Abstracts
Résumé
Les éditions de luxe imprimées sur vélin et enluminées tiennent une place stratégique dans la production d’Antoine Vérard, puisqu’elles lui ont notamment permis de chercher l’appui de prestigieux patrons, y compris les rois de France et d'Angleterre. Cet article entreprend une comparaison de l’illustration de l’édition papier courante du Merlin de 1498, avec celle de deux exemplaires enluminés dans l’atelier du maître de Jacques de Besançon, l’un de ces ouvrages ayant appartenu à la bibliothèque du roi Henry VII. Nous abordons la question du remploi des gravures et l’examen de l’ajustement ou de la création iconographiques opérés dans les objets hybrides que constituent les ouvrages imprimés sur vélin. L’étude de différents exemplaires du Merlin de 1498 est mise en perspective par des références à la tradition manuscrite de l’oeuvre et par des comparaisons avec des imprimés sur vélin d’Ogier le Danois, également publié par Vérard la même année, un ouvrage qui, dans sa version papier, utilise plusieurs gravures également remployées dans le Merlin.
Abstract
Illuminated deluxe editions printed on vellum held a strategic place in Antoine Vérard’s production because they allowed him to seek the support of prestigious patrons, including the kings of France and England. This article compares the illustration of the standard paper editions of the 1498 Merlin with that of two copies illuminated in the Master Workshop of Jacques de Besançon, including one which belonged to the library of Henry VII. We focus on the reuse of engravings and the iconographic adjustment or creation at work in these hybrid objects that make up the editions printed on vellum. The examination of different copies of the 1498 Merlin is put into perspective by references to the romance’s manuscript tradition and by comparisons with Vérard’s Ogier le Danois, published the same year and sharing several engravings with Merlin which also circulated in illuminated vellum editions.
Article body
Antoine Vérard fut le fournisseur officiel de la bibliothèque royale constituée par Henry VII : il joua un rôle clef dans son approvisionnement en ouvrages imprimés en français et dans leur transmission dans le domaine anglais, bénéficiant d'un quasi-monopole à la fin du xve siècle[2]. Les collections d'Henry VII comprennent 42 imprimés de Vérard, dont 30 sont conservés à la British Library[3]. Sept de ces ouvrages sont des exemplaires papier, mais la majorité d’entre eux consistent en éditions de luxe sur vélin enluminées dans l'atelier parisien du maître de Jacques de Besançon[4].
Si la bibliothèque constituée par Henry VII et la vaste activité éditoriale de Vérard ont déjà été bien étudiées[5], le rôle de l'illustration dans les imprimés de ce dernier demeure encore largement inexploré, qu'il s'agisse de la nature ou de la fonction des gravures et de leur remploi dans les copies papier, ou de la place et du rôle des miniatures dans les exemplaires sur vélin enluminés[6]. À partir de l'examen d'imprimés sur vélin de l'édition princeps du Merlin de Vérard de 1498[7], cet article s'intéresse à la spécificité de ces produits hybrides et aux aspects matériels de leur diffusion, en France et en Angleterre.
Nous étudierons les transformations à l'oeuvre entre la version de base du Merlin de Vérard et différents exemplaires sur vélin de ce texte, en comparant l'illustration de l'exemplaire de la bibliothèque d'Henry VII (British Library, C.22.c.6-7, t. 1-2) avec celle d'un autre exemplaire de cette édition conservé à la Bibliothèque nationale de France (BNF, Vélins 1123, t. 2), dont on ne connaît pas le possesseur originel. Une des caractéristiques des imprimés illustrés est le remploi de bois gravés d'une édition à l'autre. Les exemplaires papier du Merlin de 1498 se caractérisent par l'utilisation de gravures dont le caractère générique se prête au remploi, mais aussi par le recours à des illustrations qui se trouvent en contradiction flagrante avec le texte[8]. Les imprimés sur vélin enluminés sont des produits coûteux essayant d'imiter le format et la présentation des livres manuscrits. Alors que le remploi peut être lié à un souci d'économie de la part de l'imprimeur, puisqu'il évite la création de nouveaux bois gravés, l'illustration des exemplaires sur vélin va dans le sens de la personnalisation du livre, permettant de reprendre et de corriger certaines discordances entre le texte et l'image.
Le Merlin comprend un bon nombre de bois gravés remployés de ceux que Vérard a fait copier d'Ogier le Danois de Jean de Vingle de 1496[9] pour sa propre édition de 1498[10]. Vérard a dû faire imprimer la première édition du Merlin peu de temps après celle d'Ogier. À travers l'étude des exemplaires sur papier et sur vélin du Merlin de 1498 et leur comparaison avec l'Ogier sur vélin de Vérard (BNF, Vélins 1125 et Turin, BNU, XV, V, 183), nous verrons comment les miniatures suivent le modèle proposé par la gravure ou s'en écartent, donnant lieu à des créations iconographiques différentes, quoique souvent marquées par un caractère générique.
1. Les imprimés enluminés sur vélin : Henry VII, Vérard et le maître de Jacques de Besançon
1.1 Les éditions de Vérard dans la collection d'imprimés d'Henry VII
Gordon Kipling a montré comment, à partir du milieu des années 1490, à la mort de Caxton, Vérard devient le négociant exclusif de livres imprimés en français pour la bibliothèque royale constituée par Henry VII. Pendant plus d'une dizaine d'années, il l'a approvisionnée en exemplaires sur vélin, dont un grand nombre sont enluminés avec les armes royales de l'Angleterre[11]. Henry VII, grand patron des artistes et écrivains contemporains, a sans doute reçu un exemplaire sur vélin de la plupart des publications de Vérard, même si seuls quelques-uns de ces ouvrages ont été spécifiquement exécutés pour lui. En moyenne trois livres en français édités par Vérard sont entrés chaque année dans la collection royale entre 1492 et 1507[12].
Le mécénat du monarque anglais fut assez différent de celui de Charles VIII, patron de Vérard, qui, comme l'a étudié Mary Beth Winn, fut le commanditaire et le dédicataire de nombreux imprimés pourvus d'un prologue et d'enluminures personnalisées. Dans les exemplaires réalisés spécifiquement pour le roi d'Angleterre, la présence de miniatures, d'éléments héraldiques et de variantes textuelles spécifiques est plus rare[13]. Dans certains cas, la mention originale de Charles VIII figurant dans le prologue a été grattée et remplacée par le nom du monarque anglais : même si Henry VII est le seul patron pour lequel cette modification a été effectuée, cela témoigne de la différence du rapport entre Vérard et les souverains anglais et français. Il semble qu'Henry VII ait plutôt acheté des exemplaires déjà constitués dans le stock de Vérard.
Comme l'a montré Henri Omont, le Merlin de 1498 fit partie des éditions de Vérard conservées au palais royal de Richmond. Henry VII augmenta en effet la collection royale constituée par Edouard IV après son séjour à la cour de Bourgogne en 1470-1471 d'une série de ces « belles éditions gothiques [...] qui forment l'un des titres de gloire de la typographie parisienne de la fin du xve et du commencement du xvie siècle[14] ». Ainsi que le rappelle Mary Beth Winn, « la réputation de Vérard en tant que libraire fut fondée sur la beauté visuelle de ses livres[15] ». Cette appréciation esthétique justifie dans une bonne mesure l'intérêt d'Henry VII pour les imprimés de Vérard, notamment les exemplaires de luxe enluminés et imprimés sur vélin, manifestant ainsi sa sensibilité pour des objets en vogue à la cour de France, avec lesquels il a pu se familiariser lors de son exil en Bretagne et en France dans les années 1470 et 1480, alors qu’Edouard IV avait plutôt manifesté une préférence pour les ouvrages enluminés par des artistes flamands[16]. La mère d’Henry VII, Margaret Beaufort, possédait elle-même une large bibliothèque comprenant des livres en anglais et en français, car elle ne connaissait pas le latin, notamment des ouvrages à caractère dévotionnel et religieux, à la fois manuscrits et imprimés. Dans les années 1490-1500, elle a soutenu l’activité des pionniers de l’imprimerie anglaise, Caxton, Wynkyn de Worde et Richard Pynson[17].
L'édition du Merlin de 1498 et sa présence dans les collections royales anglaises témoignent des goûts d'Henry VII et de la cour Tudor, attachés à la tradition bourguignonne de chevalerie lettrée[18], mais aussi informés par les goûts de la cour de France, et préférant les chroniques, les romans en prose et les oeuvres poétiques aux nouveaux travaux d'orientation humaniste, malgré un intérêt pour les traductions des classiques.
Le Merlin enluminé sur vélin de la British Library (C.22.c.6,7,8) se présente sous la forme de trois grands volumes à la couverture de velours pourpre et à la tranche dorée. Le troisième tome, actuellement incomplet, correspond aux Prophéties[19]. Alors que les deux premiers volumes, qui comprennent le Merlin et la Suite Vulgate, sont de format similaire (t. 1 :32,5 x 20,5 cm, 222 ff.; t. 2 :31,5 x 21 cm, 178 ff.), le troisième se distingue des deux autres par son origine textuelle, son format plus petit (27,5 x 20 cm, 160 ff.), et sa mise en page. Contrairement aux deux premiers volumes du Merlin, les Prophéties ne contiennent, dans l'édition sur papier originale, aucune gravure[20]; il aurait donc fallu apporter des changements considérables pour en produire une version sur vélin illustrée[21].
1.2 Les imprimés de Vérard enluminés par le maître de Jacques de Besançon et son atelier
Paul Durrieu a montré que Jacques de Besançon était le bâtonnier de la confrérie de Saint-Jean-l'Évangéliste, établie pour les gens du métier du livre en l'église Saint-André-des-Arts à Paris. En 1485, il offrit à sa confrérie, selon l'inscription portée sur l'ouvrage, un Office noté de saint Jean (Paris, Mazarine, 461), orné de deux petites miniatures de style distinct[22]. Depuis, Eleanor Spencer a distingué selon des critères chronologiques et stylistiques l'existence de trois enlumineurs successifs : le maître de Jean Rolin, le maître François et le maître de Jacques de Besançon, qui a repris l'atelier de maître François et l'a développé[23]. Les manuscrits enluminés par ces artistes, tout comme les ouvrages imprimés réalisés en collaboration avec Vérard, touchèrent une clientèle allant des hauts fonctionnaires et de l'aristocratie de cour aux souverains, incluant Charles VIII, le comte Charles d'Angoulême, Anne de Bretagne, Louis XII ou Henry VII d'Angleterre.
L'illustration des Merlin sur vélin de la BNF et de la British Library témoigne du caractère hybride de ce type d'ouvrage qui se situe entre l'imprimé illustré traditionnel, fabriqué en série d'exemplaires identiques (à part les ajouts manuels comme les initiales ou pieds de mouche, ou les corrections apportées au cours de l’impression), et le manuscrit enluminé dont chaque copie est unique (même s'il existe des manuscrits jumeaux réalisés sur le même modèle au sein du même atelier). Les exemplaires sur parchemin de Vérard lui permettaient d'exciter la curiosité de sa clientèle princière par leur nouveauté, tout en donnant l'impression familière d'un manuscrit par l'adjonction de bordures enluminées, de petites miniatures dans le texte et de grandes miniatures frontispices, personnalisant chacun de ces exemplaires de luxe. Ainsi, le développement de l'imprimerie s'est effectué dans des endroits ayant déjà une forte tradition de production de livres manuscrits, bénéficiant de l'expertise et de la disponibilité d'une main d'oeuvre déjà formée. À partir de 1492, avec l'édition de la Bataille Judaïque de Flavius Josèphe, et jusqu'en 1498, Vérard recourt régulièrement aux services du maître de Jacques de Besançon pour l'illustration de ses ouvrages sur vélin. En parallèle avec l'illustration de manuscrits, l'artiste « se met au service de l'édition imprimée en peignant dans les incunables de grandes miniatures servant de frontispices ou en y recouvrant les gravures de ses propres miniatures[24] ».
