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Tout le monde s’accorde sur l’importance de la culture générale, mais en revanche, trop peu d’universitaires s’entendent pour la définir exactement ou pour eux-mêmes en valoriser l’enseignement. En France, deux professeurs de philosophie (Catherine Roux-Lanier et Daniel Pimbé), leur confrère en lettres modernes (Frank Lanot) et leur collègue enseignant l’histoire (André Ropert) ont réalisé collectivement un outil de référence très réussi et sans équivalent au Québec, portant sur La culture générale de A à Z [1]. L’ouvrage, présenté sous la forme d’un dictionnaire encyclopédique, contient environ 200 définitions très détaillées sur l’histoire des idées, les disciplines des sciences humaines, les trois religions monothéistes, certaines étapes significatives de l’histoire (Antiquité ; Renaissance ; Temps modernes), et plusieurs grands penseurs de notre civilisation. Chaque notice occupe en moyenne deux pages et comprend quelques suggestions de lectures complémentaires.

Parmi les nombreux termes définis et contextualisés, on retiendra diverses notions philosophiques comme l’abstraction, la bioéthique, l’existentialisme, le matérialisme, la métaphysique, le scepticisme, le stoïcisme (introduit comme étant la « capacité à affronter l’adversité avec volonté, courage et fermeté », p. 355). De plus, des notices spécifiques présentent certains des philosophes les plus influents comme Aristote, Descartes, Hegel, Kant, Nietzsche, Jean-Jacques Rousseau. On dégage alors les idées centrales, les oeuvres marquantes, mais aussi les critiques et les prolongements. Autres exemples de cette volonté d’exhaustivité de la part des auteurs : l’article sur Aristote mentionne l’aristotélisme ; le texte sur Marx introduit également le marxisme ; celui sur Platon réfère au platonisme. Les notices les plus utiles portent généralement sur des expressions et des concepts que l’on ne retrouve que succinctement dans les dictionnaires généraux : le contrat social, l’encyclopédisme, l’espace public, les guerres de religion, les révolutions scientifiques. Au pluriel, les Lumières sont ainsi présentées (je ne cite ici que l’extrait d’une phrase, tirée d’un texte de cinq pages sur le sujet) : « […] un idéal philosophique, fondé sur la valeur de la raison et la croyance dans le progrès » ; on le traduit en allemand par « Aufklärung » et en anglais par « Enlightenment » (p. 221).

Les auteurs ont une qualité rare : le sens de la formulation efficace. Ils réussissent à bien articuler les notions introduites. Ainsi, une excellente notice sur « la critique philosophique » présente et compare cette notion selon quatre penseurs : Kant, Marx, Popper et d’après l’École de Francfort (p. 81-83). On y traite d’abord de discernement, de jugement, tout en signalant la connotation souvent péjorative de cette expression. On a atteint un savant équilibre entre le nombre de sujets présentés et la longueur des notices pour un format adéquat et pratique. Il faut se réjouir de la réédition de cet ouvrage méconnu, mais néanmoins pleinement réussi, qui instruira certainement les étudiants de tous les cycles et pourra en outre inspirer les futurs éducateurs. Même les élèves du niveau pré-universitaire pourraient en tirer profit, car les explications sont très claires, mais sans simplification abusive. Aurais-je cependant une petite critique, une remarque, des réserves, une erreur à signaler ? Mais non ! Même après plusieurs relectures, cet ouvrage convivial me semble encore impeccable ! Je le recommande toujours à mes étudiants en début de trimestre, peu importe le cours que je leur donne. Toute bibliothèque publique se devrait de l’inclure dans sa collection.