Volume 43, Number 2, 2024
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Table of contents (3 articles)
Articles non-thématiques
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Le transhumanisme au service de l’idéologie du travail : un nouvel instrument de l’exploitation capitaliste ?
Guillaume Fauvel
AbstractFR:
Avec la division cognitive du travail qui accompagne l’évolution néolibérale des sociétés, l’efficacité ne résulte plus de la parcellarisation des processus de production en des tâches simples, répétitives et rigoureusement délimitées, mais de la capacité des forces de travail à investir dans leurs facultés d’apprentissage, d’innovation et d’adaptation afin de les maximiser en suivant les besoins perpétuels de l’appareil de production et sa dynamique de changement continu. En cela le transhumanisme représenterait le meilleur instrument dont dispose aujourd’hui le néolibéralisme pour atteindre l’objectif ultime d’une dépolitisation totale des individus et de la société au profit d’une économisation intégrale des individus et de la société. En véhiculant l’idéal d’une « augmentation technologique de l’humain », le transhumanisme enrôlerait l’individu à investir son humanité en la comprenant uniquement en termes de capital humain pour mieux la faire entrer intégralement sur le marché économique comme source d’adaptation à ce nouveau milieu dans lequel la compétition généralisée doit être perçue comme « naturelle ». Cela apparenterait le transhumanisme à une forme particulière de propagande au service de « l’idéologie du travail » de Jacques Ellul, développée par le néolibéralisme.
EN:
With the cognitive division of labour that accompanies the neoliberal evolution of societies, efficiency no longer results from the parcellarization of production processes into simple, repetitive, and rigorously delimited tasks, but from the capacity of labour forces to invest in their faculties of learning, innovation, and adaptation in order to maximize them by following the perpetual needs of the production apparatus and its dynamics of continuous change. Transhumanism would thus represent the best instrument that neoliberalism has today to reach the ultimate objective of a total depoliticization of individuals and society in favour of an integral economization of individuals and society. By conveying the ideal of a « technological increase of the human », transhumanism would enroll the individual to invest his humanity by understanding it only in terms of human capital to better make it enter integrally on the economic market as a source of adaptation to this new environment in which the generalized competition must be perceived as « natural ». This would make transhumanism look like a special form of propaganda in the service of Jacques Ellul’s “ideology of work,” developed by neoliberalism.
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Redéfinir démocratiquement les besoins pour planifier l’économie
Jonathan Durand Folco, Ambre Fourrier and Simon Tremblay-Pepin
AbstractFR:
Alors que la notion de besoin reste largement sous-théorisée au sein de la littérature sur les modèles économiques postcapitalistes, peu d’analyses sur les besoins remettent en question le capitalisme ou réfléchissent aux façons de satisfaire ceux-ci en dehors de ce système économique. Cet article propose de surmonter cette lacune en mettant en dialogue la riche littérature sur les besoins et celle sur les modèles de planification économique démocratique afin d’éclairer les manières de définir collectivement les besoins. Après un bref survol d’études sur les besoins à travers diverses disciplines, le cadre de la « lutte pour l’interprétation des besoins » de Nancy Fraser est mobilisé pour montrer comment ceux-ci peuvent être débattus dans l’arène démocratique. L’articulation de ces réflexions avec divers modèles de planification économique permet de combler certains angles morts concernant la définition démocratique des besoins.
EN:
While the notion of need remains largely under-theorized within the literature on post-capitalist economic models, few analyses of needs challenge capitalism or reflect on ways of satisfying them outside this economic system. This article proposes to overcome this gap by bringing the rich literature on needs into dialogue with the literature on democratic economic planning models, in order to shed light on ways to define needs collectively. After a brief overview of studies on needs across various disciplines, Nancy Fraser’s framework of the “struggle over needs” is mobilized to show how needs can be debated in the democratic arena. The articulation of these reflections with various models of economic planning helps to fill in certain gaps concerning the democratic definition of needs.
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L’advocacy coalition framework et le changement de politiques à l’égard de la diaspora au Cameroun
Léger Félix Ntienjom Mbohou
AbstractFR:
Cet article mobilise l’advocacy coalition framework (ACF) pour examiner le changement de politique vis-à-vis de la diaspora longtemps perçue par les autorités publiques comme une menace à la sécurité et à la stabilité du Cameroun ; et, depuis le milieu des années 2000, érigée en acteur à mobiliser en faveur du développement socioéconomique du pays. Il apparaît que l’ACF est applicable aux changements de politiques dans un État africain caractérisé par un contexte politique relativement instable. Notre analyse qui s’appuie sur une enquête auprès de fonctionnaires, d’experts et de professionnels démontre notamment que l’apprentissage politique peut influer sur les croyances fondamentales d’une coalition.
EN:
This paper mobilizes the advocacy coalition framework (ACF) to examine the policy shift towards the diaspora, which was long perceived as a threat to Cameroon’s security and stability by government authorities and, since the mid-2000s, has become an actor to be mobilized for the country’s socio-economic development. It appears that ACF is applicable to policy changes in an African state characterized by a relatively unstable political context. Our analysis, which is based on a survey of civil servants, experts, and professionals, shows that political learning can have an impact on the fundamental beliefs of a coalition.