Abstracts
Résumé
L’adoption de la Convention des Nations Unies portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales (BBNJ) (dit « traité de la haute mer ») est le produit de près de vingt années de négociations internationales. Dans un contexte international où les États d’Amérique Latine et Caraïbes (ALC) sont traditionnellement présentés comme occupant une position périphérique, cet article examine l’influence des États ALC dans le processus d’élaboration normative touchant à la régulation de la haute mer. Pour ce faire, une analyse qualitative ayant recours au process-tracing est appliquée à la période 2008-2022 et nourrie par une diversité de sources (sites onusiens, entretiens semi-directifs, projets de recherche, littérature grise). Cet article se positionne ainsi au croisement de deux débats : le premier, portant sur les États ALC dans les négociations internationales environnementales et océaniques ; le second, relatif à la place de l’ALC dans l’élaboration des normes globales.
Mots-clés :
- Océans,
- négociation internationale,
- Amérique latine,
- Caraïbes,
- diplomatie
Abstract
The adoption of the United Nations Convention on the Conservation and Sustainable Use of Marine Biodiversity beyond National Jurisdiction (BBNJ) (known as the “High Seas Treaty”) is the product of almost twenty years of international negotiations. In an international context where Latin American and Caribbean (LAC) states are traditionally presented as occupying a peripheral position, this article examines the influence of LAC states in the normative development process affecting the regulation of the high seas. To this end, a qualitative analysis using process-tracing is applied to the period 2008-2022, drawing on a variety of sources (UN sites, semi-structured interviews, research projects, grey literature). The article is thus positioned at the crossroads of two debates: the first, on LAC States in international environmental and oceanic negotiations ; the second, on the place of LAC in the development of global standards.
Keywords:
- Oceans,
- international negotiations,
- Latin America,
- Caribbean,
- diplomacy
Article body
La « Conférence intergouvernementale sur un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale », mieux connue sous le nom de négociations « BBNJ » (Biodiversity Beyond National Jurisdictions), s’est ouverte le 4 septembre 2018 à New York. À l’issue des quatre sessions de négociations initialement prévues par l’Assemblée Générale des Nations Unies (AGNU)[1], l’objectif est d’élaborer un accord juridique international contraignant permettant de bâtir un cadre de régulation internationale de la haute mer.
Cette négociation s’inscrit dans la continuité de la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer (CNUDM), adoptée en 1982 (Montego Bay, Jamaïque). Si cette Convention délimita les espaces marins sous souveraineté étatique ainsi que les activités que les États et leurs ressortissants peuvent y mener, la haute mer demeura sans contrôle ni régulation effective (mare liberum). Constituant 46 % de l’espace planétaire et assumant une fonction centrale dans les échanges écosystémiques (captation de chaleur, du CO2), la nécessité d’un encadrement des pratiques dans la haute mer s’est imposée en réponse à l’intensification des activités extractives dans les fonds marins et les menaces à la biodiversité marine du fait de la surpêche. De surcroit, cette intensification des activités menées en haute mer affecte de manière croissante les intérêts économiques des États dans les Zones économiques exclusives (ZEE) (réduction des ressources halieutiques, pollution). En intervenant sur les zones maritimes au-delà de la juridiction nationale, cet accord vise ainsi à garantir la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine dans son ensemble (A/RES/72/249, 2017)
Les États d’Amérique Latine et Caraïbes (ALC) sont directement exposés et affectés par les variations de la biodiversité marine et la santé globale des océans. De fait, vingt-trois des trente-trois États de la région disposent de plus de zones marines que de territoires terrestres (la mer représente 60 % des territoires souverains). Environ 2,3 millions de personnes vivent directement ou indirectement des activités de la pêche et 27 % de la population vit en zone côtière. Par ailleurs, 47 des 258 écorégions marines du monde se trouvent en ALC (CEPAL 2020). Ainsi l’importance et la centralité des océans pour les États de la région justifie leur engagement dans ces négociations, tant ils sont vulnérables à la surpêche, la pollution et l’exploitation minière des fonds marins.
Au-delà des intérêts stratégiques que représentent les océans et cette négociation, les États ALC ont longtemps été considérés comme occupant une position périphérique dans les négociations internationales (Edwards et Robert 2015), à l’exception toutefois du Brésil ou du Mexique (Albaret 2014). Ce constat repose sur des facteurs structurels liés aux capacités étatiques et notamment la capacité à projeter leurs intérêts dans les arènes multilatérales. De récents travaux ont en revanche remis en question cette relégation à la périphérie, en se penchant notamment sur la constitution des accords économiques internationaux (Helleiner 2014) ou encore les conventions relatives aux droits humains (Sikkink 2014 ; Fuentes-Julio 2020). D’autres travaux ont marqué le rôle joué par les États ALC dans l’élaboration de normes globales, notamment les questions relatives à la prolifération des armes nucléaires (Patti 2020) ou encore la reconnaissance des droits des peuples autochtones (Hoffmann 2020). Ainsi, nous proposons de dresser une évaluation similaire au prisme d’un enjeu environnemental et climatique majeur : la régulation de l’océan. À cet égard, la négociation du « traité de la haute mer » demeure un objet encore inexploré dont nous entendons empiriquement rendre compte.
Nous interrogeons ici l’influence des États ALC dans le processus d’élaboration des normes relatives à la régulation de la haute mer. Pour ce faire, après une contextualisation générale (I), nous présentons le cadre analytique, méthodes et données (II) qui nous permettent d’examiner la négociation (III) et d’identifier les outils et stratégies de la diplomatie océanique des États ALC (IV).
I – L’ALC, la diplomatie environnementale et les normes globales
Cet article se positionne au croisement de deux blocs de littérature : le premier, portant sur les États ALC dans les négociations internationales environnementales et océaniques (A) ; le second, relatif à la place de l’ALC dans l’élaboration des normes globales (B). En lien étroit avec ces littératures, apparaît en filigrane la question de la place des États dits périphériques dans les négociations internationales et plus généralement dans la détermination des contours de l’ordre global.
A – L’ALC dans les négociations internationales environnementales
Si la littérature sur les négociations internationales environnementales est vaste, celle portant sur la place spécifique des États latino-américains demeure limitée. Pour autant, les États ALC font preuve d’engagement diplomatique en la matière. Watts et Depledge (2018) rappellent notamment le rôle du Brésil lors du Sommet de la Terre à Rio (1992), le rôle de l’Argentin Raul Estrada Oyuela considéré comme le « père » du Protocole de Kyoto (1997), de la présidence mexicaine pour relancer le multilatéralisme climatique post-COP15 de Copenhague. On signalera aussi la contribution du Pérou lors de la COP20 offrant un terrain préparatoire à la COP21 et l’Accord de Paris, ainsi que les contributions des États caribéens via AOSIS ou encore le groupe AILAC dans ces négociations de Paris. Par ailleurs, deux latino-américaines ont servi comme secrétaires exécutives de l’UNFCC, la costaricienne Christina Figueres et la mexicaine Patricia Espinosa. Ainsi, sous diverses formes, les États ALC ont eu une diplomatie active en matière environnementale non seulement parce que la région est une des plus vulnérables vis-à-vis des effets des changements climatiques, mais également par tradition d’engagement dans le multilatéralisme environnemental.
