Revue Gouvernance
Governance Review
Volume 20, Number 1, 2023 Varia
Table of contents (4 articles)
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Les effets des coupes budgétaires et des réductions de personnel sur la satisfaction au travail des employés
Tigawendé Prosper Kaboré and Étienne Charbonneau
pp. 1–23
AbstractFR:
Des effets négatifs sur le bien-être des employés sont présumés dans la foulée des coupes. Ces présupposés sont avancés de manière répétée dans la littérature, bien que les preuves empiriques restent encore assez limitées. La présente étude tente de déterminer si les coupes budgétaires et réductions de personnel des ministères touchés ont eu les répercussions pressenties dans la littérature sur la satisfaction au travail des fonctionnaires fédéraux au Canada. Des restrictions budgétaires de 5 %, mais inférieures à 10 %, sans réduction de personnel, ont été la norme. Des coupes budgétaires se sont rarement ajoutées aux réductions de personnel. Les résultats montrent que seules les réductions budgétaires d’au moins 10 % affectent négativement, mais marginalement, la satisfaction des fonctionnaires. Globalement, une légère baisse de satisfaction au travail a été observée, alors que la théorie prévoyait une perte de satisfaction plus prononcée. Pour de prochains épisodes d’austérité, des coupes paramétriques de 5 % du budget ou des effectifs pourraient être maintenues afin de minimiser les effets pervers sur la satisfaction au travail des fonctionnaires fédéraux.
EN:
Negative effects on employee well-being as a result of staff cuts are widely hypothesized in the literature, although empirical evidence is still quite limited. This study attempts to determine whether budget cuts and downsizing in the affected departments have had the same impact on Canadian federal public servants’ job satisfaction as is suggested in the literature. Budget cuts were rarely added to staff reductions. The results show that budget cuts negatively impact the attitudes of federal employees at a 10 % threshold, but only marginally. Overall, a slight decrease in job satisfaction was observed, whereas the theory predicted more dissatisfaction. In future episodes of austerity, parametric budget or workforce cuts of five percent could be maintained in order to minimize adverse impacts on federal civil servants’ job satisfaction.
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Grandeur et misère liées à la mise en oeuvre d’une expérience de gouvernance territoriale en milieu semi-urbain au Nouveau-Brunswick : le cas de la démarche VADA à Saint-Quentin et à Grand-Sault
Majella Simard and Mario Paris
pp. 24–46
AbstractFR:
En 2007, l’Organisation mondiale de la Santé a publié un guide mondial permettant aux acteurs d’innover sur les environnements bâti et social afin d’assurer un vieillissement actif des aînés. Ce guide propose aux municipalités d’adopter l’approche « ville-amie des aînés » (VADA) en améliorant les infrastructures et les équipements mis à leur disposition ainsi que les services, notamment en matière de loisir, de santé et de transport. Notre article a pour but d’évaluer la portée des mesures mises en place par les différents acteurs sociaux de Saint-Quentin et de Grand-Sault au Nouveau-Brunswick, deux localités ayant entrepris la démarche VADA. Sur le plan théorique, notre cadrage repose sur le modèle de gérontologie environnementale qui agit sur le processus de gouvernance territoriale. Préconisant une approche qualitative, notre méthode d’analyse a consisté en la réalisation d’entrevues semi-dirigées effectuées auprès d’intervenants et de partenaires impliqués dans la démarche VADA et en la tenue de groupes de discussion auprès d’aînés. En dépit de la volonté manifestée par les élus, nos résultats révèlent que la démarche a relativement peu contribué à l’amélioration de la qualité de vie des aînés en raison de difficultés liées à l’absence d’un leadership partagé, aux nouvelles responsabilités que doivent assumer les acteurs locaux, à des problèmes de communication, de concertation et de démobilisation, mais aussi à la méconnaissance du projet, tant de la part des acteurs sociaux que des aînés, et à l’actuelle pandémie.
EN:
In 2007, the World Health Organization published a global guide on innovations to the built and social environments that would ensure active aging for seniors. This guide suggests that municipalities adopt an “age-friendly city” approach, i.e. by improving the infrastructure, equipment and services used by seniors, particularly in terms of leisure, health and transportation. This paper aims to assess the scope of the measures put in place by the various social actors of two communities that have implemented the VADA process in New Brunswick, Saint-Quentin and Grand Falls. On a theoretical level, our framework is based on the model of environmental gerontology, which acts on the territorial governance process. Advocating a qualitative approach, our analysis method consisted of conducting semi-directed interviews with stakeholders and partners involved in the VADA process and holding focus groups with seniors. Despite the aims expressed by the elected officials, our results show that the approach fell short in improving the quality of life of seniors due to difficulties related not only to a lack of shared leadership, to the new responsibilities that fell on local actors, to communication consultation and demobilization issues, but also to a lack of knowledge of the project, both on the part of social actors and seniors, and to the current pandemic.
