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Une nouvelle chronique ?
C’est avec bonheur que j’inaugure cette nouvelle chronique consacrée aux Aspects politiques de l’éducation avec le présent texte. Mais que faut-il comprendre par « aspects politiques » ? En fait, les « aspects politiques » rassemblent toutes les questions qui concernent l’État ou la vie politique, autrement dit celles qui font intervenir les pouvoirs publics, qui interpellent le public.
À travers cette chronique, les chercheuses et chercheurs, actrices et acteurs sont invités à soumettre des textes portant sur les changements, débats et controverses en éducation, principalement au Québec, mais pas uniquement. Ils sont aussi invités à présenter des textes abordant d’autres dimensions politiques de l’éducation, comme le leadership, l’appréciation ou l’image du gouvernement, du ministre de l’Éducation, du ministère de l’Éducation. Des textes explorant des questions relatives à la démocratie scolaire, à la place des groupes de pression en éducation, à des enjeux électoraux liés à l’éducation et même à l’éducation proprement politique et citoyenne assumée par l’école sont aussi les bienvenus. Bref, cette chronique explore l’interface éducation ET politique.
Olivier Lemieux, Ph.D.
Responsable de la chronique
« Aspects politiques de l’éducation »
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La Coalition avenir Québec et l’éducation : bilan de mi-mandat
Déjà le mi-mandat ?
Rappelons d’emblée qu’en octobre 2022, la CAQ obtenait un deuxième mandat majoritaire. Parmi ses 150 engagements électoraux, 22 portaient sur l’éducation, ce qui en fait l’un des cinq domaines de politique publique pour lesquels la CAQ a formulé le plus d’engagements (Polimètre, 2024).
En janvier 2023, quelques mois après son investiture à la tête du ministère, Bernard Drainville énonçait son « plan de match » pour l’éducation, lequel s’articulait en sept priorités :
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mettre en place des solutions pour freiner le déclin du français écrit ;
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rétablir une voie rapide vers le brevet d’enseignement ;
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offrir des aides à la classe aux enseignants ;
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offrir davantage de projets pédagogiques particuliers au secondaire ;
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investir dans la formation professionnelle et la rendre plus attrayante ;
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rendre le réseau de l’éducation plus performant en améliorant l’accès aux données ;
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rénover et construire des écoles (Cabinet du ministre de l’Éducation, 2023).
Qu’en est-il, donc, de ces engagements électoraux et de ces priorités en cette période de mi-mandat ?
Connaissez-vous le Polimètre ?
Le Polimètre (2024) est une initiative développée par des politologues rattachés principalement à l’Université Laval qui permet de vérifier, en temps réel, si les partis au pouvoir respectent leurs engagements électoraux. Nous avons donc pris la liberté d’associer les priorités du ministre selon les engagements électoraux du parti. Nous avons raccourci les libellés de certains engagements, dont les détails sont accessibles sur le site web du Polimètre (2024).
Visiblement, à peine quelques mois après sa réélection, la CAQ a déjà changé ou adapté plusieurs de ses priorités en éducation, potentiellement en raison du changement de garde entre les ministres Roberge et Drainville. Parmi les sept chantiers, quatre font l’objet de plusieurs engagements électoraux : le ministre Drainville continue de prioriser le français écrit, la formation professionnelle, l’accès aux données et les rénovations et constructions d’écoles. Cependant, les chantiers 2, 3 et 4 – rétablir une voie rapide vers le brevet d’enseignement, offrir davantage de projets pédagogiques particuliers au secondaire et fournir des aides à la classe – ne font l’objet d’aucun engagement initial, tandis que quatre engagements ne sont liés à aucun chantier.
En guise de conclusion
Bref, force est de constater que l’alignement entre les engagements électoraux et les chantiers souffre dans plusieurs cas d’incohérence. Qui plus est, deux des éléments les plus critiqués et contestés des politiques du ministre Drainville, à savoir la création de voies rapides de formation conduisant au brevet d’enseignement et la multiplication des projets particuliers au secondaire, paraissent parachutés. Il est alarmant que la population n’ait pas pu s’exprimer au préalable par voie de suffrage à l’égard de tels chantiers qui ont en filigrane une déprofessionnalisation de l’enseignement et une négation de l’école à trois vitesses (Delobbe, Sirois et Lemieux, 2024).
Appendices
Bibliographie
- Cabinet du ministre de l’Éducation. (2023). « Éducation et réussite de nos jeunes : le gouvernement présente ses priorités ». Cision. https://www.newswire.ca/fr/news-releases/education-et-reussite-de-nos-jeunes-le-gouvernement-presente-ses-priorites-887670747.html (page consultée le 9 mai 2024).
- Delobbe, A. -M., Sirois, G. et Lemieux, O. (2024). La gestion des ressources humaines en éducation : regard sur l’évolution récente de la profession enseignante. Dans O. Lemieux et F. Deschenaux, dir. Le système scolaire en douze regards. Québec, Québec : Presses de l’Université du Québec.
- Polimètre. (2024). « Polimètre Legault ». https://www.polimetre.org/fr/legault?gb=category&sb=progress_desc&t[]=32 (page consultée le 9 mai 2024).