Résumés
Résumé
La plaine de Piolenc-Mornas (Vaucluse) est un ancien territoire inondable par le Rhône dont la reconquête est étudiée dans le cadre d’une étude d’optimisation de la gestion des zones d’expansion de crue. Au nom du principe de solidarité amont/aval, les gestionnaires envisagent la remise en eau de ce territoire, déjà marqué par de nombreuses infrastructures d’envergure nationale. Localement, les habitants ont appris à jouer avec les contraintes et les grands projets d’aménagement : quelle culture de l’arrangement se construit avec le temps au niveau local ? Au regard des enjeux du présent, comment la mémoire active du passé inondable de la plaine participe à la construction des représentations du territoire ? Comment toutes les pénétrantes en termes d’infrastructures ont participé à la transformation de la plaine rurale en une campagne moderne ? Enfin, comment le projet de remise en eau s’inscrit-il dans ce territoire ?
Mots-clés :
- Inondation,
- Mémoire,
- Négociation,
- mobilisation locale,
- zone d’expansion de crue,
- Piolenc-Mornas (Vaucluse)
Abstract
The plain of Piolenc-Mornas (Vaucluse) is a former flooded territory by the river Rhône modified by the huge project of hydroelectricity exploitation in the 1970’s. The possibility of making it liable to floods again is studied within a global plan of optimization of floods expansion areas. Following solidarity principle between upstream and downstream, the stakeholders want to use this agricultural area to stock water and limit rise in water level. Trough numerous projects of infrastructures set in this plain in the 1990’s (high speed train), the inhabitants learnt to deal locally with the constraints of global land settlement. They have developed an attitude to claim for compensations which participate to a “bargaining culture”. Towards the stakes in the present, how does the memory of the flooded past of the plain participate to the identity of territory? How the former negotiations relative to the implementation of infrastructures have participated in turning the rural plain into modernity? Finally, how these two dynamics, memory and negotiation, influence the mobilization against the project of optimization of floods expansion areas ?
Keywords:
- floods,
- memory,
- negotiation,
- local mobilization,
- floods expansion areas,
- Piolenc-Mornas (Vaucluse – France)
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Parties annexes
Notes
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[1]
Il permet de satisfaire « la navigation qui correspond au tiers aval du Rhône –entre Lyon et Arles–, l’irrigation sur le Bas Rhône et l’hydroélectricité du Haut Rhône où le régime torrentiel du fleuve se prête bien à la production hydroélectrique », (Vernière, 1999 : 22). En 1933, la Compagnie Nationale du Rhône est créée et obtient la concession de l’aménagement du Rhône, selon le projet établi par l’Etat depuis 1921. Le Rhône compte aujourd’hui 18 aménagements hydroélectriques dits « à buts multiples » entre la Suisse et la Méditerranée (19 centrales, 19 barrages et 14 écluses à grand gabarit).
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[2]
D’après l’auteur, « onze opérations d'expropriations, réalisées entre 1949 et octobre 1952, touchent 339 exploitations pour un total d'environ 2 000 hectares de terres de culture en partie irriguée » (Giandou, 2005).
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[3]
A. Campagne, « Les expropriations à Donzère-Mondragon », dans Donzère-Mondragon, numéro hors série de La Houille Blanche, 1952, pp. 405-408, p. 405.
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[4]
La désignation de l’affluent responsable de l’inondation permettait de qualifier la période, la violence et la durée de la crue ainsi que la qualité fertilisante des limons déposés sur les terres agricoles.
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[5]
Tout d’abord, le Plan des Surfaces Submersibles, approuvé le 6 août 1982, tend à préserver le libre écoulement du Rhône et à conserver les champs d’inondations du Rhône. Les crues torrentielles des ruisseaux de l’Aygues et du Rieu Foyro en 2002 et 2003, affluents du Rhône, ont amené plus d’un mètre d’eau dans le centre-ville de Piolenc et inondé des quartiers de Mornas. L’association du Rieu de Piolenc et de ses environs qui a été créée par des sinistrés suite aux deux crues travaille à l’émergence de projets qui détourneraient les affluents des zones urbanisées afin qu’ils rejoignent directement le Rhône en cas de crue. Il existe, de plus, un Plan de Prévention des Risques (PPR) spécifiques à ces ruisseaux.
