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1. Introduction

Au Cameroun, comme un peu partout dans les régions de socle plutonique ou métamorphique, la ressource en eau de surface est limitée et/ou soumise aux forçages anthropique et climatique (LIENOU, 2007; SIGHOMNOU, 2004). Les aquifères discontinus des formations de socle cristallin s’avèrent alors primordiaux pour l’approvisionnement en eau des populations (DEWANDEL et al., 2011; LACHASSAGNE et al., 2011). À l’état sain, ces formations présentent une perméabilité de l’ordre de 10‑11 m∙s‑1 et une porosité inférieure à 1 % (COURTOIS et al., 2009; LACHASSAGNE et WYNS, 2005; MARÉCHAL et al., 2004). Elles sont donc à l’origine sans aucun potentiel hydrogéologique et ne deviennent en général aquifères qu’à la faveur de la fracturation dont l’origine est attribuée par certains à la tectonique (ACWORTH, 1987; KOUAME et al., 2010; TAYLOR et HOWARD, 2000) et par d’autres à l’altération supergène (LACHASSAGNE et al., 2011; MARÉCHAL et al., 2003; WYNS et al., 1999). Diverses études ont montré l’influence de l’altération supergène et de l’état de saturation en eau de la roche (OWOR et al., 2009) ou de la position du niveau piézométrique (GUIHENEUF et al., 2014) sur les caractéristiques hydrodynamiques des aquifères de socle. Les résultats d’une partie de ces études indiquent une corrélation entre la puissance saturée des altérites meubles et la productivité des ouvrages (ZEPHIR DE LASME et al., 2012) et une contribution efficace de l’horizon fissuré à la productivité des puits (COURTOIS et al., 2009). Aussi, ces études révèlent que le profil d’altération typique des roches de socle comprend, de haut en bas (DEWANDEL et al., 2006; LACHASSAGNE et al., 2011; MARÉCHAL et al., 2003; WYNS et al., 2004) : une couche d’altérites meubles à fonction essentiellement capacitive (lorsqu’elle est saturée en eau), surmontée par la cuirasse; une couche fissurée transmissive, composée de roche dure et présentant des fissures, en majorité, subhorizontales dans les granites (Figure 1). En plus de cette simple description structurale, les études récentes (DEWANDEL et al., 2006) indiquent que le profil d’altération typique peut être scindé en deux catégories : i) les profils issus de l’altération monophasée (WYNS et al., 1999; WYNS et al., 2004) et ii) ceux, issus de l’altération polyphasée (DEWANDEL et al., 2006; DEWANDEL et al., 2011). D’après DEWANDEL et al. (2006) et TAYLOR et HOWARD (1999), l’évolution à long terme des terrains profondément altérés est associée à des cycles d’altération et d’érosion contrôlés tectoniquement.

Figure 1

Profil d’altération typique développé au sein de roches de socle (LACHASSAGNE et WYNS, 2005)

Typical weathering profile developed on basement rocks (LACHASSAGNE and WYNS, 2005)

Profil d’altération typique développé au sein de roches de socle (LACHASSAGNE et WYNS, 2005)

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Contrairement au socle de l’Afrique centrale où les études hydrogéologiques sont peu développées (DJEUDA TCHAPNGA et al., 1999; GOMBERT, 1999), le socle ouest-africain a fait l’objet de nombreux travaux de recherche (COURTOIS et al., 2009; KOUADIO et al., 2010; KOUAKOU KOUASSI et al., 2012). Ces travaux ont permis de valider le modèle conceptuel présenté sur la figure 1, mais aussi de cartographier les propriétés des aquifères dans la zone soudano-sahélienne. Au Cameroun, et en particulier dans la région de Yaoundé, les travaux de recherche sur les aquifères de socle restent parcellaires (DJEUDA TCHAPNGA et al., 2001; EWODO MBOUDOU et al., 2012; FOUÉPÉ TAKOUNJOU et al., 2009, 2010). Ces travaux ne permettent pas de s’assurer que les modèles conceptuels hydrogéologiques développés ailleurs dans le monde (Inde, Europe, Corée du Sud [CHO et al., 2003], autres pays d'Afrique) s'y appliquent aussi et/ou y présentent des particularités.

Par ailleurs, en zone climatique humide, et notamment en zone tropicale humide, les nappes dans les altérites du socle sont à faible profondeur et rechargées annuellement. La fluctuation du niveau de ces nappes est contrôlée par les précipitations efficaces (OWOR et al., 2009; TOUCHARD, 1999), les cours d’eau (MARÉCHAL et al., 2006; WENG et LACHASSAGNE, 2000), la topographie (GLEESON et MANNING, 2008), l’épaisseur de la zone non saturée (LELONG et LEMOINE, 1968), l’épaisseur de la partie saturée de la saprolite (FOSTER, 2012) et les prélèvements par pompage (MARÉCHAL et al., 2006). Ces connaissances sont intéressantes, mais les données apparaissent encore fragmentaires. Elles se limitent à montrer la répartition verticale des porosités et des perméabilités en contexte de socle altéré et fissuré, sans forcément aborder le fonctionnement hydrogéologique de détail du profil d’altération (altérites meubles et horizon fissuré sous-jacent). Or, d’après CHILTON et SMITH-CARINGTON (1984), les aquifères d’altérites représentent une source importante d'approvisionnement en eau dans les zones rurales et urbaines des pays d’Afrique où les systèmes d’adduction en eau sont souvent déficitaires. Ceci justifie l’étude de la partie la plus superficielle des aquifères de socle, au moyen d’une approche multidisciplinaire qui permettra de mieux en cerner le fonctionnement.

