Lu pour vous

BLAIS, Mélissa (2009). J’haïs les féministes!, Éditions du Remue-ménage, Montréal, 220 p.[Notice]

  • Isabelle Côté

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  • Isabelle Côté
    BSS, Professionnelle de recherche, Université d’Ottawa

Blais explique que les féministes ne sont pas toutes en accord sur la signification du geste, entre autres, sur la psychologie de Lépine, sur le lien entre la tuerie et la violence faite aux femmes ou encore sur les solutions proposées pour contrer la violence faite aux femmes. Au-delà de ces divergences, l’auteure relève quatre consensus dans les discours féministes. D’abord, ces dernières s’entendent sur le fait que la montée de l’antiféminisme et celle du mouvement masculiniste à partir des années 1980 ont contribué au geste de Lépine. Ensuite, elles s’entendent sur le fait que l’École polytechnique est un lieu symbolique et que le geste reflétait la résistance de l’entrée des femmes dans les domaines scientifiques, traditionnellement réservés aux hommes. Un autre consensus parmi les féministes est en lien avec la cérémonie religieuse qui a eu lieu après le drame, plus précisément à savoir que « […] l’espace choisi pour exprimer la solidarité envers les personnes visées par le drame [était] caractérisé par l’exclusion du féminin » (p. 36). Enfin, les féministes sont unanimes à reconnaître la misogynie du tueur, un homme dont les intentions étaient manifestement motivées par sa haine des femmes. Toujours au premier chapitre, Blais explique que les journalistes ont quant à eux représenté les mobilisations féministes sous quatre angles majeurs. Certains les ont marginalisées en leur accordant une place d’arrière-plan dans les articles ou en ne leur consacrant que quelques lignes. D’autres ont opté pour le double standard en couvrant d’autres mobilisations alors que celles ayant une connotation féministe étaient passées sous silence. Les mobilisations féministes ont également été discréditées dans les journaux, en représentant les féministes selon une vision stéréotypée et péjorative. Enfin, des journalistes ont tout simplement opté pour le silence « par respect pour les victimes ». L’auteure se questionne à savoir comment nous pouvons garder le silence sur la violence que les hommes exercent à l’endroit des femmes, dans leur vie privée ainsi que dans la collectivité. Divers discours ont été véhiculés dans les médias quant à la signification de la tuerie et les journalistes y sont allés de multiples explications, souvent en contradiction avec les discours féministes. Alors que certains d’entre eux prônent l’oubli du drame afin de préserver l’équilibre homme/femme au sein de la société québécoise, d’autres vont opter pour le silence et le recueillement par respect pour les victimes et leurs proches, entre autres, en s’opposant à la publication de la lettre rédigée par Lépine. D’autres discours ont fait état de la violence en général en passant sous silence celle faite aux femmes. Entre autres, la violence à la télévision a été mise en cause, laquelle aurait pu pousser Lépine à commettre son geste. Un autre discours présent dans les médias consiste à comparer le geste de Lépine à celui d’autres tueries ou de meurtres collectifs. À cet égard, Blais explique que cette violence n’est pas comparable à celle des autres tueries puisque Lépine avait une cible très claire. Dans un autre ordre d’idées, certains journalistes remettent en question le rôle des services policiers, entre autres, leur rapidité à intervenir, alors que d’autres argumentent sur des lois plus strictes en lien avec la possession d’armes à feu. En revanche, maintes analyses psychologiques et psychiatriques « du tireur fou » furent évoquées dans les journaux, ce qui selon l’auteure, met l’accent sur la psychologisation de la tuerie en niant la source même du crime et les intentions du tueur. Certains vont même jusqu’à affirmer que Lépine est victime d’une société où les hommes n’ont plus leur place et, selon certains journalistes, son geste est même justifiable. À l’extrême, quelques-uns d’entre …