Les illustrations réalisées par le maître de Jacques de Besançon et la façon dont il transforme ou met en couleur les gravures des éditions de Vérard témoignent d'une maîtrise remarquable, mais aussi d'un certain conservatisme technique et stylistique. Comme le souligne Nicole Reynaud, le maître de Jacques de Besançon va « exercer jusqu'au tournant du siècle [...] prolongeant jusqu'autour de 1500, par la force des traditions d'atelier, les formes et les usages du milieu du siècle mis au goût du jour sans innovation fondamentale de représentation ». Il est parmi les derniers miniaturistes parisiens à mettre en oeuvre une telle « perfection technique[25] ». L'effet de luxe, recherché dans la variété des coloris et l'éclat du hachurage d'or, sans doute promu par Vérard pour des considérations commerciales, l'emporte sur la finesse de l'exécution dans toute la fin de la production de l'artiste[26]. Même si le maître de Jacques de Besançon n'est pas à la pointe de la modernité et perpétue dans l'imprimé la tradition artistique de la miniature, « il mérite l'attention en tant que représentatif du goût d'une époque » : l'ensemble de ses illustrations en fait « l'enlumineur de loin le plus prolifique et le plus sollicité de tout le xve siècle en France[27] ». En ce sens, le recours à l'atelier du maître de Jacques de Besançon sert bien la politique éditoriale de Vérard et coïncide avec les goûts artistiques et littéraires d'Henry VII et de sa cour, qui préfèrent les oeuvres médiévales traditionnelles aux nouveautés humanistes.
Paul Durrieu a recensé 33 incunables enluminés par le maître de Jacques de Besançon dans les collections de la BNF[28], et l'artiste a peint de nombreuses pages de dédicace destinées à des imprimés, dont une dizaine pour Charles VIII[29]. En ce qui concerne les Merlin sur vélin de 1498, on ne conserve pas la trace d'un ouvrage réalisé spécifiquement pour Charles VIII ou pour son successeur Louis XII[30]. Seuls des indices externes révèlent qu'un des exemplaires sur vélin a été acheté pour Henry VII, car les imprimés en question ne comportent ni prologue ajouté, ni emblèmes héraldiques susceptibles d'identifier leur patron ou leur commanditaire. En ce sens, les Merlin sur vélin sont bien des imprimés de luxe distincts des exemplaires papier standards, mais ils se situent à un degré intermédiaire de personnalisation et de sophistication par rapport à d'autres exemplaires enluminés produits par Vérard pour les souverains français ou anglais.
2. Étude comparative de l'illustration du Merlin imprimé de 1498 et de ses versions enluminées sur vélin
Le choix que fait Vérard d'éditer le Merlin et ses prophéties s'inscrit dans la perspective de la publication antérieure d'oeuvres arthuriennes, comme le Lancelot (1488 / 1494)[31] et le Tristan (1489)[32]. Les rééditions successives de ces textes témoignent de la réussite commerciale de ces entreprises, malgré l'investissement financier requis et le défi que représentait la longueur de ces oeuvres. Le Lancelot publié en 1488 par Le Bourgeois et du Pré, sans doute en collaboration avec Vérard, comprend six gravures de grand format, dont la plupart proviennent de bois gravés originaux spécialement créés pour l'occasion, ce qui constitue un cas exceptionnel[33].
De l'autre côté du spectre, toutes les gravures du Merlin de 1498 (22 au total : une dans le Merlin et toutes les autres dans la Suite Vulgate, soit 14 dans le premier volume de Vérard et huit dans le second) sont des remplois de bois gravés antérieurs, destinés à l'illustration d'autres textes, et faisant partie du stock dont disposait alors l'éditeur. Ce phénomène peut être lié à l'augmentation de la part des éditions illustrées dans la dernière décennie du xve siècle, puisque cela concerne alors 56 % du total contre seulement 1/3 pour la période de 1480 à 1500[34].Les images sont plus profuses mais moins adaptées au texte, la quantité l'emportant peut-être sur la qualité. Dans certains cas, les gravures utilisées dans le Merlin se prêtent bien au remploi, du fait de leur caractère générique et polysémique, mais dans d'autres, les illustrations remployées se trouvent en contradiction avec le texte. Il existe un continuum des versions sur papier, illustrées par des gravures en noir et blanc, aux imprimés sur vélin enluminés, en raison des différents degrés de transformation auxquels donne lieu l'intervention du miniaturiste.
2.1 La conservation de scènes à caractère générique
Le Merlin sur vélin de la British Library semble avoir été, à une exception près, imprimé sans les gravures utilisées pour l'édition papier (les impressions de bois ne sont pas visibles par transparence, mais elles ont pu être poncées). L'espace blanc a été employé par les miniaturistes pour la composition de nouvelles images généralement distinctes des gravures d'origine, mais qui s'en inspirent occasionnellement. Dans d'autres imprimés sur vélin où les gravures ont été reproduites, comme pour l'Ogier de 1498 de Vérard, le passage de la gravure en noir et blanc à la miniature n'apporte presque aucun changement, puisqu'il s'agit simplement de mettre en couleur l'image d'origine. L'utilisation de scènes génériques facilite le remploi d'un motif iconographique qui peut s'adapter au nouveau texte auquel il est associé.
Dans l'édition sur papier de Vérard, la Suite Vulgate comprend trois utilisations d'un bois gravé issu de l'illustration d'un texte épique, Renaut de Montauban ou les Quatre fils Aymon, représentant la chevauchée des quatre frères[35]. Dans la Suite Vulgate, ce motif iconographique s'accorde à deux occasions avec l'évocation des aventures des neveux d'Arthur, Gauvain et ses frères, même si les cavaliers ne sont pas représentés en armure.
Utilisé pour la première fois par Jean de Vingle dans son édition lyonnaise des Quatre fils Aymon de 1493[36], puis remployé dans son Ogier le Danois en 1496, ce bois gravé a été copié par Vérard pour sa propre édition d'Ogier en 1498, puis remployé dans le Merlin la même année. La bibliothèque d'Henry VII comprenait un volume sur vélin de l'Ogier de Vérard de 1498 (British Library C.22.c.1), enluminé par le même artiste que le volume II du Merlin, un peintre dont le style est proche de celui du maître de Jacques de Besançon[37]. Dans l'image de la chevauchée, la différence entre l'exemplaire papier du Merlin (Figure 1) et celui sur vélin (Figure 2) est minimale : la gravure de la copie papier a été conservée et mise en couleur. La reprise de cette gravure est importante, car elle témoigne de la plus grande proximité entre l’exemplaire sur vélin et l’édition papier de 1498, puisque, dans l’édition de 1503, la gravure de chevauchée n’est pas utilisée, l’illustration du premier volume du Merlin se limitant à la gravure frontispice et à la reprise systématique de la même scène de bataille pour toutes les autres illustrations.
Une comparaison de cette illustration dans le Merlin sur vélin et dans l'Ogier enluminé (Figure 3)[38] montre comment l'intervention d'un miniaturiste suscite des variations de détail entre deux versions enluminées de la même gravure. Dans Ogier, seuls le texte et la rubrique permettent d'identifier une chevauchée de Charlemagne et de ses compagnons car les attributs de l'empereur ne sont pas visuellement représentés. La composition des deux miniatures demeure identique, mais des différences relativement minimes concernent le choix des couleurs, l'utilisation plus abondante de rehauts d'or, ainsi que la modification de certains accessoires (de l'omission de la plume du chapeau des cavaliers et de l'ajout de lances ou d'un col d'hermine dans Ogier à la simplification du harnachement des chevaux dans Merlin). Dans les deux cas, la gravure originale a été simplifiée par l'effacement de deux personnages situés à l'arrière-plan et du bouquet tenu par le premier cavalier. Cette gravure est la seule à avoir été jugée compatible avec le Merlin et retenue dans le nouveau programme iconographique réalisé pour l'imprimé sur vélin.
2.2 L'altération de l'illustration pour une meilleure correspondance entre le texte et l'image
2.2.1 Comparaison de l'illustration du premier tome du Merlin de Vérard sur papier et de l'imprimé sur vélin de la British Library
Dans la majorité des cas, l'intervention du miniaturiste permet d'utiliser l'espace libéré par la gravure d'origine pour créer une image plus adaptée au texte correspondant, en gommant l'écart entre le texte et l'illustration produit par le remploi iconographique dans l'édition sur papier.
Pour la miniature frontispice du Merlin (Figure 4), Vérard utilise dans son édition papier un bois gravé de la Bible des poètes, les Métamorphoses d'Ovide moralisées, un texte qu'il publie en 1498, en imitant l'édition de 1488 de Colard Mansion dont il fait copier la gravure frontispice. La gravure ouvrant le premier livre de la Bible des poètes représentait l'auteur Ovide, la chute des anges rebelles (version christianisée du mythe de la chute des géants), et la fuite de Deucalion (fils de Prométhée) et de sa femme Pyrrha (fille de Pandore), les seuls rescapés du déluge envoyé par Jupiter pour châtier les hommes. L'image mêlait références antiques et références chrétiennes, mais pouvait résonner avec certains aspects du début du Merlin par la mise en scène d'une figure prophétique, l'évocation de la descente aux Enfers et de la Résurrection, et la question d'un complot diabolique[39].
Dans l'exemplaire enluminé du premier volume du Merlin conservé à la British Library, l'image destinée au début de la Bible des poètes laisse place à une nouvelle miniature illustrant plus strictement le début du Merlin (Figure 5). À droite est représentée la destruction des possessions de Merlin l'Ancien, persécuté par les démons, et à gauche la conception de Merlin par la fille de Merlin l'Ancien et par un démon. On trouve un écho de la composition de la gravure originale dans la bipartition de la scène, renforcée par le recours à un cadre architectural. La miniature exhibe l'union conduisant à la conception de Merlin, selon le procédé de la maison de poupée fréquemment employé par les miniaturistes. Le démon qui s'acharne sur les troupeaux de Merlin l'Ancien peut rappeler par sa posture le diablotin représenté au premier plan de la gravure de la Bible des poètes. Le peintre transforme radicalement le contenu de l'image frontispice originale et choisit deux scènes qui font chacune partie de la tradition iconographique du début du Merlin[40], mais sont plus rarement combinées (si ce n'est dans les grandes miniatures frontispices compartimentées ou synthétiques, comme celle du manuscrit parisien réalisé dans l’atelier du maître de Fauvel dans la première moitié du xive siècle, BNF fr. 105, Figures 6 et 7)[41]. Dans l'illustration liminaire de BNF fr. 105, dont la mise en page est bien distincte, puisque l'image est formée de neuf compartiments distincts (incluant la persécution des membres de la famille de Merlin l'Ancien ou encore le personnage de Blaise), la destruction des troupeaux de Merlin l'Ancien s'étend sur deux des compartiments supérieurs de la miniature, qui détaillent la mise à mort de moutons, vaches et chevaux. La représentation de la conception de Merlin, mise au premier plan dans l'imprimé enluminé, prend un caractère plus menaçant dans le manuscrit où le démon prêt à prendre possession de la jeune femme endormie n'est plus simplement représenté à côté d'elle dans le lit, mais se penche au-dessus de sa victime, dans la même posture qu'un de ses compagnons au-dessus d'un mouton qu'il égorge.