L’objectif du présent travail consiste donc à caractériser sur le plan géologique et hydrodynamique la partie supérieure du socle altéré et fissuré du petit bassin-versant de l’Olézoa. La compilation des investigations pédologiques, structurales, hydrométriques et piézométriques servira de base de connaissance de la structure et du fonctionnement hydrodynamique des aquifères du socle camerounais.

2. Présentation de la zone d'étude

La zone d’étude est située dans la région de Yaoundé au Sud Cameroun. Cette région, dont l’altitude moyenne est de 750 m, est localisée entre 11°20′ et 11°40′ de longitude est et entre 3°45′ et 4°00′ de latitude nord (Figure 2). Le bassin présente un paysage de collines en demi-orange ou à sommet tabulaire caractéristique du plateau forestier du Sud Cameroun (BITOM et al., 2004). Le climat qui y règne est de type équatorial marqué par deux saisons pluvieuses (mars-juin et septembre-novembre) et deux saisons sèches (décembre-février et juillet-août). La lame d'eau moyenne interannuelle précipitée sur une période allant de 1984 à 2008 est de 1 520 mm avec un écart-type de 268 mm. La température moyenne interannuelle enregistrée au cours de la même période est de 24,4 °C avec un écart-type de 0,5 °C. La végétation varie de la forêt dégradée au sud à la savane post-forestière au nord (ONGUENE MALA, 1993). Le Mfoundi est le principal cours d’eau au sud de la ville de Yaoundé (Figure 2). Ce cours d’eau est un affluent de la Mefou, sous-bassin du fleuve Nyong. Le bassin versant topographique de l’Olézoa (3,65 km2) est l’unique bassin du secteur qui possède, en son sein, cinq étangs créés à des fins piscicoles dont quatre sont totalement eutrophisés du fait des rejets anthropiques. Ce bassin renferme l’Université de Yaoundé I et d’autres structures aussi importantes comme le campement militaire, la mission catholique de Mvolyé, le corps diplomatique et le Centre Hospitalier Universitaire.

Figure 2

Situation géographique du bassin versant topographique de l’Olézoa dans la région du centre du Cameroun. L’encart en haut à gauche représente la localisation du Cameroun au sein de l’Afrique

Geographic location of the Olezoa topographical watershed in the centre of Cameroon. The insert at the top left shows the location of Cameroon within Africa

Situation géographique du bassin versant topographique de l’Olézoa dans la région du centre du Cameroun. L’encart en haut à gauche représente la localisation du Cameroun au sein de l’Afrique

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D’après MAURIZOT et al. (1986), le socle précambrien du Sud Cameroun comprend plusieurs séries métamorphiques (Figure 3a). La série de Yaoundé, affectée par l’orogénèse panafricaine (600 et 500 Ma), est majoritairement formée de gneiss et de migmatites à grenat, provenant d’anciens sédiments granitisés et métamorphisés (NZENTI et al., 1998). Cette série est constituée de deux grands ensembles migmatitiques (OWONA et al., 2003) : un ensemble métasédimentaire ou paragneiss et un ensemble métaplutonique ou orthogneiss (Figure 3b). Les paragneiss sont essentiellement constitués de gneiss à grenats et à disthène, des gneiss à grenats et plagioclases, des marbres, des roches à scapolites. Les pyriclasites intrudant l’unité métasédimentaire, les pyribolites à grenat, les pyroxénites et les roches riches en biotite caractérisent les orthogneiss (MVONDO et al., 2007; NZENTI et al., 1998). C’est ce dernier groupe qui constitue le substratum du bassin versant de l’Olézoa.

Figure 3

Carte géologique du sud-ouest du Cameroun modifiée de MAURIZOT et al. (1986) (a) et esquisse géologique de Yaoundé d’après OWONA et al. (2003) (b)

Geologic map of SW Cameroon modified from MAURIZOT et al. (1986) (a) and sketch of the geological map of Yaoundé from OWONA et al. (2003) (b)

Carte géologique du sud-ouest du Cameroun modifiée de MAURIZOT et al. (1986) (a) et esquisse géologique de Yaoundé d’après OWONA et al. (2003) (b)

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La couverture pédologique développée sur ces formations est constituée de sols ferrallitiques (rouges et jaunes) au sommet de versant et des sols hydromorphes dans les vallées. Le profil de sol de Yaoundé montre (Figure 4), de bas en haut, trois ensembles (EKODECK, 1984; NDJIGUI et al., 2013; YONGUE FOUATEU, 1986) :

  1. Un ensemble d’altérations d’épaisseur variable (5 m et plus) constitué, de bas en haut :

    • d’un niveau isaltéritique (2 m et plus) à structure de la roche-mère conservée et surmontant le gneiss non fissuré à la base; on y observe des reliques de quartz, de disthène et le développement d’un système fissuré parallèle au litage originel; les fissures sont millimétriques et comblées de produits de remplissage composés de kaolinite et d’oxyhydroxydes de fer et d’alumine;

    • d’une allotéritique tachetée ou vermiculite au sein de laquelle se trouvent des fantômes de minéraux originels; elle est peu épaisse (1 à 2 m) et est constituée de goethite et d’hématite.