Malgré leur engagement, la capacité d’influence des États ALC a souvent été considérée comme faible. C’est sur cette base qu’une série de travaux issus d’universitaires et de praticiens (négociateurs) s’est développée, interrogeant cette capacité d’influence des États ALC (dans une moindre mesure caribéens), États catégorisés comme petits ou moyens (Long 2022 ; Albaret 2014). Face à ce constat, des travaux récents ont porté sur les stratégies de coalition mises en oeuvre. Leur diversité fait écho au nombre de groupes latino-américains : A-B-U (Lorenzo Arano 2020), AILAC (Edwards et Roberts 2015 ; Edwards et al. 2017 ; Klöck et al. 2020 ; Watts et Depledge 2018 ; Arciniegas Rojas et Cordano Sagredo 2020), ALBA (Watts et Depledge 2018)[2]. Beaucoup de ces travaux se penchent sur la place des États ou des groupes face à des coalitions plus larges, comme le G77 + Chine, ou leurs imbrications avec d’autres coalitions telles que AOSIS ou les Like-Minded Developing Countries (LMDC). D’autres se penchent sur la position occupée par l’Amérique latine dans des environnements multilatéraux plus vastes tels que les Conférences des Parties (COP) de la CCNUCC (Delgado Pugley 2020). Si connaître la position occupée par les États du continent constitue un point de convergence, la manière dont cette position est construite diffère. Les uns s’interrogent sur l’influence exercée lors de la rédaction des textes préparatoires, les autres sur la manière dont les États latino-américains forgent une position de « facilitateurs » des négociations. D’autres questionnements renvoient à la manière dont les positions nationales ou de groupes se construisent et s’articulent avec les autres groupes multilatéraux.
La très grande majorité des travaux existants porte sur les négociations tenues à l’occasion des COPs. On souligne que les coalitions latino-américaines ont contribué à réduire certaines divisions fondamentales (Nord/Sud ; développés/en développement) en établissant des passerelles entre les groupes ou en influençant certaines positions de l’intérieur, facilitant des positions communes comme l’ABU au sein de la coalition G77 + Chine (Lorenzo Arano 2020). Il est démontré que certains États ont endossé un leadership sur des questionnements particuliers, comme « l’adaptation » dans le cadre de la négociation de l’Accord de Paris. Ce fut le cas du Costa Rica et du Mexique sur la connexion entre questions climatiques et droits de l’homme (Arciniegas Rojas et Cordano Sagredo 2020).
B – L’ALC dans l’élaboration des normes globales
L’ALC a longtemps été pensé et analysé à travers sa position périphérique sur le plan international. Dans une conception hiérarchique d’un ordre international dominé par les grandes puissances, les États latino-américains (à l’exception du Brésil, du Mexique et du Chili) ont occupé un second rang du fait de leurs ressources matérielles limitées (économiques, militaires). Cette grille de lecture des relations internationales étalonnée sur les déterminants matériels de la puissance a exclu de l’analyse les États qui n’en étaient pas ou peu dotés. Cette conception a néanmoins été remise en question par la pratique. La conférence de Bandung de 1955, le Mouvement des Non-Alignés, l’École de la Dépendance ou le label contemporain de « Sud Global » (Brun 2022 ; Haug 2021) constituent autant d’expressions d’une remise en question des rapports de force défavorables aux États les moins dotés en ressources dans la structuration des relations internationales (Badie 2018). Il faut toutefois attendre des travaux historiographiques récents pour ouvrir une fenêtre vers une révision de cette relégation systématique des États du sud ou des « small states » concernant l’élaboration des normes globales. Ces travaux ont contribué à ouvrir un débat relatif aux origines de la construction de l’ordre international du 20e siècle.
Cette révision a particulièrement concerné les États latino-américains (Helleiner 2014 ; McPherson et Wherli 2015 ; Schulz 2017 ; Scarfi 2017 ; Long 2020), longtemps oubliés – hormis rares exceptions (Cuba, Brésil, Mexique) – des études internationales. Cette révision a conduit à une riche conceptualisation concernant les modalités de l’influence et de la participation allant de « l’influence normative » (Schulz 2017, 2021) à « l’activisme » (Finnemore 2003 ; Sikkink 2014). Ces travaux contribuent par ailleurs à dépasser une dichotomie classique structurée autour de la dépendance plutôt qu’autour de l’autonomie (Parthenay 2022). Dans un travail pionnier portant sur les accords de Bretton Woods, Eric Helleiner (2014) démontre qu’en expérimentant des dispositifs de prêts publics internationaux, en constituant une audience privilégiée (permettant de commenter et amender les premières versions d’accords) et en participant activement dans des espaces stratégiques de la négociation, les États latino-américains ont directement contribué à la détermination des contours et des normes de l’ordre international économique du 20e siècle. Kathryn Sikkink (2014) a également démontré l’influence des États latino-américains dans l’élaboration de la charte universelle des droits de l’homme (1946). Là encore, des expérimentations antérieures (Conférences Américaines des Droits de l’Homme), la primauté de rédaction, et la formulation de propositions alternatives avaient également facilité l’introduction des droits économiques et sociaux dans la charte finale.
Ce champ de recherche visant à réviser l’influence des États latino-américains dans l’élaboration des normes s’est peu à peu densifié, qu’il s’agisse des grands principes du droit international (Schulz 2017 ; Scarfi 2017 ; Lorca 2015), de la coopération en matière sociale ou de santé (Petersen et Schulz 2016), d’interdiction du recours à la force ou de la non-intervention (Krasner 1999 ; Acharya 2018), ou du droit de la mer (Garcia-Amador 1974). Sur ce dernier point plus précisément, on notera une influence particulière de l’Amérique latine depuis 1952 depuis la création de la Commission Permanente pour le Pacifique Sud (CPPS), acteur décisif dans la fixation du principe des 200 milles marins de la Zone Économique Exclusive (ZEE)[3]. Une série de travaux monographiques atteste du rôle central joué par plusieurs États latino-américains, notamment le Mexique (Vautravers Tosca 2004 ; Vargas 2011) et le Chili (Zegers 2018 ; Laborda 2018) dans une première phase d’élaboration du droit de la mer.