La comparaison du travail du miniaturiste, de la version sur papier aux exemplaires sur vélin d'Ogier et de Merlin, témoigne des différents degrés de transformation dont fait l'objet la gravure d'origine. Plusieurs exemples montrent comment l'image initialement destinée à l'illustration des Quatre fils Aymon est modifiée pour correspondre à Ogier, puis remplacée par une miniature complètement différente dans l'exemplaire enluminé du Merlin.
Dans la plupart des cas, le miniaturiste ne cherche plus à imiter la gravure d'origine, mais adopte une nouvelle image de composition et de sujet totalement différents. Dans la Suite Vulgate est ainsi utilisée la fameuse scène de la querelle à l'échiquier, où, dans les Quatre fils Aymon, Renaut de Montauban tue Berthelot, le neveu de l'empereur Charlemagne, au cours d'une partie d'échecs qui dégénère. Dans l'édition sur papier du Merlin, l'utilisation de cette illustration, d'abord copiée par Vérard sur Jean de Vingle pour son Ogier de 1498, crée un hiatus entre le texte et une image dont le contenu est manifestement hétérogène et discordant (Figure 8).
Quand le même bois gravé issu des Quatre fils Aymon publié par Jean de Vingle en 1493 est utilisé pour son illustration d'Ogier en 1496, le transfert est facile, car ce motif est aussi repris sur le plan textuel quand Charlot, un autre neveu de Charlemagne, tue le fils d'Ogier, Baudouin, au terme d'une partie d'échecs qui lui est défavorable. Certes, le détail des lettres RE figurant sur la jarretière du meurtrier continue de désigner Renaut (au lieu de Charlot) dans l'Ogier de Jean de Vingle de 1496 et dans la copie de la gravure pour l'Ogier de Vérard de 1498. Cependant, dans l'Ogier sur vélin, le miniaturiste qui met en couleur l'illustration recouvre les lettres en question (Figure 9). L'emploi de cette gravure dans le Merlin est problématique parce qu'elle ne correspond pas du tout au texte, mais cet écart ne semble pas avoir gêné l'imprimeur.
Cependant, dans l'exemplaire sur vélin du Merlin de Vérard, l'environnement textuel devient l'élément de référence, selon une pratique plus proche de la tradition manuscrite, justifiant le recours à une miniature plus adaptée au passage concerné : l'envoi par le jeune Galeschin d'une lettre à Gauvain (Figure 10). Le jeune homme, neveu d'Arthur et fervent admirateur de ce dernier, propose à son cousin d'unir leurs forces pour défendre les terres du souverain, alors engagé dans la lutte contre ses barons révoltés et contre les Saxons qui envahissent le royaume de Carmélide. La nouvelle miniature s'écarte radicalement de la gravure originale par son sujet et sa composition.
Un deuxième cas correspond à l'emploi d'une gravure issue de l'édition des Quatre fils Aymon (publiée par Jean de Vingle en 1493), qu'il a remployée dans son Ogier de 1496 et que Vérard a fait copier pour son Ogier et son Merlin de 1498. Dans les Quatre fils Aymon, l'image montre Roland faisant prisonnier le roi Yon de Gascogne, les yeux bandés, enlevé par une troupe de soldats du monastère où il est devenu moine (Figure 11). Dans l'Ogier sur vélin de Vérard (Figure 12), la composition de la scène originale est conservée, avec une troupe à cheval à gauche et une assemblée de personnages à pieds devant l'église située à droite. L'image est adaptée à l’édition d'Ogier par la transformation de l'identité des personnages, marquée visuellement par leurs nouveaux attributs, et par l'inversion de la position du cheval situé au premier plan, ce qui permet de rendre compte de la rencontre entre le pape et l'empereur, évoquée dans le texte et la rubrique. Dans le Merlin, où l'illustration n'est accompagnée d'aucune rubrique, la gravure de remploi est discordante par rapport au texte : elle joue un rôle ornemental et structurant, mais est détachée de la narration (Figure 11).
L'image de l'édition sur papier fait l'objet d'une réinvention de l'artiste dans la copie sur vélin, où toute trace du sujet et de la composition de la gravure originale a disparu (Figure 13). La nouvelle scène représentée, plus en accord avec l'intrigue du Merlin, est le banquet célébrant les fiançailles d'Arthur et de Guenièvre, couronnés et assis ensemble à une table à gauche de la miniature, tandis que deux écuyers se chargent du service. Les fiançailles ont lieu à la cour du roi Léodegan de Carmélide, en présence de l'évêque de Carohaise ainsi que des rois Ban et Bohort. Pourtant, la miniature se focalise sur le couple de jeunes mariés et sur les festivités profanes plutôt que religieuses[42]. L'identité d'Arthur, demeuré jusqu'alors incognito, est révélée par Merlin à l'issue de la cérémonie et l'image insiste sur la dignité royale d'Arthur et de son épouse[43].
La transformation d'une autre scène des Quatre fils Aymon utilisée dans l’édition d'Ogier, puis remplacée dans la Suite Vulgate du Merlin, montre aussi le souci d'adapter des images étroitement liées à leur contexte d'origine pour éviter, dans l'exemplaire enluminé, la discordance entre texte et image qui caractérisait l'imprimé sur papier. L'arrivée devant Charlemagne de quatre messagers mutilés par le duc Geoffroy dans la gravure des Quatre fils Aymon de 1493 de Jean de Vingle, reprise dans son Ogier de 1496, puis copiée par Vérard pour Ogier et Merlin en 1498 (Figure 14), laisse ainsi place dans l'Ogier sur vélin à une scène beaucoup plus ordinaire. La composition est la même, mais les personnages au nez coupé qui occupaient l'arrière-plan disparaissent, remplacés par un homme sans attribut remarquable, tandis que le roi Caraheu prend la place du héraut qui remettait une lettre à Charlemagne (Figure 15).
Dans le Merlin sur vélin, le miniaturiste réalise une image tout à fait différente, donnant à voir le combat d'Arthur et du géant saxon, le roi Rion, dans la forêt, près d'un cours d'eau (Figure 16). La stature du géant, la forme originale de son bouclier et de son épée contribuent à donner au Saxon une touche d'exotisme et à le différencier de son jeune adversaire. Hormis l'absence de relief significatif, la représentation du cadre du combat correspond assez bien à la lettre du texte suivant immédiatement l'image, qui mentionne « une grande vallee parfonde, entre ung pleissis et ungs beaulx prés, ou il y avoit ung ruissel [...] aux piedz de deux montaignes » (BL, C.22.c.6, t. 1, f. 190v).
Le titre du chapitre au folio 190 r° sert de légende et aide à la compréhension de l'image qui suit. Ce type d'énoncé n'accompagne pas systématiquement les illustrations du Merlin, puisque seules trois des 14 gravures du premier volume du texte sont précédées d'un titre de chapitre, même s'il comprend 117 chapitres (98 pour le Merlin propre et 19 pour la Suite Vulgate), commençant chacun par un titre en forme de résumé narratif systématiquement introduit par l'adverbe « Comment... ». L'édition de Vérard comporte un appareil paratextuel important. La constitution d'aides à la lecture telles que les tables des matières et titres de chapitres devient en effet caractéristique de la pratique des éditeurs au début de l'imprimerie, même si ces éléments paratextuels ne sont pas systématiques dans les éditions des années 1480. Or, la répartition des images semble indépendante de la structuration en chapitres. Le sujet des gravures remployées dans l'édition sur papier ne coïncide pas à l'origine avec l'environnement textuel dans lequel elles sont insérées, et il est difficile d'expliquer la logique de leur placement, concentré dans les deux premiers tiers de la Suite Vulgate, à la fin du premier tome et au début du second. L'intervention du miniaturiste résorbe cet écart, avec la création d'une image plus adaptée au texte et au titre de chapitre qui l'accompagne. Dans le cas étudié, le titre de chapitre indique : « Comment le roy Artus poursuyvit tant le riche roy Rions d'Irlande qu'il attaingnit en une vallee parfonde, et gaigna son espee, la meilleure qui fut oncques forgee, ainsi que dit le compte » (BL, C.22.c.6, t. 1, f. 190).
L'énoncé du titre de chapitre est souvent repris dans le sommaire de l'ouvrage, situé entre les folios a 2 et a 6, mais ce dernier en présente ici une version condensée : la mention de la fameuse Marmiadoise, l'épée forgée par Vulcain et transmise à Rion par son ancêtre Hercule, est absente de l'intitulé figurant aux folios a 5v-a 6. La miniature du folio 190v (Figure 16) se conforme bien au titre du chapitre, mettant en scène le duel à l'épée des deux rois, mais sa réalisation suggère aussi que l'artiste s'est inspiré de la lecture du texte, ou du moins avait accès à des informations supplémentaires, puisqu'il est attentif au cadre de cet affrontement et au fait que Rion est un géant. Dans la tradition manuscrite du Merlin, l'affrontement d'Arthur et de Rion est fréquemment représenté, mais il se déroule toujours à cheval, intégrant ou non le cadre de la bataille et le gigantisme de Rion[44]. La coïncidence entre le texte et l'image n'est cependant pas parfaite : on peut se demander à quoi correspond le groupe de soldats à cheval représentés à gauche dans les fourrés. Ces derniers semblent assister à la bataille, alors que le texte mentionne seulement l'irruption de six rois saxons pourchassés par trois compagnons d'Arthur, qui permet à Rion de prendre la fuite.
2.2.2 Comparaison de l'illustration du second tome du Merlin de Vérard sur papier et des imprimés sur vélin de la BL et de la BNF
L'utilisation de compositions et de motifs similaires dans les miniatures des deux imprimés sur vélin
S'il ne subsiste qu'une seule copie enluminée du premier volume du Merlin, on a conservé deux exemplaires sur vélin du second volume. Comme l'ouvrage de la collection d'Henry VII, celui de la BNF ne porte pas de marques d'appartenance internes susceptibles d'identifier son destinataire, mais la richesse du livre et le coût de son illustration suggèrent qu'il a également circulé dans un milieu aristocratique ou royal.
Le Merlin sur vélin de la BNF et celui de la BL sont d'une édition différente des exemplaires sur papier des éditions de 1498 et 1503, même si les caractères utilisés sont les mêmes[45]. Ainsi dans le premier et le second tome du Merlin sur vélin, la mise en page de la table des matières diffère sensiblement de celle de l'édition sur papier, notamment par la façon dont le titre courant est centré. Malgré ces différences, le volume 1 de l'exemplaire sur vélin de la BL est plus proche de l'édition de 1498 que de celle de 1503, puisque sa page de titre indique « Le premier volume de Merlin » (et non « Le premie volume de Merlin », comme dans l'édition de 1503), ce qui vaut aussi pour la composition du texte. Ainsi, le folio 2 du volume 1 du Merlin se termine par : « Et comment il fist pendre la fem // -me du bon homme dont il mou [retour à la ligne] -rut », suivi de trois points en triangle, un énoncé qui s'étend sur trois lignes dans l'édition papier de 1498 et dans l'exemplaire sur vélin, alors que dans l'édition de 1503, cette phrase n'occupe que deux lignes et n'est suivie d'aucun signe de ponctuation : « Et comment il fist pendre la fem// -me du bon homme dont il mourut ».
