Introduction : passer de la séquence théorie-pratique à la séquence pratique-théorie[Record]

  • François Guillemette and
  • Jason Luckerhoff

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  • François Guillemette
    Université du Québec à Trois-Rivières

  • Jason Luckerhoff
    Université du Québec à Trois-Rivières

Depuis quelques décennies, la recherche en pédagogie est en pleine effervescence, notamment dans les milieux académiques anglophones et francophones. Spécifiquement dans la recherche en enseignement, les chercheurs et les professionnels sont passés d’un modèle dit traditionnel, qui consiste à transmettre la matière, à un modèle où l’enseignement consiste à guider l’apprenant dans son activité d’apprentissage. Une des raisons de cette transition se trouve dans le constat de l’inefficacité du modèle transmissif, notamment parce qu’il maintient l’apprenant dans la passivité et parce qu’il ne vise que la rétention de l’information transmise sans développer les habiletés comme le transfert des connaissances ou l’analyse et la créativité. De plus, ce ne sont que les plus performants, parmi les apprenants, qui réussissent à tirer profit de ces stratégies transmissives. Et encore, c’est souvent parce qu’ils ont appris à revoir par eux-mêmes les connaissances transmises lorsque vient le moment de les réinvestir dans des situations concrètes comme des exercices ou des situations d’évaluation, par exemple. Lorsque la pratique habituelle consiste à vérifier si l’apprenant est capable de se débrouiller seul avec les connaissances qu’on lui a transmises, il n’est pas surprenant de constater que ceux qui sont déjà autonomes le deviennent davantage, alors que les autres sont abandonnés à eux-mêmes, sans soutien au transfert et sans aide pour relever des défis toujours plus grands. Vygotsky (1978) a montré, au début du siècle dernier, que l’abandon est le contraire de l’autonomisation. Laisser un élève qui aurait besoin d’être soutenu se débrouiller seul ne favorise donc pas son autonomie, mais le place dans une situation d’échec en raison de l’abandon. Dans ce contexte de transition fondamentale en pédagogie, les approches inductives se présentent comme une façon de placer l’apprenant au centre de son apprentissage. C’est lui qui apprend. En français, le verbe apprendre peut être synonyme d’enseigner, mais son sens premier signifie que c’est l’apprenant qui apprend et non l’enseignant qui lui apprend. Évidemment, cela ne signifie pas que l’enseignant ne fait rien, au contraire. Les recherches montrent que l’apprentissage et la réussite sont grandement favorisés par la manière dont les enseignants soutiennent et guident l’apprentissage. Ce dernier facteur est de loin le plus important, bien avant la motivation de l’apprenant ou ses antécédents scolaires. Au fond, la question essentielle est peut-être la suivante : l’enseignant doit-il être un maître ou un pédagogue? Ici comme ailleurs, il est utile de recourir à l’étymologie : Dans la Rome antique, le pédagogue guidait l’enfant vers le maître. On trouve donc les deux rôles chez l’enseignant d’aujourd’hui, celui du pédagogue et celui du maître. Le problème avec le modèle transmissif, c’est qu’il ne valorise que le rôle du maître. Au final, si personne ne joue le rôle de guide, l’apprenant n’apprendra rien du maître, à moins, comme mentionné plus haut, d’être un élève très performant capable de devenir son propre guide. C’est là que se trouve toute la pertinence, voire la nécessité absolue des approches inductives. Essentiellement, elles assurent que l’apprenant demeure au centre de l’activité, le moteur de son apprentissage et la ressource première de la tâche qu’il accomplit. Le rôle de pédagogue est au service de l’apprenant, en soutien; il assure le pilotage. Il est essentiel à l’apprentissage parce que c’est lui qui conduit. Le mot conducteur est de la même famille latine qu’éducateur (et que duce, en italien, docentes en espagnol). C’est le leader. Le suffixe gogie dans le terme pédagogie est très rare en français. Il vient du grec aγωγός (agogos) qui signifie guide ou conducteur. Le rôle de maître correspond davantage au modèle traditionnel de transmission et, dès …

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