Résumés
Résumé
Alexandre Pouchkine, le poète national russe, reste toujours méconnu par le grand public français. Une des raisons de cet état de fait se cache dans les premières « translations » non traductives des oeuvres de Pouchkine. La présente étude analyse le caractère empirique des procédés translatifs du début du XIXe siècle qui ont créé le mythe de l’intraduisibilité de cet auteur russe.
Mots-clés:
- Pouchkine,
- intraduisibilité,
- translation,
- empirisme
Abstract
Alexandre Pushkin, Russia’s national poet, remains unknown to the French public. One of the reasons for this situation lies in the first non-translational transfers of Pushkin’s works. The present study analyzes the empirical character of the transfer processes at the beginning of the 19th century which resulted in the creation of the myth of this author’s untranslatability.
Key Words:
- Pushkin,
- untranslatability,
- transfer,
- empiricism
Corps de l’article
Si aujourd’hui nous avons une vision historicisée de la traduction et donc de l’intraduisibilité (Meschonnic, 1973, pp. 305-323), il n’empêche qu’il existe toujours de nombreux auteurs dont les oeuvres, bien qu’elles soient connues et admirées dans leur pays d’origine, sont sous-estimées ou tout simplement ignorées à l’étranger. Alexandre Pouchkine (1799-1837), l’auteur russe le plus révéré de tous les temps dans son pays, est un parfait exemple de cette incurie. À l’étranger, plus particulièrement en France, son oeuvre se voit éclipsée par celles des « grands penseurs » comme Dostoïevskiï ou Tolstoï. Plus encore, jusque dans les années soixante, les dernières en date, Pouchkine a été considéré par plusieurs comme tout simplement intraduisible. Étonnamment, ce préjugé se révèle encore tenace de nos jours. Par exemple, lors des reportages des festivités liées au bicentenaire du poète en 1999, un journaliste de Libération le proclame « intraduisible, mais traduit dans toutes les langues ». Le seul fait qu’aujourd’hui encore, avant de parler de Pouchkine, il soit nécessaire d’expliquer qui il était, et ce qu’il représentait, indique clairement que son oeuvre n’appartient pas aux lecteurs étrangers[2]. Comme l’explique Léon Robel :
[…] il y a encore beaucoup à faire pour que Pouchkine soit nôtre. Il reste à faire voir tout son travail dans son ampleur et sa diversité, à faire entendre sa voix nonpareille. […] il ne suffit pas de proclamer que Pouchkine est un des plus grands poètes de tous les temps et de tous les pays. Il faut convaincre les lecteurs français de son génie par un vif plaisir de lecture. […] un important travail de traduction a été accompli, qui permet de prendre connaissance de l’ensemble de l’oeuvre de Pouchkine en français, et par éclairs […] d’en saisir le ton singulier dans son incomparable saveur.
1999, pp. 4-5
Nous pouvons donc constater que même avec la présence des traductions françaises des oeuvres de Pouchkine, cet auteur n’est pas lu par le grand public français. Il s’agit donc d’un problème beaucoup plus vaste que celui de la traduction : il touche à ce que Berman appelle la question de translation, qui « n’advient pas qu’avec la traduction [ mais] aussi par la critique et de nombreuses formes de transformations textuelles (ou même non textuelles) qui ne sont pas traductives. L’ensemble constitue la translation d’une oeuvre. » (1995, p. 17) D’ailleurs, le commentaire de Robel qui fait le point sur l’état de la question n’est que la résultante du long et pénible processus de translation de l’oeuvre de Pouchkine en France. En effet, « il y a un tel contraste entre la pleine lumière de la gloire russe de Pouchkine et la pénombre où ce nom en France reste dissimulé » (Meynieux, 1955, p. 45) et « il y a encore beaucoup à faire », mais quand on veut avancer, il est indispensable de jeter un regard en arrière. Alors, il s’agit pour nous de retourner à la première moitié du XIXe siècle, qui marque le début de la translation de l’oeuvre de Pouchkine en France, et où sont enracinés tous les maux dont sera frappée l’ « épreuve de l’étranger »[3].
Cependant, il est nécessaire de préciser que Pouchkine n’est pas le premier parmi les auteurs russes à être introduit en France, bien que c’est avec lui que commence la littérature russe moderne. C’est en 1751 que la première oeuvre littéraire russe, une tragédie de Soumarokov intitulée Sinav et Trouvor, se voit traduite en français par le prince Alexandre Dolgoroukiï à Saint-Pétersbourg. À partir de cette date, certaines oeuvres russes sont traduites chaque année en français. Pendant plus d’un siècle le nombre de ces traductions reste minime, toutefois ce n’est pas la quantité qui mérite notre attention, mais la manière de traduire et, plus particulièrement, le sujet traduisant. En simplifiant, il est possible de ranger tous les traducteurs / translateurs des textes russes vers le français dans deux camps bien distincts. Le premier groupe est représenté par les Russes eux-mêmes. Fait peu surprenant, puisque à partir du XVIIIe siècle la noblesse russe, suivant la mode européenne, sait s’exprimer aussi bien en français qu’en russe. Nonobstant l’adoption des moeurs et de l’étiquette françaises, l’aristocratie russe ne brade pas son patriotisme. C’est précisément ce sentiment qui pousse Dolgoroukiï à traduire la tragédie de Soumarokov. Il ne cherche pas à créer une oeuvre d’art, il veut tout simplement faire connaître aux Français l’existence de la littérature russe. Certains des traducteurs russes ont établi leur résidence à Paris et profitent des salons mondains et littéraires pour instruire les Français sur la vie politique et culturelle russe. Ceux qui résident à Moscou ou à Saint-Pétersbourg accueillent les voyageurs et les représentants du corps diplomatique français et, en tant qu’hôtes, les introduisent aux réalités russes.
Le deuxième groupe de translateurs des oeuvres littéraires russes est composé des Français : ceux qui sont allés en Russie, ainsi que ceux qui n’ont pas eu cette chance. Parmi les premiers on compte ceux qui viennent y travailler, par exemple comme précepteurs; il y a également les émigrés, et il ne faut pas oublier les voyageurs qui se rendent en Russie presque comme des archéologues pour mener des enquêtes in situ sur ce peuple mystérieux et aussi pour découvrir l’énigme de ce qu’on appelle toujours « l’âme russe ». Ainsi, un des premiers venus dans l’Empire de Catherine II est Pierre-Charles Levesque (1736-1812), premier historien français de la Russie. Grâce à l’aide de Diderot, qui entretient une correspondance régulière avec l’impératrice, Levesque obtient un poste à la prestigieuse École des Cadets à Saint-Pétersbourg. Il a tout le temps qu’il lui faut, et jouit d’un accès exclusif aux archives de l’État pour rédiger son Histoire de la Russie. Cependant, Catherine II n’approuvant pas sa façon de présenter les choses, Levesque quitte Saint-Pétersbourg en 1780. Son ouvrage est quand même publié en 1782-1783. Comme nous l’avons mentionné, il y a aussi les Français qui n’ont jamais séjourné en Russie, mais qui ont assez de curiosité et d’intérêt envers ce pays, ainsi que de soutien de la part d’amis russes, pour s’adonner à l’étude de la langue russe et à la traduction. Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, nous verrons Paul Viardot, encouragé par Ivan Tourguénev, ou Prosper Mérimée, appuyé par de nombreux amis russes, traduire Pouchkine. Bien que les représentants de ce second groupe de translateurs de la littérature russe ne possèdent pour la plupart pas assez de connaissances en matière de langue et de culture russes, leurs efforts sont souvent mieux reconnus en France pour la simple raison qu’ils sont Français.
