Abstracts
Résumé
La notion de précarité occupe une place importante dans la sociologie contemporaine. Mais elle est divisée, aussi bien du point de vue des approches sociologiques que des matrices politiques qui la visent. Pour clarifier ces différences de perspectives, nous revenons, de façon approfondie et en accordant une attention particulière aux différents rapports à la quantification, sur les modes de problématisation qui, à la fin des années 1970, ont investi le nom « précaires ». Premièrement, les sciences sociales du travail s’alarment d’un renouvellement des segmentations juridiques de la condition salariale, dans des termes qui entraînent une tension entre juridisme et étude de la pauvreté. Deuxièmement, des sociologues ont rejoint des experts plus proches d’instances de pouvoir dans une discussion à propos de la signification contestataire des usages « marginaux » de l’emploi précaire. Troisièmement, des théoriciens d’extrême gauche ont tenté de reporter sur « les précaires » le rôle de classe révolutionnaire, inaugurant une série de tentatives de mobilisation. Nous souhaitons faire ressortir l’hétérogénéité des types de connaissance ainsi que des perspectives politiques qui portent sur « les précaires ».
Mots-clés :
- précarité,
- travail,
- modes de problématisation,
- quantification,
- critique sociale
Abstract
The notion of precariousness occupies an important position in contemporary sociology. But this notion is divided, from the point of view both of the sociological approaches and of the political matrixes that focus on it. In order to clarify these differences of perspectives, we offer to revisit the different modes of problematization which, in the late 1970s, came to invest the word “precarious”. We do so in a detailed way, paying particular attention to the various relations to quantification. Firstly, the social sciences of work were alarmed at a renewal of the legal segmentations of the wage working condition, in terms that led to a tension between juridicism and the study of poverty. Secondly, sociologists joined experts closer to political authorities in a discussion about the disruptive significance of “marginal” uses of precarious employment. Thirdly, far left theorists attempted to cast “precarious workers” as a revolutionary class, thereby inaugurating a series of endeavours at social mobilization. We wish to highlight the heterogeneity of the various modes of knowledge as well as of the political perspectives concerning the very notion of “precariousness”.
Keywords:
- precariousness,
- work,
- genesis,
- modes of problematization,
- quantification,
- social critique
Resumen
El concepto de precariedad ocupa un lugar importante en la sociología contemporánea, pero está dividido tanto desde el punto de vista de los enfoques sociológicos como de las matrices políticas que lo analizan. Para aclarar estas diferencias de perspectivas recurrimos, de manera profunda y prestando una atención particular, a las diferentes relaciones establecidas con la cuantificación de los modos de problematización que a finales de los años 1970 posicionaron el concepto de “precario”. En primer lugar, las ciencias sociales del trabajo se alarman por la renovación de las segmentaciones jurídicas de la condición salarial, en términos que implican una tensión entre juridismo y estudio de la pobreza. En segundo lugar, los sociólogos se han sumado a los expertos más cercanos a las instancias de poder en una discusión acerca del significado contestatario de los usos “marginales” del empleo precario. En tercer lugar, los teóricos de extrema izquierda han intentado atribuir a “los precarios” el rol de clase revolucionaria, inaugurando así una serie de intentos de movilización. Aquí queremos poner de manifiesto la heterogeneidad de los tipos de conocimiento, así como las perspectivas políticas que hacen referencia a “los precarios”.
Palabras clave:
- precariedad,
- trabajo,
- modos de problematización,
- cuantificación,
- crítica social
Appendices
Bibliographie
- Bachy, J.-P. (1977), Les jeunes et la société industrielle, Paris, Centre de recherches en sciences sociales du travail.
- Bachy, J.-P. (1981), « La classe ouvrière « bis » », inBachy, J.-P., Beregovoy, P., Coffineau, M. et Neiertz, V. (dir.), Travail précaire, Paris, Club du livre socialiste, p. 9-14.
- Barbier, J.-C. (2005), « La précarité, une catégorie française à l’épreuve de la comparaison internationale », Revue française de sociologie, vol. 46, n° 2, p. 351-371.
- Baudouin, T., Chopart, J.-N., Collin, M. et Guilloteau, L. (1989), Mouvements de chômeurs et de précaires en France, la revendication d’un revenu garanti, Paris, MIRE. En ligne, consulté le 7 octobre 2017 : www.cip-idf.org/article.php3?id_article=5814
- Bérégovoy, P. (1981), « Précariat et nouvelles idéologies », inBachy, J.-P., Bérégovoy, P., Coffineau, M. et Neiertz, V. (dir.), Travail précaire, Paris, Club du livre socialiste, p. 26-31.
- Boltanski, L. (1982), Les Cadres. L’invention d’un groupe social. Paris, Minuit.
- Boltanski, L. (2009), De la critique. Précis de sociologie de l’émancipation. Paris, Gallimard.
- Boltanski, L. (2012) Énigmes et complots. Une enquête à propos d’enquêtes. Paris, Gallimard.
- Boltanski, L. et Chiapello, E. (1999), Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard.
