Canadian Social Work Review
Revue canadienne de service social
Volume 35, numéro 1, 2018
Sommaire (10 articles)
Articles
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SUPPORTING INDIGENOUS SOCIAL WORKERS IN FRONT-LINE PRACTICE
Susan Burke
p. 5–25
RésuméEN :
Indigenous peoples have been reclaiming jurisdiction over their child welfare services and Western society has been increasingly acknowledging that Indigenous peoples are in the best position to provide these services. While the number of Indigenous social workers has historically been low, especially when compared to the population they serve, their numbers seem to be on the rise. In spite of that reality, most social service organizations continue to operate from a Western perspective, with little attention paid to the ways in which they must change in order to provide space for the Indigenous social workers they employ. This study explores the experiences of nine First Nations and Métis social workers in British Columbia (BC). The researcher, a Métis scholar and former child welfare social worker, conducted data collection and analysis through a Métissage framework, using semi-structured interviews. Thematic analysis revealed nine themes, including the need for (1) Knowledgeable leadership that supports autonomy; (2) Flexibility in practice; (3) Policy that fits both Indigenous and Western paradigms; (4) Relationships with other supportive social workers; (5) Support to navigate overlap between the personal and the professional; (6) Set standards/experienced co-workers; (7) Equitable workplace resources; (8) Respect regarding Indigenous identity, and; (9) Supports to maintain wellness. Recommendations suggest how this information can be used by organizations to better support the Indigenous social workers they employ.
FR :
Les peuples autochtones ont récupéré la compétence sur leurs services de protection de l’enfance et la société occidentale reconnaît de plus en plus que les peuples autochtones sont les mieux placés pour fournir ces services. Bien que le nombre de travailleurs sociaux autochtones ait toujours été faible, surtout si on le compare à la population qu’ils desservent, leur nombre semble augmenter. Toutefois, le recrutement et le maintien en poste demeurent un problème. Cette étude explore les expériences de neuf travailleurs sociaux des Premières nations et des Métis en Colombie-Britannique (C.-B.) au sujet de ces questions. Le chercheur, un chercheur métis et ancien travailleur social de la protection de l’enfance, a effectué la collecte et l’analyse des données dans un cadre de métissage, à l’aide d’entrevues semi-structurées. L’analyse thématique a révélé neuf thèmes, y compris le besoin de 1) leadership éclairé qui favorise l’autonomie, 2) souplesse dans la pratique, 3) politique correspondant aux paradigmes autochtones et occidentaux, 4) relations avec d’autres travailleurs sociaux de soutien, 5) soutien pour naviguer entre le personnel et le professionnel, 6) établissement de normes et apport de collaborateurs expérimentés, 7) ressources équitables en milieu de travail, 8) respect de l’identité autochtone, 9) soutien au maintien du mieux-être. Les recommandations suggèrent comment ces données peuvent être utilisées par les organismes pour mieux soutenir les travailleurs sociaux autochtones qu’ils emploient.
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LES ENJEUX INTERSECTIONNELS DE LA DEMANDE DE SERVICES DE SANTÉ MENTALE AU CANADA : la situation des jeunes femmes dépressives francophones
Florina Gaborean, Lilian Negura et Nicolas Moreau
p. 27–44
RésuméFR :
Dans cet article, nous présentons, selon le cadre théorique féministe intersectionnel, une étude visant à mieux comprendre les dynamiques identitaires qui influencent la demande de services de santé mentale des jeunes femmes francophones vivant en situation minoritaire ainsi que les effets croisés de celles-ci sur les facteurs déclencheurs de la dépression, la perception des symptômes et le parcours thérapeutique. Notre analyse révèle que l’imbrication de plusieurs catégories d’inégalité complexifie l’accès aux services de santé mentale des jeunes femmes dépressives en situation minoritaire tout en favorisant l’émergence de stratégies de lutte et de résistance. Le croisement des catégories identitaires de genre, d’âge et de langue parlée produit des effets compensatoires sur la demande de services de santé mentale. Alors que l’image sociale positive de la jeunesse les fait hésiter dans la demande de services, celle liée à l’identité féminine légitime, la dépression et les faiblesses qui pourraient en découler. Les femmes mettent en oeuvre des stratégies pour pallier les inégalités d’accès aux services de santé mentale en français et trouver les services qu’elles considèrent appropriés pour leur problème spécifique. Au lieu de favoriser la discrimination ou la marginalisation, cette imbrication d’appartenances identitaires multiples permet le renforcement du pouvoir d’agir des jeunes femmes francophones.
