Abstracts
Résumé
Zola, on le sait, réprouve une imagination livrée à elle-même. Une remarque polémique parue dans la presse en 1866 sert de point de départ à une réflexion sur le statut de cette faculté dans la tradition réaliste. Le discrédit zolien radicalise l’opposition entre les usages déréglés de la fiction et les enjeux épistémologiques d’une littérature concernée par le réel. La question est alors d’actualité si l’on en juge par les contrepoints apportés par Balzac, Hugo, Baudelaire, Flaubert, moins réticents sur le principe d’une contribution active de l’imagination au sein même du projet réaliste. Zola précisera sa poétique dans Le roman expérimental (1879). On retient l’idée d’une « déchéance de l’imagination » mais deux nuances essentielles tempèrent ce postulat naturaliste : traquée au sein de l’inventio, l’imagination est recyclée dans la dispositio et l’elocutio ; elle est ensuite hypostasiée dans ce que Zola appelle « le sens du réel », avatar du réalisme tempéramentiel, d’origine romantique, défendu dans Mes haines. En définitive, la position de Zola, quand on la contextualise, qu’on la compare et qu’on la relativise, n’est pas si éloignée d’autres revendications en faveur du réalisme artistique.
Abstract
As one knows, Zola disapproved of imagination left unto itself. The starting point of our reflection on the status of imagination in the realist tradition is a polemical remark that Zola wrote in a newspaper in 1866. The disfavour of the imagination that Zola expresses toughens the opposition between the unchecked use of fiction and the epistemological issues raised by a literature concerned with the real. This question was quite topical at the time, as one can see from the counter-arguments made by Balzac, Hugo, Baudelaire, and Flaubert, who were less reluctant to recognize the active role of imagination within the realist project. Zola is more specific about his poetics in Le roman expérimental (1879). Accordingly, one must pay attention to the idea of the “decline of the imagination” (déchéance de l’imagination), but also to two important nuances, whose role is to moderate this realist postulate: tracked down within the notion of invention, imagination is recycled in disposition and elocution and eventually reified through what Zola terms “the sense of the real” (le sens du réel), an aftermath of the “réalisme tempéramentiel,” of Romantic origin, that he supported in Mes haines. All in all, Zola’s position, properly contextualized, compared and put into perspective, is not as remote as one would think from other claims to artistic realism.