Si ces travaux révisent la conception traditionnelle du rôle périphérique de l’ALC dans la construction de l’ordre international, au 19e et 20e siècle, qu’en est-il de l’ordre global contemporain ? Dans un contexte marqué par la réactivation des rivalités stratégiques entre puissances (États-Unis, Chine et Russie) et l’essor de blocs ou coalitions régionales, il est utile d’interroger la place des États ALC dans les processus d’élaboration des normes globales contemporaines. Pour ce faire, nous sélectionnons le processus de négociation BBNJ, dont les premiers débats sont largement antérieurs (2004) à l’ouverture officielle (2018) de la Conférence intergouvernementale (CIG), comme un cas exploratoire du rôle et de la place des États latino-américains dans la constitution de normes relatives à la protection de biens publics globaux en lien avec la haute mer et, plus largement, à la préservation de la biodiversité marine.
II – Être influents dans les négociations : cadre analytique, méthode et données
Pour étudier la contribution des États ALC à l’élaboration de ce « traité de la haute mer », nous empruntons à Eric Helleiner (2014) une approche qui consiste à appréhender trois dimensions pour mesurer l’influence d’États dans une négociation internationale : l’expérimentation, l’audience et la participation. Nous ne suivrons pas dans cet article une approche exclusivement continentale compte tenu de la diversité et fragmentation des États latino-américains et caribéens, toutefois, nous portons un regard sur les contributions diverses apportées par ceux-ci.
A – Expérimentation, audience et participation
L’expérimentation consiste à se référer à des dispositifs innovants antérieurs à la négociation et qui permettent d’alimenter en propositions, modèles, ou bonnes pratiques des versions initiales ou finales de l’accord. Une question ressort ainsi de cette première variable, à savoir : dans quelle mesure la première version du traité de la haute mer s’inspire ou bien se nourrit d’innovations ou d’expérimentations menées par les États latino-américains ? Ce premier volet implique un regard rétrospectif sur les pratiques latino-américaines en matière de régulations des zones marines et sur les positions vis-à-vis de la gestion de la haute mer. Pour identifier et évaluer ces innovations, on s’appuiera sur les quatre axes de la négociation : 1) les ressources génétiques marines (marine genetic ressources, MGR) (incluant le partage des avantages) ; 2) les mesures telles que les outils de gestion par zone (area-based management tools, ABMT) (incluant les zones marines protégées) ; 3) les évaluations d’impact sur l’environnement ; et 4) le renforcement des capacités et le transfert de technologies marines.
La participation active dans la négociation elle-même traduit, enfin, l’engagement diplomatique des États et la volonté de contribuer directement à l’élaboration des normes. La participation active se mesure dans un premier temps par l’engagement des délégations et représentants étatiques. On ajoute la taille relative des délégations (nombre de représentants présents) et le profil des membres composant ces délégations, qui sont des signaux de l’importance données par les États à la négociation et de ce fait la volonté de s’y engager activement. La participation aux réunions restreintes, aux comités de consultations et aux discussions informelles constituent autant de canaux d’influence significatifs, individuels (États) ou collectifs (région). Concernant les seconds, la convergence ou cohésion des positions fera l’objet d’une attention particulière.
Enfin, l’audience renvoie à l’idée de constituer des partenaires privilégiés dans une négociation. Cela renvoie autant à des pratiques qu’à des perceptions. Au rang des perceptions, il s’agit de considérer certaines délégations comme des acteurs clés par les négociateurs « les plus influents » ou occupant des positions statutaires permettant l’influence. Au rang des pratiques, l’audience renvoie à la considération de certaines délégations comme étant suffisamment proches pour les consulter ou tester auprès d’elles des idées ou propositions clés pour la négociation. Cela peut se traduire par l’organisation d’espaces de dialogue privilégiés (formels ou informels) avec les délégations, l’organisations de réunions, etc. Cette variable semble aujourd’hui moins pertinente que par le passé, notamment face à une période où un très faible nombre d’acteurs concentrait les prises d’initiative en matière de production normative. Aujourd’hui, l’évolution des logiques de domination, la diversification et la multiplication des acteurs, des canaux de leurs influences, et des lieux ou forums de négociation rendent moins centrale cette idée de l’audience, qui reposait essentiellement sur une conception stricte de la division internationale du travail. En ce sens, cet article se penchera essentiellement sur les variables d’expérimentation et de participation.
L’analyse proposée ici ne prétend pas avoir recours à l’identification de mécanismes causaux. Les deux variables examinées nous permettront plutôt de dresser un panorama compréhensif de la place et du rôle des États ALC dans la dynamique de négociation du traité de la haute mer. En suivant une démarche de process-tracing, nous reconstruisons un processus diplomatique de long-terme, aux configurations mouvantes, au coeur duquel les leviers de l’influence, et a minima de la participation, sont diversifiés. D’autre part, retracer le processus nous permettra de différencier les stratégies « régionales » du leadership endossé par certains États du continent.
B – Des sources onusiennes diverses
Pour procéder à cette étude, nous avons récolté des données inédites à partir des sites onusiens (UN Division for Ocean Affairs and the Law of the Sea[4]), du site officiel de la conférence intergouvernementale[5], mais également à partir de la littérature grise sur la régulation des océans, d’informations communiquées via les réseaux sociaux par des représentants étatiques ou acteurs non étatiques identifiés ayant participé à la négociation, ainsi qu’à travers des six entretiens semi-directifs menés entre mars et juin 2022 avec des membres de délégations latino-américaines, notamment du Mexique, de Colombie et du Costa Rica, destinés à questionner les actions promues et mises en oeuvre par les délégations et leurs contributions.
Grâce aux sites onusiens, ainsi que les Earth Negotiations Bulletins (ENB, 2008-2022), nous avons pu reconstruire la trame historique de cette conférence intergouvernementale, documentant les étapes antérieures ayant rendu possible la négociation, et croiser les informations obtenues lors des entretiens. Nous avons consulté l’ensemble rapports ENB et plus de 80 documents officiels (projets d’accord, propositions des délégations, programmes de travail, listes de participants, etc.). Nous avons pu reconstituer les moments fondateurs (Working Group, Comité Préparatoire) en observant pour chacun, via les comptes rendus des sessions, les manières diverses selon lesquelles les États ALC sont intervenus ou se sont exprimés. Grâce aux documents officiels, un travail a pu être réalisé sur les compositions des délégations (taille relative, stabilité dans le temps et profil des négociateurs), sur les modalités d’intervention des États (prise de parole, déclarations officielles, propositions d’amendements d’articles et autres contributions), sur les positions statutaires occupées dans la négociation (facilitateurs et porte-parole d’un groupe ou coalition).