L’« arrivée » de Pouchkine en France dans la première moitié du XIXe siècle semble également être préparée par de nombreux contacts (et conflits) au niveau politique entre les deux pays, qui éveillent davantage la curiosité des Français. La fameuse Campagne de Russie de Napoléon, à elle seule, provoque énormément de réactions dans les deux pays non seulement dans les milieux politiques, mais aussi dans les cercles littéraires. Les événements de cette guerre, comme la bataille de Borodino, l’incendie de Moscou, la retraite de l’armée française durant l’épouvantable hiver russe, sont à l’origine d’innombrables récits, historiques et inventés. C’est justement après la défaite de Napoléon que l’intérêt des Français envers la Russie s’accentue sur le plan culturel. En 1816, G. Hamonière publie à Paris ses Dialogues russes et français à l’usage des deux nations, suivis d’un recueil de phrases familières et de proverbes. L’année suivante, toujours à Paris, paraît la Grammaire russe. En 1821 à Saint-Pétersbourg, Reiff publie son dictionnaire parallèle multilangagier, dont le russe ainsi que le français font partie. Entre-temps, à Paris, les conférences sur la culture et la littérature russes données par Kukhelbecker connaissent un grand succès. La presse française ne laisse pas non plus passer inaperçues des nouvelles sur la Russie. En 1821, la Revue encyclopédique[4], à elle seule, publie 42 articles sur la Russie, dont 3 bulletins bibliographiques et 39 nouvelles scientifiques et littéraires.
Or, justement, la RE est le premier ouvrage français à introduire le nom de Pouchkine en France. Nous ne prétendons en aucune façon à l’exhaustivité en choisissant de nous limiter dans le cadre de la présente étude à l’examen des pages de cet ouvrage périodique. Cette optique peut sembler quelque peu réductrice, cependant, il ne faut pas oublier que ce sont les revues littéraires qui expriment les opinions des critiques et des lettrés, qui reflètent les grandes tendances et les mouvements littéraires de l’époque et qui forment à la fois les goûts et les intérêts du grand public. La RE n’est pas seulement une des revues littéraires les plus distinguées de son époque dont la vocation est de suivre les tendances contemporaines et de s’imprégner de l’« air du temps », c’est également la revue qui suit attentivement pendant plus de dix ans le développement de la carrière littéraire de Pouchkine. Fait non négligeable, la RE assume le rôle du principal sujet translatant associé au nom de cet auteur et à la traduction de ses oeuvres en France dans la première partie du XIXe siècle. En observant chronologiquement comment cette translation s’est effectuée, nous pourrons alors comprendre le développement du destin de Pouchkine en France, à la fois cause et effet de l’échec auquel était vouée l’« épreuve de l’étranger ».
C’est donc dans la RE, dans la section « Poésie », qu’apparaît en février 1821 la toute première mention faite en France des noms de Pouchkine et de l’une de ses oeuvres :
[...] Un ouvrage, publié dernièrement dans cette ville [Saint-Pétersbourg], a fixé l’attention de tous les amis des lettres; c’est un poème romantique, en dix chants, intitulé : Rouslan et Ludmila. Son auteur, M. Pouchkin, ancien élève du lycée de Tzarskoïé-Selo, et attaché dans ce moment au gouverneur général de la Bessarabie, n’a guère que vingt-deux ans. Ce poème est tiré de contes nationaux, du temps du grand prince Vladimir; il est rempli de beautés du premier ordre; le style est tantôt énergique, tantôt gracieux, mais toujours élégant et pur, et fait concevoir de son jeune auteur les plus grandes espérances.
Cette description de l’auteur et de son poème est très positive, flatteuse même. Cependant, les lecteurs, qui n’ont pas de matériel, pas de texte pour former leur propre jugement, doivent se fier entièrement à l’opinion du critique, qui, on le suppose, connaît le poème. D’ailleurs, on ne leur promet pas de traduction à venir. Mais au moins la mention est faite. Pouchkine, qui n’obtiendra jamais l’autorisation de franchir les frontières de l’Empire russe, doit être fier que son nom, au moins, soit connu à l’étranger.
En octobre 1822, la RE consacre un autre article[5] à Pouchkine dans la section « Livres étrangers : Russie » :
[...] Les productions poétiques des meilleurs écrivains russes ornent aussi les pages du Fils de la patrie. On y rencontre celles de Joukovski, élève et rival de Goëthe et de Shiller; [...] enfin d’Alexandre Poushkin, jeune élève d’Apollon, auteur du poème de Rouslan et Ludmila [...], d’une ode sur la Liberté, pleine de verve, de poésie et d’idées sublimes, et d’une charmante pièce de vers intitulée la Campagne, où, après un tableau charmant et fidèle des beautés de la nature et les plaisirs champêtres, il s’afflige sur les tristes effets de l’esclavage et de la barbarie, exprimant, dans des vers pleins de force et d’énergie, la douce espérance d’une brillante aurore de liberté pour sa patrie. Ces deux dernières productions, restées inédites, sont l’objet des persécutions du gouvernement contre ce jeune poète, relégué en Bessarabie. – Toutes ces poésies, insérées dans les livraisons du Fils de la patrie, offrent, à un degré plus ou moins grand, de beaux tableaux à l’imagination, des idées à l’esprit, des sentiments au coeur, de l’harmonie à l’oreille, et sont dictées par le goût le plus pur, dans un style élégant qui charme le lecteur. [...]
Il n’y a toujours pas d’indication à propos d’une possible traduction française des poèmes pouchkiniens, les lecteurs français ne peuvent donc que parler de ces oeuvres sans pouvoir les lire. Cependant, une nouvelle facette de la perception qu’on a du poète émerge des nombreuses épithètes décrivant la beauté de son style : Pouchkine est un penseur. Cette distinction est très importante, puisque à une époque où la poésie est fleurie et ornementée et le plus souvent éloignée de la réalité, dire qu’un poète est non seulement maître du lyrisme, mais aussi penseur avec des idées progressistes libérales et explicitement antimonarchiques, c’est annoncer et accepter l’existence d’une nouvelle génération de poètes, porte-parole non pas de la cour, mais du peuple, des « humiliés et offensés », des poètes eux-mêmes, souffrant à cause de leur audace et de leurs convictions.
L’année suivante, en avril 1823, dans la subdivision de la section « Livres étrangers : Russie », intitulée « Critiques ou Analyses d’Ouvrages », Poltoratskiï place un rappel d’un poème de Pouchkine déjà connu (ne serait-ce que par le titre), ainsi qu’une annonce de sa nouvelle production :
[...] poème de A. Pouchkin, intitulé Rousslan et Ludmila [...]. La beauté du style, une imagination vive, de belles fictions, une excellente versification et des comparaisons sublimes constituent le mérite de ce poème, écrit dans le genre du Roland d’Arioste et d’Obéron de Vieland. Le poète russe vient encore de publier récemment un charmant conte en vers, intitulé : le Prisonnier du Caucase, dont nous espérons entretenir nos lecteurs. [...]
