Note d’opinion

La Nouvelle donne économique et Management International : l’économie numérique et l’émergence de l’Asie[Record]

  • Pascal Gaudron and
  • Aziz Mouline

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  • Pascal Gaudron
    HEC Montréal

  • Aziz Mouline
    Université de Rennes 1

Dans un récent numéro de Management International, F. Leroux notait : « il est sur que nous ne faisons pas face à un simple épisode de ralentissement conjoncturel, comme nous en avons connu régulièrement, mais que nous sommes en face d’un mouvement profond, qui va durer, et qui marque la fin d’une période et qui appelle de profondes mutations ». Il abordait ainsi la crise économique contemporaine qui se développait suite à la crise financière de 2007. Au-delà des profondes mutations évoquées par l’auteur, nous pouvons nous demander si cette crise économique, qui est la traduction de la fin de la forme d’un modèle de croissance des pays développés, n’accentue pas d’une part les modifications en cours et, d’autre part, ne redessine pas les frontières des nouveaux rapports de force internationaux au profit des pays émergents. Nous illustrerons nos propos à partir de l’examen de l’économie numérique, dont la contribution à la croissance économique mondiale est de plus en plus élevée, et l’émergence des firmes d’une zone en pleine évolution : l’Asie. « Le temps long du monde » démontre qu’une lecture européenne et même occidentale de la géohistoire de la mondialisation est une erreur. Si durant certaines phases de notre géohistoire des pays ou des zones dominent, des remises en causes sont inévitables et l’émergence (ou le retour) de zones « oubliées ou en sommeil » doit être prise en compte. En 2008, le PIB des pays dits émergents, calculé en parité du pouvoir d’achat a dépassé la moitié du PIB mondial. Ces pays émergents contribuent à plus de 80 % de la croissance mondiale, 35 % des importations et 40 % des exportations mondiales. Si les pays du G7 représentaient à eux seuls 64 % du PIB mondial en 1975, ils n’en assurent plus que 42 % en 2010. Ce constat n’est pas un fait nouveau puisque depuis 2004, les pays émergents sont à l’origine de 65 % de croissance de la production mondiale. On assiste bien à un basculement de la richesse mondiale comme le montre un récent rapport de l’OCDE . Ces mêmes pays émergents ont accumulé des excédents records de la balance des paiements courants et détiennent aujourd’hui les trois quart des réserves extérieures mondiales. La situation est toutefois complexe car l’accumulation d’excédents de la balance des paiements courants par les pays émergents ne les empêche pas d’être importateurs nets de capitaux privés en provenance des pays industrialisés. Dans le cadre de l’interdépendance économique, les pays émergents influents positivement et négativement l’économie des pays développés. Les « plus » sont à retenir du côté des exportations des pays de l’OCDE, des importations pour exporter (décomposition internationale des processus productifs), de la consommation nationale (effet prix). Les « moins » se situent du côté de la délocalisation des firmes des pays développés, des importations réalisées au détriment des secteurs des pays développés et de l’emploi. Ainsi, les acteurs du jeu mondial en cours sont connus et ce jeu n’est pas forcément coopératif. Les stratégies se dessinent et se précisent. Le modèle bicéphale de la croissance mondiale est remis en cause, c’est-à-dire des pays offrant de la main d’oeuvre abondante et à bas coût, attirant les investissements du nord (délocalisations), et des pays occidentaux bénéficiant des prix bas pour leur consommation. De nouveaux terrains d’affrontement se développent dans l’automobile, l’aéronautique, la chimie, l’économie numérique avec l’émergence de nouveaux concurrents. Parmi les pays émergents, comment ne pas s’attarder sur un pays comme la Chine, devenue en 2011, la deuxième puissance mondiale devant le Japon ? La Chine est actuellement le premier exportateur mondial (10 % des exportations mondiales), …

Appendices