Corps de l’article

Introduction

Les semences relèvent en principe du domaine de l’agriculture et de la biologie. Pour différentes raisons (protection des variétés rares, prévention de leur extinction, interdiction de vente de variétés indigènes par les autorités, etc.), des mouvements sociaux ont émergé afin de les regrouper dans des bibliothèques dites « bibliothèques de semences » (seed library). Introduites dans des bibliothèques publiques, universitaires et scolaires, leurs appellations se sont multipliées. Au Québec, diverses dénominations, tant en français qu’en anglais, sont répertoriées dans des écrits que l’on retrouve au sein de bases de données, parmi la littérature grise[1], sur des sites web[2] et sur les réseaux sociaux[3] : seed library, bibliothèque de semences, graineterie, jardinothèque, bouturothèque, plantathèque, grainothèque. Dans cet article, nous utilisons cette dernière en raison de son usage plus courant au Québec sur les sites web, les groupes sur les médias sociaux, les annonces d’événements, de formations ou d’ateliers.

Selon plusieurs médias publics, la première grainothèque dans une bibliothèque publique au Québec a été lancée en 2015 à la bibliothèque Atwater à Westmount à Montréal[4]. Cependant, nos dernières recherches et échanges avec des professionnels du milieu ont révélé, à la date de publication de cette étude, que la grainothèque de la bibliothèque de Kahnawake date de 2012[5], ce qui en fait la première à être inaugurée au Québec. Vers la fin de 2019, on en dénombrait une dizaine. Durant la pandémie, entre la fin de 2019 et 2022, une trentaine se sont encore ajoutées dans les différentes bibliothèques du Québec. En 2023, le Québec en compte une cinquantaine qui sont dispersées sur l’ensemble du territoire[6]. Bien que l’on observe l’adoption d’un nombre sans cesse croissant de grainothèques, peu d’écrits scientifiques existent sur ces dernières.

L’introduction des grainothèques dans les bibliothèques suscite des interrogations par rapport à la main-d’oeuvre impliquée dans leur organisation, par rapport aux technologies déployées et leur fonctionnement, ainsi que par rapport aux pratiques de gestion, de description et de diffusion de leurs données. Notre article abordera trois de ces thématiques : 

  • la main-d’oeuvre, afin d’identifier les membres du personnel impliqués dans la gestion, les collaborations et les créations de partenariats liées aux grainothèques ;

  • les technologies, afin d’identifier les technologies déployées dans les grainothèques et leur fonctionnement ;

  • les données, afin de comprendre les pratiques de gestion, de description et de diffusion des données appliquées dans les grainothèques.

Cadre conceptuel

Notre revue de la littérature nous a permis de construire un cadre conceptuel qui met en évidence quatre composantes principales provenant des thématiques abordées dans notre projet : grainothèques, main-d’oeuvre, technologies et données (voir figure 1). Une grainothèque dans une bibliothèque nécessite l’implication d’une main-d’oeuvre qui aura recours à différentes technologies lui permettant d’assurer la gestion et la description des données liées aux semences. La main-d’oeuvre impliquée dans la gestion de la grainothèque dans la bibliothèque collabore avec des personnes, des organismes ou des institutions leur permettant de réaliser la mission de la grainothèque.

Figure 1

Cadre conceptuel d’une grainothèque dans une bibliothèque

Cadre conceptuel d’une grainothèque dans une bibliothèque

-> Voir la liste des figures

Les grainothèques représentent, selon les écrits, la version moderne de la tradition de partage de semences (Tanner et Goodman, 2017). Ce sont des programmes communautaires offrant un accès gratuit à des semences à pollinisation libre (généralement des semences de fruits, de légumes et de fleurs) et à des ressources d’information connexes (Dean, 2018). Elles jouent un rôle dans la protection du patrimoine alimentaire d’une communauté en protégeant les variétés patrimoniales locales adaptées aux spécificités locales d’une communauté (Landgraf, 2015). Elles renforcent la biodiversité locale en se préoccupant des variétés de semences rares, locales et patrimoniales (Alger et al., 2014), et elles soutiennent le développement durable, les systèmes alimentaires locaux et facilitent l’accès à la nourriture et les conversations sur la justice sociale (Dean, 2018). Dans ce type de programme, les usagers empruntent des semences pour les cultiver chez eux. À la fin de la saison de croissance, l’usager récolte des semences et les remet à la grainothèque afin d’entretenir une collection locale durable (Ingalls, 2017 ; Landgraf, 2015). Les grainothèques jouent un rôle actif dans le renforcement des communautés grâce au partage des connaissances et des expériences, elles augmentent l’accès à la nourriture et elles peuvent favoriser un sentiment d’engagement et d’appartenance à la communauté chez les usagers (Dean, 2018 ; Desa, 2016).

L’introduction et la gestion des grainothèques dans les bibliothèques nécessite l’implication d’une main-d’oeuvre diversifiée. Dans cette étude, nous entendons par main-d’oeuvre l’ensemble des personnes qui interviennent et prennent en charge les différentes tâches en lien avec une grainothèque (préparation des semences, description des semences, organisation des formations et des ateliers, etc.). La grainothèque crée des interactions entre diverses parties prenantes rappelant ainsi la conception de la bibliothèque de David Lankes (2016). Ce dernier décrit la bibliothèque comme un système de systèmes participatifs créés et entretenus par les bibliothécaires avec et pour les communautés et où les individus partagent leurs intérêts, leurs expertises et des ressources (Lankes, 2016). Dans ce contexte, les grainothèques créent des opportunités de rencontre et de partage entre les membres de la communauté et renouvellent l’approche des bibliothèques conçues comme un « troisième lieu »[7] (Servet, 2018).