De la même façon, la composition de la dernière page du volume 1 du Merlin de 1498 et de l'exemplaire sur vélin (f. 211v) est similaire : la première colonne finit par « Et Merlin lui compta cō», alors que dans l'édition de 1503, elle se termine par « Et Merlin lui compta ». La seule différence consiste dans le colophon, qui indique « Cy fyne [retour à la ligne] Merlin. » dans l'édition papier de 1498 (Figure 17), contre « Cy fyne la premiere [retour à la ligne] partie du livre de [retour à la ligne] Merlin. », suivi de trois points en triangle, dans l'exemplaire sur vélin (Figure 18). Même si textuellement ce colophon correspond à l'énoncé de l'édition papier de 1503, « ¶ Cy fine la premiere partie du [retour à la ligne] livre de Merlin. » (Figure 19), la mise en page du colophon rapproche davantage l'édition de 1498 et l'exemplaire sur vélin : la composition du colophon réduit de l'édition de 1498 semble correspondre à l'omission du segment central, alors que les termes extrêmes du colophon sont placés au même endroit.
Il n'y a pas de différence dans la composition du second tome du Merlin des éditions sur papier de 1498 et 1503, et contrairement aux exemplaires sur vélin, le premier folio du texte (Figures 21 et 22) ne comporte pas de titre courant. Sur ce folio frontispice, le titre du premier chapitre est centré sous la miniature, à cheval sur les deux colonnes de texte, alors que ces éléments paratextuels étaient placés l'un à la suite de l'autre au début de la première colonne du texte dans les deux éditions sur papier (Figure 20). Les deux exemplaires sur vélin sont des témoins capitaux du fait qu'il y a eu au total non pas deux, mais trois éditions du Merlin de Vérard. Il a peut-être existé des exemplaires papier de cette édition, mais d'après nos vérifications, tous les témoins des volumes 2 du Merlin, qu'il s'agisse des copies papier de l'édition de 1498 ou de celle de 1503, présentent la même mise en page que l'exemplaire d'Aberystwyth. Certes, le premier volume de l'édition de 1503 se caractérise par une illustration moins variée que celui de 1498, puisqu'il ne présente que deux types de gravures différents, le second étant remployé 13 fois[46]. Alors que la scène montrant l'arrivée des messagers au nez coupés faisait l'objet d'une utilisation unique dans les Quatre fils Aymon et dans Ogier, elle est remployée à deux reprises dans le Merlin de Vérard, où elle constitue la gravure frontispice du second volume (Figure 20), aussi bien dans l'édition de 1498 que dans celle de 1503.
Les deux exemplaires sur vélin de la BL et de la BNF présentent une mise en page différente du premier folio du volume 2 : ils transforment l'énoncé liminaire « Cy commence la seconde partie du livre de Merlin » en titre courant, et le titre de chapitre n'est plus écrit sur une colonne, comme le reste du texte, mais prend la forme d'une rubrique placée au-dessous de la miniature et occupant toute la largeur de la page. Enfin, la miniature frontispice du tome 2 des copies sur vélin de Londres et de Paris ne correspond pas au bois gravé représentant l'arrivée de messagers au nez coupé des éditions papier de 1498 et 1503 : ce dernier n’a pas été reproduit et il y est substitué une scène de navigation (Figures 21 et 22).
C’est un motif que l'on trouve notamment dans une gravure remployée 11 fois dans l'édition d'Ogier de Vérard de 1498 (Figure 23). Ce bois est lui-même imité d’une gravure qui apparaît neuf fois dans l'édition d'Ogier de Jean de Vingle de 1496, alors que les autres bois y sont (r)employés entre une et sept fois. Or, les illustrations liminaires du deuxième volume sur vélin du Merlin ne constituent pas le remploi et la mise en couleur d’une gravure préexistante. Les miniaturistes se sont librement inspirés d’une scène courante, peut-être issue du modèle de navigation fourni par la gravure d’Ogier, mais il s’agit dans chaque cas d’une image originale. Dans la scène de navigation remployée dans l'Ogier de Vérard (Figure 23), une flottille composée de quatre navires fait route vers le rivage et la cité situés dans le coin supérieur gauche de l’image. Les mises en couleur de cette gravure dans l’Ogier sur vélin ne retiennent habituellement qu’un ou deux navires, apportant de petites variations au cadre qui les entoure[47]. La situation est différente dans les volumes du Merlin sur vélin, où les navires se dirigent vers la droite de l’image, quittant l’Angleterre pour se rendre en Gaule. Même si le sujet des miniatures est le même, et bien que la composition des images de Londres et de Paris soit globalement similaire, les proportions différentes du navire principal dans les deux exemplaires indiquent bien qu'il ne s'agit pas de la mise en couleur d’un même bois gravé sous-jacent, mais de créations autonomes, quoique convergentes. La miniature montre Arthur et son armée navigant vers le continent, où ils vont affronter le roi de Gaule, Claudas de la Déserte, Frolle duc d'Allemagne et Ponce Antoine, l'ambassadeur romain. Ce sujet correspond bien au titre du chapitre, placé sous la miniature, ce qui renforce sa similarité avec une rubrique expliquant le sujet de l'image : « Comme le roy Artus se partit de Logres pour venir au royaume de Benoïc avecques le roy Ban et le roy Boors et les chevaliers de la Table Ronde » (BNF, Vélins 1123, t. 2, f. 1).
Ce passage de la Suite Vulgate faisait déjà l'objet de l'illustration d'un navire dans le manuscrit enluminé que nous avons précédemment évoqué (BNF, fr. 105, réalisé à Paris vers 1320), où Arthur, debout au centre du bateau, auquel sont accrochés trois écus[48], tient une place dominante (Figure 24). La tradition manuscrite du Merlin inclut régulièrement l’illustration des différentes traversées de la mer qu'effectuent Merlin et Arthur dans la Suite Vulgate[49].
L'exemplaire de la BL (Figure 22) représente deux navires au lieu d'un seul et comporte des détails supplémentaires, représentant des hunes au sommet des mâts, ou encore dotant Arthur et les deux rois qui l'accompagnent d'un col d'hermine, mais il omet les trois blasons accrochés au flanc du vaisseau dans la copie de la BNF (Figure 21). Les miniatures sont donc plus adaptées à leur contexte que la gravure de l’exemplaire papier, même si elles reprennent un thème iconographique répandu et attesté, aussi bien dans la tradition manuscrite du Merlin que dans les gravures et les enluminures d’autres imprimés de Vérard.
Dans l'Ogier sur vélin, certaines miniatures sont originales et ne présentent pas de trace de bois gravé sous-jacent. Dans un de ces cas, c’est justement une scène de navigation qui est enluminée et se substitue à ce qui, dans les exemplaires papier, constituait un bois gravé dont le sujet était discordant par rapport au texte. Ainsi dans la copie de la BNF, l'illustration du retour en France du roi Gauthier, le neveu d'Ogier, et de sa femme Clarisse (Figure 25) remplace le remploi de la gravure de l'enlèvement du roi Yon (voir Figure 11) dans les exemplaires sur papier d'Ogier. La composition des miniatures de navigation de l'Ogier (Figure 25) et du Merlin (Figures 21 et 22) sur vélin a en commun la représentation du bateau sur l'eau, de la cité à l'arrière-plan gauche, et de la rive au premier plan, avec un rocher placé à droite de l'image. La focalisation sur un seul navire et les proportions de ce dernier rapprochent encore plus étroitement les illustrations de l’Ogier et du Merlin de la BNF, même si la figuration des occupants du navire varie dans les trois exemplaires sur vélin. On passe alors du remploi d'un bois gravé issu des Quatre fils Aymon et discordant par rapport au Merlin à la création d’une miniature de navigation, certes stéréotypée et récurrente dans différents ouvrages imprimés par Vérard, mais plus adaptée à son contexte.
L'illustration du second volume du Merlin de Vérard, exclusivement constituée de remplois d'éditions antérieures, présente moins de variété que celle du premier volume, en raison de la répétition systématique de la même scène de bataille : le même bois gravé est utilisé pour sept des huit illustrations du second volume du Merlin de 1498 (Figure 26), sauf dans la gravure frontispice. Cette image provient d'une représentation de la mort de Palamède, atteint d'une flèche décochée par Paris, dans l'édition par Jean Bonhomme de la Destruction de Troyes de Jacques Millet en 1484 et 1490[50]. Cette situation permet de mettre en exergue les différentes stratégies adoptées par les miniaturistes lorsqu'ils sont confrontés à la reprise à l'identique d'une même gravure dans l'édition originale. La gravure d'origine représente une scène de bataille qui, comme la chevauchée des quatre fils Aymon, possède un caractère générique favorisant le remploi : elle est ainsi reprise trois fois dans Ogier[51].
La Suite Vulgate du Merlin traite des nombreuses batailles d'Arthur et des rois bretons, en Angleterre et sur le continent. Il s'agit donc d'un contexte plutôt adapté à l'utilisation d'une scène de bataille dotée d'un caractère relativement générique. Pourtant, contrairement à Ogier, dans le Merlin enluminé, l'absence de reproduction de la gravure initiale lors de l'impression du texte empêche la simple mise en couleur de la gravure. Les sept occurrences de la scène de bataille issue de la Destruction de Troyes donnent donc lieu à sept images distinctes, même s'il est possible de rapprocher deux paires de miniatures qui présentent une composition relativement similaire (ff. 13-52v; 36v-46).
L'adoption la plus frappante d'une image différente de la gravure originale et adaptée au texte du Merlin apparaît avec la représentation de la transformation en cerf de Merlin, qui se rend sous cette apparence auprès de l'empereur Jules César. Le titre de chapitre permet d’identifier le cerf traversant la forêt en direction de la cité de Rome comme Merlin métamorphosé : « Comment Merlin s'en alla es parties de Romenye dedens les forestz sauvaiges et se mist en guise de cerf a cinq cornes et s'en alla courir jusques dedens le palais de l'empereur de Romme nommé Julius Cesar » (BNF, Vélins 1123, t. 2, f. 23v).
Les exemplaires sur vélin de la BNF et de la BL se caractérisent par la duplication d'une scène dont le sujet et la composition sont similaires, mais présentent des différences de détails concernant l'exécution des figures (des bois du cerf à la réalisation de la ville de Rome et aux proportions des arbres de la forêt). Ils utilisent une référence commune, peut-être des instructions aux miniaturistes, voire une liste de sujets ou d'esquisses disponibles dans l'atelier de Vérard ou du maître de Jacques de Besançon, à moins que l'illustration de l'un des deux imprimés ait été directement copiée sur l'autre, ce qui expliquerait aussi la concordance des scènes de navigation qui ouvrent les exemplaires sur vélin du volume 2 du Merlin. Même si c’était le cas, il demeure difficile de déterminer quel exemplaire aurait servi de modèle à l’autre. La miniature frontispice du tome 2 de l’imprimé de Londres est peut-être plus précise que celle de la copie de Paris, dans la mesure où elle montre deux rois naviguant (Figures 21 et 22), mais l’exécution des bois de Merlin transformé en cerf est plus habile dans l’ouvrage de la BNF (Figures 28 et 29). Enfin, la copie n’est pas systématique, puisque, dans le volume 2, trois des huit illustrations sont de composition bien distincte dans l’imprimé de la BL et dans celui de la BNF.
