Thème 1 - La place de la géographie au sein de la science d’aujourd’hui

SynthèseEntre structure et action : nouvelles perspectives en géographie[Notice]

  • Gilles Sénécal

…plus d’informations

  • Gilles Sénécal
    INRS Urbanisation,
    Culture et Société

Au vu des textes rassemblés dans cette section, il faut convenir que la place de la géographie au sein de la science d’aujourd’hui apparaît d’une certaine manière bien assurée mais, sur un tout autre plan, teintée d’incertitude. Assurance que les questions abordées témoignent d’une résonance sociale qui ne se dément pas. Incertitude dans la mesure où la géographie ne semble pas parvenir à se démarquer des autres disciplines alors que triomphe la perspective interdisciplinaire. Une telle situation est exemplaire des courants actuels en géographie sociale et dans laquelle l’interdisciplinarité et les approches intégrées sont à l’honneur. S’impose ainsi l’idée que les territoires sont d’abord des systèmes sociaux. Le texte de Valérie November participe d’une telle approche, tout en contribuant à situer la question du territoire et celle des structures spatiales dans une perspective élargie : il ne cherche pas à affirmer le rôle de la géographie dans l’analyse, mais plutôt à traiter des problèmes sociaux qui traversent l’ensemble des sciences humaines, et d’en dégager les éléments spatiaux qui pourraient participer à l’explication. Ce que la géographie perd en spécificité, elle le gagne donc en pertinence sociale. Sont ainsi abordées les grandes questions sociales et environnementales qui traversent la société actuelle, notamment celles relatives à la société du risque et à la montée en puissance des processus de démocratie participative et d’action citoyenne, de même que la place réservée à des espaces et à des groupes sociaux moins bien couverts dans l’analyse et, par le fait même, dans notre connaissance des territoires. Cette reconnaissance de la pertinence sociale de la géographie, qui s’appuie sur un mouvement de retour vers le territoire et une montée en puissance des institutions locales de la société civile, n’est pas sans ambiguïté. Car, en parallèle, se développe une modernité avancée productrice de standardisation et d’effacement des spécificités. C’est du moins la thèse soutenue par Brice Gruet, qui met en perspective une série de problèmes et d’enjeux actuels, que l’on peut qualifier de majeurs, et que la géographie ne parviendrait pas à saisir à travers un paradigme original. De là, il faut en conclure à la grande difficulté de se démarquer et de situer les faits territoriaux dans des approches et des méthodologies spécifiques, alors que la période actuelle semble basculer dans une univers déterritorialisé, si le terme est permis, dans lequel la banalité des sociétés sécularisés, l’individualisme et le culte de la technologies semblent triompher. On peut se demander, par contre, si cette sommation de désenchantements, et qui préside à l’affirmation du paradigme absent, ne serait pas le produit d’une nostalgie des sociétés traditionnelles aux liens communautaires forts. Ne pourrait-on pas opposer à cette représentation d’un monde qui bascule, celle des acteurs sociaux communicants et agissants, capables d’interagir face aux contraintes et, possiblement, même en situation de modernité avancée et de mondialisation, de trouver à reproduire des lieux et des territoires significatifs ? Aux premiers abords, il faut convenir que les termes d’acteur social, de risque et d’action (locale ou dite citoyenne) occupent une place de plus en plus affirmée en géographie, même s’il ne s’agit pas, à proprement parler, de termes géographiques (Sénécal, 2005). Dès lors, il n’est pas inutile de se demander s’ils sont solubles dans le champ de la géographie et en quoi servent-ils notre compréhension des territoires et de leur évolution ? D’abord, l’acteur acquiert son statut d’acteur territorialisé lorsqu’il participe à des logiques institutionnelles et des rapports de pouvoir définis spatialement (Gumuchian, et al., 2003). Ensuite, l’acteur territorialisé serait aussi celui qui, participant aux débats sociaux, engage une réflexion sur le devenir du territoire. Ce type de réflexion prend …

Parties annexes