Différentes technologies, informatiques ou non, peuvent être utilisées pour soutenir les tâches dans une grainothèque. Dans notre étude, nous entendons par technologie toute « [p]ièce d’équipement ou technique permettant d’accomplir une activité particulière » (Organisation météorologique mondiale, 2011, s. p.).

Certaines technologies permettent de créer, de diffuser et de gérer les données en lien avec les semences. Nous considérons une donnée comme tout

[é]lément (fait, chiffre, etc.) qui est une information de base sur laquelle peuvent s’appuyer des décisions, des raisonnements, des recherches et qui est traité par l’humain avec ou sans l’aide de l’informatique.

Office québécois de la langue française, 2002, s. p.

Plus précisément, une information de base dans une grainothèque est l’information sur les différentes variétés de semences organisée et décrite dans un catalogue (informatique ou non) (par exemple, le nom commun de la semence, le nom botanique (scientifique), la variété, la date de récolte locale ou d’emballage, la provenance, le taux de germination, les notes, le niveau de compétence, etc.) (Conner, 2015 ; Desa, 2016).

Méthodologie

Dans le but de documenter les trois thématiques dans notre étude, nous avons procédé à une recension de la littérature nous permettant d’identifier les éléments pertinents touchant ce sujet de recherche. La première étape a consisté à construire une requête regroupant les différentes désignations des grainothèques adoptées par les bibliothèques québécoises tout en y ajoutant la limitation géographique du Québec. Cette requête a été lancée dans les bases de données Library, Information Science and Technology Abstracts (LISTA), Érudit et Google Scholar. Nous souhaitions, ce faisant, vérifier l’ampleur de la production littéraire sur les grainothèques au Québec.

Seuls deux écrits pertinents ont été repérés, ce qui a permis de constater que peu d’études ont été publiées sur les grainothèques au Québec. Ces publications, en anglais, analysent le déploiement de deux grainothèques. La première publication, par Dana Ingalls (2021), s’intitule « From seed to harvest: Growing the Macdonald Campus Seed Library ». Dans ce texte, l’autrice fait référence à une autre de ses publications ayant pour titre « Breaking new ground: The case for seed libraries in the academic library » (Ingalls, 2017). Ces textes traitent, entre autres, de la mise en oeuvre d’une grainothèque à l’Université McGill à Montréal. La deuxième publication recensée, « Building healthy community relationships through food security and food sovereignty » par Treena Delormier et Kaylia Marquis (2018), aborde notamment l’implantation d’une grainothèque dans la bibliothèque publique de Kahnawaké située sur la rive-sud de Montréal.

Le dépouillement du contenu de ces trois publications nous a permis de comprendre que les grainothèques sont à la base un « mouvement » (Ingalls, 2021) dont les pratiques remontent à plusieurs années (Delormier et Marquis, 2018). Dans cette perspective, notre plan de concept s’est élargi pour inclure, entre autres, les concepts de relations communautaires (community relationships), sécurité alimentaire (food security), souveraineté alimentaire (food sovereignty), engagement écologique (ecological engagement), échange de semences (seed exchange), semences d’héritage et semences anciennes (heirloom seeds), programme d’autosuffisance (self-sufficient program), don de semences (seed donation), conservation de semences (seed savingseed keeping), emprunts de semences (seed borrowing), banques de semences (seed banks).

Par la suite, et afin d’identifier le vocabulaire pour traiter des aspects technologiques, nous avons procédé au dépouillement des rapports annuels de Library Systems Reports publiés par l’American Library Association à partir de 2000. Nous avons combiné les termes identifiés à ceux des grainothèques et lancé notre recherche dans l’ensemble des bases de données du fournisseur ProQuest. Ceci nous a permis de repérer quatorze documents pertinents.

Un exercice similaire a été mené pour les concepts en lien avec le catalogage, le web de données, les bibliothèques d’objet, les collections atypiques. Ces termes, combinés à ceux décrivant les grainothèques, visaient à effectuer une recherche de documents pertinents en lien avec les pratiques de gestion, de description et de diffusion des données appliquées dans les grainothèques. Dix-huit documents ont été repérés, regroupant les 14 documents recensés auparavant dans la recherche sur les aspects technologiques.

Enfin, les écrits portant sur les événements d’inauguration des grainothèques ont permis de couvrir le sujet de la main-d’oeuvre impliquée dans ces initiatives grainothèques.

L’ensemble des 18 textes initialement identifiés a été complété par quelques autres provenant d’autres sources, notamment la littérature grise récupérée par perle de citation et par sérendipité, et aboutissant à un corpus final de 30 textes. Ce corpus couvre majoritairement les grainothèques nord-américaines au Canada et aux États-Unis. En raison de sa pertinence en lien avec notre recherche, un article analysant la mise en oeuvre de la grainothèque à l’École polytechnique supérieure de l’Université de Saragosse a également été inclus.

L’analyse du corpus identifié s’est basée sur une approche qualitative. La lecture et l’analyse comparative des textes ont permis de faire émerger de manière inductive les thématiques importantes et leurs relations. Un même texte peut avoir été associé à plusieurs thématiques différentes. Comme préconisé par Fortin et Gagnon (2016) :

la lecture critique au cours de laquelle les principaux éléments des sections ont été examinés, est suivie de l’analyse de l’ensemble des publications pertinentes, de leur comparaison et de la présentation des tendances, autant sur le plan des perspectives conceptuelles que théoriques ou encore de la méthode ou des résultats.