Ici, pour la première fois, apparaît une promesse de suivre le développement du génie du poète; cependant, par « entretenir nos lecteurs », l’auteur de l’article ne sous-entend pas nécessairement la traduction prochaine de l’oeuvre de Pouchkine; ce qu’il entend probablement c’est que les lecteurs auront droit à encore plus de descriptions. Puisqu’il est question de définitions, il est intéressant de noter que pour la première fois également surgissent des comparaisons. Faute de pouvoir présenter les textes, le critique compare Pouchkine à d’autres auteurs connus du public français. Il s’agit ici du poète italien Ludovico Ariosto (1474-1533), auteur de Roland furieux (1516-1532) et d’un écrivain allemand, Christof Martin Wieland (1733-1813), auteur du poème Obéron.
Deux mois après cet article sur Pouchkine, paraît l’annonce de la parution de l’Anthologie russe, écrite par Dupré de Saint-Maure pendant son séjour de quatre années en Russie. Il évoque « le vaste champ » que présente la littérature russe encore « trop peu connue en Europe » (1823, p. XLI). Il admire « l’abondance [...] et combien la Littérature russe peut encore offrir de matériaux aux traducteurs à venir ». Ce livre, comme l’explique l’auteur de la notice bibliographique, parue dans la RE en juillet 1823, contient, outre les productions originales de Dupré de Saint-Maure, la présentation des principaux écrivains russes de l’époque, ainsi que les traductions de quelques fragments de leurs oeuvres. Remarque importante : Dupré de Saint-Maure dédie son ouvrage, qui a pour but de « faire connoître, en France, quelques productions remarquables des poètes qui honorent la Russie », au tsar, « en regrettant toutefois que son ignorance de la langue russe l’ait empêché de recourir lui-même aux sources originales, et qu’il se soit vu forcé de s’en rapporter aux traductions littérales qu’il s’est procurées ». Pour la première fois, et alors que n’apparaît toujours aucune traduction dans ses pages, la revue indique au moins à ses lecteurs l’ouvrage où ils pourront finalement lire des extraits de poèmes dont ils discutent depuis plus de deux ans déjà. Ainsi, une partie de Rouslan et Ludmila de Pouchkine figure dans l’Anthologie.
D’abord traduit en prose par un « nègre », ce poème est mis en vers par Dupré de Saint-Maure. Selon lui, « le poëme de Rouslan et Ludmila est une nouvelle preuve que le ciel septentrional a aussi le pouvoir de faire éclore des fictions poétiques, parées de tout l’éclat d’une imagination vive et féconde. Celles de M. Pouschkin rappellent souvent le charme des ingénieuses folies de l’Arioste; et l’on peut s’écrier avec Voltaire en lisant Ludmila, ‘ce n’est point le climat qui fait ce que nous sommes’. » (1823, p. XXXIII) Encore une fois, Pouchkine est comparé à l’Arioste, il semble que c’est ainsi qu’il est perçu en France.
En 1824, le nom de Pouchkine est mentionné trois fois dans la RE. Dans le numéro d’avril est annoncée dans la section « Livres étrangers : Russie » la publication à Moscou d’un volume de vers sous le titre de Nouvelles Aonides. Comme l’indique le critique, « les éditeurs ont préféré la qualité à la quantité : 34 pièces seulement composent leur recueil, et 17 auteurs y ont contribué, parmi lesquels on remarque [le nom de] Alexandre Poushkin [qui a fourni] des fragments de son Prisonnier de Caucase ». Dans la seconde mention, faite au mois de juin par Poltoratskiï, les lecteurs apprennent qu’un livre intitulé Feuilles littéraires a paru à Saint-Pétersbourg, recueillant « des articles intéressants en prose et en vers [dont] Sur l’émancipation d’un oiseau, charmante pièce de M. Alexandre Pouschkin ». D’après ces deux rapides citations, il n’est pas difficile de constater que les auteurs des articles considèrent Pouchkine comme une figure connue par les fidèles lecteurs de la revue, puisqu’il n’y a aucune précision sur le poète. Seule la qualité de ses oeuvres est évoquée. La troisième fois, en septembre, c’est tout l’article qui est consacré à Pouchkine et à sa nouvelle production :
[...] Le jet d’eau de Baktchi-Saraï, poëme par A. Pouchkin. Ce jeune poète occupe déjà un des premiers rangs sur le parnasse russe; il s’est fait connaître antérieurement par deux poëmes, dont l’un en six chants, est intitulé Rouslan et Ludmila, et l’autre le Prisonnier du Caucase. Son dernier poëme, dont nous annonçons ici la publication, quoique inférieur aux deux premiers par la brièveté de son sujet, étincelle cependant des beautés du premier ordre. Le début est un tableau fidèle de la cour d’un despote tatare. L’auteur le dépeint au milieu de son palais, agité d’une colère qu’il tâche de concentrer dans son âme; ses courtisans, dans l’attitude la plus soumise entourent son trône jusqu’au moment où le khan leur fait un signe d’impatience. Tout le monde se retire alors, en s’inclinant dans le silence le plus profond. La description d’un eunuque, chargé de surveiller les beautés du harem, est faite avec beaucoup d’art : l’indifférence de cet individu, mutilé par une prévoyance barbare, pour les charmes des belles odalisques confiées à ses soins, la manière sombre avec laquelle il épie leurs moindres mouvements, son apathie au moment où elles se baignent, forment un des meilleurs morceaux du poëme, qui d’ailleurs est écrit avec beaucoup de grâce et d’harmonie.
La différence et la nouveauté de ce passage résident dans l’apparition d’une critique du poète et de son oeuvre. Malgré les beautés stylistiques, ce poème est pourtant jugé inférieur aux précédents. Auparavant qualifié de penseur, Pouchkine ici n’a pas droit aux mêmes éloges. Les thèmes qu’il aborde dans ce poème : la liberté et l’absence de liberté, la force et l’impuissance, la guerre et la paix, l’amour et la jalousie, la vie et la mort, ne semblent pas frapper le critique qui préfère parler du harem et de la beauté de ses odalisques. Bien évidemment, il ne fait que dépeindre son impression personnelle, cependant, la description qu’il présente ne définit ni le contenu du poème, qui n’est pas descriptif mais raconte une histoire, ni les idées qu’il exprime. Omission majeure, vu le fait que le poème n’existe pas encore en traduction française.