Au-delà de ces documents officiels rendant compte de la dynamique formelle de la négociation, les entretiens semi-directifs[6] nous ont permis de comprendre les non-dits et implicites, les dynamiques informelles, l’état d’esprit des représentantes et représentants, les pratiques diplomatiques et la nature des interrelations entre les personnes participantes. Enfin, nous avons pu également compter sur les données statistiques d’un projet ERC en cours (MARIPOLDATA), qui a notamment compilé les informations relatives aux déclarations officielles et temps de parole associés aux thèmes développés lors des sessions de négociation (Tolochko et al. 2021).
III – Élaborer le traité de la haute mer : une négociation au long cours
En achevant sa quatrième session (IGC 4), la conférence intergouvernementale atteignait déjà 231 heures de négociations formelles tenues entre 2018 et 2022 (avec une interruption due à la pandémie de COVID-19 entre août 2019 et mars 2022). Pour autant, comprendre cette négociation, les sujets abordés, et les processus ayant mené à la formulation de premières versions d’un traité international implique de se pencher sur un processus de plus de dix années de discussions structurées, comme beaucoup de négociations environnementales, en trois séquences : 1) une première séquence structurée autour d’un Ad HocOpen-Ended Informal Working Group (2008-2016) (Working Group) ; 2) une seconde séquence structurée autour d’un Comité de Préparation (« PrepCom ») (2016-2017) ; et 3) une troisième séquence structurée autour de la conférence intergouvernementale elle-même (communément appelée « IGC ») (2018-2022).
Chacune de ces séquences a confirmé l’avancée vers un traité international juridiquement contraignant sur la haute mer. Le Working Group est parvenu à un « naked skeleton » d’accord, une architecture générale pouvant servir à la négociation. Le PrepCom a confirmé l’idée d’un instrument juridique international contraignant. Et, enfin, la troisième séquence de négociation (composée de plusieurs sessions) travaille à finaliser progressivement le traité en tant que tel, avec des discussions portant sur des avant-projets d’accord.
A – Le Ad Hoc Open-Ended Informal Working Group (Working Group) : ouvrir la voie
Lors de la première séquence, on observe une progressivité constante des discussions portant sur le bien-fondé d’une négociation sur les BBNJ. Les premiers échanges et réflexions portent essentiellement sur des lignes de fractures concernant les lacunes en matière d’application de la Convention sur le Droit de la Mer (UNCLOS, acronyme anglophone), ou encore sur la nécessité de lancer un processus de négociation sur un accord international ainsi que sur la nature juridique dudit accord (contraignant ou non ; lien avec les autres textes existants ; conséquences pour les non-parties à UNCLOS). Dans cette séquence, le Mexique s’est systématiquement positionné à l’avant-garde et a maintenu (entre 2008-2016) une position ambitieuse, affirmant notamment la nécessité d’un nouvel instrument juridique international. Le pays endosse clairement un leadership et se positionne en intermédiaire entre plusieurs blocs, entretenant des liens étroits avec le G77 + Chine, mais aussi avec l’Union européenne (UE) et la Nouvelle-Zélande. Dans cette phase, on observe une progressive convergence entre les États ALC appelant à un nouvel instrument juridique. Seule la Bolivie promeut l’adaptation des mécanismes existants (IISD 2014, 2015). Dans cette configuration, les États ALC ont oeuvré pour imposer l’idée de la nécessité d’un nouvel instrument juridique international en matière océanique, quand prédominait initialement dans le Working Group une vision pragmatique d’adaptation des instruments existants (Japon, Russie, États-Unis, Norvège, notamment).
Depuis la création du Working Group, on constate que les États latino-américains sont très participatifs. Ils interviennent plusieurs fois, à chaque session. C’est le cas notamment pour l’Argentine, le Mexique, Trinidad et Tobago ou le Costa Rica, défendant notamment l’inscription des ressources marines au patrimoine commun de l’humanité. L’Argentine, très engagée entre 2008 et 2014, est nommée par les délégations membres du « Groupe d’Amis des Co-Chairs » (avec le Guatemala). En cela, ce pays qui fait alors la promotion d’une approche holistique[7], parlant au nom du G77 + Chine (en particulier lors du comité 2010) a une voix écoutée par les coordinateurs de la négociation. À ce stade, cette approche holistique qui justifie la création d’un nouvel instrument juridique international rencontre l’opposition d’États comme les États-Unis, la Russie, la Norvège ou le Japon pour des motifs essentiellement économiques d’exploitation libre et non contrainte des ressources halieutiques en haute mer.
Dans ce contexte, le Mexique va progressivement endosser un leadership au sein du WG. Le pays a déploré la lenteur des progrès du groupe sur les AMP (aires marines protégées) et a appelé à l’établissement d’un mandat pour la tenue d’une conférence intergouvernementale afin de traiter des questions des AMP et des RGM (ressources génétiques marines) sous forme d’un ensemble indivisible et de préciser l’autorité compétente pour la désignation des AMP et la gestion du partage des avantages (benefit sharing). On notera que cet appel à une conférence intergouvernementale est réalisé pour la première fois à l’occasion d’une intervention mexicaine, se faisant ainsi non seulement précurseur dans la défense d’une approche englobante, mais également dans la promotion d’une véritable négociation internationale pour l’élaboration d’un nouvel instrument juridique international (dépassant un simple accord d’adaptation de l’UNCLOS). Cette proposition sera par la suite reprise conjointement par le G77 + Chine, l’UE et le Mexique et fera référence à un processus portant sur le cadre juridique devant régir le traitement des RGM « dans le cadre d’un accord unique ». Pour justifier l’avancée vers un nouvel accord international, les délégations latino-américaines ont également travaillé à séparer les activités menées dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique (CDB), dont elles critiquent le fait qu’elles noient le travail du WG, pour légitimer l’existence propre d’un instrument hors-CDB sur la haute mer. Si le Mexique est précurseur dans l’appel à l’élaboration d’un nouvel instrument juridique international, soutenu par l’UE et la CARICOM en 2013, certains États ALC n’y sont pas encore tous pleinement favorables (notamment la Bolivie) et l’unité latino-américaine n’est pas garantie. Le Brésil qui fait partie des États non convaincus par un nouvel instrument soutient toutefois indirectement les autres États favorables par une position intermédiaire qui souligne la nécessité d’une approche holistique pour aborder les enjeux de la régulation de la haute mer (MRG, AMP, EIA, CBTT). Le Venezuela et la Colombie plaident également pour un nouvel instrument, dans la mesure où ils n’ont pas ratifié l’UNCLOS et privilégient l’engagement d’une discussion sur un nouvel accord plutôt qu’une adaptation des instruments existants.