Fortin et Gagnon, 2016, p. 71

Les différentes thématiques présentées dans les résultats proviennent de cet exercice comparatif visant à synthétiser les écrits pertinents aux questions étudiées.

Résultats et synthèse des écrits

La main-d’oeuvre impliquée dans les grainothèques

Les écrits recensés montrent que l’implantation et l’organisation d’une grainothèque dans une bibliothèque reposent sur différentes formes de collaboration au sein d’une même bibliothèque, ou entre différentes bibliothèques. La bibliothèque est également susceptible de développer des partenariats avec des organismes communautaires ou des groupes sociaux.

Collaboration au sein d’une même bibliothèque ou d’une même organisation

Dans un contexte universitaire, la collaboration se crée entre des employés de différents services de la bibliothèque, par exemple, entre le service de développement des collections et le service des communications. Il est également possible de collaborer avec d’autres entités de l’université, tels que des consultants en développement web, afin de concevoir le site web de la grainothèque. Les bibliothécaires peuvent aussi collaborer avec les responsables des communications de la bibliothèque pour élaborer un logo et du matériel promotionnel destinés à promouvoir la grainothèque dans divers lieux, événements ou publications universitaires (Ingalls, 2021).

De plus, les grainothèques offrent diverses opportunités de collaboration entre la bibliothèque et la communauté universitaire dans le cadre de l’organisation d’ateliers de jardinage ou de conservation de semences pour les professeurs et des groupes étudiants intéressés par le jardinage ou le développement durable. En implantant une grainothèque dans la bibliothèque, cette dernière soutient l’enseignement et la recherche en mettant à la disposition de sa communauté des semences pouvant être utilisées dans des projets divers (Ingalls, 2021). Un service comme la grainothèque contribue également au bien-être des étudiants en offrant des activités de jardinage qui permettent de réduire le stress et d’améliorer la santé mentale, nutritionnelle, psychologique, physique et sociologique (Dean, 2018 ; Ingalls, 2021).

Collaboration entre bibliothèques

Cette revue de littérature nous a permis de constater l’existence de partage d’expériences et de pratiques ainsi que la collaboration entre différentes bibliothèques : les plus expérimentées aident celles qui désirent déployer une grainothèque dans leur démarche de mise en place du service. C’est le cas de la Mass Aggie Seed Library (MASL) qui a décidé, sur la base de l’expérience d’autres grainothèques, de ne pas informatiser sa grainothèque. Ils ont, en effet, observé, lors de la visite de deux grainothèques universitaires, que le processus de catalogage et de suivi des enveloppes de semences était fort exigeant et ne correspondait pas à leurs besoins. Dans leur grainothèque, une liste de semences a été fournie par le biais d’un ordinateur situé près de la grainothèque permettant une recherche dans la collection. L’ordinateur a, par la suite, été retiré en raison de sa sous-utilisation, les usagers préférant chercher dans les tiroirs étiquetés du catalogue de fiches de semences (Borrego, 2020).

La collaboration entre bibliothèques se concrétise aussi par le biais du catalogage original et dérivé et les catalogues partagés. Un catalogage original pour les semences a été réalisé dans les grainothèques de Missoula Public Library (MPL) à Montana aux États-Unis et les autres bibliothèques du consortium de Montana. Le système intégré de gestion de bibliothèque (SIGB) de MPL ou des autres bibliothèques du consortium de Montana n’incluait pas, en effet, de notices préexistantes sur des semences, ce qui éliminait la possibilité de catalogage dérivé. Le catalogage original effectué a facilité, par la suite, le partage des notices bibliographiques entre les bibliothèques du consortium ainsi que le catalogage dérivé et ensuite le partage des semences via le prêt entre bibliothèque (PEB) (Alger, Jonkel et Bray, 2014).

Collaboration entre bibliothèque et organisme communautaire ou mouvement social

Les textes recensés montrent que le partenariat entre une bibliothèque et un organisme communautaire ou un groupe social découle de l’existence préalable d’activités communautaires en lien avec le développement durable comme le jardinage. Jardiner est l’une des activités communautaires les plus populaires en Amérique du Nord : des centaines de variétés de cultures sont disponibles via l’échange dans des maisons de semences (Alger, Jonkel et Bray, 2014 ; Dean, 2018 ; Delormier et Marquis, 2018 ; Helicke, 2015 ; Peekhaus, 2018 ; Soleri, 2018). Avec la disparition d’environ 93 % de ces variétés dans les années 1980 en faveur des multinationales et des consortiums agroalimentaires, le mouvement d’échange de semences prend de plus en plus d’ampleur (Alger, Jonkel et Bray, 2014 ; Soleri, 2018).

