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La communauté fransaskoise rassemble des individus qui s’identifient à la francophonie et qui contribuent à la vitalité de la langue française dans la province de la Saskatchewan (ACF, 2006 : 11). Elle comprend non seulement des personnes de langue maternelle française, mais tous ceux et celles qui parlent le français et qui désirent s’identifier à la communauté (ACF, s.d.). Près de 5 % des habitants de la Saskatchewan parlent le français, tandis que moins de 2 % ont le français comme langue maternelle (Statistique Canada, 2017). Depuis longtemps minoritaire en Saskatchewan, la communauté fransaskoise a évolué au cours des dernières décennies avec l’urbanisation et l’arrivée d’immigrants d’origines diverses. Alors que la majorité des Fransaskois et Fransaskoises habitent dans des centres urbains, soit Regina, Saskatoon, Prince Albert et Moose Jaw, certains secteurs ruraux de la province connaissent toujours une présence francophone importante, notamment au nord dans les environs de Bellevue, au sud-est près de Bellegarde et au sud-ouest autour de Gravelbourg (FCFA, 2009 : 2). Éparpillés sur un vaste territoire et avec un poids démographique faible, les Fransaskois représentent une des plus « petites » communautés francophones en situation minoritaire au Canada[2].

La petitesse de la communauté fransaskoise se mesure non seulement par son faible poids démographique, mais aussi en fonction de sa relation de pouvoir vis-à-vis de l’État. Comme plusieurs communautés francophones en milieu minoritaire, les Fransaskois exercent peu de contrôle sur les institutions qui les desservent. Au fil des ans, ils ont de moins en moins recours aux coopératives fransaskoises et aux institutions bancaires des caisses populaires et sont peu représentés au sein des institutions gouvernementales[3]. Le sociologue fransaskois Wilfrid Denis (2008 : 294-295) attribue l’affaiblissement institutionnel de la communauté fransaskoise à la dispersion de la population, au manque de services en français et à l’obligation grandissante de s’exprimer en anglais pour le travail. Alors que leurs institutions culturelles, politiques et économiques ne définissent pas l’ordre de leur monde, Denis (2006) explique que les Fransaskois cultivent depuis longtemps un projet de résistance contre « l’hégémonie anglodominante » de l’État canadien. Comment une communauté aussi « petite » envisage-t-elle « faire communauté[4] » au sein de l’État anglodominant canadien ?

Plusieurs auteurs se sont demandé comment les communautés francophones en situation minoritaire peuvent vivre autrement que la majorité anglophone au sein de l’État canadien[5]. Le sociologue philosophe Joseph Yvon Thériault soutient que les francophones du Canada ont longtemps eu le désir de « faire oeuvre de civilisation en français dans le continent anglo-américain » (2007 : 8). Il attribue l’origine de ce rêve au désir de l’élite franco-catholique de façonner un projet de société autre que celui proposé par la civilisation anglo-américaine au XIXe siècle. Malgré leur dispersion sur l’ensemble du continent, les francophones participent à ce projet en commun grâce au réseau institutionnel de l’Église catholique. Or, de nombreux chercheurs constatent que l’idée d’une société canadienne-française éclate avec la montée du néonationalisme québécois et la diminution de l’emprise catholique durant les années 1960 (voir par exemple Thériault et Laniel, 2016). Comme d’autres francophones au pays, ceux en Saskatchewan participent à la provincialisation des identités francophones au début des années 1970 et adoptent le nom « Fransaskois[6] ». Dans un mémoire présenté à la Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme, les leaders de la communauté constatent la fragilité qu’entraîne la fragmentation de l’identité canadienne-française :

[O]n doit admettre que le peuple canadien-français de la Saskatchewan semble de moins en moins sûr de son destin et plus sujet à l’assimilation anglaise. Après avoir généreusement porté la cause du français, grâce au dynamisme des chefs qui le guidaient, le peuple canadien-français manifeste, et particulièrement au niveau de la jeunesse, des signes évidents de fatigue et de lassitude dans la lutte. L’élite même émigre en partie continuellement et ne semble pas réussir à donner à la masse l’élan de vigueur et de confiance en elle-même dont elle a tant besoin.