En 1825, la RE fait deux mentions de Pouchkine. Au mois de mai dans la section « Livres étrangers : Russie », paraît l’annonce de la publication à Saint-Pétersbourg d’« Eugène Onéguinn, roman en vers, par Alexandre Pouchkin. [...] Cette petite bluette, écrite avec grâce et facilité, forme seulement le premier chapitre d’un roman que l’auteur se propose de continuer. Le genre de vie dissipé et frivole que mène le héros du roman est décrit avec beaucoup de naturel. Tous les amusements qu’offre Pétersbourg sont dépeints avec une vérité étonnante. La description du théâtre de Pouchkin nous a paru surtout digne d’être remarquée. » Ici, il n’y a pas vraiment de critique, bien que le choix du mot « bluette » semble contestable pour un texte empli de satire et d’ironie. Comme toujours, l’aisance et la beauté de la versification sont notées; cependant, un nouvel aspect important du style pouchkinien est perçu, celui du réalisme. Au mois de juin dans la section « Nouvelles scientifiques et littéraires : Russie » se trouve une revue (préparée par Iakov Tolstoï[6]) des principales productions littéraires publiées dans l’Empire du tsar depuis le mois de juillet 1824. Le bibliographe constate que « la poésie a fourni le plus grand nombre d’ouvrages ». Parmi d’autres auteurs contemporains « Alexandre Pouchkin [s’est distingué pour ] le Jet d’eau de Baktchi-Saraï, [...] Onéguinn, [un] poème [...] intitulé : Les Bohémiens, que l’on n’a pu lire encore qu’en manuscrit, excite déjà l’enthousiasme des amateurs de la littérature russe, qui s’accordent à y reconnaître des beautés du premier ordre, et qui le placent au dessus de tout ce que la muse brillante de ce poëte a produit jusqu’à présent ». Tolstoï aurait probablement pu parler plus en profondeur du contenu des oeuvres de Pouchkine, il ne le fait pas. Ses louanges n’ont donc pas beaucoup de valeur : une fois de plus, les lecteurs de la RE sont obligés de tout croire sur parole.
Au mois de juin 1826, dans la section « Bulletin bibliographique : France : Littérature », apparaît la nouvelle (présentée par Edme Héreau[7]) de la publication à Paris de « La fontaine des pleurs, poëme traduit librement du russe par J.-M. Chopin. [...] Le jeune poëte lyrique dont M. Chopin a essayé de nous faire connaître le dernier (sic) ouvrage, est la plus chère espérance du Parnasse russe, qui peut l’opposer avec orgueil aux poëtes modernes les plus distingués des autres nations de l’Europe. [...] Les détails seuls de ce poëme, qui en renferme beaucoup de charmants, ont pu inviter M. Chopin à entreprendre un travail dont l’auteur devra lui savoir autant de gré que nous, et qu’on n’appréciera bien qu’en comparant les deux versions, russe et française. [...] ». Ici, pour la première fois, on ne compare Pouchkine à personne, son nom seul suffit. Il entre dans les rangs des poètes européens les plus estimés. Situation presque irréelle, puisque si peu de ses productions sont connues par si peu de lecteurs français. Autre élément significatif : on parle du traducteur, des mérites de son travail, on invite même le public à comparer la traduction à l’original. La dernière suggestion, malgré son intérêt et la bonne volonté dont elle témoigne, ne va pas sans soulever quelques doutes : en vérité, y a-t-il beaucoup de lecteurs, à l’exception des Russes, qui peuvent le faire? Toutefois, un passage traduit du poème est inclus dans cet article.
Deux mois plus tard, en août, paraît une autre annonce à caractère purement informatif, attribuée à Poltoratskiï, concernant Pouchkine et la publication d’un recueil de ses oeuvres à Saint-Pétersbourg :
[...] Ce recueil d’un poëte qui jouit dans son pays d’une très grande réputation, et qui est aussi distingué par ses lumières et son esprit que par la chaleur et l’éclat de son imagination, contient des productions charmantes dans plusieurs genres de poésies. On y compte 17 élégies, 21 épigrammes et épitaphes, 12 imitations de poëtes anciens, 16 épîtres à divers littérateurs russes et à quelques dames, 9 imitations du Coran et 24 autres pièces dont on ne saurait rigoureusement assigner le genre. Il a reçu l’accueil le plus flatteur de tous ceux qui s’occupent des lettres en Russie; et sans doute les journaux littéraires ne manqueront pas de nous faire apprécier les productions qu’il renferme. [...]
Nous voyons ici pour la première fois que le critique a pris soin d’indiquer le contenu de l’ouvrage et de mentionner les genres que pratique Pouchkine. Ces marques d’appréciation restent néanmoins superficielles et ne cernent pas véritablement le style de ses oeuvres, bien que le sentiment d’admiration qu’éprouvent les lecteurs russes soit transmis. L’idée de poursuivre l’examen de ce volume est aussi clairement manifeste et témoigne de l’intérêt que porte cette revue envers la Muse de Pouchkine.
Dans le numéro de novembre 1826, sous la rubrique « Analyses d’ouvrages », E. Héreau mène une analyse assez approfondie de l’Anthologie russe de Dupré de Saint-Maure, publiée trois ans auparavant. Pour ce qui est des oeuvres de Pouchkine, il fait les remarques suivantes :
[...] Nous avons un jeune poëte, Alexandre Pouchekine, qui s’est déjà fait connaître par des productions où l’on aperçoit l’empreinte d’un grand talent et d’une verve originale; mais ses poésies sont éparses dans différents journaux, et les meilleures ne sont point encore sorties de son porte feuille, quoique les copies s’en propagent rapidement et circulent furtivement dans nos sociétés. Ce Protée moderne, car il sait revêtir toutes les formes, promet, un poëte du premier ordre. [...]
Ici, l’accent est mis sur le caractère original des textes pouchkiniens qui ne sont plus comparés aux ouvrages étrangers. Le potentiel du poète est également souligné. Pouchkine n’est plus le « jeune élève d’Apollon », mais un « Protée moderne », noté pour la diversité de ses oeuvres en matière de forme et de contenu. De plus, pour la première fois figure le constat que ses ouvrages sont lus, bien qu’en cachette, dans les milieux littéraires français.
En 1827, trois mentions liées au nom de Pouchkine se succèdent. Au mois d’avril, en plus d’un rappel de la publication à Saint-Pétersbourg des poésies de Pouchkine, d’une brève biographie de l’auteur et d’un rapide parcours bibliographique, apparaît la notice suivante : « Notre correspondant nous annonce une tragédie du même auteur [Pouschkin], intitulée Boris Godounov, comme devant paraître incessamment, et qui fait déjà l’admiration de ceux qui l’ont lue en manuscrit. » Quant au recueil de poèmes en question, la description du contenu est fort libérale :
On doit regretter que plusieurs de ses pièces de vers, que nous avons eues entre les mains, lors de notre séjour en Russie, n’aient point trouvé place dans ce recueil, et notamment celles qui ont valu à Pouschkin un exil de plusieurs années [...]. Cependant, la censure russe, qu’aurait effrayée le seul titre de l’ode à la liberté, a permis d’imprimer quelques pièces de vers qui font partie de ce recueil, et dans lesquelles on retrouve le penchant du poëte pour une noble indépendance. [...]
En mai, dans la section « Nouvelles scientifiques et littéraires : Russie » figure l’article intitulé « Propriété littéraire. Droits d’auteur en Russie. », où est fournie l’information sur la rémunération de Pouchkine : « La fontaine de Bakhtchisaraï, poëme du jeune Pouschkin, dont nous avons plusieurs fois entretenu nos lecteurs, a été payé 3000 roubles à son auteur; c’est-à-dire, sur le pied de 5 roubles par vers : les Casimir Delavigne et les Lamartine ne tirent pas un meilleur parti en France de leurs productions poétiques [...]. » Finalement, au mois de juin, dans l’article sur le poète russe Baratynskiï, le nom de Pouchkine est mentionné d’une manière significative :
[...] M. Baratinsky s’est placé au rang des poëtes les plus distingués de l’école romantique. [...] Joukovsky peut, selon nous, en être regardé comme le chef; et cependant, il faut reconnaître qu’il s’est plutôt montré l’heureux imitateur des Allemands que le poëte original : cette dernière qualification appartient à plus juste titre au jeune Alexandre Pouschkin, sur les traces duquel M. Baratinsky semble marcher avec bonheur. [...]