  2. Un ensemble glébulaire d’accumulation d’oxyhydroxydes de fer et d’argile kaolinitique (≈4 m). Il est le siège de redistribution du fer et de déferrugination et comprend, de bas en haut :

    • un niveau nodulaire inférieur (nodules ferrugineux lithorelictuels dominants);

    • un niveau à blocs et fragments de cuirasse ferrugineuse à faciès variant suivant les sites;

    • un niveau nodulaire supérieur hétérogène.

  3. Un ensemble meuble supérieur (2 à 15 m) argilo-sableux. Il est le siège d’un effondrement plus ou moins complet des structures altéritiques et glébulaires. Cet ensemble est surmonté par un horizon humifère.

Figure 4

Organisation générale du profil d’altération de Yaoundé (EKODECK, 1984)

General organization in the weathering profile of Yaoundé (EKODECK, 1984)

Organisation générale du profil d’altération de Yaoundé (EKODECK, 1984)

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La conductivité hydraulique verticale est de l’ordre de 10‑4 m∙s‑1 dans les deux derniers horizons et 10‑6 m∙s‑1 dans l’horizon d’altération (HUMBEL, 1969). L’organisation structurelle de ces différents ensembles permet de dégager les couches de matériaux consolidés et non consolidés. Les travaux entrepris au cours de cette étude sont spécifiquement orientés sur les matériaux non consolidés, constitués d’altérite meuble et d’argile sableuse.

3. Méthodologie

L’approche méthodologique utilisée dans le présent travail est fondée sur les caractérisations géologiques et hydrodynamiques. La caractérisation géologique a porté sur les observations des profils d’altération et des structures de déformation. Au niveau des profils d’altération, un inventaire et une description des différents états d’altération des formations du bassin ont été réalisés. La description de ces différents états a pour but de définir un modèle conceptuel de l’altération des formations géologiques du bassin. Quatre échantillons de sol, prélevés dans des fosses et trous de profondeurs variables, ont fait l’objet d’une analyse granulométrique complète. Cette analyse a pour but de caractériser ces formations pédologiques. Quatre secteurs de prélèvement ont été choisis selon le nombre de puits et la disponibilité d’espace pour la réalisation d’échantillonnage des sols (Figure 5a). Les profondeurs de prélèvements, correspondant à chaque secteur, sont respectivement 3,5 m (nord), 1,60 m (sud-ouest), 1,50 m (sud-est) et 0,5 m (sud). L’analyse des structures linéaires et planaires, relevées sur les affleurements, a pour but de déterminer les principales directions des déformations. Celles-ci ont ensuite été comparées à celles du réseau hydrographique afin d’établir un lien entre les déformations tectoniques et celui-ci.

Figure 5

Cartes de localisation des puits (a) et d’affleurement (b) avec les isovaleurs correspondant aux cotes topographiques

Location maps of wells (a) and outcrops (b) in which isovalues correspond to spot heights

Cartes de localisation des puits (a) et d’affleurement (b) avec les isovaleurs correspondant aux cotes topographiques

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Au niveau hydrodynamique, des essais de perméabilité à charge variable ont été effectués sur les quatre échantillons de sol dans le but de déterminer la conductivité hydraulique. Les autres données hydrodynamiques (hydrométrie et piézométrie), acquises à pas de temps bimensuel, ont été analysées dans le but de caractériser leur évolution sur la période allant du 15 septembre 2006 au 30 août 2007. Les données hydrométriques présentées ici sont celles de trois sources S1, S2 et S9 (Figure 5a). Ces sources sont assez représentatives de la zone d’étude et subissent moins d’effets anthropiques (bouchage du siphon, irrégularité du siphon) que les sept autres sources. Leur débit a donc été suivi de manière régulière par jaugeage capacitif. L’analyse de la variation du débit dans le temps a pour but de déterminer les coefficients de tarissement. Cette analyse a été réalisée uniquement au moyen du modèle de Maillet (DEWANDEL et al., 2003) dont l’équation est la suivante :

Qt est le débit au temps t, Q0 le débit initial et α le coefficient de tarissement.

D’après DEWANDEL et al. (2003) et SCHOELLER (1967), l’analyse de la variation du débit dans le temps peut fournir des informations quantitatives sur les caractéristiques des aquifères. Ainsi, l’approche fondée sur l’équation 2 (SCHOELLER, 1967) a servi de base à l’identification des systèmes d’écoulement. Leur degré de perméabilité et leur condition de circulation souterraine ont été suggérés à partir du coefficient de variation des sources. D’après GILLI et al. (2008), ce coefficient correspond au rapport entre l’écart des débits moyens de crue et d’étiage et le débit moyen de crue.

où α est le coefficient de tarissement, K le coefficient de perméabilité, m la porosité de la roche, X la longueur de la nappe, V0 le volume, q0 le débit à l’origine, a et b les constantes dépendant de la largeur de la nappe.