ACFC et ACÉFC, 1964 : 9

Les leaders fransaskois, comme ceux d’autres communautés francophones en milieu minoritaire, entreprennent ainsi des démarches pour retrouver le dynamisme qui les animait avant la rupture du Canada français.

Le défi auquel font face les communautés francophones en milieu minoritaire à la fin des années 1960 et encore aujourd’hui relève en grande partie du fait qu’elles constituent ce que Jacques Boucher et Joseph Yvon Thériault (2005 : 3) décrivent comme des fragments d’une culture sociétale, voire des « petites cultures », condamnées à justifier non seulement leurs choix et leurs projets, mais leur existence même. Au cours des dernières années, certains commentateurs se sont penchés sur les formes de reconnaissance que l’État peut offrir aux minorités francophones et sur les formes que peut prendre l’autonomie au sein des communautés francophones en milieu minoritaire (Thériault, 1994 ; Cardinal et González Hidálgo, 2012 ; Léger, 2012 ; Poirier, 2012). D’ailleurs, le numéro inaugural de la revue Minorités linguistiques et société en 2012 explore les fondements normatifs, juridiques et politiques de l’autonomie des communautés francophones en milieu minoritaire. Alors que ces interventions contribuent à situer les francophones dans les débats sur la reconnaissance des minorités, le discours universitaire sur l’interaction entre les minorités linguistiques et l’État s’est surtout concentré sur les opportunités et les contraintes posées par l’État. Plutôt que d’envisager le sort des communautés francophones comme une variable dépendante conditionnée par l’État, cette étude cherche à ancrer ces débats théoriques dans la réalité vécue par les communautés francophones en situation minoritaire afin de démontrer comment le devenir des communautés francophones se négocie en interaction non seulement avec l’État, mais aussi en dialogue avec ses membres.

Ancrée dans un cadre socio-historico-institutionnel, cette étude cherche à mieux comprendre les aspirations politiques des communautés francophones en milieu minoritaire et à expliquer comment celles-ci prennent forme dans le contexte institutionnel canadien à partir d’une étude de cas de la communauté fransaskoise. À la lumière des dimensions historique et sociologique du cadre néo-institutionnaliste, le phénomène de boucle de rétroaction politique (feedback) qui admet l’influence des institutions sur les stratégies de mobilisation des acteurs tout en reconnaissant que la mobilisation des acteurs entraîne à son tour une contrainte sur les institutions (Béland, 2002) est pris en considération. L’État fédéral canadien apparaît ainsi comme un acteur doté d’une autonomie et d’intérêts qui lui sont propres, mais qui demeure sujet à l’influence de divers acteurs (voir March and Olsen, 1989 ; Skocpol, 1995).

L’analyse s’organise autour de trois moments de crise, soit la crise identitaire canadienne des années 1960, la crise constitutionnelle des années 1980 et la crise identitaire fransaskoise des années 1990, qui constituent des points tournants (critical junctures) dans la relation entre les communautés francophones en situation minoritaire et l’État fédéral canadien[7]. James Mahoney (2000) observe que des moments de crise marquent une ouverture qui peut soit aboutir au changement, soit faire preuve de continuité (path dependency). Alors que des moments de crise peuvent occasionner des changements au sein des régimes linguistiques, Linda Cardinal et Selma Sonntag (2015 : 45) démontrent que la configuration du pouvoir entre les minorités linguistiques et l’État qui émerge n’est jamais complètement divorcée de celles qui ont précédé.

Afin de cerner la nature et l’évolution des aspirations des Fransaskois dans le contexte institutionnel canadien, cet article présente les résultats d’une analyse qualitative de discours d’archives d’organismes fransaskois, d’entrevues effectuées auprès de leaders communautaires, d’articles publiés dans l’hebdomadaire fransaskois L’Eau Vive et de diverses publications communautaires et étatiques (politiques, ententes, rapports) de 1960 à 2015[8]. Cette analyse de discours démontre une volonté persistante dans le discours politique fransaskois de renverser le rapport de domination entre l’État et la communauté fransaskoise[9]. Le désir de la communauté fransaskoise d’exercer un contrôle sur son avenir s’exprime par la réorientation de ses revendications politiques et la restructuration périodique de ses structures et processus de gouvernance pour saisir les ouvertures créées par les trois moments de crise à l’étude (cités plus haut). Alors que ces efforts n’ont pas réussi à renverser le rapport de domination qu’exerce le gouvernement fédéral sur cette petite communauté, plusieurs leaders constatent que la prise en main des institutions de gouvernance a permis à la communauté fransaskoise de mieux « faire communauté ». L’expérience vécue des Fransaskois met en lumière les objectifs et les défis des communautés francophones en milieu minoritaire dans leur quête de vivre autrement au sein de la majorité anglophone au Canada.