Si, dans la tradition manuscrite de la Suite Vulgate, la transformation de Merlin est fréquemment représentée, elle est le plus souvent mise en scène dans le palais impérial, au moment dramatique de l'irruption de l'animal merveilleux à la table de Jules César[52]. La représentation de la transformation en cerf contribue à recentrer l'illustration des imprimés sur vélin sur Merlin, en soulignant les dons extraordinaires dont il bénéfice en tant que fils du diable, ce qui fait écho à la miniature frontispice du Merlin sur vélin représentant sa conception. Représentées dans l’imprimé, l'errance sylvestre de Merlin métamorphosé et son entrée bondissante dans le palais alors qu'il est pourchassé par les Romains sont plus rarement figurées dans les manuscrits enluminés. Cependant, comme la scène de navigation déjà examinée, elles font partie du programme iconographique de BNF fr. 105 et 9123 (Figures 30 à 32), ouvrages tous deux enluminés dans le premier quart du xive siècle dans l'atelier parisien du maître de Maubeuge et du maître de Fauvel, et ayant fait partie des collections des rois de France, auxquelles Vérard ou le maître de Jacques de Besançon ont peut-être eu accès. Dans les imprimés, la représentation conjointe de la forêt de Romenie et de l'arrivée à Rome de Merlin transformé en cerf semble faire fusionner les miniatures de BNF fr. 9123 ff. 227 et 227v. Le maître de Jacques de Besançon enlumina pour Vérard plusieurs manuscrits et imprimés sur vélin destinés au roi Charles VIII, qui, compte tenu de la qualité et de la quantité des ouvrages réalisés pour lui, fut le plus important patron de l’imprimeur[53].
Dans la plupart des cas, la gravure de la Destruction de Troyes qui figurait dans le Merlin imprimé sur papier est remplacée par une miniature de composition différente, bien que traitant également d'un sujet militaire. Seule une minorité des gravures du Merlin correspond au début d'un nouveau chapitre dont le titre précède l'image et peut lui servir de rubrique. Cela concerne trois des 14 gravures du volume 1, et quatre des huit gravures du volume 2 du Merlin. Dans le second tome, les illustrations sont souvent placées au début de ce qui, dans la table des matières, correspond à un nouveau chapitre, mais le titre de ce dernier n'est pas systématiquement copié dans le texte. Lors de la guerre de Gaule, la bataille qui a lieu devant la forteresse de Trèbes entre les armées d'Arthur et de Claudas s'inscrit dans un espace marqué par la citadelle en surplomb et la forêt située au premier plan à droite de l'image, et montre la confrontation de deux groupes à pied (Figure 33). Le titre de ce chapitre insistait déjà sur le château qui donne son nom à la bataille et aux pieds duquel se déroule le combat : « Comment il y eut une grande bataille devant le chastel de Trebes contre le roy Artus » (BNF, Vélins 1123, t. 2, f. 8v).
Les deux imprimés sur vélin recourent à la même scène et à la même composition, malgré quelques variations concernant les couleurs et les motifs héraldiques. L'illustration de la suite de cette bataille met en scène la contextualisation spatiale de l'affrontement, présentant dans les deux éditions enluminées la lutte qui prend place entre un bloc rocheux, représenté à gauche, et la forêt, située à droite, où est littéralement « embusqué » un groupe de soldats (Figure 34). Même si ces derniers sont représentés à pied, ils correspondent sans doute aux 300 chevaliers de réserve de l'armée d'Arthur, des troupes d'élite qui ne rejoignent la bataille que dans un second temps: « On avoit retiré hors de l'ost les trois centz chevaliers qui estoient toute la fleur de la bataille en une embusche loing de l'ost... » (BNF, Vélins 1123, t. 2, f. 13). L'intervention du miniaturiste, qui a peut-être lu le texte, permet donc de préciser la nature du combat et le cadre de l'affrontement, renforçant l'intensité de la bataille par sa mise en scène dans un espace exigu et encaissé, ce qui n'était pas possible avec le remploi systématique de la gravure d'origine.
D'autres jeux d'échos et de répétitions voient néanmoins le jour entre les différentes miniatures. Ainsi, l'embuscade des chevaliers arthuriens lors de la bataille de Trèbes (Figure 34) présente une composition similaire à celle de la miniature consacrée au guet-apens que tend le roi Loth à Arthur et Guenièvre dans la forêt de Sarpine (Figure 35). La reprise de ces éléments plastiques souligne l'importance des stéréotypes iconographiques dans le répertoire des artistes de l'atelier du maître de Jacques de Besançon. On retrouve le rocher à gauche et, à droite, la forêt abritant les soldats embusqués, mais la chevauchée du cortège royal remplace la bataille de Trèbes. On peut noter l'absence de Guenièvre, mais le texte précise qu'Arthur lui confie une escorte particulière pour la mettre en sécurité quand il est informé du piège tendu par le roi Loth : « bailla la roine quarante chevaliers pour la conduire et mener a sauvete s'ilz voient que besoing en feust » (BNF, Vélins 1123, t. 2, f. 52v). Si les miniaturistes s'écartent complètement de la gravure originale et de ses multiples remplois à l'identique, ils recourent eux-mêmes à des compositions stéréotypées et récurrentes, y compris dans les cas minoritaires où les miniatures illustrant les deux Merlins imprimés sur vélin diffèrent.
Les variations dans l'illustration des deux imprimés sur vélin
Les différences iconographiques entre l'imprimé enluminé sur vélin de la BNF et celui de la BL sont assez rares : elles ne concernent que deux miniatures sur huit dans le second volume du Merlin. Cela indique que le programme iconographique conçu pour ces ouvrages était sans doute fixé d'avance et constituait un modèle relativement bien défini, auquel de petits ajustements pouvaient cependant être apportés.
La première différence significative intervient au niveau de l'illustration de la bataille de Clarence, où les barons bretons combattent les envahisseurs saxons. L'imprimé de la BL adopte alors une miniature dans laquelle une mêlée compacte a lieu entre les repères spatiaux constitués par des promontoires rocheux et par la forêt (Figure 36). Ce type de composition se retrouve dans d'autres imprimés enluminés sur vélin, comme l'Ogier de Turin de 1498 (Figure 37).
Par contraste, l'imprimé de la BNF montre le duel à la lance de deux rois qui s'élancent l'un contre l'autre au-devant de leur armée (Figure 38). Ce motif assez stéréotypé peut rappeler une des gravures du premier volume du Lancelot en prose imprimé par Vérard en 1494 puis 1504 (Figure 39), une scène mise en couleur par les artistes chargés de l'illustration des exemplaires sur vélin de ce texte (Figure 40).
La seconde différence iconographique importante entre les imprimés sur vélin de la BNF et de la BL concerne l'illustration du tournoi organisé à l'occasion du mariage d'Arthur et de Guenièvre. Dans l'ouvrage de la BNF (Figure 41), une scène de duel (qui peut rappeler celle du folio 36v, Figure 38) a lieu dans une arène sous le regard de trois rois, Arthur, Ban et Bohort, placés dans une tribune à l'arrière-plan de l'image. L'illustration de l'imprimé de la BL (Figure 42) évoque moins directement le motif du tournoi, mais la miniature révèle pourtant d'autres détails du texte : il s'agit en effet d'une mêlée de chevaliers plus que de la mise en scène d'une succession de joutes individuelles. En outre, Merlin conseille aux trois rois d'intervenir dans le tournoi en interrompant un affrontement entre Gauvain et ses compagnons, qui viennent d'être adoubés, et les Chevaliers de la Table Ronde. Le conciliabule entre Merlin et les rois est représenté à droite de l'image, tandis que, du côté gauche, figure sans doute l'affrontement de Gauvain et de Minodalis. La composition de l'image constitue une variation sur la représentation de scènes de batailles figurées entre un escarpement rocheux et une partie boisée (Figure 34). En fait, le tournoi ne se déroule ni dans une arène, comme dans l'imprimé de la BNF, ni en pleine campagne, comme dans celui de la BL, mais « a l'entree de la porte de la cité de Thoraise » (BL, C.22.c.7, t. 2, f. 45v). Guenièvre, absente des deux images, n'est pas non plus mentionnée à cet endroit du texte, même si elle assiste sans doute au tournoi qui célèbre le mariage.
Pour Mary Beth Winn, chaque exemplaire enluminé d'une édition de Vérard peut se distinguer des autres : « Les différences se mesurent par degrés : dans certains exemplaires extrêmement luxueux toutes les gravures sur bois sont couvertes de nouvelles miniatures, alors que dans d'autres, plus ordinaires, les gravures ne sont que peintes ou altérées que par quelques détails[54]. » Ainsi, les copies imprimées sur vélin du Tristan de Vérard de 1496 (conservées à Châteauroux, Paris, Turin et Copenhague), illustrées par différents artistes, varient dans leur style et leur iconographie[55]. La nature des bois gravés dans l'édition sur papier et leur adéquation ou inadéquation au texte sont aussi des éléments qui déterminent le caractère conservateur ou novateur de l'intervention du miniaturiste.
Dans les cas où un artiste est engagé pour enluminer un imprimé comprenant déjà des gravures adaptées au texte qu'elles accompagnent, il ne lui est pas nécessaire d'apporter de grandes modifications aux images dont il hérite, et il peut se contenter de les mettre en couleur. C'est souvent le cas dans l'Ogier de 1498, où l'intervention du miniaturiste permet la transformation et l'adaptation de certaines scènes, mais où les effets de répétition iconographique et formelle hérités du remploi des bois gravés d'origine demeurent frappants.
Or, cette solution n'est pas satisfaisante quand un peintre est sollicité pour illustrer un ouvrage comportant des gravures qui n'ont pas été réalisées spécifiquement pour le texte concerné, mais constituent des remplois particulièrement discordants. Quand il y a un écart entre le texte et la gravure qui l'accompagne, et a fortiori, quand cette dernière n'est plus imprimée dans l'édition sur vélin, la tâche du miniaturiste demande plus de souplesse et de créativité, même s'il peut recourir à des compositions types qui lui sont familières. En l'absence de la gravure originale, l'artiste ou celui qui supervise la réalisation d'un nouveau programme iconographique a la possibilité d'introduire de nouveaux sujets et des motifs plus adaptés.
La plupart du temps, dans les deux exemplaires enluminés du Merlin, le peintre substitue à la gravure d'origine une scène complètement différente. La scène de bataille répétée à sept reprises dans le second volume du texte n'est jamais réutilisée ou adaptée par le miniaturiste qui lui préfère systématiquement une nouvelle image, même si cette dernière, qui constitue souvent une variation sur le motif du combat, peut elle-même présenter un caractère très stéréotypé. La comparaison des imprimés enluminés du Merlin de la BL et de la BNF montre, à quelques exceptions près, qu'ils suivent des programmes iconographiques similaires. Bien que chaque miniature soit « unique et destinée à un seul ouvrage », par contraste avec la gravure, « générique, polyvalente et destinée au réemploi[56] », il faut relativiser le degré d'inventivité de l'artiste. En effet, l'examen et la comparaison des miniatures du Merlin sur vélin montrent le retour de compositions types au sein du même ouvrage (un phénomène déjà présent dans l'illustration des manuscrits enluminés), ainsi que l'existence de modèles iconographiques qui circulent dans le cercle plus large des imprimés enluminés de Vérard, et constituent un fonds commun parmi les différents artistes de l'atelier du maître de Jacques de Besançon.