- Boltanski, L. et THévenot, L. (1983), « Finding One’s Way in Social Space : A Study Based on Games », Social Science Information, vol. 22, n° 4-5, p. 631-80.
- Boumaza, M. et Pierru, E. (2007), « Des mouvements de précaires à l’unification d’une cause », Sociétés contemporaines, n° 65, vol. 1, p. 7-25.
- Bourdieu, P. (1998), Contre-feux, Marseille, Raisons d’Agir.
- Bresson, M. (2007), Sociologie de la précarité, Paris, Armand Colin.
- Bureau international du travail (1977), Les jeunes face aux conditions et au milieu de travail, Genève, Bureau international du travail.
- Caire, G. (1982), « Précarisation des emplois et régulation du marché du travail », Sociologie du travail, vol. 24, n° 2, p. 135-158.
- Casas-Cortés, M. (2014), « A Genealogy of Precarity : A Toolbox for Rearticulating Fragmented Social Realities in and out of the Workplace », Rethinking Marxism : A Journal of Economics, Culture & Society, vol. 26, n° 2, p. 206-226.
- Castel, R. (1999 [1995]), Les métamorphoses de la question sociale, Paris, Gallimard.
- Cingolani, P. (1986), L’Exil du précaire, Paris, Méridiens Klincksieck.
- Cingolani, P. (2005), La précarité, Paris, PUF.
- Cingolani, P. (2014), Révolutions précaires : Essai sur l’avenir de l’émancipation, Paris, La Découverte.
- Coëffic, N. (1982), « L’ampleur des emplois précaires », Économie et statistique, 147, n° 1, p. 33-41.
- Dauty, F. et Morin, M.-L. (1992), « Entre le travail et l’emploi : la polyvalence des contrats à durée déterminée », Travail et emploi, 1992, n° 52, p. 20-36.
- DeFoucauld, J.-B., Cézard, M. et Reynaud, M. (2008), Rapport du groupe de travail sur la définition d’indicateurs en matière d’emploi, de chômage, de sous-emploi et de précarité de l’emploi, Paris, Conseil national de l’information statistique.
- Demazière, D. et Pignoni, M.-T. (1999), Chômeurs, du silence à la révolte, Hachette littératures.
- Desanti, D. (1979), « Les précaires », Le Monde, 23 juillet.
- Desrosières, A. (2008), L’argument statistique I : Pour une sociologie historique de la quantification, Paris, Presses des Mines.
- Dittmar, G. (1974), « Pourquoi ‘’Marge’’ ? », Marge, n° 1, p. 1-2.
- Drouin, P. (1977), « Les dés sont pipés pour les jeunes », Le Monde, 18 avril.
- Fédéation générale services-livre, (1977), « Les hors-statut : des travailleurs à part… au centre de la restructuration capitaliste », in CFDT, Les dégâts du progrès. Les travailleurs face au changement technique, Paris, Seuil, p. 216-233.
- Fourcade, J. (1992), « L’évolution des situations d’emploi particulières de 1945 à 1990 », Travail et emploi, n° 52, p. 4-19.
- Galambaud, B. (1977), Les jeunes travailleurs d’aujourd’hui : refus et attentes des jeunes face au travail salarié, Toulouse, Privat.
- Galland, O. (1984), « Précarité et entrées dans la vie », Revue française de sociologie, vol. 25, n° 1, p. 49-66.
- Germe, J.-F. (1978), « Les nouvelles formes d’emploi : le travail intérimaire », Critique de l’économie politique, n° 5.
- Grell, P. (2002), « Le sentiment d’aliénation comme opérateur de mouvance : réflexion à partir d’expériences de vie de jeunes en situation précaire », Sociologie et sociétés, vol. 34, n° 1, p. 199-214.
- Gorz, A. (1980), Adieux au prolétariat : au delà du socialisme, Paris, Galilée.
- Greilsamer, L. (1979), « Sur le terrain des petites violences », Le Monde, 23 février.
- Henriet, B. (1981), Les emplois précaires : évaluations, interprétations et implications, Sceaux, Centre de recherches en sciences sociales du travail/CRESST.
- Insee (1978), « Les résultats de l’enquête emploi d’octobre 1977 », Économie et statistique, n° 102, p. 3-12.
- Insee (1982), Les emplois précaires en 1980. Une enquête de l’INSEE sur l’intérim et les contrats à durée déterminée, Archives et documents, n° 63.
- Join-Lambert, L. et Fayard, D. (1975), Pouvoir social et précarité. Essai méthodologique pour une évaluation des situations familiales les plus précaires, Pierrelay, Mouvement Aide à toute détresse.
- Kravaritou, Y. (1990), « Les nouvelles formes d’embauche et la précarité de l’emploi », Revue internationale de droit comparé, vol. 42, n° 1, p. 129-147.
- Levy-Stringer, J. (1977), Les marginaux : une nouvelle force politique en France, Paris, Fayolle.
- Linhart, D. et Maruani, M. (1982), « Précarisation et déstabilisation des emplois ouvriers », Travail et emploi, 1982, n° 11, p. 27-36.