Une première grainothèque a été lancée à Beverly en Californie en 1999 puis le nombre a atteint 900 en 2016 dans différents pays (Soleri, 2018). Plusieurs grainothèques ont commencé en tant que service indépendant avant d’être intégrées dans une bibliothèque. C’était le cas au Montana avec la coopérative alimentaire Missoula Community Food Co-Op qui fournit et promeut un accès abordable à des aliments locaux et simples. Cette coopérative gérait aussi une grainothèque appelée Five Valley Seed Library (FVSL) qui possédait des semences d’héritage, patrimoniales et indigènes. En raison de sa popularité et de son expansion, il s’est avéré nécessaire de la relocaliser. La Co-Op a alors établi un partenariat entre la FVSL et la MPL. Par le biais de ce service, cette dernière a pu rejoindre le mouvement de grainothèques qui s’étendait dans le pays, avec les avantages que cette grainothèque pouvait apporter à la communauté de Missoula. La bibliothèque a fourni l’espace et les ressources nécessaires pour accueillir la FVSL dans son établissement : une armoire adaptée à ce type d’items, une formation adéquate des bénévoles et du personnel impliqué, un catalogage, une stratégie de promotion, etc. (Alger, Jonkel et Bray, 2014). Dans leur étude, Alger, Jonkel et Bray (2014) mentionnent que le déploiement d’un tel service dans les bibliothèques exige que ces dernières soient prêtes à innover et à se transformer selon les besoins de la communauté. De plus, elles doivent comprendre qu’une grainothèque est une activité collective et qu’il s’avère crucial d’impliquer des bénévoles et des groupes intéressés (jardiniers, agriculteurs, écoles, éducateurs, etc.).

Raisons pour la collaboration et le partenariat

La littérature présente divers motifs expliquant la collaboration et le partenariat dans le cadre de la mise en place d’une grainothèque au sein d’une bibliothèque (Conner, 2014 ; CSS Marie-Victorin, 2022, Ingalls, 2017 ; Landgraf, 2015 ; Peekhaus, 2018 ; Richmond grows seed lending library, 2016 ; Tanner et Goodman, 2017). Les raisons relèvent tant de la grainothèque que de la bibliothèque.

Une grainothèque :

  • élargit la capacité de la bibliothèque dans la diffusion des types de connaissances différents ;

  • Démontre que la bibliothèque est toujours utile et plus pertinente que jamais, tout en innovant ;

  • contribue à promouvoir la bibliothèque en tant qu’agent actif et progressiste du changement dans sa communauté ;

  • fournit une infrastructure pour la préservation et le partage des connaissances et des expériences agricoles locales ;

  • se révèle plus efficace dans un établissement communautaire comme la bibliothèque.

Une bibliothèque :

  • organise des événements communautaires sur les semences (ateliers, formations, rencontres…) ;

  • est soutenue par des professionnels, comme les grainothécaires, qui proposent des solutions créatives dans les domaines de la sécurité alimentaire, la durabilité et l’engagement civique ;

  • fournit :

    • un espace physique accessible au public ;

    • un accès gratuit à des informations et des semences ;

    • des heures d’ouverture flexibles ;

    • du personnel spécialisé.

  • dispose d’un environnement de catalogage existant (SIGB, directives de catalogage, normes de description, politiques d’emprunts…) ;

  • possède des logiciels permettant de faire l’inventaire des semences ou de générer des statistiques facilitant la prise de décisions et la compréhension des parties prenantes sur l’utilité d’une grainothèque ;

  • soutient l’échange de semences grâce aux catalogues partagés facilitant un prêt entre bibliothèques.

Technologies déployées dans les grainothèques et leur fonctionnement

Dans les bibliothèques, le déploiement des technologies varie considérablement d’une grainothèque à une autre selon les décisions prises par les responsables, les besoins des publics, ainsi que les ressources mises à leurs dispositions (Borrego, 2020).

Quel que soit le type de technologies, celles-ci visent à gérer l’emprunt des semences, tracer leur provenance en cas de retour, créer des inventaires et produire des statistiques (Conner, 2014 ; Dean et Mezick, 2020 ; Roussil, 2023 ; Tanner et Goodman, 2017). Selon Conner (2014), il n’est pas nécessaire de tenir le registre des emprunteurs si la bibliothèque se limite à la distribution de semences. Cependant, celle-ci insiste sur l’importance d’avoir une liste des semences disponibles permettant de les localiser et qui pourra être imprimée et déposée à côté de la collection ou publiée en ligne sur le site web de la bibliothèque.

Les écrits recensés présentent trois types de technologies utilisées dans la mise en place d’une collection de semences : (1) les « technologies non informatisées » (par ex. : cahier, papier, crayon), (2) les « technologies informatisées autonomes » qui sont indépendantes des catalogues des bibliothèques (par ex. : sites et pages web, logiciels : SPORO, LibAnalytics, LibInsight, réseaux sociaux : Facebook, Pinterest, Twitter (X), blogues), et (3) les « SIGB existants » dans les bibliothèques (par ex. : Millennium).

Technologies non informatisées

Plusieurs bibliothèques utilisent un système d’emprunt très informel comme la Richmond Grows Seed Lending Library. Dans ce système, basé sur la confiance (Tanner et Goodman, 2017), les usagers sont encouragés à prendre la quantité de semences dont ils ont besoin : « [i]t operates on an honor system, with no library card needed »[8] (Landgraf, 2015, p. 61).

À son tour, la MASL « consciously decided to go low-tech, almost no-tech, due to the freedom this approach allowed »[9] (Borrego, 2020, s.p.). Tel que précisé plus tôt, cette décision a été prise à la suite de la visite de deux grainothèques universitaires prenant soin de cataloguer et de faire le suivi concernant chaque enveloppe de semences. Il a été constaté que ce processus s’avérait exigeant et n’était pas conforme aux objectifs ou aux besoins de leur projet de grainothèque (Borrego, 2020).