L'exemplaire du Merlin sur vélin conservé à la British Library et faisant partie de la bibliothèque de Henry VII témoigne du succès de Vérard dans la dissémination de ses imprimés en français à la cour d'Angleterre à la fin du xve siècle. Comme la majorité des exemplaires sur vélin des collections de Henry VII, le Merlin n'est pas un ouvrage de Vérard produit spécifiquement pour le roi d'Angleterre, ou du moins il ne présente pas de marques de personnalisation telles qu'un prologue faisant mention du dédicataire, une image frontispice consacrée au don du livre à son mécène, ou des emblèmes héraldiques susceptibles de l'identifier.
Il s'agit pourtant bien d'un objet de luxe enluminé dans l'atelier d'un artiste reconnu qui travailla aussi bien à l'illustration d'ouvrages manuscrits qu'à celle d'imprimés sur vélin. Le maître de Jacques de Besançon ne se caractérise pas par la modernité de son style, mais, dans la lignée de ses prédécesseurs, le maître de Jean Rolin et le maître François, il perpétue avec succès la tradition de la miniature dont il maîtrise parfaitement la technique. L'utilisation de l'or, la vivacité et la richesse des couleurs et des pigments témoignent du souci de produire un livre caractérisé par sa magnificence. Le livre enluminé est utilisé comme objet d'apparat et de prestige, en lien avec l'exaltation du règne d'Arthur et du modèle chevaleresque. Pourtant, si la production des imprimés sur vélin est restreinte et élitiste, elle s'effectue en parallèle avec l'impression d'ouvrages qui, dans leur circulation courante sur papier, permettent un élargissement du public ayant accès au livre et à la lecture.
Les éditions de Vérard imprimées sur vélin et enluminées sont des produits hybrides, à cheval entre le manuscrit enluminé, où chaque miniature est unique, et l'imprimé traditionnel, caractérisé par la reproduction à l'identique du texte et de l'illustration au sein de tous les exemplaires d'une même édition. Différentes copies d'un ouvrage imprimé peuvent être personnalisées avec un degré de luxe proportionnel aux moyens de leur commanditaire. Les gravures originales sont tantôt conservées ou modifiées par les miniaturistes, tantôt complètement remplacées, en fonction des oeuvres et des exemplaires concernés.
La comparaison des éditions papier du second volume du Merlin de Vérard (1498 et 1503) avec les deux copies sur vélin de la BL et de la BNF révèle l'existence d'une troisième édition de ce texte, différente de celle de 1503 et plus proche de celle de 1498. Elle montre comment l'intervention du peintre implique, dans la majorité des cas, la création d'une nouvelle image dont le sujet est distinct de la gravure originale. Ce n'est pas le cas dans les imprimés sur vélin de l'Ogierde 1498, où les artistes, apparemment peu soucieux d'effets de répétition très marqués, privilégient soit la mise en couleur, soit l'adaptation des gravures préexistantes, même si ce texte comprend, comme le Merlin, de nombreux remplois d'illustrations copiées par Vérard sur les gravures employées par Jean de Vingle pour ses éditions lyonnaises des Quatre fils Aymon (1493) et d'Ogier le Danois (1496). Dans le Merlin, la discordance entre les gravures remployées et le texte qui les accompagne explique sans doute la suppression des gravures et la nécessité d'inventer des illustrations totalement différentes. Même certaines scènes génériques susceptibles d'être adaptées à leur nouveau contexte sont remplacées, ce qui crée un plus grand degré de variation dans l'illustration du Merlin, bien qu'elle soit moins abondante que celle de l'Ogier.
Il faut cependant relativiser la diversité des miniatures du Merlin sur vélin, du fait de l'émergence de motifs et de compositions types intégrés à un programme illustratif très similaire dans les copies de la BL et de la BNF. Les miniatures introduites font aussi partie du répertoire iconographique plus large des artistes employés par Vérard, le maître de Jacques de Besançon et son atelier. Le programme iconographique élaboré pour le Merlin sur vélin manifeste néanmoins, dans l'ouvrage d'Henry VII comme dans son équivalent demeuré en France, un souci de mise en correspondance du texte et de l'image. Comme dans les ouvrages manuscrits, le contexte détermine le sujet de la miniature, ce qui n'était pas le cas de l'illustration des versions sur papier du même ouvrage. Cependant, le fait que les artistes, agissant de leur propre initiative ou sous l’influence de Vérard, recourent à des compositions récurrentes et stéréotypées, témoigne d’une convergence entre les miniatures des imprimés sur vélin et les bois gravés faisant l’objet de multiples remplois dans les éditions papier.
On peut trouver des antécédents iconographiques dans la tradition manuscrite pour certaines miniatures spécifiques créées pour les imprimés sur vélin de Vérard, mais il ne s’agit pas pour le maître de Jacques de Besançon et son atelier de reprendre un programme illustratif dans son intégralité. Le nombre et le placement des images diffèrent aussi considérablement dans les manuscrits et l’imprimé. Le fait que des rapprochements ponctuels puissent être faits entre les miniatures des imprimés et celles de manuscrits du xive siècle tient peut-être au fait que les manuscrits du Merlin et de la Suite Vulgate datant de la fin du xiiie et du début du xive siècle sont habituellement plus abondamment illustrés que ceux xve siècle.
Il existe un continuum entre l’activité de Vérard comme producteur de manuscrits enluminés et d’ouvrages imprimés sur vélin – permettant différents degrés de personnalisation du livre, en relation avec leur destinataire réel ou potentiel, que ce soit par le texte (notamment les prologues) ou les images (en particulier les scènes frontispices de dédicace) –, et celle qu’implique l’édition d’imprimés sur papier. Vérard prend ainsi le relais du libraire médiéval[57] en tant qu’éditeur / imprimeur coordonnant le travail des artisans impliqués dans la conception de livres imprimés et travaillant en étroite collaboration avec le maître de Jacques de Besançon, lui-même un chef d’atelier établi entretenant des relations privilégiées avec les grands commanditaires, y compris Charles VIII. Si l’on identifie le maître de Jacques de Besançon à François Le Barbier fils, le fait qu’au début du xvie siècle plusieurs personnes portant le nom de « Barbier » sont recensées comme libraires ou imprimeurs renforce l’idée de la convergence de ces activités ainsi que de l’importance des dynasties familiales impliquées dans ces métiers[58].
Appendices
Annexe
Tableau 1. Comparaison iconographique du Merlin sur papier (1498) et du Merlin enluminé de Vérard
Note biographique
Irène Fabry-Tehranchi est ancienne élève de l'ENS-LSH (Lyon) et agrégée de Lettres Modernes. Elle est docteure de l'université Paris III-Sorbonne Nouvelle, auteure du livre Textes et Images des manuscrits du Merlin et de la Suite Vulgate, xiiie-xve s. (Brepols, 2014), et a coédité avec Anna Russakoff le volume bilingue L'humain et l'animal dans la France médiévale (Rodopi, 2014). Elle a enseigné aux universités de Paris III, Marne la Vallée et Reading (Royaume-Uni), et à l'ENS de Paris. Ses recherches portent sur la littérature et les chroniques arthuriennes. Elle s'intéresse aux relations entre texte et image dans les manuscrits médiévaux et les incunables. Elle est maintenant conservatrice des collections de langue romane à la British Library de Londres.
Notes
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[1]
Je souhaite remercier les relecteurs anonymes de cet article pour leur lecture minutieuse et leurs suggestions.
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Gordon Kipling, « Henry VII and the Origins of Tudor Patronage », dans Patronage in the Renaissance, Guy Fitch Lytle et Stephen Orgel (ed.), Princeton, Princeton University Press, 1981, p. 117-64.
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[3]
Joseph-Basile-Bernard Van Praet, Catalogue des livres imprimés sur vélin, qui se trouvent dans des bibliothèques tant publiques que particulières pour servir de suite au catalogue des livres imprimés sur vélin de la bibliothèque du roi, Paris, De Bure frères, 1828, t. 1, p. 284.
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[4]
Les manuscrits à peintures en France : 1440-1520, François Avril et Nicole Reynaud (dir.), Paris, Flammarion, Bibliothèque Nationale, 1993, p. 254-62. L'abondance des ouvrages enluminés par le maître de Jacques de Besançon suggère une oeuvre collaborative au sein d'un atelier d'artistes ayant parfaitement intégré le style de la maison (d'où la difficulté de distinguer différentes mains) et capables de produire en série des illustrations de qualité homogène. Cela s’est sans doute développé sur plusieurs générations, du maître François, François Le Barbier père (actif entre 1460 et 1480) au maître de Jacques de Besançon, François Le Barbier fils (actif entre 1480 et 1500). Voir Mathieu Deldicque, « L’enluminure à Paris à la fin du xve siècle : Maître François, le Maître de Jacques de Besançon et Jacques de Besançon identifiés? », Revue de l’art, 2014, 183, n° 1, p. 9-18.
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[5]
Voir Le Moyen Français, Antoine Vérard, volume 69, 2011.
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[6]
IrèneFabry-Tehranchi, « Du manuscrit à l'imprimé : les remplois de bois gravés dans l'illustration du Merlin et de sa continuation dans l'édition d'Antoine Vérard (1498) », Viator, vol. 47, n° 3, 2016 (à paraître).
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[7]
Voir ISTC im00498000. Bien que dans toutes les éditions, le colophon du troisième volume du Merlin, comprenant les Prophéties, soit daté de l'année 1498, le changement d'adresse de Vérard du Pont Notre Dame (qui s'effondra en 1499) à la Rue Neuve Notre Dame, où il déménage en juillet 1503, indiqué dans le colophon, suggère qu'une deuxième édition a été publiée en 1503. Alors que, dans l'édition de 1498, le premier volume du Merlin compte sept bois gravés différents pour 14 images, celle de 1503 ne présente plus que deux bois gravés différents, et diffère aussi dans son titre (« Le premie [sic] volume de Merlin ») et sa composition. Une des difficultés pour la datation consiste dans l'absence de colophon daté à la fin des volumes 1 et 2 du Merlin, mais le premier tome se termine par « Cy fyne Merlin » dans l’édition de 1498, contre « Cy fine la premiere partie du livre de Merlin » dans celle de 1503. Il n’y a pas de différence de composition entre l’édition papier du second volume du Merlin de 1498 et celle de 1503. Enfin, certains exemplaires du troisième volume de l’édition de 1503 contiennent une gravure du Christ dormant pendant la tempête placée après le colophon. Après Vérard, le Merlin sera imprimé pour Michel le Noir (1505, 1507), pour la veuve de Jean Trepperel et Jean Jeannot (1510) puis Philippe le Noir (1526, 1528), Jean et Richard Mace de Rouen et Michel Anger de Caen (1526), et pour Jean Mace à nouveau (1535). William Meads, « Outlines of the history of the legend of Merlin », dans Merlin, or the Early History of Arthur : A Prose Romance(About 1450-1460 A. D.), Henry B. Wheatley (ed.), Londres, K. Paul, Trench, Trübner and Co., EETS, o. s. 10, 1965, p. XLIX.