La crise identitaire canadienne – La complétude institutionnelle

L’analyse débute avec la « rupture de l’intention vitale » de la société canadienne-française avec la sortie du Québec du Canada français lors des États généraux de 1967 (Thériault et Meunier, 2008 : 228 ; Laniel et Thériault, 2016). En Saskatchewan, ce moment correspond à la présence accrue de la culture anglodominante dans la vie quotidienne des Fransaskois avec l’arrivée des médias de masse, l’urbanisation et l’augmentation du nombre de mariages mixtes. Le taux d’anglicisation en Saskatchewan atteint les 50 % au début des années 1970 (FFHQ, 1977 : 25). Comme le constate un leader de l’époque, « [l]a Francophonie en Saskatchewan se maintient en vie au prix de luttes continues et d’efforts surhumains. Nous nous rendons compte que malgré ces dépenses d’énergies, elle subit une baisse constante » (ACFC, 1977a). Conscients de la menace de plus en plus importante de l’assimilation, les leaders de la communauté s’engagent à développer la capacité de ses membres à contrecarrer cette tendance et à s’entraider. Pour contrer l’affaiblissement de la fransaskoisie, ces leaders adoptent le discours de la complétude institutionnelle.

Popularisée par le sociologue Raymond Breton, originaire de la Saskatchewan, la « complétude institutionnelle » se base sur l’idée que l’évolution des minorités dépend de leur capacité de mettre sur pied des organismes, des services et des activités dans divers secteurs qui inciteront les individus à se joindre à ces minorités[10]. Afin d’atteindre un plus haut degré de complétude institutionnelle, les leaders fransaskois non seulement cherchent à créer des institutions qui leur sont propres, mais souhaitent aussi exercer un certain contrôle au sein des institutions de la société dominante. Ce discours est évident dans le visionnement collectif des membres de la communauté à la fin des années 1960. Pour faire l’état de la situation de plus en plus précaire de la communauté fransaskoise à cette époque, le comité exécutif de l’organisme porte-parole des francophones en Saskatchewan, l’Association culturelle franco-canadienne (ACFC), met sur pied le Comité d’étude du renouveau français. Le mandat de ce dernier est de consulter les membres de la communauté afin de proposer un programme d’action pour l’avenir. Le travail du comité confirme que les Fransaskois ne cherchent pas uniquement la protection de la langue, mais surtout l’épanouissement de la culture francophone en Saskatchewan. Cela implique le partage de la culture francophone et du fait français avec les membres de la communauté éparpillés partout en province ainsi qu’avec la société majoritaire (ACFC, 1968a). Les Fransaskois réclament « l’épanouissement » de la communauté dans son ensemble (ACFC, 1968b).

Ces revendications sont mises de l’avant dans le contexte de la crise identitaire entraînée par la montée du néonationalisme québécois. Elles résonnent en particulier avec l’adoption par le gouvernement fédéral d’une politique de bilinguisme officiel en 1969 comme symbole inclusif de la dualité linguistique (McRoberts, 1999). Selon Monica Heller, cette politique cherche à démontrer la possibilité de vivre « en français » dans l’ensemble du pays (2011 : 9 ; voir aussi Normand, 2012). Cela s’effectue notamment par l’investissement dans la reproduction d’espaces francophones dans divers secteurs. Face à cette ouverture sur le plan fédéral de créer des espaces francophones pour favoriser la dualité linguistique, les leaders fransaskois saisissent l’occasion de faire passer l’épanouissement par le développement institutionnel de divers secteurs. À Regina, par exemple, l’association francophone locale se dit « consciente de la faiblesse et [de] la fragilité de[s] infrastructures » sur les plans économique et politique, ainsi que dans les secteurs de l’éducation, de la communication et de la culture (ACFR, 1978 : 2). Comme d’autres organismes locaux et provinciaux, elle cherche à rétablir la vitalité de ses institutions. C’est dans ce contexte que les Fransaskois entreprennent une quête pour le renouvellement de leurs infrastructures dans le but d’accroître leur complétude institutionnelle.