Lors de sa session de 2013, l’AGNU appelle à l’organisation de trois dernières sessions du WG pour finaliser les débats. Ces trois sessions ont lieu entre 2014 et 2015. Dans ces sessions, alors que plusieurs États interviennent sur des questions organisationnelles ou de principe (utilisation de « patrimoine commun de l’humanité », lien avec l’Autorité internationale des fonds marins), le Mexique déplace le débat sur le terrain de la nature juridique du nouvel accord, en précisant qu’il doit être sous la tutelle de l’UNCLOS. Cette stratégie accélère la discussion et cherche à dépasser les dernières réticences, notamment des États qui se cantonnent à l’idée d’un nouvel accord de mise en oeuvre de l’UNCLOS. Comme l’explique un diplomate mexicain, cette option se justifie par l’existence d’accords de mise en oeuvre déjà ratifiés, la volonté de protéger l’UNCLOS et faire en sorte qu’un nouvel accord se fasse dans le cadre onusien et selon le principe de l’universalité[8]. Cette réflexion sur la tutelle du nouvel instrument, introduite par le Mexique, est également soutenue par le G77 + Chine et prolongée par un débat sur sa dimension potentiellement contraignante. D’autre part, le chemin vers une conférence intergouvernementale sera pavé par des propositions latino-américaines, notamment celle du Guatemala qui invite, une fois les travaux de groupe de travail achevé, à convoquer un preparatory meeting, proposition soutenue par le G77 + Chine et la CARICOM (IISD 2014). L’option d’un comité préparatoire sera effectivement retenue pour la suite des discussions post-WG, pour quatre sessions entre 2016 et 2017.
Enfin, lors de la dernière session du WG, la position influente du Mexique dans les discussions va se trouver formalisée. En effet, le 21 janvier 2015, les co-présidents du WG décident de créer « un Groupe de travail informel-ouvert » axé sur la négociation future et chargé de préparer un document de travail. Pour piloter ce groupe, la Nouvelle-Zélande et le Mexique sont nommés « co-facilitateurs », en reconnaissance de l’engagement mené. À l’issue des travaux menés par ce groupe, c’est le Mexique qui présenta le projet des « co-facilitateurs » destiné à constituer la base des futures négociations, expliquant qu’il était fondé sur le document officieux révisé du G77 + Chine et combinait des libellés tirés des propositions de l’UE, du Mexique et de la Nouvelle-Zélande. Ici l’influence du Mexique et la Nouvelle-Zélande passe par la capacité à formuler les premières bases d’un document de travail multilatéral. C’est effectivement dans ce document de travail que l’on voit se dessiner l’architecture suivie dans la suite des négociations. Sur cette base, il est prévu de convoquer « en 2017 ou en 2018, une conférence intergouvernementale sur la BADJN[9] pour élaborer un instrument juridiquement contraignant s’inscrivant dans le cadre de la Convention dans un délai prédéterminé et précédée par un PrepCom » (IISD 2015)[10].
À partir de 2015, on observe une intensification de l’engagement diplomatique chilien. Jusqu’à cette date, le Chili souffrait de ne pas avoir ratifié le second accord d’implémentation de la CNUDM (New York 1995) et du fait que le ministère des Relations extérieures (MRE) n’envoyait pas de représentants dans les réunions de travail pour des raisons budgétaires (Laborda 2018 : 623). Toutefois, à partir de 2015, le Chili se réengage dans le processus en préparant une position nationale en vue du PrepCom, en étant élu dans son Bureau (avec le Costa Rica), et en organisant la seconde conférence internationale Our Ocean[11] à Valparaiso (2015) ainsi qu’un atelier latino-américain sur les océans (avec une ONG costaricienne, Mar Viva). Avec l’Argentine, le pays cherche alors à constituer un groupe d’États « Like-Minded » au sein de la région (Argentine, Chili, Brésil, Pérou, Équateur, Paraguay, Venezuela et Colombie).
Dans cette première séquence, on constate que les États ALC, notamment par un leadership du Mexique puis du Chili (plus tardif), ont contribué à imposer l’idée, d’une part, de la nécessité d’un nouvel instrument juridique international et, d’autre part, de la nécessité d’une conférence intergouvernementale sur la haute mer. La participation constante et dense, l’occupation de positions statutaires ayant permis d’accroître les leviers de l’influence (Group of Friends ; Co-facilitators) et l’appui de groupes et coalitions telles que le G77 + Chine, l’UE et la CARICOM, ont rendu possible un engagement collectif vers la négociation d’un instrument juridique international contraignant. Toutefois, on notera qu’à ce stade il n’existe pas d’unité latino-américaine pleine et entière, ni de groupes ou coalitions agrégeant les positions nationales du continent.
B – Le Preparatory Committee (PrepCom) : définir le cadre de la négociation
Avec la mise sur pied du PrepCom, la discussion passe d’un « naked skeleton » à un véritable « projet d’instrument juridique international contraignant ». L’apport de ce comité est effectivement de rationaliser et donner une architecture plus précise aux divers éléments abordés dans la phase antérieure. Dans ce processus, plusieurs États latino-américains ont joué un rôle central.
C’est essentiellement grâce à l’occupation de positions statutaires dans la négociation que les États ALC ont pu être influents. Avant même le début des travaux du PrepCom, le Président de l’AGNU désigna Eden Charles, représentant de Trinidad et Tobago, État insulaire de la Caraïbe, pour présider le Comité. D’autre part, à l’occasion du premier comité (du 28 mars au 8 avril 2016) quatre « facilitateurs » ont été nommés pour coordonner le travail sur les quatre axes principaux de la discussion (MGR, ABMT, EIA, CBTT). Parmi eux, Carlos Soral, de la délégation brésilienne, a été désigné pour faciliter les discussions en matière de MGR. Enfin, le comité s’est doté d’un Bureau, composé de deux membres de chaque ensemble régional. Pour l’Amérique latine et les Caraïbes, il s’agit de deux États particulièrement engagés et actifs : le Chili et le Costa Rica.
À l’issue du second PrepCom, le Président Eden Charles quitta ses fonctions et fut remplacé par le brésilien Carlos Soral. Un cinquième axe fut ajouté pour structurer la discussion, intitulé « Cross-cutting issues », facilité par Carlos Soral lui-même. Aussi, deux des cinq axes du PrepCom se trouvaient « facilités » par des membres de délégations latino-américaines. L’axe portant sur les MGR sera confié (du fait de la présidence de Soral) à la bélizienne Janine Elizabeth Coye-Felson, spécialiste reconnue sur les questions de MGR[12]. Avant la tenue du 3e et dernier comité, le Président du PrepCom soumit un document proposant une présentation rationalisée des éléments du projet de texte pour un instrument international légal contraignant. C’est ainsi le brésilien Soral qui élabora la toute première trame d’un accord. Notons qu’à l’occasion de cette dernière séance du PrepCom, s’est constitué de manière informelle un groupe d’États latino-américains dont les positions étaient plutôt convergentes. Ce groupe de Like-minded Latin American states se composait alors des pays suivants : Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Mexico, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine et Uruguay.