La grainothèque de la bibliothèque du Reynolds Community College a également opté pour une approche simple permettant aux utilisateurs d’emprunter des semences après avoir rempli un formulaire papier. Dans cette grainothèque non informatisée, on a noté de faibles retours de semences qui ont eu pour effet de réduire la diversité de la collection. Ceci n’a pas semblé constituer un problème pour les gestionnaires du projet : ce qui importe, selon ces derniers, c’est de mettre les semences entre les mains des gens et de susciter une réflexion à leur sujet (« to get seeds out there in people’s hands and get them thinking about it »)[10] (Vilelle, 2017, s.p.).

Technologies informatisées autonomes

Dans ce contexte, les gestionnaires des grainothèques prennent soin de mettre les collections de semences en ligne, en ayant recours à des technologies informatiques diversifiées, surtout sur des sites web, en dehors des catalogues des bibliothèques (Ingalls, 2021 ; Mehra, Sikes et Singh, 2020 ; Singh, Mehra et Sikes, 2021). À la Macdonald Campus Seed Library à l’Université McGill à Montréal, le système de gestion des semences ainsi que le système d’emprunt étaient séparés du catalogue ou du système de gestion des collections principal des bibliothèques. Ingalls (2021) explique que le catalogue en réseau utilisé par la bibliothèque de McGill, WorldCat, est non personnalisable et s’avère peu pratique pour intégrer des notices d’une collection de semences en constante évolution. Dans le but de contourner le problème, une page web sur le site de la bibliothèque a été créée pour mettre en ligne la collection des semences. L’emprunt se fait à l’aide d’un formulaire papier ou en ligne. Dans ce système, il n’était pas nécessaire d’apposer des codes-barres aux enveloppes de semences ni de fixer une date d’échéance puisqu’il n’était pas important de savoir qui a emprunté quoi. L’évaluation des stocks de semences et la gestion de l’inventaire constituent les principales activités soutenues par la technologie retenue (Ingalls, 2021).

Dans les institutions publiques d’enseignement supérieur à Knoxville au Tennessee, la Pellissippi State Community College (PSCC) et à l’Université de Tennessee (UT), il était important d’évaluer et de démontrer la valeur de la grainothèque. Dean et Mezick (2020) décrivent les technologies utilisées pour faire un suivi des collections de semences. L’utilisation de la grainothèque est en effet un élément essentiel pour les parties prenantes, de même que pour l’existence et l’avenir de celle-ci. À cette fin, un système de collecte de données statistiques est créé qui fournit une vision globale de la grainothèque. Différentes méthodes de collecte de données statistiques sont examinées, en tenant notamment compte de la manière dont les données sont présentées ainsi que de la facilité de lecture et/ou de compilation des données. Pour réaliser ces statistiques, la grainothèque du PSCC utilise d’abord LibAnalytics puis LibInsight, un des produits de SpringShare conçu spécifiquement pour les bibliothèques. Ce produit est déjà utilisé dans les bibliothèques du PSCC et constitue le principal système de collecte de données statistiques, ce qui a permis de fournir un moyen facile de recueillir des statistiques sans requérir de coût supplémentaire ou de temps additionnel pour familiariser le personnel à un nouveau dispositif. Dans le but de former la collection de semences de la grainothèque de l’UT, les données de la grainothèque de PSCC sont utilisées en déterminant les types de semences les plus populaires (Dean et Mezick, 2020).

Au PSCC, les utilisateurs sélectionnent leurs semences dans la collection, puis les apportent au bureau de référence où un bibliothécaire remplit le formulaire sur le logiciel LibInsight. À l’UT, les utilisateurs sélectionnent leurs enveloppes de semences, puis remplissent eux-mêmes le formulaire sur un iPad déposé à côté de la grainothèque. Ces technologies ont permis de fournir des données sur le nombre de transactions dans les grainothèques, le profil des personnes qui les utilisent, le nombre des enveloppes empruntées chaque semestre, et par la suite de montrer l’intérêt d’un tel service au sein de ces communautés (Dean et Mezick, 2020).

Conner (2014) souligne l’utilité des réseaux sociaux, pour cette catégorie de technologies informatisées autonomes ; ceux-ci favorisent la diffusion des images, des informations et des interactions entre les usagers des grainothèques. En plus de Facebook, Twitter et les blogues, Conner propose le site de réseautage social et de partage de photographies Pinterest qui est utilisé comme catalogue de semences par la Washington County Seed Savers Library (Conner, 2014).

SIGB existants

Certaines grainothèques vont plus loin dans la gestion des collections de semences en intégrant la description des semences dans leur SIGB. À l’aide de ce type de système sophistiqué, comme le décrivent Tanner et Goodman (2017), les semences peuvent être ajoutées au catalogue en ligne et les enveloppes de semences peuvent être scannées à l’instar d’un livre. En revanche, il n’y a pas de date d’échéance pour les emprunts liés à cette collection. De plus, la distribution des semences dans des enveloppes individuelles avec des codes-barres facilite le PEB lorsque ce service est prévu. En apposant des codes-barres sur les enveloppes, ceci permet de scanner les paquets de semences et de les emprunter comme n’importe quel autre document (Ingalls, 2017 ; Tanner et Goodman, 2017).

