Voici le 15e livre de la collection « Les régions du Québec » qui a pour but de rédiger une synthèse historique pour chacune des régions, dans le cadre du Chantier des histoires régionales de l’INRS-Urbanisation, Culture et Société. L’Histoire des Îles-de-la-Madeleine aborde les mêmes thèmes que les ouvrages d’histoires régionales parus à ce jour : la géographie, la démographie, l’économie, la politique, l’organisation sociale, la culture, les loisirs, les institutions, la vie religieuse et l’identité régionale. Le fait de traiter les mêmes thématiques permet d’effectuer des analyses comparatives en histoire du Québec. À cet égard, c’est un outil utile et unique pour une meilleure saisie de la réalité complexe des régions, un aspect négligé dans la recherche actuelle. Comment comprendre un état de la situation d’une nation sans connaître ses parties et ses membres ? Voilà l’un des mérites de cette collection. Et, à leur tour, les auteurs de l’Histoire des Îles-de-la-Madeleine ont livré la marchandise. Au fait, qui sont-ils ? On mentionne très brièvement dans l’avant-propos que Paul Larocque est professeur-chercheur à l’Université du Québec à Rimouski et que Jean-Charles Fortin est un chercheur autonome qui a déjà participé à divers autres projets d’histoires régionales. Ne serait-il pas pertinent et mérité de leur donner plus de visibilité en tant qu’auteurs et de présenter des notices biographiques plus complètes sur la quatrième de couverture ? Autre question qui intéresse les historiens : quelle est la démarche historique ? Quelles sont les méthodologies appliquées ? Quelles sont les sources utilisées et comment a-t-on fait la critique des sources ? Pas un mot à ce propos par les auteurs, si ce n’est une ligne dans l’introduction générale mentionnant le dépouillement des documents parlementaires fédéraux et provinciaux, les listes nominatives des recensements du XIXe siècle, les archives judiciaires, les rapports annuels des pasteurs anglicans, les actes de baptêmes, mariages et sépultures catholiques et protestants, les fonds d’archives privés conservés au Musée de la Mer et au Centre d’archives de Cap-aux-Meules et enfin, les journaux et les monographies locales. Une note méthodologique aurait pu être ajoutée par exemple à la fin du livre. Cette synthèse historique sur les Îles-de-la-Madeleine, ainsi que toutes les autres publications des histoires régionales, a été menée avec une rigueur scientifique incontestable mais, une note sur la démarche méthodologique consoliderait cette rigueur. Comment écrit-on une histoire régionale ? Je n’irai pas plus loin dans ce questionnement qui m’amènerait à interroger l’approche historique ou les écoles historiques. Mission accomplie. L’Histoire des Îles-de-la-Madeleine donne au grand public ainsi qu’aux spécialistes des sciences humaines beaucoup de matière et une mise en forme de l’ensemble des faits et des événements qui ont marqué l’évolution historique de ce coin du pays québécois. Car c’est de cela qu’il s’agit : une construction du temps régional en faisant ressortir les temps forts qui ont façonné le patrimoine et la mémoire des Madelinots. C’est là toute l’originalité des histoires régionales et la raison fondamentale de leur existence. Comme les auteurs le reconnaissent, les Îles-de-la-Madeleine forment une société distincte et leur histoire de vie insulaire est captivante. On découvre un pan d’histoire ignoré par bien du monde. Mentionnons par exemple la question de la propriété du sol entre les mains de l’amiral britannique Coffin à compter de 1797, puis la mainmise de la famille néo-écossaise Leslie sur les activités économiques des Îles du milieu du XIXe siècle jusqu’en 1930 ; la réappropriation par les habitants de leur milieu avec l’émergence des coopératives après 1930 ; la prise en charge de leur avenir par la diversification économique et le développement d’une conscience historique …
Jean-Charles Fortin et Paul Larocque, Histoire des Îles-de-la-Madeleine, Sainte-Foy, Les Éditions de l’IQRC et Les Presses de l’Université Laval, 2003, 400 p.[Record]
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Richard Lagrange
Département d’histoire,
Collège Édouard-Montpetit.