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[8]
Sur l'origine des gravures remployées, voir Tableau 1 : Comparaison iconographique du Merlin sur papier et du Merlin enluminé de Vérard (1498).
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[9]
ISTC io00061900.
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[10]
ISTC io00062000. Trois des six exemplaires qui subsistent sont des copies sur vélin.
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[11]
Gordon Kipling, « Henry VII and the Origins of Tudor Patronage », dans Patronage in the Renaissance, Guy Fitch Lytle et Stephen Orgel (ed.), Princeton, Princeton University Press, 1981, p. 125.
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[12]
Gordon Kipling, « Henry VII and the Origins of Tudor Patronage », dans Patronage in the Renaissance, Guy Fitch Lytle et Stephen Orgel (ed.), Princeton, Princeton University Press, 1981, p. 117-64.
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[13]
Mary Beth Winn en dénombre huit : Des deux amans de l'Arétin et l'Art de rhétorique de Molinet (1493), la Bible des poètes d'Ovide et l'Orloge de Sapience de Henri Suso (1493-94), la Consolation de Boèce (1494), le Miroir Historial de Vincent de Beauvais (1495-96), le Pèlerinage de vie humaine de Guillaume de Digulleville (1499), et les Homélies de saint Grégoire (1501). Voir Joseph-Basile-Bernard Van Praet, Catalogue des livres imprimés sur vélin, qui se trouvent dans des bibliothèques tant publiques que particulières pour servir de suite au catalogue des livres imprimés sur vélin de la bibliothèque du roi, Paris, De Bure frères, 1828, t. 4, p. 300, et Mary Beth Winn, Anthoine Vérard, Parisian Publisher 1485-1512 : Prologues, Poems, and Presentations, Genève, Droz, 1997, p. 142-53.
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[14]
Henri Omont, « Les manuscrits français des rois d'Angleterre au château de Richmond », Études Romanes dédiées à Gaston Paris, Paris, Émile Bouillon, 1891, p. 3.
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[15]
Mary Beth Winn, « Anthoine Vérard et l’art du livre », Le Moyen Français, 2011, vol. 61, p. 134.
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[16]
Janet Backhouse, « The Royal Library from Edward IV to Henry VII », dans The Cambridge History of the Book in Britain, vol. 3: 1400-1557. Lotte Hellinga and Joseph Burney Trapp (ed.), Cambridge, Cambridge University Press, 1999, pp. 272-73.
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[17]
Ce fut principalement pour promouvoir la production, l’impression et la dissémination de textes liturgiques et religieux, malgré l’exception que constitue le roman Blanchardin et Églantine, qu’elle avait acheté à Caxton dans les années 1480, avant de le lui faire traduire de français en anglais et imprimer en 1488. Susan Powell, « Lady Margaret Beaufort and her Books », The Library, 1998, vol. 20, pp. 197-240.
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[18]
Dans ce milieu, la distinction entre roman et histoire n'était pas fondamentale, car, dans les deux cas, les lecteurs privilégiaient la mise en scène d'exploits chevaleresques exemplaires et l'exaltation de nobles sentiments. Gordon Kipling, « Henry VII and the Origins of Tudor Patronage », dans Patronage in the Renaissance. Guy Fitch Lytle and Stephen Orgel (ed.), Princeton, Princeton University Press, 1981, pp. 124-25.
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[19]
Ce texte s'inscrit dans un genre littéraire particulièrement populaire tout au long du Moyen Âge et au-delà, et a renforcé l'autorité de Merlin et soutenu l'intérêt pour ce personnage; voir Paul Zumthor, Merlin le prophète: un thème de la littérature polémique, de l'historiographie et des romans, Lausanne, Payot, 1943; Genève, Slatkine, 1973, et Catherine Daniel, Les Prophéties de Merlin et la culture politique, xiie-xvie siècle, Turnhout, Brepols, 2006.
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[20]
Dans certains exemplaires de la deuxième édition du Merlin de Vérard (1503), les Prophéties comportent une gravure d'une colonne représentant le Christ endormi et ses disciples dans une barque pendant la tempête, placée à la fin du volume, après le colophon, mais ce n’est pas systématique. Les Prophéties ne comportent pas d'illustrations au sein du texte; voir Oxford, Bodleian Library, Auct. 2 Q 6.57, f. 152.
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[21]
En cela, l'édition des Prophéties se distingue de celle du Lancelot (1494) ou du Tristan (1496), où Vérard avait dès le départ ménagé d'importants espaces pour la rédaction des titres de chapitres. Ce dispositif lui a permis, dans les éditions sur vélin de ces textes, de faire recouvrir ces titres de chapitres par une miniature, tandis que leur énoncé était recopié à la main dans la marge à côté de l'image; voir Mary Beth Winn, « Vérard’s Editions of Tristan », Arthuriana, vol. 19, n° 1, Spring 2009, p. 51.
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[22]
Paul Durrieu, Jacques de Besançon et son oeuvre, un grand enlumineur parisien au xve siècle, Paris, Champion, 1892, p. 10-11; et Paul Durrieu, « L'enlumineur et le miniaturiste », Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 54, n° 5, 1910, p. 345-46.
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[23]
Sur ces artistes, voir Eleanor P. Spencer, The Maître François and his Atelier, thèse, Harvard University, 1931; Eleanor P. Spencer, « Dom Louis de Busco's psalter », dans Gatherings in Honor of Dorothy E. Miner, Ursula E. McCracken, Lilian M. C. Randall et Richard H. Randall (ed.), Baltimore, Walters Art Gallery, 1974, p. 227-240; et Charles Sterling, La peinture médiévale à Paris, 1300-1500, Paris, Bibliothèque des arts, 1987-90, vol. 2, p. 214-29.
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[24]
Les manuscrits à peintures en France : 1440-1520, François Avril et Nicole Reynaud (dir.), Paris, Flammarion, Bibliothèque Nationale, 1993, p. 255-56.
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[25]
Les manuscrits à peintures en France : 1440-1520, François Avril et Nicole Reynaud (dir.), Paris, Flammarion, Bibliothèque Nationale, 1993, p.255-62.
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[26]
Charles Sterling, La peinture médiévale à Paris, 1300-1500, Paris, Bibliothèque des arts, 1987-90, vol. 2, p. 228.
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[27]
Les manuscrits à peintures en France : 1440-1520, François Avril et Nicole Reynaud (dir.), Paris, Flammarion, Bibliothèque Nationale, 1993, p. 256.
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[28]
Paul Durrieu, Jacques de Besançon et son oeuvre, un grand enlumineur parisien au xve siècle, Paris, Champion, 1892, p. 102.
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[29]
Voir Mary Beth Winn, « Offerings for the King : Antoine Vérard’s Presentation Manuscripts and Printed Books », dans Manuscripts in the Fifty Years after the Invention of Printing, dir. O. Trap, London, The Warburg Institute, 1983, p. 66-74; et Mary Beth Winn, Anthoine Vérard, Parisian Publisher 1485-1512 : Prologues, Poems, and Presentations, Genève, Droz, 1997, p. 101 ss.
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[30]
Charles VIII meurt le 7 avril 1498. La mention de l'année 1498 dans le colophon du troisième volume du Merlin, comprenant les Prophéties, est à utiliser avec précaution dans la mesure où Vérard n'a déménagé à l'adresse indiquée, « devant Notre Dame a l'ymaige saint Jehan l'Evangeliste », qu'après l'effondrement du Pont Notre-Dame en octobre 1499; voir Jane H. M. Taylor, Rewriting Arthurian Romance in Renaissance France, from Manuscript to Printed Book, Cambridge, Brewer, 2014, p. 97-98, note 27. Sur la reconstruction du pont, voir Étienne Hamon, Une capitale flamboyante : la création monumentale à Paris autour de 1500, Paris, Picard, 2011, pp. 114-17.
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[31]
ISTC il00033500 et il00033000; il00033700 et il00033600. Voir Jane H. M. Taylor, Rewriting Arthurian Romance in Renaissance France, from Manuscript to Printed Book, Cambridge, Brewer, 2014, p. 62 ss.
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[32]
ISTC it00430000. Voir Mary Beth Winn, « Vérard’s Editions of Tristan », Arthuriana, vol. 19, n° 1, Spring 2009, p. 46-73.
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[33]
Voir Jane H. M. Taylor, Rewriting Arthurian Romance in Renaissance France, from Manuscript to Printed Book, Cambridge, Brewer, 2014, p. 65.
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[34]
Danièle Sansy, « Texte et image dans les incunables français», Médiévales, vol. 22-23, 1992, p. 47-70. Il faut aussi tenir compte des disparités géographiques, puisque 60% des éditions illustrées sont d'origine parisienne, et d'une distinction linguistique, puisque 70% des éditions illustrées sont en langue vernaculaire.
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[35]
Les gravures réalisées par le maître lyonnais Jean Perréal pour l'édition imprimée à Lyon par Jean de Vingle en 1493, 1495, 1497 et 1499 des Quatre fils Aymon, constituent une source majeure pour l'illustration des éditions de textes vernaculaires produites par Vérard; voir Marie-Dominique Leclerc, « L'histoire des Quatre fils Aymon. Essai d'analyse iconographique», La vie en Champagne, 4, 1995, p. 9; Les manuscrits à peintures en France : 1440-1520, François Avril et Nicole Reynaud (dir.), Paris, Flammarion, 1993, p. 365-69; et Anatole Claudin, Histoire de l'imprimerie en France au xve et au xvie siècle, Paris, Imprimerie nationale, 1900-14, vol. IV, p. 222-26. Sur l'origine des bois gravés de remploi utilisés dans le Merlin de 1498, voir Irène Fabry-Tehranchi, « Du manuscrit à l'imprimé : les remplois de bois gravés dans l'illustration du Merlin et de sa continuation dans l'édition d'Antoine Vérard (1498) », Viator, vol. 47, n° 3, 2016 (à paraître).
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[36]
ISTC ia01433000.
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[37]
Mary Beth Winn, Anthoine Vérard, Parisian Publisher 1485-1512 : Prologues, Poems, and Presentations, Genève, Droz, 1997, p. 152.
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[38]
Il existe trois imprimés sur vélin de l'Ogier de Vérard de 1498 : British Library, C.22.c.1, BNF, Vélins 1125 (numérisé sur Gallica, http://gallica.bnf.fr/), et Bibliothèque Nationale de l’Université de Turin, XV.V.183, un exemplaire de luxe présenté par Vérard au roi Louis XII au moment de son avènement au trône en 1498. Le dernier ouvrage a été reproduit en facsimilé : voir Ogier le Dannoys. Roman en prose du xve siècle, Knud Togeby (ed.), Copenhague, Munksgaard, 1967; et Knud Togeby, Ogier le Danois dans les littératures européennes, Copenhague, Munksgaard, 1969.
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[39]
Voir Nathalie Koble, « Le testament d'un compilateur: montages textuels et invention romanesque dans l'édition princeps des “livres de Merlin” (Antoine Vérard, 1498) », Du roman courtois au roman baroque: actes du colloque des 2-5 juillet 2002, Emmanuel Bury et Francine Mora (dir.), Paris, Belles lettres, 2004, p. 251-64.