Cependant, le catalogage des collections de semence s’est parfois avéré difficile et certains problèmes ont été rencontrés, notamment en relation avec les systèmes informatiques utilisés dans les bibliothèques, par exemple en ce qui a trait aux amendes dans le cas des retards et à la date d’échéance pour les retours (Tanner et Goodman, 2017). Peekhaus (2018) rapporte aussi des difficultés rencontrées dans les bibliothèques qui ont intégré leurs grainothèques dans un SIGB. Dans ces systèmes, les bibliothécaires ont attribué le critère « Spécial » comme un type distinct pour les semences afin de s’assurer qu’aucune amende de retard ou de coût de remplacement ne leur soit associé. Toutefois, certains systèmes de bibliothèques intégrés (par ex. : Millennium integrated library system) ne permettent pas de contrôler cette option, ce qui maintient l’emprunt de semences sur le compte des usagers jusqu’à ce qu’elles soient retournées, c’est-à-dire à la fin de la saison en cas de retour - ce qui n’arrive pas la plupart du temps. Cette situation nécessite une intervention de la part des bibliothécaires qui produisent un rapport mensuel pour ce type de « documents spéciaux », puis suppriment manuellement les prêts des semences des comptes des usagers (Peekhaus, 2018).

Pratiques d’organisation et de description des données de semences

Peekhaus (2018) soulève deux questions essentielles et que les grainothécaires doivent se poser avant d’entreprendre l’organisation d’une grainothèque : « Should the collection […] have different sections for ornamentals, for herbs, and for vegetables ? Should the collection be classified according to seed-saving difficulty ? »[11] (Peekhaus, 2018, p. 277). Cette seconde question exige que les grainothécaires possèdent ou acquièrent des connaissances sur la conservation des semences (Peekhaus, 2018 ; Vernooy, Shrestha et Sthapit, 2017). De même, Desa (2016) insiste sur la nécessité de prendre une décision quant à la manière d’afficher, catégoriser et collecter des informations sur les semences (trier les semences par famille, par ordre alphabétique de nom commun, par type de semences (biologique, héritage, légume, fleur, etc.). Différentes pratiques d’organisation et de description sont présentées dans la littérature que l’on peut mettre en lien avec les types de technologies déployées.

Organisation alphabétique simple

Dans certains systèmes, l’organisation alphabétique simple selon le nom de la semence est appliquée. Cette organisation ne nécessitant aucune connaissance en agriculture ou sur les codes d’organisation, elle s’avère facile à comprendre par tout usager (Ingalls, 2017, 2021). Ce type d’organisation s’applique généralement bien aux grainothèques n’ayant pas informatisées leurs collections et où la recherche est généralement manuelle (Borrego, 2020).

Organisation par catégories organisées alphabétiquement

Pour des grainothèques ayant adopté des technologies autonomes, il existe des systèmes d’organisation plus complexes qui peuvent aider les utilisateurs à trouver les semences convenant à leur expertise et à leur expérience en agriculture. Ces systèmes supposent tout d’abord de séparer les semences par types (légumes, fruits, fleurs), puis à organiser chaque type par ordre alphabétique ou par degré de difficulté pour les cultiver et les conserver (facile, modéré, avancé) (Ingalls, 2017, 2021 ; Roberson, 2016).

Exemple du Pellissippi State Community College (PSCC) et de l’Université du Tennessee (UT)

Dean et Mezick (2020) décrivent dans leur article l’organisation des grainothèques de PSCC et de l’UT. Bien que cette organisation comporte quelques différences dans les pratiques entre les deux institutions, nous tenons à mettre l’accent ici sur la pratique organisationnelle, et non sur les points distincts. L’objectif de ces grainothèques est de fournir aux usagers des semences pour cultiver des aliments. Les semences de légumes sont, par conséquent, plus nombreuses que celles de fleurs et d’herbes. Pour cette raison, les fleurs et les herbes sont regroupées dans le catalogue sans distinction de catégories, ce qui permet aux usagers de les trouver facilement.

Les légumes, quant à eux, sont organisés par ordre alphabétique comme suit :

  • Par type (par exemple, beans,corn, eggplant, flower, greens, herb, lettuce, etc.)

  • Au sein de chaque type, par exemple la laitue, chaque variété est organisée par ordre alphabétique (par exemple, amish deer tongue, baby oakleaf, buttercrunch, iceberg, little gem, etc.)

  • Dans les catalogues des plus petites grainothèques du campus du PSCC, les collections sont classées par ordre alphabétique sans organisation par type (par exemple, basil, beans, corn, dill, greens, lettuce, nasturtium, pansy, etc.)

La conservation des semences est encouragée par le biais des présentoirs des grainothèques qui signalent eux-mêmes cette possibilité, au moyen d’une affichette, ou alors grâce à l’étiquetage des tiroirs du catalogue manuel de cartes et à l’intérieur des boîtes :

  • Les étiquettes sont entourées de vert, de jaune ou de rouge pour indiquer le niveau de difficulté à conserver les semences de chaque type (débutant, intermédiaire, avancé).

  • Des informations sur la conservation des semences sont fournies sur des étiquettes collées sur les enveloppes pour une référence rapide.

  • Des icônes indiquant la ou les saisons de plantation (une feuille verte, un soleil, une feuille orange et un flocon de neige) ont aussi été attribués aux semences.

L’étiquetage, ou la classification, par degré de difficulté a dissuadé certains usagers novices en agriculture d’emprunter certaines semences de la collection nécessitant plus d’expertise accrue.

Les épaisseurs des enveloppes de semences varient d’une enveloppe à une autre selon la taille des semences. Ce critère a été pris en considération en donnant plus d’espace à celles qui sont volumineuses par rapport à celles qui occupent moins d’espace. Par exemple, une variété de haricots peut finir par occuper tout un rang tandis que plusieurs variétés de tomates peuvent être placées sur un même rang (Dean et Mezick, 2020).