C – La Conférence intergouvernementale (ICG) : négocier le traité de la haute mer
Si les États ALC ont été actifs dans les premières séquences, l’ouverture de la conférence intergouvernementale met à l’épreuve la capacité d’influer sur le contenu de l’accord jusqu’à sa finalisation. Le président de l’AGNU choisit la Singapourienne Rena Lee, co-facilitatrice dans les travaux antérieurs (CBTT), pour présider la conférence. C’est initialement le Mexique qui avait été invité à présider[13] du fait de son engagement de longue date en matière de codification du droit de la mer mais le pays ne put soumettre de candidature en raison d’échéances électorales alors en cours. Après une session d’organisation, la première session n’a donné que peu de résultats et a consisté en une accumulation de positions nationales ou collectives, chacun cherchant plutôt à jauger les alliés potentiels, à évaluer la dynamique de salle et à se positionner.
Lors de la deuxième session, la conférence s’est structurée en cinq axes majeurs : les MG, ABMT, EIA, CBTT, et des enjeux transversaux (cross-cutting issues). Dans la continuité des actions engagées par le PrepCom, c’est à un État ALC que le groupe sur les MGR a été confié. Ce groupe a été coordonné par la bélizienne Janine Elizabeth Coye-Felson jusqu’à la troisième session[14]. À l’issue de la seconde session, la présidente de la conférence sollicita les États pour qu’ils déposent des propositions d’amendements à l’avant-projet d’accord qui avait été communiqué aux délégations le 17 mai 2019. Les propositions ont majoritairement été transmises par les États les plus engagés dans le processus de négociation. Désormais réunis dans un groupe régional inédit dénommé « CLAM » (Core Latin American Group)[15], une majorité d’États latino-américains a soumis 24 propositions sur la quasi-totalité des parties du texte, soit 5,3 % des propositions totales, largement dominées par la Corée du Sud, les Philippines, le Sénégal, l’UE, les États-Unis et l’Indonésie. On constatera qu’en dépit de déclarations officielles plus nombreuses sur les MGR, c’est essentiellement sur les ABMT et CBTT que le CLAM a axé ses propositions, tirant profit de ses expérimentations sous-régionales, en particulier sur les aires marines protégées.
La troisième session de la conférence a permis de faire progresser l’accord. À ce stade, l’appel à des évènements connexes (One Ocean Summit 2022, UN Ocean Decade, etc.) participait, selon tous les représentantes et représentants interrogés, à la constitution d’un « momentum politique » à l’échelle globale sur l’enjeu des océans, alors doté d’une forte visibilité. Dans ce contexte favorable qui conduisait les délégations à espérer pouvoir mettre au vote un texte à l’issue de la quatrième session, la crise sanitaire du Covid-19 est venue interrompre la dynamique. Après deux années de semi-interruption, dans la mesure où des travaux intersessions et de nombreux webinaires se sont tenus, la négociation a repris en mars 2022 à New York. De l’avis de personnes présentes[16], la dynamique consistait davantage en une reprise douce de la négociation qu’en une familiarisation aux enjeux centraux pour les nouveaux membres de délégations[17]. Cette quatrième session s’est achevée sans parvenir à la finalisation de l’accord, mais avec un consensus pour la tenue d’une cinquième (et dernière) session.
Durant les sessions de la conférence, les États ALC réunis au sein du CLAM ont été les plus « vocaux », en comparaison d’autres groupes régionaux (Graphique 1). Le nombre élevé d’interventions au nom du CLAM s’explique par le fait que lors de l’IGC 2 et 3, seules les positions de groupes étaient autorisées, limitant les interventions nationales. À la demande de certains, le Costa Rica entre autres États de la région, la possibilité de positionnements nationaux (en parallèle ou en complément de ceux du CLAM) a été réintroduite pour la quatrième session[18]. Nous comparons ces données d’intervention du CLAM avec les autres coalitions d’États étant intervenues au moins une fois et les deux États ayant le plus grand nombre d’interventions dans les trois premières sessions de la Conférence (États-Unis et Japon).
Graphique 1
Déclarations officielles, IGC 1-2-3
L’intensité de cette participation s’accompagne d’une présence élargie des délégations latino-américaines (Tableau 1). Elles représentent près d’un quart des délégations présentes, et ces mêmes délégations sont le plus souvent nombreuses (à l’exception des délégations caribéennes qui font baisser la moyenne régionale) (Graphique 2).
Tableau 1
Participation des délégations ALC
Graphique 2
Moyenne de délégués ALC présents sur les 4 IGC
IV – La diplomatie océanique latino-américaine et caribéenne : outils et stratégies
Il convient à présent de revenir sur les stratégies mises en oeuvre par les États ALC pour peser dans cette négociation. Dans le triple processus décrit (Working Group, PrepCom et IGC), c’est essentiellement par la participation que les États latino-américains ont cherché à être influents.
Paradoxalement, l’expérimentation pèse relativement peu et surtout à l’échelle individuelle. Un paradoxe, en effet, car certains États ALC sont à l’avant-garde en matière de protection des zones marines, notamment la Colombie, le Costa Rica, Panama et l’Équateur (Couloir Marin du Pacifique Est Tropical). De même, le Chili a protégé des zones marines (Rapa Nui et Nazca-Desventuradas) qui coïncident avec les fosses de Nazca et Salas y Gomez, des espaces mondialement reconnus en matière de protection de la biodiversité marine. Si cette initiative prise par le Chili a pu être présentée comme une anticipation du traité de la haute mer et a pu inspirer d’autres États (Laborda 2018), elle n’a pas été mise formellement en avant comme bonne pratique dans la négociation. En revanche, en matière d’expérimentation, on signalera le poids de l’expertise et l’apprentissage institutionnel menant à la sélection de personnalités latino-américaines à des positions pouvant potentiellement permettre d’influencer certains axes de la négociation. Ce fut le cas du Mexique qui très tôt co-présida le Working Group en raison de sa vaste expérience en matière de codification du droit de la mer au début des années 1980. Le Mexique avait joué un rôle central, à travers son ministre des Relations extérieures de l’époque Jorge Castañeda (1979-1982), dans la préparation de la Convention de Montego Bay. De même, à l’échelle individuelle, l’expertise en matière de MGR a valu à Janine Elizabeth Coye-Felson d’être nommée par la présidente de la Conférence Rena Lee, facilitatrice de l’axe MGR lors des trois premières sessions de la IGC. Comme le confirment d’autres membres de délégations latino-américaines, il est admis que ce choix fut motivé davantage par l’expertise individuelle que par une logique de représentativité des pays (Belize)[19]. Malgré cela, on notera que les MGR et l’enjeu du partage des bénéfices associés ou transferts technologiques sont un élément central des positions et préoccupations des États caribéens (le plus souvent exprimés via la CARICOM) dans la négociation.
