
Perspectives interdisciplinaires sur le travail et la santé
Volume 23, Number 1, 2021 Le retour au travail après une lésion professionnelle pour les travailleuses et travailleurs en situation de précarité
Table of contents (8 articles)
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Retour au travail après une lésion professionnelle : étude de cas sur les effets du droit sur l’expérience des justiciables
Katherine Lippel and Camille Lanthier-Riopel
AbstractFR:
Cet article, qui présente des résultats d’une étude québécoise sur le retour au travail après une lésion professionnelle subie par des personnes occupant un emploi précaire ou mobile, met en évidence certains effets inattendus des règles de droit et des incitatifs économiques y associés sur le processus de retour au travail. Il analyse les enjeux juridiques qui sous-tendent trois études de cas tirées d’une étude exploratoire comprenant des entrevues avec 11 victimes de lésions professionnelles et 18 informatrices et informateurs clés. Les résultats, basés sur une analyse en profondeur des mécanismes par lesquels le cadre juridique régissant la santé et la sécurité du travail (indemnisation et prévention) et le droit à l’égalité déterminent l’expérience rapportée par deux travailleurs d’agence de travail temporaire et une professionnelle de la santé engagée dans un travail de type « fly-in/fly-out », permettent d’identifier les mécanismes de production de résultats défaillants dans le processus de réadaptation professionnelle. L’étude découvre des conséquences inattendues de certaines règles sur l’expérience des trois victimes de lésion professionnelle et suggère des moyens pour réduire certaines pratiques sous-optimales en tenant mieux compte de l’environnement juridique dans lequel le processus de réadaptation se déroule, afin de rendre effectives les normes visant la prévention des incapacités au travail.
EN:
This article reports on findings drawn from a Quebec study investigating the experiences of precariously employed or mobile workers who attempt to return to work after a work injury. It illustrates the unexpected effects of legal regulations and their associated economic incentives on the return-to-work process. Analyzing the legal context of three case studies drawn from interviews with 11 injured workers and 18 key informants, the study examines the ways in which the regulatory framework may shape the claimants’ experiences. It first provides a detailed account of the return-to-work experiences of three workers: a fly-in, fly-out health care worker and two employees of temporary employment agencies. It then provides an in-depth examination of the mechanisms by which specific parameters of the regulatory framework that governs workers’ compensation, occupational health and safety, and the right to equality shape events leading to less than satisfactory outcomes in disability prevention. The study shows that the experiences of the three injured workers were shaped by regulatory issues that had unforeseen consequences. Avenues are suggested to improve the regulatory effectiveness of laws designed to prevent work disability.
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« Je comprends pas pourquoi on est obligé de se battre de même » : quand le processus judiciarisé de réparation des lésions professionnelles induit la précarité
Maxine Visotzky-Charlebois
AbstractFR:
La communication propose de présenter certains résultats issus d’une recherche qui porte sur les coûts humains et financiers de la justice incombant aux personnes accidentées ou malades du travail. Les résultats ici présentés découlent d’une étude de terrain de nature qualitative qui a débuté en septembre 2018. Trois éléments qui découlent du processus judiciarisé seront discutés à la lumière des coûts de la justice : la médicalisation du processus, les délais ainsi que la complexité du processus et du droit en cause. Ces éléments sont susceptibles d’influer sur les coûts engagés par les travailleur-euses et poseront des défis particuliers notamment en ce qui concerne la quête à l’expert-e et de l’accès à la représentation experte. Nous terminerons par une discussion visant à mettre en lumière de quelle façon le processus judiciarisé en lui-même peut engendrer de la précarité, alors que ce processus peut se concevoir comme une couche de vulnérabilité supplémentaire.
EN:
This paper discusses the results of a study that focuses on the human and financial costs of justice for those who are injured at or made ill by work. The results presented here are based on a qualitative field study which began in September 2018. Three elements that arose from the appeal process are discussed in light of the tangible and intangible costs of justice: the medicalization of the process and the delays and complexity of the judicial process. These elements are likely to influence the costs incurred by injured workers and pose specific challenges, particularly in terms of the quest for a medical expert and access to expert legal support. We end this paper with a discussion that highlights how the appeal process itself can be conceived as an additional layer of vulnerability that ultimately creates a form of precariousness.