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[6]
Dans le Vaucluse la catastrophe de Vaison-la-Romaine du 22 septembre 1992 a agi comme un électrochoc en mettant à l’agenda des élus la prévention du risque inondation. Au niveau national, la loi Barnier de 1995 qui instaure le PPR fait également suite à ces événements qui causèrent vingt et un morts et quarante disparus.
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[7]
Ce plan « grand fleuve », initié en 2007, est conçu comme un projet global de développement durable par un partenariat qui réunit pour le volet « inondations » les Régions, l’Etat, l’Europe et la Compagnie nationale du Rhône (les autres volets touchent à l’identité et au patrimoine, à la qualité des eaux, ressource et biodiversité, à l’énergie, au transport fluvial et au tourisme).
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[8]
Le principe consiste à modifier les mécanismes d’entrée (création de déversoirs), de stockage et de sortie des eaux, mais aussi de jouer sur le moment du stockage (si possible pendant la pointe de la crue).
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[9]
Les Comités Territoriaux de Concertation ont été mis en place sur le Rhône en mars 2005. Ils constituent des scènes d’échanges, au niveau local, entre tous les acteurs concernés par la prévention des inondations (élus, maîtres d’ouvrage, représentants socioprofessionnels, associations…).
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[10]
Les noms désignent en abrégé les grandes plaines inondables et non les villages eux-mêmes. Q10 : crue décennale, Q1000 : crue millénnale
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[11]
La commune de Piolenc comptait 2184 habitants en 1968 contre 4296 en 1999 et la commune de Mornas 1103 en 1968 contre 2209 en 1999. Cette croissance démographique est principalement due à l’installation de nouveaux résidents (cadres, professions intermédiaires, retraités) comme en témoignent la très faible part des résidences secondaires dans l’augmentation du nombre de logements (Données INSEE, recensement 1999).
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[12]
Référence est faite à l’ensemble des infrastructures qui traversent la plaine.
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[13]
Pour une analyse critique de cette notion, on pourra se référer aux travaux de François Duchêne, Christelle Morel-Journel, Emmanuel Martinais et Thierry Coanus (1999, 2000 et 2004) et de Julien Langumier (2008b).
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- Duchene F. et C. Morel-Journel, 2000, « Riverains de cours d’eau et gestionnaires du risque, un dialogue impossible ? », Geocarrefour, Revue de géographie de Lyon, volume 75, n°3, pp 221-226.
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- Giandou A., 2000, L'échec d'une colonisation agricole et ses conséquences : La Crau, Ruralia, [En ligne], mis en ligne le 25 janvier 2005. URL : http://ruralia.revues.org/document140.html. Consulté le 28 avril 2008.
- Lafaye C. et L. Thevenot, 1993, « Une justification écologique ? Conflits dans l’aménagement de la nature », Revue française de sociologie, vol 34, n° 4, pp. 495-524
- Langumier, J., 2008a, Survivre à l’inondation. Pour une ethnologie de la catastrophe, ENS Editions, Lyon
- Langumier, J., 2008b, « Soutien psychologique et culture du risque : deux réponses institutionnelles contraires face aux émotions de la catastrophe », in Hernandez Fabrice, Marche Hélène, Lézé Samuel (dir.), Le langage social des émotions. Etudes sur les rapports au corps et à la santé, Anthropos-Economica, Paris, pp. 320-349.
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- Marie, M., 1996, « Aménager ou Ménager le territoire », Les Annales des Ponts et chaussées, n°77, pp 67-76
- Verniere, B., 1999, L’action publique entre stabilité et changement : un siècle d’aménagement du Rhône, 1899-1999, IEP de Lyon, 120p.