EN :
In this article, we present, according to the intersectional feminist theoretical framework, a study aimed at better understanding the identity dynamics that influence the demand for mental health services by young Francophone women living in minority situations, as well as their cross effects on the factors that trigger depression, the perception of symptoms and the therapeutic pathway. Our analysis reveals that the interweaving of several categories of inequality complicates access to mental health services for depressed young women in minority situations while encouraging the emergence of strategies to fight and resist. The intersection of gender, age and spoken language identity categories has compensatory effects on the demand for mental health services. While the positive social image of youth makes them hesitate when requesting services, the one linked to female identity legitimizes depression and the weaknesses that could result from it. Women are implementing strategies to address inequalities in access to mental health services in French and to find the services they consider appropriate for their specific problem. Instead of fostering discrimination or marginalization, this interweaving of multiple identities allows young Francophone women to empower themselves.
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THESE ARE INDIGENOUS LANDS: Foregrounding Settler Colonialism and Indigenous Sovereignty as Primary Contexts for Canadian Environmental Social Work
Chris Hiller et Elizabeth Carlson
p. 45–70
RésuméEN :
The recent upsurge of interest regarding environmental social work is unfolding against a backdrop of centuries of continuous struggle on the part of Indigenous peoples to protect their lands and waters. In this article, we consider the ways in which environmental social work frameworks engage the realities and resistances of Indigenous peoples in the context of settler colonialism. We contend that to ethically engage with environmentalism, social workers living and working on Indigenous territories must understand and resist settler colonialism, our implication in upholding its structure and practices, and its contribution to ecological destruction. Drawing upon the work of Indigenous scholars, we briefly describe Indigenous peoples’ conception of their relationships to land and sovereignty and how settler colonialism as a structure is organized with the explicit aim of eliminating these relationships. We then review prominent texts addressing several competing environmental social work frameworks, considering how each takes up (or not) histories of colonialism and Indigenous dispossession and addresses Indigenous identities, relations to land, and assertions of sovereignty. We conclude by offering principles and practices that might foreground the disruption of settler colonialism and respect for Indigenous sovereignty as necessary frameworks for Canadian environmental social work.
FR :
La récente recrudescence de l’intérêt pour le travail social environnemental se déroule sur un fond de siècles de lutte continue des peuples autochtones pour protéger leurs terres et leurs eaux. Dans cet article, nous examinons les façons dont les cadres de travail social environnemental engagent les réalités et les résistances des peuples autochtones dans le contexte du colonialisme des colons. Nous soutenons que pour s’engager éthiquement avec l’environnementalisme, les travailleurs sociaux qui vivent et travaillent sur les territoires autochtones doivent comprendre et résister au colonialisme des colons, à notre implication dans le maintien de sa structure et de ses pratiques, et à sa contribution à la destruction écologique. En nous appuyant sur les travaux d’universitaires autochtones, nous décrivons brièvement la conception qu’ont les peuples autochtones de leurs relations à la terre et à la souveraineté et la façon dont le colonialisme des colons en tant que structure est organisé dans le but explicite d’éliminer ces relations. Nous passons ensuite en revue des textes importants traitant de plusieurs cadres de travail social environnemental concurrents, en examinant comment chacun d’entre eux reprend (ou non) l’histoire du colonialisme et de la dépossession indigène et aborde les identités indigènes, les relations à la terre et les affirmations de souveraineté. Nous concluons en offrant des principes et des pratiques qui pourraient mettre en évidence la perturbation du colonialisme des colons et le respect de la souveraineté autochtone comme cadres nécessaires au travail social environnemental canadien.