En revanche, c’est à travers la participation et ses ressorts variés que les États ALC ont été le plus influents : a) la prise de positions statutaire ; b) la stratégie de coalition et c) l’activisme en matière de codification. Cet enjeu ouvre par ailleurs un débat sur le degré d’homogénéité ou d’unité de l’engagement diplomatique latino-américain et caribéen.
A – Les positions statutaires
Les positions statutaires offrent une palette variée de rôles potentiels permettant d’engranger plus ou moins d’influence dans les négociations (Tableau 2). Le rôle de « facilitateur » d’un axe de la conférence intergouvernementale offre une capacité d’influence technique sur la construction normative plus importante qu’un rôle de co-président du Ad Hoc Open-Ended Working Group. En revanche, cette dernière position confère une influence diplomatique forte en matière d’orientation de l’agenda et de choix des instruments (conférence intergouvernementale ou accord de mise en oeuvre).
Tableau 2
Synthèse des positions statutaires des États ALC
Ce que l’on retiendra est que des positions statutaires ont été occupées par un ou plusieurs États ALC dans toutes les séquences de ce long processus jusqu’à la quatrième session IGC. Par ailleurs, au-delà de certaines positions plus administratives, de gestion et coordination (membre des Bureaux du PrepCom, vice-présidence de la IGC), plusieurs autres se sont avérées centrales sur le plan politique et normatif. Politique, en raison de la capacité d’orienter les choix collectifs comme a pu le faire le Mexique en co-présidant le Working Group dès 2004, d’orienter le format de la négociation et la méthode comme le fit le trinidadien Eden Charles en présidant la première session du PrepCom, et enfin en définissant le cadre normatif dans lequel pourrait évoluer la conférence intergouvernementale, comme le fit le brésilien Carlos Soral en présidant les deux sessions suivantes du PrepCom. Enfin, la continuité dans le temps du rôle de facilitateur sur des axes thématiques de la négociation a permis d’exercer une influence normative significative, comme ce fut le cas de la bélizienne Janine Coye-Felson, facilitatrice pour les MGR dans le PrepCom puis les trois premières sessions de l’IGC.
B – La stratégie de coalition
Bien que parfois unie dans des négociations climatiques, l’ALC a avancé le plus souvent dispersée et fragmentée dans ce long processus de négociation. Dans les phases initiales, des désaccords importants touchent à l’élaboration d’un nouvel instrument juridique international contraignant dans la mesure où plusieurs États du continent soit ne sont pas membres de l’UNCLOS (Colombie, Venezuela), soit ne l’ont pas ratifié (El Salvador, Pérou). D’autres enjeux de division apparaissent, notamment sur l’inclusion dans la négociation des questions liées à la pêche, sachant qu’elles sont déjà essentiellement gérées par des organisations régionales compétentes (Regional Fisheries Management Organisations). Face à ces intérêts divergents, les deux premières séquences ont essentiellement laissé s’exprimer les leaderships étatiques, notamment ceux du Brésil, du Mexique – traditionnellement actifs dans le multilatéralisme onusien – ou du Chili (à partir de 2015). La troisième séquence (IGC) voit en revanche un changement de stratégie.
La formation d’une coalition, en parallèle du groupe constitué par la CARICOM, a permis de rendre plus visibles les intérêts des États du continent. Le groupe émerge dans un premier temps informellement lors de la dernière session du PrepCom (2017) puis se formalise à l’occasion de la IGC (2018). Ce groupe de Like-Minded Latin American states, ensuite nommé « CLAM » constitue alors une dynamique essentiellement « newyorkaise » et « onusienne », suscitée initialement par l’Argentine et le Chili puis par des représentants mexicains. Dans un premier temps, ce groupe a réuni essentiellement des représentants latino-américains au sein de la Sixième Commission de l’AGNU (portant sur les affaires juridiques)[20]. À un stade initial, les capitales n’avaient pas été associées à ce mouvement. La nouveauté de ce groupe, déconnecté d’autres initiatives telles que l’AILAC existant au sein des COPs, s’explique par cette dynamique endogène de représentants non familiarisés aux autres arènes de négociations climatiques. Plusieurs négociateurs évoquent en effet une « dynamique de salle »[21] particulière. Si le Mexique tient la coordination logistique et stratégique du CLAM à New York, le groupe distribue des positions de coordination des différents axes : 1) MGR (Brésil, Panama) ; 2) ABMT (Costa Rica, Argentine) ; 3) CBTT (El Salvador, Honduras) ; 4) EIA (Guatemala, Uruguay et Pérou) ; enjeux transversaux (Colombie, Mexique et Équateur). De fait, la logique de coalition avait pu générer de l’insatisfaction pour certains qui se voyaient frustrés de ne pas pouvoir exprimer des positions nationales ou percevaient une perte de visibilité individuelle. En dépit de ces frustrations, on observe que le CLAM est la coalition qui a le plus contribué aux débats ainsi qu’à l’exercice de codification (Tableau 3). La pause liée au Covid-19 a permis aux capitales de reprendre la main sur le CLAM avec une coordination par les ministères. Pour autant, le Mexique a maintenu son leadership dans la coordination du groupe, en assurant le porte-parolat lors de la quatrième session, et représentant le CLAM (avec le Chili[22] et la Colombie) lors des réunions bilatérales entre le groupe et la présidence de la conférence[23].
C – La codification
En matière de codification, l’influence des États ALC (pris individuellement et collectivement) se structure en deux temps. La première correspond à la rédaction du « zero draft » par Carlos Soral à l’occasion du PrepCom qui a balisé le terrain de la négociation. La seconde correspond à l’appel à propositions d’amendement à l’avant-projet de l’accord élaboré par Rena Lee. Lors de la première phase, l’apport a concerné prioritairement les MGR, une contribution à la codification qui est le produit plus largement de tous les efforts de « facilitations » entrepris par Carlos Soral (Brésil), Eden Charles (Trinité-et-Tobago) et Janine Coye-Felson (Belize) dans les différentes phases de la négociation. Dans la seconde phase, on observe que le CLAM est la coalition qui, avec l’UE, a le plus soumis de propositions d’amendements à l’avant-projet d’accord (Tableau 4). Si les contributions antérieures avaient ciblé les MGR, les propositions d’amendement concernent essentiellement les outils de gestion des aires (ABMT) et la consolidation des compétences et transfert de technologies (CBTT). Contrairement à l’UE, en revanche, le CLAM ne s’est que très peu positionné sur la question de l’évaluation des impacts environnementaux, notamment du fait d’une forte dispersion des enjeux au sein de cet axe[24].
