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  • Francine Saillant

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  • Francine Saillant
    Département d’anthropologie
    Université Laval
    Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4
    Canada

C’est non sans plaisir que nous vous présentons ces textes reçus au fil des mois et qui viennent maintenant « composer » ce numéro particulier ; sans être tout a fait thématique, il l’est devenu un peu compte tenu de ce que l’on a pu en dégager a posteriori. Les textes s’arriment entre eux non pas à la façon de blocs erratiques mais plutôt comme une corde et ses nœuds, que l’on a nommés politique, réflexivité, psychanalyse. Nœuds de sens mettant en scène des repré-sentations du politique et de son travail sur les sujets, la société et la culture, des représentations du terrain, ce nœud gordien de la pratique anthropologique, et enfin des représentations du lien social, à travers la psychanalyse. Ce type de numéro, nous croyons qu’il faut en « commettre » de temps en temps, question d’ouvrir des brèches pour des débats qui, autrement, sont ficelés lors de projets planifiés longtemps à l’avance ; question de laisser place aussi aux auteurs qui nous envoient des textes d’un grand intérêt mais qui, lorsqu’ils sont présentés hors thème en fin d’un numéro thématique, ne reçoivent pas toujours l’attention méritée. Morceaux choisis, certains textes viennent étrangement répondre à des débats en cours à Anthropologie et Sociétés, ouverts par des responsables ou des auteurs dans des numéros antérieurs, tout comme ils en précèdent d’autres à venir, du moins nous l’espérons. Espace de respiration théorique, de discussion et d’ouverture, un numéro de la sorte saura favoriser des réactions, sous formes d’autres textes et essais à soumettre, afin de resserrer par d’autres nœuds encore ces liens qui se tissent étrangement entre le lectorat, les auteurs et la rédaction. Quoique les débats sur les distinctions entre communauté et société ouverts par Tönnies paraissent quelque peu désuets maintenant, tant cette notion ancienne de communauté semble se perdre dans les méandres d’une nostalgie qui l’emporte avec elle, il n’en demeure pas moins que les appels à la commu-nauté sont devenus, surtout en Amérique du Nord, de quasi-injonctions. Appels nombreux, non voilés, présentant la communauté sous forme de panacée devant les effets dévastateurs d’un néolibéralisme plus sauvage que jamais. La commu-nauté, ce petit morceau de société locale que l’on désire encore organique et que le politique cherche à organiser pour ses besoins, par la promotion de l’entraide, des gouvernances locales, des solidarités primaires, n’est pas perdue, mais elle revit, sous une forme inédite et moderne, comme « lieu d’ancrage des liens sociaux et de la citoyenneté ». Mais la communauté s’est toujours avérée construction politique, ainsi que Denise Helly le démontre dans son analyse socio-historique percutante des variations du sens de la communauté dans le contexte capitaliste. Question brûlante, car liée à ce que laisse poindre comme horizon la trans-formation de l’État-providence, quand l’État veut faire plus avec moins, réor-ganiser ses responsabilités envers les citoyens, quand il se dit étrangement moins nécessaire et qu’il veut laisser plus de place au marché tout en rappelant aux citoyens leurs devoirs de solidarité. Cela, bien des femmes le savent maintenant, elles à qui bien des fois on demande d’occuper justement cette place des liens primaires, elles qui incarnent trop souvent la métaphore même de la commu-nauté, une fois que l’individualisme a pris le pas sur les solidarités organiques. Certaines catégories de sujets semblent plus enclines à occuper la place de la communauté — les femmes — ou à se représenter comme membres d’une com-munauté — les autochtones ; dans tous les cas, il s’agit peut-être là d’un vacuum à combler ou à imaginer quand s’instaure la gouvernementalité des liens. La place des femmes en politique passerait par leur plus …

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