Comme nous pouvons le constater, la revue maintient son intérêt et n’oublie pas d’informer ses lecteurs, qui n’ont toujours pas un accès facile aux textes pouchkiniens, des nouvelles productions du poète russe. Ses sentiments libéraux sont fortement appréciés. Les critiques font savoir à leurs lecteurs que l’information qui leur est transmise s’alimente à une source fiable en Russie, ou a été recoltée par les critiques eux-mêmes lors de leurs voyages dans l’empire du tsar; ils veulent les assurer que l’information qu’ils trouveront dans leurs pages n’est pas que le reflet des rumeurs et opinions qui circulent dans la société parisienne. La remarque sur le prix du poème, dans le deuxième article, est juste. Toutefois, un fait important échappe à l’attention de Héreau, qui puise l’information dans les renseignements fautifs fournis par Iakov Tolstoï : tandis que, par exemple, Lamartine poursuit sa carrière diplomatique, Pouchkine, quant à lui, vit de sa plume. Enfin, dans le troisième passage cité se trouve une confirmation additionnelle du statut de Pouchkine comme poète original, et non pas comme imitateur des étrangers. Sa position sur la scène littéraire, interprétée par les Français, semble devenir solide.
En 1828, le nom de Pouchkine est mentionné quatre fois. Au mois de janvier, dans la section « Bulletin bibliographique : Russie », se trouve l’annonce de la publication en Russie de son poème Tsigani (Les Bohémiens). Pour l’auteur de la notice :
De tous les poëtes russes modernes, Pouchkin est, sans contredit, celui qui dans ses ouvrages réunit à un haut degré les qualités que l’Europe demande aux productions poétiques. L’originalité dont ses oeuvres sont empreintes est aussi dans son caractère. Il est indépendant par nature; toute contrainte lui pèse; son génie s’agrandit devant l’obstacle, et semble défier la persécution. [...]
Outre son opinion sur Pouchkine, J. M. Chopin[8] inclut dans son article une description du contenu du poème, son analyse, quelques fragments traduits en prose, ainsi qu’une promesse de traduire le poème au complet en vers. En février de la même année, E. Héreau écrit un article sur un journal périodique russe le Courrier de Moscou qui est, selon lui, « le meilleur recueil russe après le Télégraphe de Moscou ». Il précise qu’il « doit sans doute cet avantage, du moins en grande partie, à la collaboration du poëte Alexandre Pouschkine, qui l’enrichit exclusivement de ses nouvelles productions. Le premier cahier contenait un fragment d’une tragédie de ce jeune poëte, qui a pour titre Boris Godounof, et dont on fait les plus grands éloges en Russie ». Au mois d’avril, paraît la notice (écrite par I. Tolstoï) de la publication à Saint-Pétersbourg du quatrième et du cinquième chapitres d’Evghénii Onéguine (Eugène Onéguine), roman en vers, par Alexandre Pouchkine. Une remarque assez naïve (venant de la part d’un Russe!) sur la censure des oeuvres pouchkiniennes, attribuable sans doute à la méconnaissance de la situation réelle, fait certainement sourire, non sans tristesse, le lecteur avisé :
C’est sous les auspices de l’empereur Nicolas que paraît tout ce que publie Pouchkine; ce prince, jaloux d’encourager un talent aussi distingué, se plaît à lire lui-même, en manuscrit, les productions de ce jeune poëte, et il daigne même quelquefois lui communiquer ses remarques. C’est ainsi que les oeuvres du poëte favori de la Russie échappent à l’influence de la censure.
Sur le style et les particularités poétiques de Pouchkine le critique écrit :
Les nouveaux chapitres que nous annonçons sont écrits avec la plus grande facilité; au point que, si l’on retranchait les rimes, on pourrait croire que la pièce est écrite en prose cadencée et d’une élégante légèreté. Comme ils ne forment que des fragments de l’ouvrage, nous attendrons qu’il ait entièrement paru pour porter un jugement réfléchi sur l’ensemble de cette composition remarquable. Nous dirons seulement que la description du genre de vie de deux jeunes gens retirés à la campagne; celle d’une fête et d’un bal champêtre donnés par un gentilhomme de province, sont empreintes de ces couleurs locales qui en rendent la traduction difficile.
Finalement, au mois d’août, dans la section « Nouvelles scientifiques et littéraires : Russie », dans un article intitulé « Publications prochaines » on évoque à nouveau la parution imminente de la tragédie tant attendue de Pouchkine :
On attend du poëte Alexandre Pouschkine, bien connu des lecteurs de la Revue, sa tragédie de Boris Godounof, destinée, dit-on, à faire époque dans l’histoire de l’art dramatique en Russie. [...]
Ainsi en 1828, Pouchkine a toujours la faveur des critiques de la Revue encyclopédique. Il n’est pas seulement au premier rang des poètes russes, mais des auteurs européens. Pour la seconde fois, il voit ses textes en traduction française paraître dans cet ouvrage périodique. Grâce à ses oeuvres, les revues littéraires russes connaissent également un grand succès. Pouchkine jouit, selon les journalistes de la RE, d’une certaine immunité face à la féroce censure russe (sic) grâce à l’intérêt qu’éprouve l’empereur envers ses productions. De plus, les critiques signalent que l’originalité de Pouchkine et ses descriptions de la vie russe posent de graves problèmes lors de la traduction de ses textes. Enfin, Pouchkine est considéré comme un nom familier, un auteur bien connu pour les fidèles de la Revue, qui attendent toujours avec impatience des nouvelles sur ses oeuvres et ses publications.
En janvier 1829, paraît une communication assez scandaleuse liée au nom de Pouchkine. Il s’agit de la publication à Saint-Pétersbourg d’un roman en vers par Eugène Velskoï intitulé tout simplement Evgueniï Velskoï : « Ce que nous savons du roman en vers d’Eugène Velskoï par les journaux russes nous ferait croire que l’auteur de cette bagatelle a voulu parodier plutôt qu’imiter le poème d’Onéguine d’Alexandre Pouschkine [...], dont la fin se fait bien attendre. » Dans le même article figure l’annonce de la publication, toujours à Saint-Pétersbourg, du poème L’Amour en prison, qui « paraît être une autre imitation malheureuse de la Fontaine de Bakhtchisaraï du même auteur [Pouchkine]. » Bien que les publications citées ne comportent pas de réflexions négatives sur Pouchkine lui-même, la mention que le poète est impliqué dans un scandale n’est pas une nouvelle heureuse pour Pouchkine dont les oeuvres ne sont pas encore connues par le public français.
En mars 1830, J. M. Chopin écrit un article pour la section « Bulletin bibliographique », entièrement consacré à Pouchkine et à son poème « Les deux Frères brigands », paru à Moscou en 1827. Chopin propose une analyse du style et du contenu du poème entrecoupée de quelques passages traduits en prose. Il se demande quelles sont les raisons qui ont pu pousser Pouchkine à parler des brigands, du « sort d’un être dégradé » :
[...] Est-ce l’amour fraternel qui seul peut pallier des fautes si monstrueuses? Plus on avance dans l’étude du coeur humain, et plus on est convaincu qu’il n’est point de scélératesse sans quelque mélange de vertu, comme il n’est point de vertu sans faiblesse... Mais, ici, la disproportion est effrayante. Ne serait-ce point plutôt cet amour vif de l’indépendance, dont les poésies de M. Pouchkine portent une empreinte si originale, qui attache le lecteur par un attrait sympathique? On aime Pouchkine de tout l’amour qu’on porte à la liberté; et, dans les deux Brigands, cette influence suffit peut-être pour déguiser l’immoralité du sujet. Il y a sans doute un profond sentiment politique dans ce vers :
Mne tochno sdès... ia v’lès khotchou!...