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Le retour au travail dans un contexte de barrières linguistiques : Une étude comparative des politiques et des pratiques d’indemnisation des victimes de lésion professionnelle au Québec et en Ontario
Stephanie Premji, Momtaz Begum, Alex Medley, Ellen MacEachen, Daniel Côté and Ron Saunders
AbstractFR:
La façon dont les régimes d’indemnisation des victimes de lésion professionnelle doivent tenir compte des barrières linguistiques est d’une importance capitale à la lumière de la diversification linguistique croissante du Canada. S’appuyant sur des entrevues menées auprès de travailleurs accidentés et d’informateurs clés, cette étude est la première à examiner, de manière empirique, les politiques et les pratiques du retour au travail sous l’angle des barrières linguistiques. En comparant les juridictions du Québec et de l’Ontario, l’étude met en lumière des similitudes et des différences touchant les accommodements linguistiques ainsi que les politiques et les pratiques du retour au travail qui déterminent les expériences des travailleurs accidentés ayant des besoins linguistiques. Elle fait valoir que les lacunes à cet égard, qui sont plus marquées au Québec, contribuent à un faible retour au travail pour ces travailleurs dans les deux provinces.
EN:
The question of how workers’ compensation systems should account for language barriers is of increasing importance given Canada’s growing linguistic diversity. This study is the first to empirically examine, based on interviews with injured workers and key informants, return-to-work policies and practices through the lens of language barriers. By comparing two jurisdictions, Quebec and Ontario, the study highlights similarities and differences in language accommodation and return-to-work policies and practices that shape the experiences of injured workers with language needs. It argues that gaps in this regard, which are more pronounced in Quebec, contribute to poor return-to-work outcomes for these workers in both provinces.
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Return-to-Work in a Language Barrier Context : Comparing Quebec’s and Ontario’s Workers’ Compensation Policies and Practices
Stephanie Premji, Momtaz Begum, Alex Medley, Ellen MacEachen, Daniel Côté and Ron Saunders
AbstractEN:
The question of how workers’ compensation systems should account for language barriers is of increasing importance given Canada’s growing linguistic diversity. This study is the first to empirically examine, based on interviews with injured workers and key informants, return-to-work policies and practices through the lens of language barriers. By comparing two jurisdictions, Quebec and Ontario, the study highlights similarities and differences in language accommodation and return-to-work policies and practices that shape the experiences of injured workers with language needs. It argues that gaps in this regard, which are more pronounced in Quebec, contribute to poor return-to-work outcomes for these workers in both provinces.
FR:
La façon dont les régimes d’indemnisation des victimes de lésion professionnelle doivent tenir compte des barrières linguistiques est d’une importance capitale à la lumière de la diversification linguistique croissante du Canada. S’appuyant sur des entrevues menées auprès de travailleurs accidentés et d’informateurs clés, cette étude est la première à examiner, de manière empirique, les politiques et les pratiques du retour au travail sous l’angle des barrières linguistiques. En comparant les juridictions du Québec et de l’Ontario, l’étude met en lumière des similitudes et des différences touchant les accommodements linguistiques ainsi que les politiques et les pratiques du retour au travail qui déterminent les expériences des travailleurs accidentés ayant des besoins linguistiques. Elle fait valoir que les lacunes à cet égard, qui sont plus marquées au Québec, contribuent à un faible retour au travail pour ces travailleurs dans les deux provinces.
