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Alors que les dialogues oecuméniques ont fait des progrès considérables sur la question mariale qui avait paru un jour diviser les Églises — en témoignent le document de la Commission luthéro-catholique des États-Unis et celui du Groupe de travail luthéro-catholique allemand, le texte du Groupe des Dombes et le consensus auxquels sont parvenus les membres de la Commission internationale de dialogue entre anglicans et catholiques —, la reprise de certains développements mariologiques risque à nouveau non seulement de diviser les Églises chrétiennes, mais de déchirer l’Église catholique elle-même. Dans ce petit ouvrage, Hendro Munsterman instruit le débat sur un des titres mariaux controversé, « Marie corédemptrice », l’autre étant « Marie médiatrice ».
Le premier chapitre, « Les choix mariologiques du concile Vatican II », situe le débat sur un horizon plus vaste : la mariologie avant Vatican II, le discernement opéré au moment du concile et les choix mariologiques de Vatican II et la théologie et la piété mariale après Vatican II. C’est sur cet horizon que le deuxième chapitre examine le titre marial controversé, coredemptrix, après un premier développement sur la naissance et le développement des titres mariaux, observant au passage le transfert sur Marie de titres initialement attribués à l’Église et à l’Esprit Saint. C’est ensuite que l’auteur examine l’apparition et la signification du titre coredemptrix au xve siècle, titre qui s’enracinait cependant dans le titre de Redemptrix attribué à Marie à partir du xe siècle. H.M. examine ensuite l’usage de ce titre chez les théologiens et, enfin, dans les textes romains (5 occurrences, toutes au xxe siècle), les trois premières n’étant pas du pape lui-même et la dernière occurrence remontant à 1935 si l’on excepte six mentions par Jean-Paul II dans ses discours. Le dossier étant établi, l’auteur s’interroge à la fin de ce chapitre sur la signification que veulent actuellement donner à ce titre les promoteurs de sa dogmatisation, en particulier les promoteurs de la pétition en ligne « vox populi ».
Dans le troisième et dernier chapitre, l’auteur propose dix arguments contre l’utilisation de ce titre, s’appuyant notamment sur la Déclaration de la commission théologique internationale du congrès mariologique de Czestochowa.
Cet ouvrage, simple et accessible, est utile au moment où le débat sur la piété mariale et son orientation reprend. Il s’agit d’une étude fort équilibrée qui permet de remettre en contexte certaines idées et de les apprécier dans leur devenir historique. La théologie mariale de langue française a produit trop peu d’ouvrages solides au cours des dernières années, à côté d’une abondante littérature pieuse qui manque parfois d’équilibre et de perspectives historiques et doctrinales. Cet ouvrage, avec quelques autres, vient compenser un peu.