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SERVICES DE SUPERVISION DES DROITS D’ACCÈS AU QUÉBEC : regard d’intervenants
Annick St-Amand, Marie-Christine Fortin, Marie-Christine Saint-Jacques, Sylvie Drapeau et Marie-Hélène Gagné
p. 71–89
RésuméFR :
Les services de supervision des droits d’accès (SDA) permettent de maintenir le lien parent-enfant dans un contexte neutre et sécuritaire. Les familles qui se retrouvent dans ces services ont généralement un point en commun : elles ont besoin d’être épaulées, écoutées et protégées, notamment par des intervenants formés qui assurent le bon déroulement des contacts supervisés. Peu d’écrits scientifiques ont documenté les pratiques en vigueur dans les services de SDA et qui s’actualisent auprès des familles en provenance de la Cour supérieure ou détenant une entente volontaire ou survenue au terme d’une médiation. Ainsi, à partir de données collectées par le biais d’un questionnaire électronique, cette étude fait état du point de vue de 50 répondants supervisant ou administrant un service de SDA dans lequel s’effectuent des échanges de garde et des visites supervisées. Les répondants se sont exprimés sur la nature du travail effectué dans les ressources de SDA, les forces et difficultés du service, les pistes d’amélioration ainsi que leur perception du système judiciaire. Les résultats ont permis de constater que les répondants sont à l’aise dans leur rôle, qu’ils identifient plusieurs points forts des services, mais que le financement des ressources peut parfois leur poser certaines embûches.
EN :
Supervised access and custody exchange services (SACES) allow the parent-child relationship to evolve in a neutral and safe environment. Families in these services generally have one thing in common: they need to be supported, listened to, and protected, including by trained workers who ensure the smooth running of supervised contacts. There is little scientific literature documenting practices in SACES that is provided to families coming from the Superior Court or subjected to a voluntary or mediation agreement. Using data collected through an electronic questionnaire, this study presents the views of 50 respondents supervising or administering SACES services in which custody exchanges and supervised access take place. Respondents commented on the nature of the work being done in SACES resources, the strengths and challenges of the service, areas for improvement, and their perceptions of the justice system. Results showed respondents are comfortable in their role and identify several service strengths, but that funding can sometimes represent some challenges for them.
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Social Workers’ Experience of Moral Distress
Shannon Jaskela, Juliet Guichon, Stacey A. Page et Ian Mitchell
p. 91–107
RésuméEN :
When health care professionals know the right thing to do, but are prevented from doing so, they can suffer from moral distress. Although moral distress in nursing has been studied extensively, it has been a neglected topic with regard to the social work profession. This paper presents findings of a qualitative descriptive study on health care social workers’ experiences of moral distress, focusing mainly on the situations that caused such moral distress. The effects of moral distress, the coping strategies these social workers used to deal with their experience and the common theme of “pushing the rules” are also presented. Finally, we offer recommendations, which were made by participants, to assist social workers with decreasing the effects of moral distress. By following these recommendations, social workers’ experience of moral distress may decrease which will, in turn, positively affect the organizations for which they work and the patients they serve.
FR :
Lorsque les professionnels de la santé savent ce qu’il faut faire, mais qu’on les empêche de le faire, ils peuvent souffrir de détresse morale. Bien que la détresse morale en soins infirmiers ait fait l’objet d’études approfondies, elle a été négligée en ce qui concerne la profession de travailleur social. Cet article présente les résultats d’une étude descriptive qualitative sur les expériences de détresse morale des travailleurs sociaux des soins de santé, en se concentrant principalement sur les situations qui ont causé une telle détresse morale. Les effets de la détresse morale, les stratégies d’adaptation utilisées par ces travailleurs sociaux pour faire face à leur expérience et le thème commun de « repousser les règles » sont également présentés. Enfin, nous offrons des recommandations, présentées par les participants, pour aider les travailleurs sociaux à réduire les effets de la détresse morale. En suivant ces recommandations, l’expérience de détresse morale des travailleurs sociaux peut diminuer, ce qui, à son tour, aura un effet positif sur les organismes pour lesquels ils travaillent et les patients qu’ils servent.
