Compte rendu

La communauté au miroir de l’État. La notion de communauté dans les énoncés québécois de politiques publiques en santé. par Stéphane Vibert Québec, Les presses de l’Université Laval Collection Société, cultures et santé 2007, 123 p.[Notice]

  • Martine Duperré

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  • Martine Duperré
    Professeure
    École de service social
    Université Laval, Québec

Comme son titre l’indique, l’auteur Stéphane Vibert se propose d’analyser la manière dont le discours de l’État sur la communauté a influencé l’organisation des services sociaux et de santé québécois. Cette analyse se fonde sur une trentaine d’énoncés de politique et de rapport de commissions d’enquête du domaine des services sociosanitaires couvrant un peu plus de trois décennies soit entre les années 1970 et 2003. L’auteur analyse plus spécifiquement comment les politiques et programmes québécois rendent compte de l’évolution de la notion de communauté dans les champs de la santé mentale, de la déficience intellectuelle, des communautés culturelles ainsi que de services aux personnes âgées. Partant de la notion de communauté retrouvée dans le rapport d’enquête de la commission Castonguay-Nepveu de 1972, l’auteur décortique ensuite les différentes générations subséquentes d’appels à la communauté au Québec dans les politiques publiques. Au terme de cette analyse, l’auteur propose une typologie conceptuelle composée de quatre idéaux types. L’auteur fait d’abord référence à la communauté en tant que communauté locale (chapitre deux), puis à la communauté comme organisation communautaire (chapitre trois). Vient ensuite la communauté considérée comme espace d’identité collective (chapitre quatre) puis comme communauté englobante ou sociétale (chapitre cinq). Ces quatre idéaux types, selon l’auteur « [...] s’interpénètrent de façon réciproque, l’un étant souvent compris qu’à l’aune de l’autre. Plutôt donc que des réalités substantielles, ces ‘modes de communautés’ n’apparaissent que comme des ‘types relationnels’, dont chacun émerge à la croisée de compréhensions particulières de l’appartenance, mais aussi du ‘manque à appartenir’ considéré comme un danger essentiel du vivre-ensemble moderne » (p. 14). L’introduction de l’ouvrage sert d’abord à faire un retour sur le concept de communauté dans les sciences sociales et je dirais que ce retour est vu à travers le prisme des sociétés. D’entrée de jeu, l’auteur montre la polysémie du terme en soutenant que la « communauté » est simultanément, selon les ancrages territoriaux ou temporels, un recours contre la technocratie, un programme politique ou un danger qui annonce un repli sur soi. L’auteur décortique ensuite la dualité de la notion de « communauté » vue comme un ensemble de relations sociales organiques ou contractuelles et pourtant il ne soutient pas nécessairement leur opposition, comme on le voit souvent. En effet écrit-il : « ’[c]ommunauté’ et ‘modernité’ ont été la plupart du temps des couples opposés sur un plan explicite, mais il n’a jamais été tant question de communauté qu’au cours des périodes qui tentent d’appréhender et de maîtriser ‘leur’ modernité, en s’interrogeant justement sur les formes de communautés dont elles sont capables et celles qui sont impossibles pour elles » (p. 3). Le chapitre 1 analyse la pensée étatique sur la « communauté » à travers le rapport de la commission Castonguay-Nepveu. L’auteur montre que la conception de l’opposition entre la ‘société’ et la ‘communauté’ y est bien présente. En effet, l’effritement des valeurs communautaires est vu comme un résultat de la modernité, de l’industrialisation et de l’urbanisation, car les valeurs communautaires s’articuleraient mal ailleurs que dans le rural. Ce qui fait que la communauté, alors mise en danger, doit être soutenue par les services sociaux étatiques : « Ainsi, [il] s’agit à la fois de préserver, voire de sauver les communautés encore existantes quoiqu’en voie de perdition, mais également de rappeler l’idéal d’une « communauté » englobante, au-delà du pluralisme et de l’atomisation révélés par les avancées du mode de vie industriel moderne » (p. 23). Dans cet esprit, les services sociaux et de santé proposés par la Commission sont en faveur d’une approche « organique » avec des structures de base intégrées aux « [...] communautés locales, …