Le suivi de la piézométrie a été effectué à la sonde électrique manuelle sur 27 puits géoréférencés par GPS (Figure 5). Ces puits de particuliers, de diamètre interne de l’ordre de 1 m, ont une profondeur comprise entre 1 et 13 m (Tableau 1). Les puits suivis sont peu perturbés par les prélèvements à des fins domestiques ou par des rejets, et les fluctuations de la nappe ne sont donc pas significativement influencées. Les cartes piézométriques (crue et étiage) ont été interpolées à partir des différentes mesures réalisées dans les puits et la mesure des cotes altimétriques des sources et du cours d’eau. L’analyse de ces cartes et l’interprétation de la décharge à partir du modèle de Tison (TISON, 1956) ont pour but de mettre en évidence la dynamique des écoulements de surface et souterrains. D’après TISON (1956), l’équation générale qui régit les fluctuations du niveau de la nappe est :

q et Am sont respectivement le débit sortant et moyen entrant, qm la demie amplitude, q0 le débit sortant de la nappe à l’origine, t le temps (en mois), τ le temps fourni par la relation :

avec T la période et S l’étendue de la nappe. Dans l’hypothèse où l’on a dq/dh = β (constante) c’est-à-dire que le débit sortant varie linéairement avec la hauteur de la nappe et dans le cas d’un abaissement soumis à une descente exponentielle, le mouvement du niveau piézométrique est régi par la relation :

h0 est la cote maximale (m) atteinte par la nappe à la suite d’une alimentation, h la cote de la nappe (m) à un instant t, B = Bm′ où B′ représente la superficie de la nappe (m2) et m′ la porosité (%).

Tableau 1

Synthèse des niveaux piézométriques et coefficients de tarissement des puits suivis

Summary of piezometric levels and recession coefficients of studied wells

Synthèse des niveaux piézométriques et coefficients de tarissement des puits suivis

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4. Résultats

4.1 Modèle conceptuel de l’altération des orthogneiss du bassin de l’Olézoa

Les replats morphologiques d’altitudes élevées sont respectivement observés au nord (770-800 m) et au sud-ouest (770-780 m) alors que le replat d’altitude modérée apparaît au centre (740-760 m). Ces replats sont séparés par une large vallée plate marécageuse. Les observations de terrain ont permis de répertorier quatre points correspondant aux différents états d’altération des formations du bassin (Figure 5b). Dans l’ensemble, les matériaux résistants (roches) apparaissent majoritairement dans les zones à topographie haute (ex. carrières) alors que les matériaux latéritiques sont observés sur les versants (Figure 5b). Les sols semblent être plus épais au niveau des points situés à proximité des talwegs. Les profils correspondant aux quatre points d’observations (Figure 5b) sont représentés sur la figure 6. Le point 1, dont la base de l’affleurement est à environ 735 m, présente un profil d’environ 13 m de hauteur avec de bas en haut (Figure 6a) : un horizon meuble d’argile rouge à jaune (≈6 m) avec des microreliefs d’altération sèches à la lisière de la couche d’argile latéritique (≈5 m); celle-ci est surmontée d’une large couche (≈50 m d’extension latérale) de cuirasse (≈2 m d’épaisseur). Le profil au point 2 (Figure 6b), dont la base est à environ 750 m d’altitude, a une épaisseur d’environ 4 m. Ce profil, laminé dans son ensemble, présente également des microreliefs d’altération secs de diamètre millimétrique à la base et centimétrique au sommet. Le point 3 (Figure 6c), au sein duquel se trouve la source S1, présente un horizon altéré et fissuré (≈2 m) surmonté de microreliefs d’altération qui semblent marquer la transition avec la couche argilo-sableuse (≈1 m) sus-jacente. On y observe des reliques de gneiss (lits clairs et sombres). Contrairement aux points 1 et 2 (Figures 6a et b), les microreliefs d’altération observés au point 3 présentent une circulation d’eau. Ceux-ci semblent correspondre également à des zones de transition entre les altérites meubles fissurées et non fissurées (Figure 6c) et entre les altérites meubles et l’argile latéritique (Figure 6a ).

Figure 6

Manteau d’altération du bassin de l’Olézoa. Profils observés au centre/sud-est (a), à l’est (b), au nord (c) et au sud-ouest (d). 1) Microrelief sec; 2) microrelief avec circulation hydrique; 3) altérites fissurées; 4) lits clairs; 5) couche stratifiée

Weathering mantle of the Olezoa watershed. Studied profiles in the Centre/Southeast (a), East (b), North (c), and Southwest (d). 1) Dry microrelief; 2) microrelief with water flow; 3) fissured alterites; 4) light-coloured beds; 5) stratified layer

Manteau d’altération du bassin de l’Olézoa. Profils observés au centre/sud-est (a), à l’est (b), au nord (c) et au sud-ouest (d). 1) Microrelief sec; 2) microrelief avec circulation hydrique; 3) altérites fissurées; 4) lits clairs; 5) couche stratifiée

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Les éléments structuraux observés sur la roche saine (Figure 7a et b) ont également été observés au point 4 (Figure 5b). Au niveau de cet affleurement, le mur des altérations meubles (≈758 m d’altitude) présente une alternance d’ondulations concaves et convexes (≈30 cm d’amplitude) qui conditionnent les variations centimétriques locales de l’épaisseur de sol, celle-ci étant plus importante au niveau des formes concaves. Cette structure semble donc orienter le profil d’altération à ce point (Figure 6d). Ce profil y est altéré, fissuré et moins épais (≈1,5 m) en amont (Figure 6d1), alors qu’en aval (Figure 6d2) et suivant l’inclinaison de la pente, le front d’altération est surmonté d’une couche laminée (50 cm) et d’une couche d’arène argilo-sableuse à grenue (≈1,50 m). Les couches observées au sein de ce point (Figure 6d2), sont, par endroits, stratifiées et la roche, dans les deux carrières est, par endroits, fissurée.