J’étouffe dans les fers... rendez-moi l’air des bois!
Ici, bien qu’il éprouve des difficultés à accepter le sujet, Chopin admire les idées libérales de Pouchkine et sa quête de la liberté. Pour la première fois, un critique français parle de l’amour pour ce poète russe.
En mars 1832, c’est dans un article consacré à un recueil publié en allemand qu’on retrouve le nom de Pouchkine. Il s’agit de trois poèmes de « A. Puschkin, W. Schukowski et A. Chomjalow; traductions du russe en vers allemands. », édités sous le titre de Der Polen Aufstand und Warschaus Fall à St-Pétersbourg. Ce sont des poèmes patriotiques, inspirés par les conflits politiques entre les pays slaves et les réactions de la part des pays étrangers. Pour l’auteur de l’article :
C’est aussi le sentiment national qui seul a inspiré les trois poètes moscovites; leurs productions, surtout celle du plus célèbre d’entre eux, M. Puschkin, respirent la haine de l’étranger. M. Puschkin s’adresse aux calomniateurs de la Russie, et après de violents reproches, il leur lance ce défi :«
Vos paroles osent nous menacer! Eh bien, prêtez-leur le secours de l’action : de vos tribunes verbeuses envoyez-nous la troupe de vos disciples courroucés. »
Cette citation, ou plutôt deux phrases tirées de passages différents du poème, traduites librement, n’expriment pas, à notre avis, l’idée principale de ce poème. Le critique les choisit probablement pour l’effet qu’elles peuvent produire chez le lecteur étranger. En fait, Pouchkine veut faire comprendre aux pays étrangers qu’ils ne doivent pas prendre part au conflit slave dont ils ne savent pas grand-chose. Oui, il parle de la haine, mais non pas de la sienne; il parle plutôt de la haine de l’étranger envers les slaves, que Pouchkine perçoit dans le fait que l’étranger ne respecte pas l’autonomie de ces pays, puisqu’il se mêle des affaires slaves en prêchant le bien-être du monde entier. Toutefois, l’auteur de l’article respecte la sympathie que ressentent les poètes russes envers « la cause polonaise, la plus grande infortune de notre époque »; et Pouchkine ne perd pas son statut de plus grand poète russe.
Cet article est la dernière mention faite par la RE du nom de Pouchkine, avant qu’elle cesse d’exister en 1833. Pendant plus de dix ans, la Revue a suivi pour ses lecteurs l’oeuvre de Pouchkine et, en parcourant les articles qui lui sont consacrés, nous pouvons déjà nous faire une idée des problèmes qui font principalement obstacle à la translation de son oeuvre en France. Nous tirons donc les conclusions suivantes.
D’abord, il faut parler du nom de l’auteur (sujet de translation). Dans la même revue, il est tantôt « Pouchkin », tantôt « Poushkin », parfois il est « Pouschkin » et puis « Pouchekine », il peut être « Pouchkine » ou bien « Puschkin ». Dommage que le même périodique, dans ses articles écrits pour la grande partie par les mêmes personnes, ne trouve pas le moyen d’uniformiser la translittération du nom du poète. Il en va de même pour les titres des textes cités (objet de translation). En 1822, on parle de « Rouslan et Ludmila », l’année suivante de « Rousslan et Ludmila ». En 1824, on écrit sur « Le jet d’eau de Baktchi-Saraï », en 1826 il devient « La fontaine des pleurs », en 1827 « La fontaine de Bakhtchisaraï », etc. Pour que la translation ait du succès et des résultats positifs, n’est-il pas nécessaire, essentiel même, de faire connaître à la culture cible dès le début « qui » et « qu’est-ce qui » est translaté?
Ensuite, il est important de dire quelques mots sur les translateurs (sujet translatant). Dès son apparition en 1819, la RE, éditée par Marc-Antoine Jullien, s’affiche comme une revue libérale d’opposition. Toutefois, pour des raisons politiques, l’éditeur se trouve souvent obligé d’adoucir le ton des articles. Parfois, il doit omettre complètement certains articles prévus pour la publication. En fin de compte, au lieu d’analyser et de « montrer le progrès réel de l’humanité dans tous les domaines » (Garber, 1997, p. 235), but d’origine de la RE, la Revue finit par présenter de l’information ponctuelle, peu définie, sur des faits divers.
La plupart des correspondants de la RE travaillant dans le domaine de la culture russe ne vivent pas uniquement de leur plume. Donc, pour protéger leur carrière, ils ne signent pas leurs articles. Le contenu des articles en souffre : très peu de critiques parlent véritablement des idées et du contenu des oeuvres de Pouchkine, où le thème central est la liberté. Il en résulte que les fidèles de la Revue n’ont droit qu’à des descriptions floues du style du poète. De plus, on a souvent l’impression que même les critiques russes parlent non pas à partir de leurs propres lectures, leurs propres observations, mais à partir des informations glanées lors d’une soirée mondaine dans des salons russes ou dans un journal russe publié en français[9].
Si la majorité des critiques russes évite des analyses approfondies en se protégeant, les correspondants français ont leurs raisons pour justifier le caractère approximatif de leurs commentaires sur Pouchkine. Bien qu’ils maîtrisent, chacun à un degré différent, la langue russe, cette connaissance ne leur suffit ni pour comprendre en profondeur l’oeuvre du poète, ni pour en abstraire les idées principales. Ils mentionnent d’ailleurs souvent dans leurs articles que le caractère particulier de la langue de Pouchkine, qui fusionne le parler et les contes populaires à la langue littéraire, rend la compréhension difficile. Aux difficultés linguistiques s’ajoute la méconnaissance des réalités politiques, économiques et culturelles russes. Bien que certains critiques français aient séjourné en Russie, ils interprètent les événements à leur manière, qui, malheureusement, revêt souvent un caractère erroné. Aussi, ils s’adressent pour des clarifications à leurs collègues russes, mais, ces derniers, faute d’avoir des renseignements nouveaux, se trompent de temps à autre. Iakov Tolstoï, par exemple, ayant peur d’être persécuté pour sa participation dans le mouvement décembriste, quitte la Russie en 1823 et garde des visions idéalistes sur son pays.