Organisation scientifique par nom botanique

Cette organisation, utilisée surtout dans un environnement de technologies informatisées autonomes, s’avère plus complexe et potentiellement moins conviviale pour le grand public. Elle consiste à organiser les semences selon leurs noms botaniques (Conner, 2014). D’excellentes raisons supportent le recours à ce système ; c’est notamment le cas lorsqu’une même variété de plantes peut avoir plusieurs noms communs utilisés à la fois par les jardiniers et les entreprises semencières. Dans ces conditions, l’utilisation du nom botanique évite toute confusion quant à la nature exacte d’une semence particulière. Ce système peut convenir à une bibliothèque universitaire, surtout si la bibliothèque choisit de mettre l’accent sur des thèmes liés à la recherche (Conner, 2014 ; Ingalls, 2017, 2021).

Catalogage dans un SIGB

Peekhaus (2018) mentionne que certaines grainothèques optent pour l’intégration de leurs semences à leur SIGB. Dans ce système, les catalogueurs créent des notices bibliographiques spéciales pour chaque variété de semences, et chacune de ces notices contient des vedettes-matières différentes. Plusieurs de ces vedettes-matières sont intentionnellement générales et communes à toutes les notices de semences afin de s’assurer que les personnes effectuant des recherches par mot-clé pour des éléments connexes soient informées de la présence de semences. Dans un tel système, chaque semence a sa propre notice bibliographique et est cataloguée par son nom commun et sa variété (par ex. : Tomate : Brandywine). Les semences sont également cataloguées selon le degré de difficulté de la conservation des semences (Peekhaus, 2018).

Lorsque des codes-barres sont attribués aux enveloppes de semences, le PEB est facilité dans la mesure où ce service s’applique (Tanner et Goodman, 2017). Par exemple, le catalogage des semences et l’attribution de codes-barres aux enveloppes rendent possible le PEB entre les 12 succursales du système des bibliothèques d’Omaha. Ceci permet aux usagers de demander des semences à partir de n’importe quelle succursale pour les faire livrer près de leur domicile tout comme un livre ou tout autre matériel de bibliothèque (Alger, Jonkel et Bray, 2014 ; Kokroko, 2013 ; Landgraf, 2015).

Le format MARC, qui est un format d’échange de données bibliographiques informatisées des catalogues de bibliothèques, est l’un des formats utilisés par certaines grainothèques pour décrire leurs collections. C’est aussi le cas en ce qui concerne la norme de description RDA.

Exemple de l’École polytechnique supérieure de l’Université de Saragosse

Corda et Tello (2019), dans leur article « Dilemas de formatos y normas para catalogar semillas agroecológicas », discutent des choix de formats et de normes pour le catalogage des semences agroécologiques. Elles considèrent que le catalogage des semences est un défi, car il s’agit d’un élément inhabituel pour une bibliothèque. Cependant, elles estiment qu’il est d’une importance vitale de les inclure dans le catalogue, non seulement pour assurer une plus grande visibilité au projet, mais aussi pour la valeur ajoutée qu’apporte la grainothèque aux services de la bibliothèque.

Afin d’accomplir cette tâche, elles se sont inspirées de l’expérience de l’École polytechnique supérieure de l’Université de Saragosse qui avait déjà intégré les semences dans leur catalogue général. En outre, les standards traditionnels de catalogage AACR2, les standards RDA et les particularités du format MARC21 utilisés dans le système Koha ont été pris en compte. Des critères et des instructions ont été précisés pour cataloguer les semences agroécologiques telles que détaillées ci-après.

Plusieurs décisions ont été prises par rapport aux différents champs MARC (Corda et Tello, 2019) :

  • Les champs de données codées pertinentes complétées au format MARC ont été remplis comme suit :

    • En-tête :

      • Type d’enregistrement : r - artefact tridimensionnel ou objet naturel.

      • Niveau bibliographique : c - collection.

    • 007 :

      • Type de matériel : z, non spécifié.

      • Désignation spécifique de matériel : z, autre.

    • 008 :

      • Type de matériel : VM, matériel visuel.

      • Type de date, statut de publication : b, date non fournie, date liée.

      • Date 1 : il a été décidé d’inscrire l’année de catalogage si l’année de récolte ou de conditionnement des semences ne peut pas être obtenue, car il est important de tenir compte du temps approximatif de conservation et de stockage.

      • Forme de l’élément : #, aucun des éléments suivants.

      • Type de matériel visuel : z, autre.

      • Technique : |, non utilisée.

  • Les champs de titre :

    • MARC 245 $a (titre propre) : correspondrait au nom simple et singulier de la semence, détaillant la variété de l’espèce séparée par une virgule.

    • MARC 246 (forme variante du titre) : correspondrait au nom scientifique et à la famille de la semence décrite.

  • Les champs de la désignation générale du matériel :

    • Type de contenu : MARC 360 $a forme tridimensionnelle $b tdf $2 rdacontent

    • Type de média : MARC 337 $a autre $b x $2 rdamedia

    • Type de support : MARC 338 $a objet $b nr $2 rdacarrier

    • Le terme « Objet » a été appliqué aux semences comme le terme « semence » n’est pas dans les listes de termes fournies dans les AACR2 ou dans la RDA.

    • Description physique : MARC 380 $a env. 20 s.

    • Pour enregistrer l’extension du support, les normes AACR2 10.5 (description physique des supports tridimensionnels) et RDA 3.4.6.2 (extension de support tridimensionnel) ont été évaluées. Les deux prévoient que, si les termes fournis dans les listes ne sont pas appropriés, ils peuvent être librement décrits avec les termes correspondant de manière concise. Dans ce cas, le nombre approximatif de semences dans les enveloppes a été attribué à ce champ. Par exemple : env. 20 s. (environ 20 semences).