Tableau 3
Propositions et déclarations sur l’avant-projet d’accord (IGC 1-2-3)
Conclusion
La négociation du « traité de la haute mer » constitue un nouvel exemple de contre-intuition relative à la place que peuvent occuper des États considérés comme périphériques dans une négociation multilatérale. En participant activement à l’impulsion, à la détermination de l’architecture générale de la négociation ainsi qu’à l’exercice de codification lui-même, les États latino-américains ont contribué significativement à l’élaboration des futures normes relatives à la régulation de la haute mer. Malgré de fortes oppositions initiales d’États développés (États-Unis, Russie, Norvège, entre autres), les latino-américains sont parvenus à imposer l’option d’un instrument international juridiquement contraignant ainsi que la tenue d’une conférence intergouvernementale pour le négocier. L’étude de ce processus BBNJ alimente ainsi une littérature plus vaste sur les contributions du « Sud Global » à la définition et à l’élaboration des normes globales. Au-delà du cas latino-américain, cet article permettra d’identifier les stratégies diplomatiques à l’oeuvre pour participer à la construction de ces normes et sera utile pour de futurs travaux comparatifs (avec d’autres groupes régionaux ou avec d’autres négociations multilatérales). Sur le plan stratégique, et en dépit des crises politiques qui traversaient le continent, les États ALC ont su mettre sur pied une coopération pragmatique et technique afin de rendre visible et faire peser les intérêts du continent dans le processus BBNJ. La formalisation tardive d’un groupe régional inédit, le CLAM, a renforcé la capacité d’influence en vue de l’élaboration du traité lui-même. La formation de cette coalition ad hoc n’a pas empêché en revanche l’expression d’autres voix (Venezuela, Nicaragua, Cuba). On relève que c’est autant en participant activement qu’en occupant des positions statutaires que l’influence s’est matérialisée. L’apport de certains États, notamment le Mexique via un engagement continu dans le processus et en suscitant une coordination collective, ou de certains individus, à travers des dynamiques de pen-holdering ou de cadrage, est également à signaler. Bien que la négociation ne soit pas encore achevée, du fait de l’ajout d’une cinquième session (15-26 août 2022, IGC5), puis d’une 5e « bis » (IGC 5.2, 20 février - 3 mars 2023), la diplomatie océanique latino-américaine et caribéenne a fait montre, depuis le lancement du processus en 2004, de sa capacité à influer sur la protection de la biodiversité marine en haute mer et ainsi à insérer les États latino-américains dans les enjeux liés à la protection des « communs ».
Appendices
Annexe
Entretien 1 – Universitaire spécialiste de l’océan, 12 avril 2022
Entretien 2 – Diplomate costaricien(ne), le 13 avril 2022
Entretien 3 – Diplomate mexicain(e), le 4 mai 2022
Entretien 4 – Diplomate mexicain(e), le 4 mai 2022
Entretien 5 – Diplomate mexicain(e), le 4 mai 2022
Entretien 6 – Diplomatie colombien(ne), le 24 mai 2022.
Remerciements
Remerciements aux coordinateurs du numéro spécial ainsi qu’aux deux relecteurs anonymes.
Note biographique
Kevin Parthenay est professeur des universités en science politique à Tours et membre de l’Institut universitaire de France (IUF).
Notes
-
[1]
La quatrième session tenue au mois de mars 2022 s’est achevée sans finalisation de l’accord. Aussi, une cinquième session a été sollicitée par la Présidente, Rena Lee (Singapour), à l’AGNU. Cette cinquième session aura lieu à New York en août 2022.
-
[2]
On pourra également évoquer le Groupe de Rio, la Communauté des États Latino-américains et caribéens (CELAC) et la Communauté des Caraïbes (CARICOM).
-
[3]
Alors que les autres États participant à la négociation étaient plutôt favorables à la détermination d’une zone économique exclusive de 50 miles marins. Les membres de cette Commission sont le Chili, l’Équateur, le Pérou et la Colombie (qui adhère en 1979).
- [4]
- [5]
-
[6]
Voir la liste des six entretiens en annexe.
-
[7]
C’est-à-dire une négociation incluant les quatre piliers retenus par la résolution de l’AGNU du 24 décembre 2011 (A/RES/66/31) : ABTM, MGR, EIA, CBTT.
-
[8]
Entretien réalisé le 22 mai 2022.
-
[9]
Biodiversité au-delà des juridictions nationales.
-
[10]
IISD-ENB, « Report of main proceedings for 21 January 2015 », 9th Meeting of the BBNJ Working Group (https://enb.iisd.org/fr/report-main-proceedings-21-january-2015).
-
[11]
Ces conférences annuelles ont été lancées en 2014, à l’initiative des États-Unis (notamment John Kerry), pour réunir autour des enjeux océaniques leaders gouvernementaux, acteurs non étatiques, secteur privés, universitaires, etc. Elles ont notamment pour objectif de faire avancer l’Objectif de développement durable (ODD) n° 14, relatif à la « vie aquatique ».
-
[12]
Elle fut notamment responsable « océans » pour le groupe AOSIS.
-
[13]
Entretien réalisé le 4 mai 2022.
-
[14]
La coordination a été assurée par la présidente de la négociation, Rena Lee, lors de la quatrième session. En raison des restrictions sanitaires, Janine Coye-Felson n’a pas pu se rendre à New York. Lors de cette dernière session, aucun État ALC n’occupa de position statutaire dans la négociation.
-
[15]
Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Mexico, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine et Uruguay.
-
[16]
Entretiens réalisés le 13 avril 2022 et le 4 mai 2022.
-
[17]
De nombreuses délégations ont été renouvelées notamment en raison des alternances politique ou des mutations professionnelles au sein des services extérieurs.
-
[18]
Entretien réalisé le 13 avril 2022.
-
[19]
Entretien réalisé le 4 mai 2022.
-
[20]
Entretien réalisé le 4 mai 2022.
-
[21]
Entretiens réalisés le 13 avril, 4 mai et le 24 mai 2022.
-
[22]
On notera que la capacité d’influence du Chili a été affectée négativement par la crise politique survenue en octobre 2019, celle-ci ayant contraint le gouvernement à freiner certaines actions multilatérales (par exemple, l’annulation de la COP25 à Santiago, déplacée à Madrid).
-
[23]
Entretien réalisé le 4 mai 2022.
-
[24]
Idem.
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List of figures
Graphique 1
Déclarations officielles, IGC 1-2-3
Graphique 2
Moyenne de délégués ALC présents sur les 4 IGC
List of tables
Tableau 1
Participation des délégations ALC
Tableau 2
Synthèse des positions statutaires des États ALC
Tableau 3
Propositions et déclarations sur l’avant-projet d’accord (IGC 1-2-3)