2017 Student Competition / Concours étudiant 2017
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POLITICIZED NARRATIVE THERAPY: A Reckoning and a Call to Action
Renee Dumaresque, Taylor Thornton, Daniela Glaser et Anthony Lawrence
p. 109–129
RésuméEN :
Using a poly-vocal approach, this piece calls for the interruption and interrogation of narrative therapy’s colonial associations (White & Epston, 1990), and the cooption of narrative therapy by psychiatry under the guise of progressiveness (J. Poole, Personal Communication, January 31, 2017). We locate narrative therapy in the neoliberal geography of recovery and marketization, where social problems are coded as individual struggles, personal stories are used as mental health marketing material, and the burden of wellness enables psychiatric governance (Costa et al., 2012; Morrow, 2013; Poole, 2011). Drawing on Sefa Dei and Asgharzadeh’s (2001) anti-colonial discursive framework, critical race theory and its technique of counter-storytelling, Patricia Hill Collins’ (1990) Black feminist thought, and anti-sanist theorizing, we explore the possibility of reimagining narrative therapy for political ends. Throughout this piece, we draw on narrative techniques to move beyond an individual understanding of distress, connecting personal struggles to the broader social and political context. We do this by extending a political lens to the four steps taken in a mainstream narrative approach. We have chosen to use case studies informed by our own lived experiences in order to highlight the potential that we see in narrative work. This approach does not leave narrative therapy unchallenged and we understand that by remaining in a narrative framework housed in social work practice we cannot truly separate our approach from colonial care (Baskin, 2016; Lee & Ferrer, 2014). Rather, we hope to start a critical and transparent conversation that begins to explore the reconceptualization of narrative therapy for the purpose of deconstructing dominant discourses and making any colonial connections visible.
FR :
Cette oeuvre utilise une approche dite plurivoque et exige des associations coloniales une interrogation sur la thérapie narrative, ainsi que l’interruption de celle-ci (White et Epston, 1990). Elle exige également la cooptation de la thérapie narrative en psychiatrie sous couvert de la progressivité (J. Poole, Communication personnelle, le 31 janvier, 2017). La thérapie narrative se retrouve dans la réparation et la commercialisation géographique néolibérale où les problèmes sociaux sont enregistrés comme des problèmes individuels; où les histoires personnelles sont utilisées comme matériel de commercialisation de la santé mentale et où le fardeau du bien-être favorise la gouvernance psychiatrique (Costa et coll., 2012; Morrow, 2013; Poole, 2011). En nous fondant sur le cadre de travail discursif anticolonial, la théorie critique sur les races et les techniques de narration contraire de Sefa Dei et d’Asgharadeh (2001), ainsi que sur la pensée féministe noire et la théorie « anti-saniste » de Patricia Hill Collins (1990), nous explorons les possibilités de réimaginer la thérapie narrative aux fins politiques. Des techniques narratives sont utilisées dans cette oeuvre pour passer outre la compréhension individuelle de la détresse et pour rattacher les problèmes personnels aux contextes sociaux et politiques plus vastes. Nous y parvenons en ajoutant un angle politique aux quatre étapes prises lors d’une approche plus conventionnelle. Nous avons choisi d’utiliser des études de cas éclairées par nos propres expériences afin de souligner le potentiel du travail narratif. Cette approche ne rend pas incontestée la thérapie narrative et nous comprenons qu’en demeurant dans un cadre de travail narratif logé dans la pratique du travail social, nous ne pouvons pas réellement séparer notre approche de celle des soins dits coloniaux (Baskin, 2016; Lee et Ferrer, 2014). Au contraire, nous espérons lancer une conversation critique et transparente qui, elle, lancera la reconceptualisation de la thérapie narrative aux fins de déconstruire les discours dominants et rendre visible toute connexion coloniale.