christophe Corbier (chargé de recherche au Centre national de recherche scientifique) et de Jean Boivin (Université de Sherbrooke) font suite à une communication sur le même thème. Le premier se penche avec brio sur les concepts, antérieurs au néoclassicisme à proprement parler, de classicisme et d’hellénisme, plus particulièrement à travers les écrits et travaux du compositeur et chef d’orchestre français Louis-Albert Bourgault-Ducoudray (1840-1910), lequel s’intéressait vivement à la musique de la Grèce antique, qu’il abordait dans ses cours d’histoire de la musique au Conservatoire de Paris. Le second a choisi d’étudier les échos au Québec du néoclassicisme musical, notamment au fil des visites fort remarquées d’Igor Stravinski à Montréal entre 1937 et 1946 ; si celui-ci a certainement été une figure dominante de ce courant, une recherche dans les journaux d’époque montre que d’autres modèles ont été proposés aux compositeurs canadiens, qui ont été particulièrement sensibles au néoclassicisme à l’européenne dans les décennies 1940 et 1950. Les textes de Danick Trottier et de Federico Lazzaro permettent toutefois d’en aborder d’autres aspects marquants. Danick Trottier (Université du Québec à Montréal) tente de mieux comprendre le point de vue très critique du philosophe Theodor W. Adorno (1903-1969) sur le néoclassicisme (surtout stravinskien), à la fois dans son rôle méconnu de critique musical et dans son ouvrage-clé, Philosophie de la nouvelle musique (1949), où il oppose les démarches de Stravinski et de Schönberg, sans cacher ses préférences nettes pour l’oeuvre de ce dernier. On constatera que les écrits d’Adorno gagnent à être revisités et que, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ils révèlent l’importance historique accordée au néoclassicisme par le célèbre philosophe de l’École de Francfort, à la …

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