Figure 7

Éléments tectoniques observés au point 4 (Figure 5b) : a) microfailles avec filon; b) diaclase oxydée de direction N15. Diagrammes directionnels : c) cours d’eau; d) filon; e) diaclase; f) faille conjuguée; g) foliation

Tectonic elements observed at the point 4 (Figure 5b): a) microfaults with vein; b) oxidized joint with a N15 direction. Directional diagrams: c) stream; d) vein; e) joint f) shear fault; g) foliation

Éléments tectoniques observés au point 4 (Figure 5b) : a) microfailles avec filon; b) diaclase oxydée de direction N15. Diagrammes directionnels : c) cours d’eau; d) filon; e) diaclase; f) faille conjuguée; g) foliation

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De manière générale, la structuration verticale du profil d’altération des formations du bassin versant étudié peut donc être définie comme suit :

  • une altération et un cuirassement anciens marqués par des replats morphologiques d'altitude élevée; les points les plus hauts de la zone d’étude correspondent donc à des paléosurfaces d’altération;

  • une érosion fluviatile ayant généré la morphologie subactuelle, notamment la large vallée marécageuse de l’Olézoa, et préservée des replats altérés en tête de bassin. Le réseau hydrographique a incisé (et incise actuellement) profondément la roche saine puisque l’on rencontre des zones de roche saine (horizon fissuré ou roche saine) jusqu’à des altitudes élevées dépassant 770 m (au nord de P1 et dans la carrière de Mvolyé, par exemple);

  • une altération « récente » qui a construit de nouvelles altérites et localement des cuirasses sur cette morphologie récente. Les profils sont donc aussi bien observés sur les surfaces les plus hautes du bassin d’étude que sur les versants.

Le profil d’altération résultant semble s’organiser, du sommet à la base, comme suit (Figure 8) :

  • une couche d’argile latéritique (1 à 5 m’épaisseur) surmontée par une cuirasse alvéolaire (0 à 2 m). Cette cuirasse n’a été observée qu’au centre/sud-est du bassin (Figure 5b); elle arme le replat situé à une altitude d’environ 740-755 m dans cette partie du bassin;

  • la couche d’altérite laminée qui comprend, au sommet, l’allotérite (1 à 6 m d’épaisseur), riche en argile de couleur variée et contenant des microreliefs d’altération et, à la base, l’isaltérite (0,5 à 1 m d’épaisseur) contenant des reliques du gneiss;

  • la couche fissurée (1 à 2 m) qui affecte le gneiss légèrement altéré;

  • le gneiss sain fracturé.

Figure 8

Profil d’altération développé sur les orthogneiss du bassin versant de l’Olézoa

Weathering profile developed on orthogneiss in the Olezoa watershed

Profil d’altération développé sur les orthogneiss du bassin versant de l’Olézoa

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Ces observations montrent que l’on est en présence d’une altération polyphasée marquée par plusieurs cycles d’altération et d’érosion : « biostasies » et « rhexistasies » des « anciens auteurs ». L’altération récente, développée sur le substratum sain, semble générer des profils peu épais (2 à 3 m au maximum) alors que les systèmes latéritiques anciens généreraient, à l’échelle du bassin d’étude, d’épaisses formations superficielles meubles (10 à 20 m au maximum).

4.2 Éléments structuraux

Sur l’ensemble du bassin d’étude, les éléments structuraux les plus évidents qui affectent la roche saine sont les failles, les filons, les diaclases, la foliation et la schistosité (Figure 7a et b). La représentation de ces structures planaires et linéaires en histogramme directionnel (Figure 7d, e, f et g) révèle des directions NNE, NE, ESE, SE, N, ou SE à SSE et ENE. Le cours d’eau Olézoa présente un tracé parfois rectiligne marqué par des zones de confluence à angles droits et des changements brutaux d’orientation. Les principales directions du réseau hydrographique (Figure 7c) sont similaires à celles de la tectonique (diaclases et foliation principalement).

4.3 Caractéristiques hydrodynamiques de l’aquifère altéritique

4.3.1 Lithologie et conductivité hydraulique des produits d’altération

La nature du réservoir altéritique est constituée de sable argilo-graveleux (nord), d’argile gravelo-sableuse (sud-ouest), de sable argileux (sud-est) et d’argile sablo-limoneuse au sud du bassin versant étudié. On observe des variations spatiales et verticales d’argilosité au sein des formations étudiées (Tableau 2).

Tableau 2

Distribution granulométrique et conductivités hydrauliques des produits d’altération du bassin versant de l’Olézoa

Grain size distribution and hydraulic conductivity of weathered products in the Olezoa watershed

Distribution granulométrique et conductivités hydrauliques des produits d’altération du bassin versant de l’Olézoa

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Les conductivités hydrauliques mesurées présentent une distribution spatiale et verticale, en rapport avec la lithologie (Tableau 2). Elles sont comprises entre 4,4∙10‑6 et 9,9∙10‑5 m∙s‑1 pour une moyenne de 4,7∙10‑5 m∙s‑1.