Russes ou Français, les critiques de la RE s’en tiennent à une lecture plutôt superficielle dans leurs présentations de Pouchkine et de ses oeuvres. Sans pour autant sous-estimer les mérites de ces premiers translateurs français, qui ont introduit le nom de Pouchkine en France et ont su reconnaître le talent de l’auteur russe, nous ne pouvons ne pas remarquer l’empirisme de leurs procédés translatifs. Le fait de publier régulièrement des articles mentionnant le nom de Pouchkine ne constitue pas une preuve d’une approche méthodique puisque ces articles, même s’ils fournissent quelques informations ponctuelles, ne disent pas grand-chose sur le contenu des textes pouchkiniens et ne présentent pas de morceaux traduits. De cette double translation, seule celle du nom de Pouchkine peut être considérée comme réussie : les critiques qui débutent par des comparaisons du jeune poète aux auteurs étrangers, finissent par accepter son caractère unique, lui confèrent la couronne de l’auteur le plus distingué, le plus connu de l’Empire russe, le statut du rival ex aequo des poètes européens. Cependant, même cette réussite au niveau de la translation du nom est relative : après la mort tragique de Pouchkine en 1837, son nom semble être plutôt oublié. Il faudra attendre les années cinquante et les efforts entrepris par Ivan Tourguénev pour voir renaître cette translation de manière un peu plus constante.
Pourtant, nous constatons, et malheureusement sans grande hésitation, l’échec de la translation des oeuvres de Pouchkine. Dans ce sens, on pourrait dire que, malgré leur bonne volonté, les premiers translateurs ont fait plus de mal que de bien. N’ayant pas donné accès aux textes pouchkiniens, ils ont rendu ses oeuvres inaccessibles, et non seulement dans le sens physique du terme. Par extension, les écrits de Pouchkine deviennent « difficiles à comprendre », « difficiles à traduire » et, finalement, tout simplement « intraduisibles ». Le mythe de l’intraduisibilité de Pouchkine naît dans les années vingt du XIXe siècle, lors de la première décennie de la translation de son nom et de ses oeuvres. En mars 1827, E. Héreau écrit dans la RE le commentaire suivant sur la traduction des auteurs russes : « […] pour bien traduire […], il faut réunir à la connaissance parfaite de leur langue celle du sujet qu’ils ont traité. De la difficulté de remplir ces deux conditions indispensables a dû naître le grand nombre de mauvaises traductions dont nous sommes inondés. » En octobre 1847, Charles de Saint-Julien propose dans la Revue des deux mondes des traductions en prose de quelques vers de Pouchkine. Il dit à propos de la langue russe : « Qu’on y songe, l’idiome russe est le plus difficile des idiomes européens. » Et sur la traduction des textes pouchkiniens il fait les observations suivantes :
Il importe qu’on ne l’oublie pas, une traduction de ce poète exige une connaissance intime et approfondie, non seulement de la grammaire et du vocabulaire russes, mais des finesses et des bizarreries de la langue; elle exige aussi un long commerce avec ce génie si original, si en dehors de toute tradition européenne. Tant que cette double condition n’aura pas été remplie, notre pays, nous le disons avec regret, ne connaîtra qu’imparfaitement la valeur et l’originalité du poète russe.
Dans les années cinquante, c’est Mérimée qui écrit beaucoup sur Pouchkine et sa traduction du russe (Martianova, 1960, p. 106) :
Traduire de russe en français n’est pas une tâche facile. Le russe est une langue faite pour la poésie, d’une richesse extraordinaire et remarquable surtout par la finesse de ses nuances. Lorsqu’une pareille langue se trouve à la disposition d’un écrivain ingénieux qui se plaît à l’analyse, vous devinez le parti qu’il en peut tirer et les insurmontables difficultés qu’il prépare à son traducteur.
Quant à Pouchkine, Mérimée admet qu’il est « impossible de donner en français une idée de la concision de ses vers ». Le mot est prononcé. Il a du poids, car il est prononcé par un écrivain célèbre qui a produit lui-même des traductions de Pouchkine. Ce qui se trouvait en germination au début du siècle est érigé en dogme : Pouchkine est intraduisible. Comme l’écrira (en termes métaphoriques) Eugène-Melchior de Vogüé, grand chercheur dans le domaine de la littérature russe, en 1886 :
[…] traduire cette langue de diamant; c’est une gageure à rendre fou de désespoir. […] Je me souviens d’avoir vu, entre deux feuilles d’un exemplaire d’Oniéguine, une luciole rapportée de Naples par une jeune voyageuse; de l’étoile des nuits italiennes, il restait un triste vermisseau; tout son charme, fait de sa lumière, s’était évanoui dès qu’on y avait touché. Ainsi mourrait cette poésie, si je la transportais sur ces pages.
1971, p. 97
Voilà donc le paradoxe de la situation de Pouchkine en France : si on ne le traduit pas, il n’existe pas pour les lecteurs français; si on le traduit, on le tue. De Vogüé conclut en disant que « les poètes russes ne sont et ne seront jamais traduits » (Boutchik, 1947, p. 17).
Faisons maintenant une récapitulation des huit éléments essentiels de la translation, déjà mentionnés à plusieurs reprises lors de cette étude, afin de rassembler les éléments qui, par leur effet combiné, ont concouru à l’échec de l’entreprise. Le sujet translatant (le par-qui) (1) est composé de deux groupes de participants : les traducteurs et les critiques. Aucun de ces groupes n’est homogène, mais est composé de deux clans distincts : les Russes et les Français. Ces deux clans, à leur tour, possèdent des caractéristiques différentes. Parmi les Russes, il y a ceux qui résident en Russie, d’autres qui habitent en France. Parmi les Français, il y a ceux qui étudient le russe et ceux qui l’ignorent. Par ailleurs, il existe ceux qui ont fait des séjours en Russie, ainsi que ceux qui n’ont pas eu cette chance. Cependant, les premiers ne connaissent pas nécessairement le pays et la culture russes. Enfin, de manière globale, bien que l’initiative vienne le plus souvent du côté des Russes, c’est l’opinion des Français qui est la plus respectée. Il arrive parfois que les représentants des deux groupes joignent leurs efforts, ce qui donne, bien que rarement, des résultats positifs.
Le sujet de la translation (le qui) (2), c’est-à-dire Pouchkine, reste mal défini tout au long du XIXe siècle, et n’est connu que par son nom qui, du reste, s’en trouve desservi à défaut d’une translittération française uniformisée. L’objet de la translation (le quoi) (3), c’est-à-dire, les oeuvres de Pouchkine, restent inconnues, parfois ignorées par les traducteurs mêmes. Certains titres des textes pouchkiniens sont transmis, mais demeurent méconnus de la plupart des Français qui ne lisent pas Pouchkine. Le destinataire de la traduction (le pour-qui) (4) est cependant bien défini, c’est tout simplement le grand public français.
Le moment de la translation (le quand) (5) ne peut pas être défini de la même manière pour chaque instance, déterminée historiquement. Nous ne résumons que brièvement ici les grandes tendances. Le début du siècle est marqué par la période romantique qui atteste une ouverture d’esprit, une curiosité accrue envers les pays-cultures étrangers, surtout après la défaite napoléonienne. Après la mort de Pouchkine, tragique et scandaleuse (période dont nous n’avons pu parler en détail ici), le moment de la prochaine translation se fait attendre. Elle est reprise dans les années cinquante, Mérimée y contribuant alors pour beaucoup. Les pourparlers à propos de l’Alliance franco-russe créent une mode russe et donc une nouvelle possibilité pour la translation, d’abord accueillie avec intérêt, puis dénoncée comme une attirance passagère, une maladie. L’année du centenaire de la naissance de Pouchkine fait resurgir son nom, pour la dernière fois au XIXe siècle.