Conscients du contexte étatique dans lequel ils se situent, les leaders soulignent le besoin de la communauté d’exercer un contrôle direct sur son avenir. Ils soutiennent que dans leurs formes actuelles, les institutions de la majorité sont incapables de répondre à leurs besoins et représentent des obstacles à la réalisation de leurs objectifs collectifs[11] (ACFC, 1977b : 4). À l’occasion d’une allocution prononcée devant le comité sur l’union nationale en 1978, le directeur général de l’ACFC déclare :

Notre destin, chers amis, repose entre nos mains, à nous les Fransaskois… Notre destin est aussi partagé par ceux ou celles qui ont cherché politiquement le mandat de veiller au bien commun. C’est pourquoi nous essayons de parler le langage que nos politiciens comprennent. Alors, c’est pourquoi nous n’exprimons qu’une chose, essentielle de notre point de vue : notre volonté collective de renverser le mouvement d’assimilation.

ACFC, 1978a : 5

Vers la fin des années 1970, le discours des leaders communautaires évoque le besoin de prendre en main leur propre développement. Ils sont d’avis que la transformation des rapports de pouvoir exige un jeu politique à deux niveaux, soit auprès de la communauté et auprès des instances étatiques[12]. De façon concrète, ils cherchent non seulement une plus grande autonomie pour la communauté, mais aussi une plus grande reconnaissance de celle-ci au sein de la société dominante.

Les demandes d’autonomie des leaders fransaskois s’expriment notamment dans le domaine de l’éducation[13] – la pierre angulaire d’un projet politique commun parmi ses membres (Dubois, 2014). Les Fransaskois cherchent à se libérer du contrôle administratif qu’exerce l’État sur les programmes, l’infrastructure, le transport et le financement de l’éducation (Denis, 2008 : 95). Des consultations révèlent que les membres de la communauté ne cherchent pas à obtenir des garanties de protection de l’éducation française en Saskatchewan, puisque le gouvernement provincial prétend déjà protéger celle-ci par le biais des écoles bilingues (Denis, 2006 : 92-93) ; ils souhaitent plutôt « reprendre le contrôle de leurs institutions scolaires » (ACFC, 1980). Les Fransaskois dressent ainsi un plan pour la gestion scolaire qui est présenté au ministre de l’Éducation en 1984[14].

Sans réponse favorable à leur proposition de la part du gouvernement provincial, des membres de la communauté se tournent vers les instances juridiques pour revendiquer la gestion scolaire. Cardinal souligne que, depuis l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés, « il est impossible d’éviter la question des droits lorsque l’on traite du pouvoir de contrôler sa destinée » (1999 : 333). En 1986, onze codemandeurs fransaskois exigent le droit de « gérer et de contrôler » leurs institutions scolaires devant la Cour du banc de la reine. L’avocat fransaskois Roger Lepage[15], qui a plaidé la cause, rappelle : « on a commencé sans aucune gestion, aucun contrôle, aucun élève ». Deux ans plus tard, le juge C. Ross Wimmer déclare que la loi scolaire saskatchewanaise brime les droits garantis aux Fransaskois par l’article 23 de la Constitution canadienne[16]. À la suite de ce jugement, connu comme l’arrêt Wimmer, la Cour reconnaît aux Fransaskois un droit d’accès à des institutions scolaires distinctes.