4.3.2 Caractéristiques hydrométriques

À l’exception de la source S9, les sources suivies ont été aménagées par la population à des fins domestiques. La source S1 se trouve sous une cavité souterraine qui indique une érosion. Les eaux émergent entre une arène argilo-sableuse (≈1 m) au toit et un horizon altéré et fissuré sous-jacent (Figure 6c). Des blocs de roche saine affleurent à environ trois mètres du point d’émergence des eaux. L’environnement topographique de la source S2 correspond à un fossé. La partie avale de ce fossé, au sein de laquelle les eaux émergent sous une faible couche d’altérite, présente un caractère marécageux. Quant à la source S9, son environnement est marqué par une zone marécageuse. Les eaux émergent sous une arène argilo-sableuse (≈50 cm). Les mesures de débit sont effectuées en aval des zones d’émergence afin de collecter l’intégralité du débit.

Les valeurs moyennes des débits des sources S1, S2 et S9 sont respectivement 0,3 ± 0,17 L∙s‑1, 0,1 ± 0,01 L∙s‑1 et 0,1 ± 0,04 L∙s‑1 (Figure 9a). Les débits varient entre 0,15 L∙s‑1 (S2) et 0,65 L∙s‑1 (S1) pendant la période de crue contre 0,07 L∙s‑1 (S9) à 0,13 L∙s‑1 (S2) pour la période d’étiage. Les hydrogrammes correspondant à ces trois sources présentent des formes variées. Celles des sources S1 et S9 présentent une allure à double dôme correspondant aux deux périodes pluviométriques (Figure 9a). Les dômes de la source S1, avec une forte amplitude, présentent un déphasage d’environ 1 mois alors que ceux de la source S9, de faible amplitude, ne sont pas significativement déphasés par rapport aux apports pluviométriques (Figure 9a). La source S2 apparaît globalement peu sensible aux apports pluviométriques. Les coefficients de tarissement de ces trois sources sont α1 = 0,016 j‑1, α2 = 0,001 j‑1 et α9 = 0,007 j‑1 respectivement pour S1, S2 et S9 (Figure 9b). Les valeurs du coefficient de variation du débit de chaque source sont respectivement 15,6 %, 3,6 % et 4,1 %. La distribution de ces différents coefficients pour ces exutoires de nappe montre des comportements distincts d’une source à l’autre.

Figure 9

Hydrogrammes (a) et courbes de tarissement (b) de trois sources du bassin de l’Olézoa (2006-2007)

Hydrographs (a) and recession curves (b) of three springs in the Olezoa watershed (2006-2007)

Hydrogrammes (a) et courbes de tarissement (b) de trois sources du bassin de l’Olézoa (2006-2007)

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4.3.3 Caractéristiques piézométriques

La carte piézométrique, établie pour la période de basses eaux (décembre-mars), présente la même morphologie piézométrique que celle de la période de hautes eaux (Figure 10). Ces cartes ne font pas apparaître une hausse importante de la piézométrie à l’exception des secteurs nord (P1) et Sud (P27) où la surface piézométrique fluctue d’environ 2 m, ce qui reste faible en valeur absolue. Ces secteurs correspondent à des zones hautes (P1) ou, tout comme la zone couverte par S8, P23 et P24, à des zones proches d’un cours d’eau. Les secteurs nord (P1, P3) et sud-est (P24), avec des gradients hydrauliques importants (0,20) par rapport aux autres secteurs du bassin (0,08 à 0,10), pourraient indiquer des zones de plus faible perméabilité; vu la faible densité de points de mesure et l’influence de la topographie, il convient néanmoins de rester prudent sur cette interprétation. Les directions des écoulements souterrains sont conformes à la topographie soit NNE, N-S, E-O et ESE à SE. Les points hauts et bas sont respectivement observés au nord et au sud du bassin. Le premier pôle apparaît au même endroit que le dôme topographique. Le second se trouve dans la zone à potentiel imposé par le cours et le bas-fond où certains puits présentent des variations piézométriques très atténuées. Dans cette zone, les ravines, constituées d’étangs et de zones hydromorphes, sont humides toute l’année (Figure 10b). Dans l’ensemble du bassin, trois grandes profondeurs de niveaux piézométriques sont observées (Figure 11) : i) la profondeur comprise entre 0 à 2 m, ii) la profondeur comprise entre 2 et 4 m et iii) la profondeur au-delà de 4 m. Les altitudes et les profondeurs moyennes des puits, correspondant à ces tranches de profondeurs, sont respectivement 720,5 m et 2,2 m, 736 m et 4,4 m et 731,3 et 7,6 m, ce qui suggère bien que les puits de basse altitude, situés dans les bas-fonds, près du potentiel imposé que constituent les cours d’eau, montrent des niveaux piézométriques proches de la surface du sol. On y est donc dans des secteurs d’émergence de la nappe qui alimente les cours d’eau. Il n’existe pas une zonalité dans la distribution des niveaux piézométriques et des profondeurs des puits, néanmoins, les profondeurs des puits sont, par endroits, corrélées avec la topographie (les puits les plus profonds sont en général au sommet ou flanc de relief).