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[40]
Sur l'illustration liminaire du Merlin dans la tradition manuscrite, voir : « référence non disponible de manière à préserver le caractère anonyme de l’article. (Le comité éditorial de Mémoires du livre / Studies in Book Culture). »
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[41]
Voir Alison Stones, « The Artistic Context of le Roman de Fauvel », dans Fauvel Studies : Allegory, Chronicle, Music, and Image in Paris, Bibliothèque nationale de France, MS français 146, Margaret Bent et Andrew Wathey (dir.), Oxford, Clarendon Press, 1998, p. 529-67; et Mary et Richard Rouse, Manuscripts and their Makers : Commercial Book Producers in Medieval Paris, 1200-1500, Turnhout, H. Miller, 2000, t. I, ch. 7 et 8, t. II, appendices aux ch. 7 et 8.
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[42]
Le livre du Graal. I, Joseph d'Arimathie, Merlin, Les premiers faits du roi Arthur, Daniel Poirion et Philippe Walter (dir.), Paris, Gallimard, coll. « Pléiade », 476, 2001, p. 1074-76.
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[43]
Guenièvre et la mère de Merlin, qui figure dans la miniature frontispice, sont les seuls personnages féminins représentés dans l'illustration de l'imprimé sur vélin. Si la mère de Merlin, dont la piété habituelle tranche avec la conduite de ses soeurs, se laisse surprendre par le démon, dans le Merlin, Guenièvre est présentée dans le texte comme une jeune femme dotée d'une beauté et d'une éloquence exceptionnelles. En tant que fille du roi de Carmélide, Léodegan, elle constitue un bon parti pour Arthur, alors affaibli par la révolte de ses barons. Dans cette oeuvre qui s'intéresse à la jeunesse héroïque d'Arthur, Guenièvre est présentée de façon très positive, sans qu'affleure la question de sa relation future avec Lancelot.
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[44]
Voir par exemple Turin, BNU L.III.12, f. 52; BNF, fr. 749, f. 234; BL, Add. 10292, f. 144v et BNF, Arsenal 3482, p. 176, entre la fin du xiiie et la première moitié du xive siècle.
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[45]
Voir Joseph-Basile-BernardVan Praet, Catalogue des livres imprimés sur vélin, qui se trouvent dans des bibliothèques tant publiques que particulières pour servir de suite au catalogue des livres imprimés sur vélin de la bibliothèque du roi, Paris, De Bure frères, 1828, t.4, Supplément, p. 247-48, n° 376.
-
[46]
Voir Irène Fabry-Tehranchi, « Du manuscrit à l'imprimé : les remplois de bois gravés dans l'illustration du Merlin et de sa continuation dans l'édition d'Antoine Vérard (1498) », Viator, vol. 47, n° 3, 2016 (à paraître).
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[47]
Voir British Library, C.22.c.1, BNF, Vélins 1125; ou Bibliothèque Nationale de l’Université de Turin, XV.V.183.
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[48]
Le dragon d'or sur fond d'azur peut faire référence à l'enseigne d'Arthur, et l'écu d'argent à trois bandes de gueules est celui du roi Ban de Bénoïc. L'écu central, d'or au lion de sable, n'est pas celui de Bohort de Gaunes, mais il s'agit des armes du comté de Flandres, ce qui renvoie peut-être au commanditaire du manuscrit, réalisé dans l'atelier du maître de Fauvel.
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[49]
Voir Irène Fabry-Tehranchi, « La traversée de la Manche et les campagnes militaires d'Arthur sur le continent dans l'iconographie des manuscrits de la Suite Vulgate du Merlin (xiiie-xve s.) », dans Arthur, la mer et la guerre, Alban Gautier, Marc Rolland et Michelle Szkilnik (dir.), Paris, Garnier, 2015 (à paraître).
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[50]
ISTC im00578700 et im00579750.
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[51]
Dans l'Ogier enluminé sur vélin, la première occurrence de la gravure fait l'objet d'une simple mise en couleur pour l'illustration du combat où Ogier vient secourir les troupes de Charlemagne mises en difficulté par leurs ennemis païens (Figure 23). Dans les deux autres reprises de cette gravure dans Ogier, l'image initiale est recouverte par une miniature utilisant un sujet radicalement différent, comme dans l'illustration du Merlin sur vélin. L’Ogier est beaucoup plus illustré, car il comprend au total 57 gravures, contre 22 dans le Merlin, mais l'accroissement du nombre des images n'implique pas une plus grande variété iconographique, puisque l'Ogier ne compte que 14 bois gravés différents qui sont utilisés jusqu'à 13 fois au sein de la même oeuvre. Le Merlin compte pour sa part huit bois gravés différents, utilisés jusqu'à 7 fois chacun. L’illustration plus abondante d’Ogier est sans doute due à la disponibilité de l’édition illustrée antérieure de Jean de Vingle, copiée par Antoine Vérard, alors que le Merlin de 1498, beaucoup plus long et formé de trois volumes si l’on inclut les Prophéties, constitue l’édition princeps de ce texte. L’Ogier et le Merlin de Vérard présentent d’autres différences de mise en page et de présentation : le premier ouvrage ne comprend pas de sommaire et est imprimé en pleine page, alors que le texte du Merlin se répartit sur deux colonnes. Enfin dans Ogier, toutes les gravures sont précédées d’un titre de chapitre pouvant servir de rubrique, ce qui n’est pas systématique dans le Merlin, où les titres de chapitres listés dans la table des matières ne sont pas toujours reportés au sein du texte.
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[52]
Irène Fabry-Tehranchi, « “Comment Merlin se mua en guise de cerf” : écrire et représenter la métamorphose animale dans les manuscrits enluminés de la Suite Vulgate du Merlin », Revue Textimage, Varia, vol. 2, 2010, p. 1-32. http://www.revue-textimage.com/05_varia_2/fabry1.html (01/03/2014)
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[53]
Mary Beth Winn, Anthoine Vérard, Parisian Publisher 1485-1512 : Prologues, Poems, and Presentations, Genève, Droz, 1997, p. 104-23. Parmi les livres dédiés à Charles VIII et réalisés avec la collaboration de Vérard et du maître de Jacques de Besançon, où figurent souvent des scènes de dédicace, on peut mentionner l’imprimé De la Bataille judaïque de Flavius Josèphe, Paris, BNF, Vélins 696, postérieur à 1492; l’imprimé des Paraboles maistre Alain [Chartier], de 1492-93, Chantilly, Condé, 26; le manuscrit des Statuts de l'ordre de Saint-Michel, réalisé vers 1493-1494, Vienna, Österreichische Nationalbibliothek, 2637; les trois volumes comprenant le Lancelot, la Queste del saint Graal et la Mort Artu, de 1494, Paris, BNF, Vélins 614-16; le Gouvernement des princes imprimé en 1497, BNF, Vélins 411; ou encore le livre d’heures manuscrit datant de 1496-98, Madrid, Biblioteca Nacional de España, Vitr. 24-1.
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[54]
Mary Beth Winn, « Anthoine Vérard et l’art du livre », Le Moyen Français, 2011, vol. 61, p. 146.
-
[55]
ISTC it00431000. Voir Mary Beth Winn, « Vérard’s Editions of Tristan », Arthuriana, vol. 19, n° 1, Spring 2009, p. 46-73.
-
[56]
Mary Beth Winn, « Anthoine Vérard et l’art du livre ». Le Moyen Français, 2011, vol. 61, p. 146.
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[57]
Ce dernier, responsable de l’organisation de la production et de la commercialisation du livre manuscrit, supervisait l’activité de différents professionnels spécialisés : parcheminiers, scribes, peintres et relieurs, tout en se chargeant des relations avec les commanditaires et acheteurs des livres ainsi produits; voir Mary et Richard Rouse, Manuscripts and their Makers : Commercial Book Producers in Medieval Paris, 1200-1500, Turnhout, H. Miller, 2000; et Godfried Croenen et Peter Ainsworth (éd.), Patrons, Authors and Workshops: Books and Book Production in Paris around 1400, Louvain, Peeters, 2006.
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[58]
Il s’agit de Claude, Jean et Symphorien Barbier; voir Mathieu Deldicque, « L’enluminure à Paris à la fin du xve siècle : Maître François, le Maître de Jacques de Besançon et Jacques de Besançon identifiés? », Revue de l’art, 2014, 183, n° 1, p. 12-14; et Paris, Archives Nationales, Minutier central des notaires de Paris (1515, 1517 et 1528), dans Ernest Coyecque, Recueil d'actes notariés relatifs à l'histoire de Paris et de ses environs au xvie siècle. 1, 1495-1545 : articles I-XXVI, no 1-3608, Paris, Imprimerie nationale, 1905, n° 15, 36, 918 et 991.
Bibliographie
- Histoire de la vie, miracles, enchentements et prophecies de Merlin, Paris, Antoine Vérard, 1498, 3 vol. [Aberystwyth, National Library of Wales, CG 110-112 (papier, 3 vol.); Londres, British Library, C.22.c.6-7 (vélin, vol. 1-2); Paris, BNF, Vélins 1123 (vélin, vol. 2)].
- Lancelot du Lac, Paris, Antoine Vérard, 1504 [Paris, Arsenal, Rés. fol. BL 923, 3 vol.].
- Le livre du Graal. I, Joseph d'Arimathie, Merlin, Les premiers faits du roi Arthur, Daniel Poirion et Philippe Walter (dir.), Paris, Gallimard, coll. « Pléiade », 476, 2001.
- Merlin: 1498, Cedric Pickford (dir.), London, The Scolar Press, 1975. [facsimile de Aberystwyth, National Library of Wales, CG 110-112].
- Ogier le Dannoys. Roman en prose du xve siècle, Knud Togeby (dir.), Copenhague, Munksgaard, 1967. [facsimile de Bibliothèque Nationale de l’Université de Turin, XV.V.183].
- Ogier le Danois, Paris, Antoine Vérard, 1498 [Chantilly, Musée Condé, IV-G-028 (papier); Paris, BNF, Vélins 1125 (vélin); Bibliothèque Nationale de l’Université de Turin, XV.V.183 (vélin)].
- Merlin et Suite Vulgate [Paris, BNF, fr. 105 et BNF, fr. 9123, Paris, vers 1320 (manuscrits)]
- François Avril et Nicole Reynaud (dir.), Les manuscrits à peintures en France : 1440-1520, Paris, Flammarion, Bibliothèque Nationale, 1993.
- Catherine Daniel, Les Prophéties de Merlin et la culture politique, xiie-xvie siècle, Turnhout, Brepols, 2006.
- Mathieu Deldicque, « L’enluminure à Paris à la fin du xve siècle : Maître François, le Maître de Jacques de Besançon et Jacques de Besançon identifiés? », Revue de l’art, 2014, 183, n° 1, p. 9-18.
- Paul Durrieu, Jacques de Besançon et son oeuvre, un grand enlumineur parisien au xve siècle, Paris, Champion, 1892.
- Paul Durrieu, « L'enlumineur et le miniaturiste », Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 54, n° 5, 1910, p. 330-46.
- Irène Fabry-Tehranchi, « “Comment Merlin se mua en guise de cerf” : écrire et représenter la métamorphose animale dans les manuscrits enluminés de la Suite Vulgate du Merlin », Revue Textimage, Varia, vol. 2, 2010, p. 1-32. http://www.revue-textimage.com/05_varia_2/fabry1.html (01/03/2014).
- Irène Fabry-Tehranchi, « Du manuscrit à l'imprimé : les remplois de bois gravés dans l'illustration du Merlin et de sa continuation dans l'édition d'Antoine Vérard (1498) », Viator, vol. 47, n° 3, 2016 (à paraître).
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