Le juge Wimmer précise que l’obligation de l’État de fournir aux Fransaskois l’accès à ces institutions scolaires est sujette aux limites de la section 23(3) de la Constitution canadienne, qui stipule que le droit de se faire instruire dans la langue de la minorité s’exerce là « où le nombre des enfants des citoyens qui ont ce droit est suffisant pour justifier à leur endroit la prestation, sur les fonds publics, de l’instruction dans la langue de la minorité[17] ». À l’Assemblée législative de la Saskatchewan, certains députés estiment que le nombre peu élevé de Fransaskois ne justifie pas le coût de création d’un système scolaire francophone. Par exemple, le député Jack Goohsen déclare en chambre : « the reality is that there are very few French-speaking people in Saskatchewan… to support another school board system is an absolute and total, complete waste of money » (cité dans Hansard, 1993 : 1740). Le gouvernement provincial évoque notamment des inquiétudes par rapport au coût pour retarder sa mise en oeuvre. Un désaccord entre le gouvernement provincial et fédéral quant au financement de la gestion contribue aussi à retarder la mise en oeuvre d’un système scolaire francophone en Saskatchewan[18]. Comme le décrit le journal hebdomadaire fransaskois, « [l]e fédéral et le provincial jouent à la balle » (L’Eau Vive, 1992 : 4). Dans une lettre adressée au gouvernement fédéral, le président de l’Association provinciale des parents francophones demande l’assistance financière du gouvernement fédéral pour faire avancer la gestion de ce dossier (ACFC, 1992). Malgré ces démarches, le gouvernement provincial tarde à entamer un processus législatif pouvant conduire à modifier la loi scolaire pour permettre aux Fransaskois de gérer leurs propres écoles.

En parallèle avec les revendications pour la gestion autonome d’institutions scolaires, des démarches sont aussi entreprises pour que la communauté participe aux processus décisionnels de la société dominante. Howard R. Giles, Richard Y. Bourhis et Donald M. Taylor notent l’importance d’assurer la représentation – officielle et non officielle – des membres d’une communauté linguistique dans divers contextes institutionnels (1977 : 316). Cet objectif est au coeur de la cause Mercure sur la reconnaissance du bilinguisme législatif en Saskatchewan. La défense de cette cause soutient que l’article 110 de la Loi sur les Territoires du Nord-Ouest de 1877, qui prévoyait la rédaction des lois en français et en anglais ainsi que l’utilisation de ces deux langues devant les tribunaux et l’Assemblée législative, s’applique toujours en Saskatchewan.

Le jugement de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Mercure, rendu une semaine après l’arrêt Wimmer, donne raison à la défense : l’article 110 est toujours en vigueur, car il n’avait pas été clairement éliminé lors de la création de la Saskatchewan en 1905. Or, la Cour précise que ledit article peut être abrogé par l’Assemblée législative de la province, puisqu’il n’a pas de statut constitutionnel[19]. L’ACFC propose plutôt des amendements pour garantir des droits aux francophones au sein de l’Assemblée législative et propose un plan pour traduire les lois de la province en français (Gareau, 2001). Nonobstant ces efforts, l’Assemblée législative adopte un projet de loi quelques mois plus tard qui abolit tous les droits reconnus par l’article 110.

En principe, l’adoption du bilinguisme officiel en 1969, la reconnaissance juridique du droit à la gestion scolaire dans l’arrêt Wimmer et la reconnaissance du bilinguisme législatif dans l’arrêt Mercure constituent des initiatives de la part de l’État fédéral qui répondent aux aspirations des Fransaskois de gérer leurs propres institutions scolaires et de participer aux processus décisionnels de la société dominante. Or, dans les faits, la réalité des Fransaskois ne correspond pas à leurs aspirations. Alors que la communauté fransaskoise se voit comme un « acteur crédible et dynamique » (ACF, 2008 : 13), elle n’exerce toujours pas de pouvoir sur ses propres institutions et ne participe pas aux processus décisionnels de la société dominante à la fin des années 1980. Malgré l’ouverture présentée par l’adoption du bilinguisme et les victoires juridiques, la « petitesse » de la communauté fransaskoise demeure largement inchangée.

La crise constitutionnelle canadienne – Le développement global

À la fin des années 1970, le discours du développement global s’ajoute à celui de la complétude institutionnelle. Avec l’intensification du conflit Québec-Canada, les leaders de la communauté fransaskoise empruntent le discours de la Fédération des francophones hors Québec (FFHQ) – aujourd’hui connue sous le nom de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) –, qui revendique une plus grande place dans le paysage politique canadien (Normand, 2012 : 39). Le discours du développement global, qui renvoie autant aux pratiques qu’aux institutions, est exprimé dans le contexte fransaskois en 1978 :

Nous savons aussi que tous les efforts partiels ne remplaceront jamais un projet politique concerté, unique et, en conséquence, engageant. Notre franchise nouvelle oblige les gouvernements responsables à poser audacieusement le seul geste qui compte, soit celui de reconnaître de mettre en application l’unique recommandation fondamentale que notre communauté réclame avec toute l’énergie des millions de personnes qui la constitue[nt] : UNE POLITIQUE GLOBALE, PRÉCISE, COHÉRENTE ET DÉFINITIVE DE DÉVELOPPEMENT DES COMMUNAUTÉS DE LANGUE ET DE CULTURE FRANÇAISES.

