Cahiers Charlevoix
Études franco-ontariennes
Volume 1, 1995
Sommaire (7 articles)
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Avant-propos
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1910. Une première prise de parole collective en Ontario français
René Dionne
p. 15–124
RésuméFR :
René Dionne, pionnier des études littéraires franco-ontariennes à l’Université d’Ottawa, se penche sur un texte fondateur de l’identité franco-ontarienne : les actes du Congrès d’éducation des Canadiens-Français d’Ontario tenu à Ottawa en 1910. Par le compte rendu fidèle et détaillé qu’il en donne, il réaffirme le long passé littéraire franco-ontarien, dont la prise de parole actuelle n’est qu’un épisode, puisqu’il a dénombré plus de deux cents oeuvres écrites par vingt-quatre écrivains outaouais qui prirent individuellement la parole entre 1865 et 1909. Puis il compare ce congrès aux grandes conventions nationales (la franco-américaine, les québécoises et les acadiennes) pour mieux marquer l’originalité du congrès franco-ontarien qui, bien que tardif, fut, observe l’auteur, démocratique, provincial, national, loyal, optimiste et littéraire. Devant les conflits politiques et religieux qui menaçaient de dégénérer, l’heure était à la vigilance et à la cohésion; la prise de parole de 1910 se devait d’être collective.
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Aux origines de l’identité franco-ontarienne
Gaétan Gervais
p. 125–168
RésuméFR :
L’historien Gaétan Gervais, professeur à l’Université Laurentienne, analyse le problème de l’identité franco-ontarienne d’un point de vue contemporain. Il voit dans l’éclatement du Canada français, provoqué par la Révolution tranquille, la source du malaise identitaire des élites ontaroises actuelles. Exclus par un Québec qui récupère comme québécois tout l’héritage naguère canadien-français, avec l’encouragement d’organismes nationaux – l’auteur montre du doigt la Société Radio-Canada, dite « la SRC », et le Secrétariat d’État (Patrimoine canadien) – qui opposent les Québécois aux « francophones » canadiens, les Franco-Ontariens s’ontarianisent : le déplacement de leurs centres d’activités vers Sudbury et Toronto est en cela significatif.
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« Le Lynx et le renard ». Un relais déroutant dans la transmission du conte populaire français en Ontario
Jean-Pierre Pichette
p. 169–240
RésuméFR :
Son enquête sur « Le Lynx et le renard » amène Jean-Pierre Pichette, ethnologue de l’Université de Sudbury, à la démonstration de l’origine française d’un petit conte animalier recueilli chez les Sauteux du nord de l’Ontario, en dépit de son inculturation amérindienne. Par un curieux retour des choses, l’étudiant parti à la recherche de la culture de l’autre se retrouve plongé dans la sienne propre que le gros bon sens, nourri de préjugés – le mythe du « bon sauvage », dans sa version écologique contemporaine, joint au complexe du minoritaire –, l’empêche cependant de reconnaître. La privation de contact avec la tradition orale franco-canadienne rendrait ainsi, devant une simple présomption, l’identification impossible et, partant, l’abdication naturelle.
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Langue maternelle et langue d’usage dans les foyers mixtes francophones : les enjeux de l’exogamie
Roger Bernard
p. 241–289
RésuméFR :
La dilution de l’identité est aussi à l’ordre du jour des travaux du sociologue Roger Bernard de l’Université d’Ottawa. La minorisation de l’élément canadien-français, passé du village à la ville, a favorisé, outre la bilinguisation et l’anglicisation, l’exogamie dont les enjeux linguistiques révèlent une situation inquiétante : même à la maison, l’auteur enregistre la très nette force d’attraction de l’anglais comme langue d’usage dans les foyers mixtes composés d’un parent francophone et de son conjoint anglophone et, fait remarquable qui bouscule le concept même de langue maternelle, la mère francophone ne réussit pas mieux que le père francophone à transmettre le français dans ce contexte. Ces recherches débordent le cadre de l’Ontario et ont des retombées sur tout le Canada français.
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Francophones et Franco-Ontariens dans l’univers agricole canadien, 1851-1911 : perspectives comparatives
Fernand Ouellet
p. 291–359
RésuméFR :
Fernand Ouellet, historien de l’Université York, s’intéresse à la spécificité de l’expérience franco-ontarienne dans l’univers agricole canadien. Son étude fouillée, fruit d’une longue enquête statistique pour les années 1851 à 1911, présente plusieurs aspects de nouveauté : comparative et régionale, elle permet de corriger les erreurs de perspective et d’isoler les données relatives aux concentrations ethniques partout au Canada durant cette période. L’auteur peut ainsi mettre en évidence les disparités régionales canadiennes, puis relever celles qui existent entre le Québec et l’Ontario, et enfin distinguer même les populations françaises et anglaises de l’Ontario. Bien que « préliminaire », cette recherche oblige le chercheur à conclure que les Franco-Ontariens ont amélioré leur sort en s’établissant dans cette province, car, pourtant moins riches qu’ailleurs en Ontario, leurs terres, comme celles de leurs nouveaux compatriotes, affichaient un meilleur rendement que celles, plus fertiles, de la région de Montréal ; comme quoi la qualité des terres ne peut seule tout expliquer.
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La Mémoire oubliée en Ontario français. « Désespoir de vieille fille » de Thérèse Tardif
Fernand Dorais
p. 361–409
RésuméFR :
Fernand Dorais, professeur de littérature à la retraite de l’Université Laurentienne, a choisi pour son premier article – il annonce une trilogie – d’exhumer un essai publié à Ottawa en 1943 et, à son avis, injustement tombé dans l’oubli. Il s’agit de Désespoir de vieille fille de Thérèse Tardif, un livre qui choqua lors de sa parution et fit un tel scandale qu’il eut droit, la même année, à la Réponse à « Désespoir de vieille fille » de Simone Routier. C’est que Thérèse Tardif était la première femme « à parler de la part matérielle de l’amour ». À l’aide des recensions de l’époque, des articles de Tardif et des méthodes critiques, l’auteur propose une nouvelle lecture de cette oeuvre, « vraiment extraordinaire dans le Canada français de 1943 », qu’il situe dans le courant des écrivains catholiques français de son temps.