Figure 10

Cartes piézométriques : a) décrue; b) crue

Piezometrics maps: a) fall period; b) flood period

Cartes piézométriques : a) décrue; b) crue

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Figure 11

Limnigrammes piézométriques (2006-2007) par tranche de niveaux statiques : a) 0-2 m ; b) 2-4 m ; c) >4 m

Piezometric fluctuations (2006-2007) based on static range levels: a) 0-2 m; b) 2-4 m c) >4 m

Limnigrammes piézométriques (2006-2007) par tranche de niveaux statiques : a) 0-2 m ; b) 2-4 m ; c) >4 m

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Les courbes d’évolution temporelle de la piézométrie ne sont pas confondues. Leur allure permet de distinguer, indépendamment de ces tranches de profondeur, des puits présentant un comportement double (de type bimodal) comme les sources, et d’autres où ces variations sont plus lissées. Les amplitudes de fluctuation piézométrique varient entre 0,1 et 2,4 m, soit une amplitude moyenne de 0,6 ± 0,7 m pour l’ensemble du bassin (Tableau 1). Ces variations d’amplitude semblent être liées à la distribution hétérogène de la perméabilité, qui est en rapport avec la variation d’argilosité et la répartition du gradient hydraulique (Tableau 2 et Figure 10). De manière générale, les amplitudes piézométriques sont majoritairement obtenues entre 0 et 0,5 m et la profondeur des puits/épaisseur de la zone non saturée qui caractérise cette tranche d’amplitude est de 2 m (Tableau 1). Ceci montre que la profondeur du puits et l’épaisseur de la zone non saturée n’ont pas une influence directe sur les fluctuations piézométriques. Ces dernières semblent donc être influencées par les propriétés physiques et hydrauliques des formations (granulométrie, porosité et perméabilité) et, le cas échéant, la distance au potentiel imposé le plus proche.

L’épaisseur de la zone non saturée présente une hétérogénéité spatiale. Elle est de 10 m sous le sommet, entre 3 et 6 m sous les mi-versants et entre 0,1 et 2,2 m dans la zone de vallée où la vidange de la nappe est de l’ordre de 0,06 m∙mois‑1 contre 0,1 à 0,39 m∙mois‑1 pour les zones de mi-versant ou de sommet (Figure 5 et Tableau 1). Cette distribution de la vidange est à corréler avec le modelé du relief et la présence des « potentiels imposés » que constituent les zones de vidange de la nappe des bas-fonds (Figures 5, 10 et 11).

5. Discussion

Les formations d’altération du socle de Yaoundé n’ont pas fait, à ce jour, l’objet d’une cartographie géologique. Toutefois, les séquences d’altération du socle du bassin étudié reflètent les caractères morphostructuraux et minéralogiques observés dans le bassin du Nyong (BITOM et al., 2004). En effet, le profil d’altération développé au sein des ensembles migmatitiques de Yaoundé (EKODECK, 1984, NDJIGUI et al., 2013, YONGUE-FOUATEU, 1986) est identique à celui des formations orthodérivées présenté dans le cadre de ce travail. Ce dernier indique une alternance de phases d’altération et d’érosion contrôlées tectoniquement (TAYLOR et HOWARD, 1999). Des différences d’épaisseur observées et le caractère stratiforme des couches en fonction de la topographie sont en rapport avec les traits morphologiques et pédologiques décrits par ONGUENE MALA (1993) dans l’unité de paysage intermédiaire de Minkoaméyos (sud-est de Yaoundé).

Ces traits morphopédologiques indiquent un modèle polyphasé assimilable à celui décrit par DEWANDEL et al. (2006) dans les formations granito-gneissiques de l’Inde. Les cuirasses ferrugineuses identifiées seulement au centre du bassin (740-760 m), ont également été observées par YONGUE-FOUATEU (1986) à 740 m d’altitude au sud de Yaoundé (Ekoundou), à 760 m et 780 m respectivement à Etoundi et Mfandena, localités situées au nord de Yaoundé. Ces différents replats régionaux sont la conséquence de successions de phases d'altération et d'érosion (biostasies et rhexistasies). Ces observations morphopédologiques montrent que l’on est en présence d’une double altération : une altération ancienne, épaisse (10-20 m au moins) à l’échelle du bassin, issue du démantèlement de vieux systèmes latéritiques; une altération récente, peu épaisse (2-3 m maximum) développée sur le substratum sain.

La présence de microreliefs d’altération met en évidence des spécificités des sols de Yaoundé. Ces microreliefs observés au sein du bassin étudié sont assimilés à des formes karstiques décrites par VICAT et al. (2002), dans la région de Yaoundé. Ces formes sont respectivement caractérisées par la rareté ou l’absence de produit d’altération au niveau de ces pseudo karst et la présence d’une circulation hydrique qui peut expliquer le départ des matériaux les plus fins.