ACFC, 1978a : 4 ; majuscules et soulignement dans l’original

Alors que le discours de la complétude institutionnelle demeure présent en Saskatchewan, l’idée du développement global est de plus en plus répandue dans les propos des leaders de la communauté. Ceux-ci font des demandes auprès du gouvernement provincial de participer aux processus décisionnels qui les touchent et expriment le désir de reprendre le contrôle de leur destinée (ACFC, 1978b : 5)[20]. Au niveau national, la FFHQ précise qu’« une politique globale doit viser à transférer le plus possible de pouvoirs aux communautés [francophones] » (1982 : 38-39).

L’atteinte de cet objectif est plus envisageable dans le climat politique des années 1980, qui présente une ouverture pour la transformation des rapports de pouvoir entre la communauté fransaskoise et l’État fédéral canadien. Wilfrid Denis (1994 : 139) explique que le gouvernement fédéral se montre plus ouvert aux demandes des communautés francophones en milieu minoritaire en raison des questions constitutionnelles et identitaires qui monopolisent l’arène politique – une réalité que constatent les leaders de la communauté[21]. Les Fransaskois s’allient aussi à la FFHQ, qui prépare une série de manifestes pour faire valoir les revendications des francophones : Les héritiers de lord Durham (1977), Deux poids, deux mesures (1978), Pour ne plus être sans pays (1979), Un espace économique à inventer (1981), Pour nous inscrire dans l’avenir (1982). Ayant de son côté le poids des instances juridiques, la solidarité des leaders francophones et le climat politique général, la communauté fransaskoise cherche à atteindre ses objectifs en négociant avec l’État.

Le gouvernement fédéral se montre favorable à offrir du financement aux communautés francophones en situation minoritaire – une préoccupation qui est depuis longtemps au programme de l’ACFC. L’ancien président de l’organisme, Roland Pinsonneault (1964-1968), observe que « [p]our faire fonctionner une association comme l’ACFC, il ne suffit pas de bonne volonté » (cité dans Leclerc, 2001 : 118119 ; voir aussi Allaire, 1993 ; et Denis, 1993 : 281). Alors qu’ils constatent « l’espoir » qu’apporte l’appui financier de l’État, les leaders fransaskois soulignent dès la fin des années 1970 que tout financement doit correspondre aux objectifs de la communauté et non pas à ceux de l’État (ACFC, 1977b : 6). S’éloignant du discours qui prône le développement institutionnel des divers secteurs, les leaders fransaskois soutiennent plutôt que le financement de l’État doit s’inscrire dans un projet politique plus large qui reconnaît et respecte les objectifs d’une politique globale de développement (ACFC, 1978b : 5). C’est dans ce contexte que le gouvernement fédéral signe deux ententes avec la communauté fransaskoise. La première, qui est aussi signée avec le gouvernement provincial, octroie du financement notamment pour la mise en oeuvre de la gestion scolaire tel que cela était exigé par l’arrêt Wimmer (Denis, 1994 : 139). La deuxième, nommée l’« Entente Canada-communauté fransaskoise », finance des organismes qui oeuvrent dans divers secteurs afin de mettre sur un pied d’égalité les services que reçoivent les francophones et les anglophones (ibid. : 140). Bien que la Saskatchewan soit la première province à signer une entente Canada-communauté, des ententes semblables sont ensuite signées et renouvelées ailleurs au pays.

Dans une étude pancanadienne, Johanne Poirier (2009 : 15) constate que les ententes Canada-communauté consolident, dans le paysage constitutionnel canadien, la place des francophones en milieu minoritaire. Or, les Fransaskois critiquent le fait qu’ils reçoivent par l’entremise de ces ententes des services en tant que « groupe de langue officielle » plutôt que comme « communauté », et soulignent la nécessité de favoriser l’épanouissement de la communauté « dans son ensemble » (ACFC, 1989 ; 1998). Dans la mesure où ces ententes promeuvent le statut égal des deux langues officielles sans pour autant tenir compte de l’expérience et de l’identité culturelle collective des Fransaskois, Denis (1994 : 149) maintient que les ententes Canada-communauté privilégient les objectifs de l’État aux dépens de ceux des communautés francophones. Une étude qui évalue la relation entre l’État et la communauté fransaskoise huit ans après la signature de la première entente Canada-communauté conclut : « En dépit des succès manifestes que la communauté a réalisés au cours des dernières années, sa reconnaissance et son évolution demeurent et continueront à demeurer précaires » (Schneider, 1995 : 3).