- Linhart, D. (1982), « Pour une prospective du travail », Sociologie du travail, vol. 24, n° 2, p. 178-191.
- Lyon-Caen, G. (1980), « Plasticité du capital et nouvelles formes d’embauche », Droit social, septembre-octobre, n° 9-10 : 8-18.
- Mallet, S. (1963), La nouvelle classe ouvrière, Paris, Seuil.
- Mathieu, L. (2007), « Ce que la précarité fait aux mobilisations », inHamman, P. et Boumaza, M. (dir.), Sociologie des mouvements de précaires, Paris, L’Harmattan, p. 241-257.
- Mattoni, A. (2010) « Pratiques médiatiques multiples dans les mobilisations italiennes contre la précarité », in M. SURDEZet al. (dir.), Identifier — S’identifier : À propos des identités politiques, Lausanne, Antipodes, p. 271-293.
- Mauger, G. et Fosse, C. (1977), La vie buissonnière : marginalité petite-bourgeoise et marginalité populaire, Paris, Maspero.
- Merle, V. (1979), « Désenchantement plus qu’allergie », Autrement, n° 21, p. 16-29.
- Monso, O. et Thevenot, L. (2010), « Les questionnements sur la société française pendant quarante ans d’enquêtes Formation et Qualification Professionnelle », Économie et statistique, n° 431-432.
- Moulier Boutang, Y. (2007), Le capitalisme cognitif : la nouvelle grande transformation, Paris, Amsterdam.
- Neilson, B. et Rossiter, N. (2008), « Precarity as a Political Concept, Or, Fordism as Exception », Theory, Culture & Society, vol. 25, n° 7-8, p. 51-72.
- Nicole-Drancourt, C. (1992), « L’idée de précarité revisitée », Travail et emploi, n° 52, p. 57-70.
- Passeron, J.-C. (2006 [1991]), Le Raisonnement sociologique. Un espace non poppérien de l’argumentation, Paris, Albin Michel.
- Paugam, S. (2000), Le salarié de la précarité : les nouvelles formes de l’intégration professionnelle, Paris, PUF.
- Perrin, É. (2004), Chômeurs et précaires : au coeur de la question sociale, Paris, La Dispute.
- Pitrou, A. (1978), La vie précaire : des familles face à leurs difficultés, Paris, CNAF.
- René J.-F. (1993), « La jeunesse en mutation. D’un temps social à un espace social précaire », Sociologie et sociétés, vol. 25, n° 1, p. 153-171.
- Robert, P. (1980), « Jeunesse, crises et luttes », économie et politique, janvier, p. 50-56.
- Rosanvallon, P. (dir.) (1979), Crise et avenir de la classe ouvrière, Paris, Seuil.
- Roulleau-Berger, L. (1991), La ville intervalle : jeunes entre centre et banlieue, Paris, Méridiens-Klincksieck.
- Rousselet, J. (1974), L’allergie au travail, Paris, Seuil.
- Rousselet, J. (1980), La Jeunesse malade du savoir, Paris, Grasset.
- Sartin, P. (1977), Jeunes au travail, jeunes sans travail, Paris, Les Éditions d’organisation.
- Sass, C. et al., (2006), « Le score EPICES : un score individuel de précarité », Bulletin épidémiologique hebdomadaire, n° 14, 2006, p. 93-96.
- Schehr, S. (1999), La Vie quotidienne des jeunes chômeurs, Paris, PUF.
- Schifres, S. (2004), La mouvance autonome en France de 1976 à 1984, Mémoire de maîtrise d’histoire, Paris 10 Nanterre.
- Schnapper, D. (1994 [1981]), L’épreuve du chômage, Paris, Gallimard.
- Sinigaglia, J. (2007), « Le mouvement des intermittents du spectacle : entre précarité démobilisatrice et précaires mobilisateurs », Sociétés contemporaines, vol. 65, n° 1, p. 27 sq.
- Srnicek, N. et Williams, A. (2015), Inventing the Future. Postcapitalism and a World Without Work, Londres/New York, Verso.
- Standing, G. (2011), The Precariat : The New Dangerous Class, London et New York, Bloomsbury Academic.
- Tanguy, L. (2006), Les Instituts du travail : La formation syndicale à l’université de 1955 à nos jours, Rennes, PUR.
- Tari, M. (2011), Autonomie ! Italie, les années 1970, Paris, La Fabrique.
- Tronti, M. (2013 [2008]), Nous, Opéraïstes. Le « roman de formation » des années soixante en Italie, Paris, Éditions de l’éclat et Lausanne, Éditions d’en bas.
- Vimont, C. (1981), L’avenir de l’emploi : l’illusoire, le possible, Paris, Économica.
- Wright, S. (2002), Storming Heaven : Class Composition and Struggle in Italian Autonomist Marxism, London, Pluto Press.
Du fait de l’anonymat de la plupart de leurs articles, les revues Camarades, Autonomie pour le communisme et Cash ! ne se prêtaient pas au format de citation utilisé ci-dessous. Ils sont consultables, ainsi que Marge, sur le site http://archivesautonomies.org/