Les caractéristiques hydrométriques et piézométriques obtenues dans le cadre de ce travail sont similaires à celles généralement observées au sein de la majorité des nappes d’altérites des formations de socle, sous-climat tropical humide (CHILTON et FOSTER, 1995; LELONG et LEMOINE, 1968; MAYO et al., 2003; TAYLOR et HOWARD, 1999; WENG et LACHASSAGNE, 2000). Ces caractéristiques indiquent un contrôle de la fracturation ancienne sur l’orientation du réseau hydrographique (MPESSE, 1999; MVONDO et al., 2007; NZENTI et al., 1998). Elles indiquent également que le modelé du paysage dudit bassin est induit par le réseau hydrographique (BITOM et al., 2004). Ensuite, les écoulements souterrains se calquent sur cette morphologie, avec des écoulements des points hauts vers les points bas. Le régime de ces écoulements souterrains est lié à l’inertie et/ou au caractère continu/discontinu du réservoir aquifère (CHILTON et FOSTER, 1995; EL GASMI et al., 2013). D’après EL GASMI et al. (2013), les fluctuations ainsi que les vitesses de tarissement au sein des aquifères continus sont faibles. Ceci indique un emmagasinement et une inertie importante de l’aquifère présentant une bonne aptitude à stocker les réserves (DESPREZ, 1980; KHOUMÉRI et al., 2008). Ce caractère inertiel est plus important au sein des bas-fonds, avec des « aquifères marécageux » dont le comportement est conditionné par les zones à potentiel imposé, liées à la cote du cours d’eau. Néanmoins, il ne faut pas surestimer l’importance de ces aquifères de bas-fond. En effet, MARÉCHAL et al. (2011), travaillant sur les processus hydrologiques du bassin de Nsimi, sous-bassin du Nyong (Sud Cameroun), soulignent que les aquifères marécageux contribuent à raison de 4 % à l’écoulement total contre 65 % pour les aquifères de mi-pente. Les zones de bas-fonds constituent donc des zones d’émergence de la nappe des versants et leur inertie apparente est seulement due au potentiel imposé.

D’après MAYO et al. (2003), les recharge et décharge saisonnières dans les zones moins inertes sont plus apparentes. Un décalage peut être observé entre les impulsions pluviométriques (pluie efficace) et la réponse de la nappe. Ce décalage dans les altérites de l’Olézoa est moins important que celui obtenu dans les altérites du Malawi (2-3 mois), développées dans les mêmes environnements climatiques et géologiques (CHILTON et FOSTER, 1995; TAYOR et HOWARD, 1999). Ce déphasage est lié à un drainage retardé entre les zones de recharge et de drainage (MAYO et al., 2003) et à l’évapotranspiration d’une partie de la pluie, donc au degré d’humidité du sol pendant les périodes précédant les phases pluvieuses (OWOR et al., 2009). Au sein des aquifères discontinus ou fortement hétérogènes, les courbes d'évolution piézométriques des puits ne sont pas confondues (LABADI et ACHOUR, 2011) et les coefficients de variation, de tarissement ainsi que les débits des sources sont importants (GILLI et al., 2008; SCHOELLER 1967; TOKUNAGA, 1999). Cependant, le colmatage ou le remplissage des fissures par des particules argileuses (KAMGANG BEYALA et EKODECK, 1991) peut entraîner une variation du débit des sources (GRILLOT, 1992; LABADI et ACHOUR, 2011) engendrant une multitude de formes. D’après DEWANDEL et al. (2003), la multiplicité de formes indique un changement spatial et local des propriétés physiques et hydrauliques de l’aquifère. Les variabilités spatiales et verticales d’argilosité et des conductivités hydrauliques observées au sein des formations étudiées semblent donc influencer la recharge et les fluctuations piézométriques (GLEESON et MANNING, 2008; CHILTON et SMITH-CARINGTON, 1984). Elles peuvent également indiquer des conditions d’aquifères confinés à semi-confinés, observées au Malawi, en Ouganda et au Zimbabwé (TAYLOR et HOWARD, 2000). Par ailleurs, la distribution des vitesses de descente de la nappe (β/B = ln (ho/h)/t) montre, par endroits, des croissances locales (P4 et P5). Cela indique que la décharge de la nappe n’est pas directement fonction de la topographie, mais des propriétés des terrains dominants en amont du puits (Tableau 1). D’après TISON (1956), les zones à forte perméabilité ont des vitesses de descente plus grandes que celles des zones moins perméables, même situées plus en amont.

6. Conclusion

Le travail réalisé dans le cadre de cette étude a permis de proposer une image des caractéristiques hydrogéologiques des formations d’altération de la ville de Yaoundé. Le profil d’altération développé dans les formations orthodérivées du bassin de l’Olézoa présente une structuration verticale similaire à celles des formations granito-gneissiques de Yaoundé et d’ailleurs dans le monde (Inde, France, autres pays d’Afrique). Les données actuelles semblent indiquer une altération ancienne issue du démantèlement de vieux systèmes latéritiques d’une part et, d’autre part, un modèle d’altération polyphasé, avec des altérites relativement récentes développées sur une morphologie présentant un relief significatif. Les microreliefs d’altération observés au sein de la partie altérée peuvent avoir une influence locale sur l’hydrodynamisme des nappes d’altérites. Les caractéristiques hydrodynamiques obtenues dans le cadre de ce travail procèdent, principalement, de la précipitation efficace, du modelé du relief et des propriétés physiques et hydrauliques des terrains. Celles-ci mettent en évidence l'effet de plusieurs formes d’hétérogénéités au sein de l’aquifère. Ce travail nécessite d’associer, dans le cadre de recherches futures, le volet chimique afin de mieux cerner le fonctionnement hydrogéologique du bassin versant de l’Olézoa, situé au sud du Cameroun.