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L’indemnisation des travailleurs précaires en Ontario : résistance des employeurs et droit de parole limité pour les victimes de lésions professionnelles
Ellen MacEachen, Sonja Senthanar and Katherine Lippel
AbstractFR:
Les politiques et pratiques concernant l’indemnisation des victimes de lésions professionnelles n’ont pas suivi le rythme des besoins changeants des travailleurs et employeurs résultant de la croissance de l’emploi précaire. Dans cette étude, nous avons cherché à savoir si les politiques concernant l’indemnisation et le retour au travail répondaient aux besoins des travailleurs ontariens qui occupent un emploi précaire. Une analyse critique du discours a guidé l’étude, qui a consisté en entrevues en profondeur menées auprès de quinze travailleurs occupant un emploi précaire et de cinq employeurs qui ont embauché et dirigé ce genre de travailleurs. Nous avons identifié trois domaines pour lesquels les politiques de retour au travail ne sont pas en adéquation avec les besoins des travailleurs précaires. Il s’agit de l’écart en matière de connaissances et de pouvoir entre les employeurs bien informés et les travailleurs vulnérables, des défis liés à l’attribution des blessures et de la crainte des travailleurs à parler ouvertement de leurs accidents de travail. Les résultats de cette étude indiquent que les politiques d’indemnisation et de retour au travail ne sont pas en adéquation avec les besoins des travailleurs occupant un emploi précaire. En particulier, nous avons observé qu’il était difficile pour eux de faire une demande d’indemnisation quand les employeurs montraient une certaine résistance en cours de processus.
EN:
The policies and practices of workers’ compensation have barely kept pace with the changing worker and employer needs created by the growth of precarious forms of employment. This study focused on how well workers’ compensation and RTW policies in Ontario fit the needs of precariously employed workers. A critical discourse analysis guided our study which consisted of in-depth interviews with 15 precariously-employed workers and 5 employers who had hired and managed these kinds of workers. Three domains where RTW policies fit uneasily with the experiences of precariously-employed workers were identified. These related to knowledge and power contrasts between well-informed employers and vulnerable workers, injury attribution challenges, and worker fear of speaking up about accidents. This study suggests that workers’ compensation and RTW policies rest uneasily with the circumstances of precariously-employed workers. In particular, it was difficult for workers to engage with/make a claim for workers’ compensation when employers resisted this process.
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Workers’ compensation claims for precariously employed workers in Ontario: employer resistance and workers’ limited voice
Ellen MacEachen, Sonja Senthanar and Katherine Lippel
AbstractEN:
The policies and practices of workers’ compensation have barely kept pace with the changing worker and employer needs created by the growth of precarious forms of employment. This study focused on how well workers’ compensation and RTW policies in Ontario fit the needs of precariously employed workers. A critical discourse analysis guided our study which consisted of in-depth interviews with 15 precariously-employed workers and 5 employers who had hired and managed these kinds of workers. Three domains where RTW policies fit uneasily with the experiences of precariously-employed workers were identified. These related to knowledge and power contrasts between well-informed employers and vulnerable workers, injury attribution challenges, and worker fear of speaking up about accidents. This study suggests that workers’ compensation and RTW policies rest uneasily with the circumstances of precariously-employed workers. In particular, it was difficult for workers to engage with/make a claim for workers’ compensation when employers resisted this process.
FR:
Les politiques et pratiques concernant l’indemnisation des victimes de lésions professionnelles n’ont pas suivi le rythme des besoins changeants des travailleurs et employeurs résultant de la croissance de l’emploi précaire. Dans cette étude, nous avons cherché à savoir si les politiques concernant l’indemnisation et le retour au travail répondaient aux besoins des travailleurs ontariens qui occupent un emploi précaire. Une analyse critique du discours a guidé l’étude, qui a consisté en entrevues en profondeur menées auprès de quinze travailleurs occupant un emploi précaire et de cinq employeurs qui ont embauché et dirigé ce genre de travailleurs. Nous avons identifié trois domaines pour lesquels les politiques de retour au travail ne sont pas en adéquation avec les besoins des travailleurs précaires. Il s’agit de l’écart en matière de connaissances et de pouvoir entre les employeurs bien informés et les travailleurs vulnérables, des défis liés à l’attribution des blessures et de la crainte des travailleurs à parler ouvertement de leurs accidents de travail. Les résultats de cette étude indiquent que les politiques d’indemnisation et de retour au travail ne sont pas en adéquation avec les besoins des travailleurs occupant un emploi précaire. En particulier, nous avons observé qu’il était difficile pour eux de faire une demande d’indemnisation quand les employeurs montraient une certaine résistance en cours de processus.