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Décentralisation en Afrique subsaharienne francophone : difficultés des gouvernements, engagement innovant de la société civile
Dossa Hyppolite Dansou and Mario Carrier
pp. 47–73
AbstractFR:
Après plusieurs décennies de mise en oeuvre de de décentralisation, vu les ambitions initiales de gouvernance, de développement et le caractère toujours actuel de cette réforme en Afrique de l’Ouest, quel bilan peut aujourd’hui en être fait ? Comment les populations locales vivent-elles cette réforme ? Tout en tenant compte du cadre législatif régissant les relations États/collectivités territoriales (CT), cet article analyse la façon dont s’emboîtent les échelles de gouvernance pour fournir – ou non – des capacités de développement aux CT avant de mettre en exergue l’accroissement du nombre des OSC (organisations de la société civile) à la faveur de la réforme, leurs interactions et actions en faveur du développement territorial.
L’analyse repose sur les hypothèses suivantes : d’une part, les pratiques (mise en oeuvre des lois et objectifs de la décentralisation) des gouvernements centraux ne permettent pas encore d’atteindre la gouvernance et le développement escomptés. D’autre part, la décentralisation favorise l’émergence de plus en plus d’OSC innovant dans le développement des territoires. Et nos conclusions confirment ces hypothèses.
Exclusivement basé sur une collecte documentaire, l’article part du cadre théorique sur la gouvernance multiniveaux proposé par Goldsmith et Page (1987 ; 2010), repris par Poupeau (2019), et des indices de développement humain (IDH) des huit pays francophones de l’Union économique et monétaire Ouest-Africaine (UEMOA), pour produire une analyse comparée de cette réforme dans ces pays à travers ses objectifs de départ.
EN:
Several decades after the implementation of the decentralization reform, and given its initial ambitions in terms of governance and development and its ongoing relevance in West African countries, what assessment can be made today ? How do local populations experience this reform ? Taking into account the legislative framework of relations between the State and local authorities, this article analyzes how the levels of governance act together to provide— or not provide— development capacities to the local authorities, and then highlights the increasing number of CSOs (civil society organizations) as a result of the reform and their interactions and actions in favour of territorial development. The analysis is based on the following hypotheses : On the one hand, the practices (adoption of laws and objectives of decentralisation) of central governments do not yet make it possible to achieve the expected governance and development. On the other hand, decentralisation encourages the emergence of more and more CSOs innovating in the development of territories. And our findings confirm these hypotheses.
Based exclusively on a collection of documents, the article draws on Page and Goldsmith’s (1987 ; 2010) theoretical framework on multilevel governance, which was reprised by Poupeau (2019), and the human development index (HDI) of the West African Economic and Monetary Union’s eight French-speaking countries to perform a comparative analysis of the reform in these countries based on its initial objectives.
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Mapping Artificial Intelligence Use in the Government of Canada
Paul Daly
pp. 74–95
AbstractEN:
On the one hand, technological advances and their enthusiastic uptake by government entities are seen as a push toward a Canadian dystopic state, with friendly bureaucrats being replaced by impassive machines. On the other hand, embracing technology is considered a confident move of the Canadian administrative state toward an utopian low-cost, high-impact decision making process. I will suggest in this paper that the truth—for the moment, at least—lies somewhere between the extremes of dystopia and utopia. In the federal public administration, technology is being deployed in a variety of areas, but rarely, if ever, displacing human decision making. Indeed, technology tends to be leveraged in areas of public policy that don’t involve any settling of benefits, statuses, licenses, and so on. We are still a long way from sophisticated machine learning tools deciding whether marriages are genuine, whether taxpayers are compliant or whether nuclear facilities are safe. The reality is more down to earth. In this paper, I map out the uses of algorithms and machine learning in the federal public administration in Canada. I will briefly explain my methodology in Part I; in Part II, I identify seven different use cases, which I describe with the aid of representative examples, and offer some critical reflections.
FR:
D’un côté, les progrès technologiques et leur adoption enthousiaste par les entités gouvernementales poussent les Canadiens vers un état dystopique, avec des fonctionnaires sympathiques remplacés par des machines. De l’autre, l’adoption de la technologie permet à l’État administratif canadien de se lancer avec confiance dans une utopie où la prise de décisions est exécutée à coût modique et engendre un fort impact. Je suggérerai dans cet article que la vérité actuelle se situe quelque part entre les extrêmes de la dystopie et de l’utopie. Dans l’administration publique fédérale, la technologie est déployée dans une variété de domaines, mais rarement, voire jamais, dans le but de remplacer la prise de décision humaine. En effet, la tendance est de s’appuyer sur la technologie pour améliorer les domaines de la politique publique sans pour autant décider des avantages, du statut, des licences, etc. Nous sommes loin jusqu’à présent d’outils d’apprentissage automatique sophistiqués qui passent au crible l’authenticité des mariages, les potentielles fraudes fiscales et la sûreté des installations nucléaires dangereuses. La réalité est plus terre à terre. Dans cet article, j’identifierai les utilisations des algorithmes et de l’apprentissage automatique dans l’administration publique fédérale au Canada. Dans la partie I, j’explique brièvement ma méthodologie et dans la partie II, j’identifie sept cas d’utilisation différents, que je décris à l’aide d’exemples représentatifs avant d’offrir quelques réflexions critiques.