  • Le champ 037 - Source d’acquisition : Il a été nécessaire d’enregistrer l’origine des semences, qu’il s’agisse d’entreprises productrices de semences ou de particuliers qui les ont récoltées. Le champ MARC qui a semblé le plus approprié pour ces données est 037 (Source d’acquisition).

  • Le champ 500 – Notes générales : Dans ce champ, des informations abrégées ont été incorporées se référant aux caractéristiques des semences, leur semis, leur entretien, leur culture et leur récolte.

  • Le champ 650 - Sujet ajouté Entrée-Terme d’actualité (champ de descriptif thématique) : Des descripteurs thématiques, propres à la bibliothèque, ont été tirés du serveur des vocabulaires contrôlés Tematres.

  • Le champ de l’identification physique : des codes alphanumériques ont été attribués à l’aide des tables Cutter en partant des noms simples et en différenciant les codes répétés avec les initiales de la variété de graines. Ceci a permis de stocker et de trier les semences par code et de les localiser rapidement (Par ex. : Lechuga, variedad gallega: L459, Lechuga, variedad criolla: L459c, Lechuga, variedad grand rapid: L459gr).

Enfin, les semences ont été distribuées dans de petites enveloppes avec un code-barre unique pour chaque variété.

Conclusion

Les textes recensés présentent trois exemples concrets de collaboration et de partenariat par le biais des grainothèques :

  1. La collaboration au sein de la même bibliothèque où les employés des différents services de la même bibliothèque collaborent. Dans le milieu universitaire, la collaboration peut s’étendre à d’autres services de l’université et contribue à améliorer le bien-être des étudiants.

  2. La collaboration entre bibliothèques se concrétisant par le partage d’expériences et de pratiques de gestion et de description des grainothèques, ainsi que par le biais du catalogage original et dérivé et les catalogues partagés.

  3. La collaboration entre bibliothèque et organismes communautaires ou mouvements sociaux où la bibliothèque rejoint le mouvement de la communauté dans ses activités en lien avec le développement durable.

Ces trois dimensions nous permettent de réaliser que les grainothèques déploient des activités qui vont au-delà de la distribution gratuite de semences. Elles proposent des projets communautaires visant à favoriser une souveraineté et une sécurité alimentaire ainsi qu’un développement durable. Afin d’intégrer ce mouvement, les bibliothèques ont dû adapter leurs approches pour identifier les meilleurs pratiques dans le but de rendre ce service accessible à la communauté.

L’analyse des écrits nous a permis de brosser un portrait de ces pratiques et d’approfondir notre compréhension des technologies déployées et du niveau d’organisation et de description des données des semences lesquels diffèrent d’un environnement à l’autre.

Nous avons recensé trois types de technologies déployées dans des grainothèques :

  1. Des technologies non informatisées où les grainothèques n’utilisent pas l’informatique. La gestion de ces collections se base sur l’honneur dans des bibliothèques qui ne cherchent pas à suivre la trace des semences ou à produire des statistiques.

  2. Des technologies informatisées autonomes où la collection des semences est gérée par des technologies indépendantes du catalogue de la bibliothèque. Certaines, comme les sites web, représentent une alternative lorsque l’intégration des données des semences dans le SIGB semble être moins pratique. D’autres, comme les logiciels, assurent un inventaire des semences, facilitent l’approvisionnement et aident à la prise de décision au sujet de la grainothèque. Enfin, les réseaux sociaux permettent une communication facile, rapide et pratique entre les usagers de la grainothèque.

  3. Les SIGB où les données sur les semences sont intégrées dans le catalogue de la bibliothèque comme tous les autres documents. Le but de cette intégration est de faciliter le repérage, les emprunts et le PEB, malgré certaines difficultés techniques concernant la date d’échéance et les amendes.

Par rapport à la description et à l’organisation des données des semences, les pratiques sont diversifiées. Nous trouvons :

  1. L’organisation alphabétique simple qui semble convenir aux usagers n’ayant pas de connaissances en agriculture ou en codes d’organisation.

  2. L’organisation par types organisées alphabétiquement et où des icônes et des descriptions plus élaborées ont été produites, et qui s’avère adéquate pour les usagers ayant un minimum d’expertise et d’expérience en agriculture.

  3. L’organisation scientifique par nom botanique facilitant la distinction des semences d’une même variété de plantes qui semble convenir à un environnement universitaire et aux entreprises de semences plutôt qu’au grand public.

  4. Le catalogage dans un SIGB où les grainothécaires ont pu adapter la spécificité de cette collection de semences aux standards et aux normes d’organisation et de description de cet environnement (normes AACR2, RDA et format MARC). Les vedettes-matières semblent également être importantes pour informer les chercheurs de la disponibilité des semences de la bibliothèque et pour rendre cette collection de plus en plus visible et accessible.

  5. Cette revue de littérature a permis de mettre au jour des exemples de collaboration, de partenariat, de technologies et de pratiques d’organisation et de description de grainothèques dans plusieurs contextes et régions. Nous nous proposons maintenant, et à la lumière de ces informations, d’entreprendre une enquête et d’aller dans les milieux afin de mieux comprendre la réalité québécoise en ce qui a trait aux caractéristiques des grainothèques, et d’explorer les technologies déployées pour soutenir leurs activités.