Les raisons de la translation (le pourquoi) (6) sont de deux natures, historique et personnelle. La première s’explique par la situation de la France, autrefois le symbole de l’hégémonie européenne, attirée par les cultures étrangères. La deuxième dépend des translateurs individuels. Les uns, parmi les Russes, sont animés par des sentiments patriotiques, les autres par la perspective de gains personnels. Parmi les Français, on compte ceux qui sont motivés par l’étude de la langue, par des voyages dans le pays du tsar. Il existe cependant des représentants des deux côtés qui ont véritablement la volonté de faire connaître en France le nom et les oeuvres de Pouchkine. Ironiquement, cette volonté ne suffit pas pour atteindre le but.
L’endroit de la translation (le où) (7) est également très important dans le cas de Pouchkine. Ainsi, par exemple, les traductions effectuées en Russie ont moins de valeur, moins d’impact sur le destinataire, que les traductions produites en France. En France même, les grands journaux parisiens jouissent d’un plus grand rayonnement, d’un plus grand auditoire que leurs compétiteurs provinciaux.
Enfin, la manière de la translation (le comment) (8) est un autre élément essentiel à la cause. Dans le cas de Pouchkine, on compte plusieurs manières, telles que la critique textuelle ou non textuelle; la traduction littérale ou d’annexion, en vers ou en prose, directe ou indirecte; les représentations théâtrales ou les déclamations dans des cercles littéraires. Finalement, en définitive, c’est le caractère empirique des premiers procédés translatifs du début du XIXe siècle qui détermine l’échec de la translation.
Ces huit composantes de la translation qui forment un ensemble indissociable sont influencées par la réceptivité historique de l’époque, mais participent en même temps à la formation de cette réceptivité et sont les conditions impératives de toute réception, ainsi que les causes premières dans le cas de la non-réception. Beaucoup de temps s’est écoulé depuis les efforts des premiers translateurs pouchkiniens. Le XIXe siècle verra poindre les approches plus méthodiques de Tourguénev, de Mérimée, de de Vogüé. Au XXe siècle, c’est le projet translatif de l’équipe menée par Efim Etkind qui mérite l’attention la plus vive. Mais, pour revenir à l’observation de Léon Robel, que nous appuyons, « il y a encore beaucoup à faire » pour engager l’oeuvre de Pouchkine sur la voie de l’ « épreuve de l’étranger ».
Parties annexes
Note biographique
Natalia Teplova
Doctorante au Département de langue et littérature françaises de l’Université McGill. Elle prépare une thèse sur la traduction de Pouchkine en France et au Japon sous la direction d’Annick Chapdelaine. Elle travaille dans le domaine de la traductologie et s’intéresse, entre autres, aux questions de l’intraduisibilité ainsi que de l’histoire du discours traductologique dans et au-delà de l’espace occidental.
Notes
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[1]
Cet article est une synthèse sommaire du travail effectué pour le mémoire de maîtrise intitulé Pouchkine en France au XIXe siècle : problèmes de translation sous la direction d’Annick Chapdelaine (Université McGill, 2000).
-
[2]
Nous aurions pu parler longuement de Pouchkine – père de la littérature russe moderne, pionnier de la littérature professionnelle en Russie, rénovateur de la langue littéraire russe, unificateur des racines populaires et de la civilisation européenne, penseur passionné, ardent, audacieux, engagé, libéral, protecteur des humiliés et des marginaux; nous n’indiquerons cependant que deux ouvrages biographiques sur cet auteur : ceux de H. Troyat et de H. Gourdin.
-
[3]
Expression introduite par A. Berman dans son livre L’épreuve de l’étranger. Culture et traduction dans l’Allemagne romantique. Paris, NRF/Gallimard, 1984.
-
[4]
Revue encyclopédique, ou analyse raisonnée des productions les plus remarquables dans la littérature, les sciences et les arts, par une réunion de membres de l’Institut et d’autres hommes de lettres, Paris, janvier 1822, tome XIII, p. 14. (Par souci de concision, le titre de cette revue sera indiqué dorénavant par le sigle RE).
-
[5]
Cet article est signé « S. P-y », c’est-à-dire Sergueï Poltoratskiï, qui fournira une soixantaine d’articles au total à la RE. Même si ses articles ne comportent pas d’analyses approfondies, Poltoratskiï se trouve néanmoins persécuté par les autorités russes pour ses contributions à la revue étrangère.
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[6]
Iakov Tolstoï, ancien militaire de l’armée russe, est un des correspondants permanents de la RE. Il connaissait d’ailleurs personnellement Pouchkine.
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[7]
Edme Héreau est le secrétaire principal de la RE. Il a fait un séjour de dix ans en Russie et jouit sans doute d’une grande familiarité avec la langue russe.
-
[8]
J. M. Chopin, secrétaire du prince Kourakine, a séjourné pendant 3 ans à Saint-Pétersbourg.
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[9]
En 1829, par exemple, il y a sept journaux publiés en langue française en Russie (trois à Saint-Pétersbourg, trois à Moscou et un à Odessa). En 1830, le nombre s’élève à huit journaux, dont quatre sont publiés à Saint-Pétersbourg, un à Moscou et trois à Odessa.
-
[10]
Les entrées bibliographiques dans cette section, ainsi que dans la section B, sont indiquées par ordre chronologique.
Références
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- Revue encyclopédique, Paris, juillet 1821, t. 11, 31e cahier, pp. 206-207.
- Revue encyclopédique, Paris, janvier 1822, t. 13, p. 14.
- Revue encyclopédique, Paris, octobre 1822, t. 16, pp.119-120.
- Revue encyclopédique, Paris, avril 1823, t. 18, 52e cahier, pp. 120-121.
- Revue encyclopédique, Paris, juillet 1823, t. 19, 55e cahier, p. 185.
- Revue encyclopédique, Paris, avril 1824, t. 22, 64e cahier, no 4, pp. 136-137.
- Revue encyclopédique, Paris, juin 1824, t. 22, 66e cahier, no 6, pp. 650-651.
- Revue encyclopédique, Paris, septembre 1824, t . 23, 69e cahier, no 9, p. 643.
- Revue encyclopédique, Paris, mai 1825, t. 26, 77e cahier, pp. 455-456.
- Revue encyclopédique, Paris, juin 1825, t. 26, 78e cahier, pp. 897-899.
- Revue encyclopédique, Paris, juin 1826, t. 30, 90e cahier, no 6, pp. 819-821.
- Revue encyclopédique, Paris, août 1826, t. 31, 92e cahier, no 9, p. 406.
- Revue encyclopédique, Paris, novembre 1826, t. 32, 95e cahier, no 11, pp. 377-386.
- Revue encyclopédique, Paris, mars 1827, t. 33, 99e cahier, no 3, pp. 817-820.
- Revue encyclopédique, Paris, avril 1827, t. 34, 100e cahier, no 4, pp. 149-150.
- Revue encyclopédique, Paris, mai 1827, t. 34, 101e cahier, no 5, pp. 533-537.
- Revue encyclopédique, Paris, juin 1827, t. 34, 102e cahier, no 6, p. 678.
- Revue encyclopédique, Paris, janvier 1828, t. 37, 109e cahier, no 1, pp. 130-132.
- Revue encyclopédique, Paris, février 1828, t. 37, 110e cahier, no 2, p. 556.
- Revue encyclopédique, Paris, avril 1828, t. 38, 112e cahier, no 4, pp. 126-127.
- Revue encyclopédique, Paris, août 1828, t. 39, 116e cahier, no 8, p. 500.
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