Comme d’autres communautés francophones, la communauté fransaskoise est appelée à s’organiser pour répondre aux diverses exigences administratives établies par le gouvernement fédéral – un prérequis pour être en mesure de recevoir du financement (Allaire, 1993 ; voir aussi Cardinal et Juillet, 2005 ; Cardinal, 2007 ; Thériault, 2007 ; Forgues, 2010 ; 2012). Dans les trois ans qui suivent la signature de la première entente Canada-communauté, le nombre d’organismes associés à l’ACFC passe de 25 à 75 (Denis, 1994 : 141-142). La bureaucratisation de la structure organisationnelle de la communauté – selon laquelle chaque organisme interagit directement avec l’État pour les demandes de subventions – crée une dépendance administrative et financière des organismes fransaskois vis-à-vis de l’État. Cette tendance se manifeste à l’échelle du pays, où les communautés francophones sont de plus en plus subordonnées aux priorités de l’État au détriment de leur autonomie (Cardinal et Juillet, 2005 ; Forgues, 2010).

En Saskatchewan, plusieurs Fransaskois s’inquiètent du rôle grandissant qu’occupe l’État dans le développement et la gouvernance de la communauté (Denis, 1992 ; 1994 : 142 ; Schneider, 1995)[22]. Ils rappellent que, à l’origine, leur entrée en négociation avec l’État n’était pas motivée par une simple requête de financement, mais par un désir de prendre part au processus politique et décisionnel afin d’assurer le développement global de la communauté (voir aussi Normand, 2012 : 61). Au contraire, le financement de l’État a eu pour effet de fragmenter la communauté, et ce, sur les plans institutionnel et politique. Alors que les négociations avec le gouvernement fédéral présentent une ouverture qui mène à la multiplication des services et des activités dans divers secteurs – voire à une plus grande complétude institutionnelle –, les membres exercent en réalité peu de contrôle sur le développement global de la communauté. Leur « petitesse » demeure encore une fois largement inchangée. En réaction à ce constat, les leaders fransaskois adoptent, à la fin des années 1980, un nouveau discours qui prône la débureaucratisation et le « retour à la base » (ACFC, 1989 : 87).

La crise identitaire fransaskoise – La gouvernance démocratique

Le développement d’une relation entre l’État et la communauté fransaskoise fondée principalement sur des transactions financières a mené à ce qu’une Fransaskoise décrit comme une « crise » au début des années 1990[23]. Par contraste avec les deux autres moments de crise qui relèvent principalement des tensions au niveau national, cette troisième crise relève plus directement du contexte fransaskois. André Lecours (2002 : 12) rappelle que les sources de tensions qui ouvrent la porte au changement peuvent être économiques, politiques, culturelles, sociales et même idéologiques. L’ensemble de ces facteurs ont contribué à cette troisième crise qui émane d’une constatation qu’il existe une contradiction entre le caractère de la communauté en tant qu’agglomération d’organismes à but non lucratif et son identité comme communauté politique, sociale et culturelle. Afin de réduire l’écart entre le désir de la communauté d’exercer du pouvoir sur son avenir et la bureaucratisation de ses structures de gouvernance qui sont soumises au pouvoir financier et administratif de l’État, les Fransaskois adoptent le discours de la gouvernance démocratique.

La fragmentation de la communauté dans les années 1980 avait exacerbé des tensions entre des individus et des organismes. Alimentées par la quête de financement, ces tensions reflétaient aussi des divisions entre les communautés rurales et urbaines ainsi qu’un questionnement idéologique quant à l’avenir de la fransaskoisie. Face à cette fragmentation, les membres élus du Conseil d’administration de l’ACFC remettent leur démission, ce qui conduit l’ACFC à adopter à l’unanimité une proposition pour la tenue des États généraux « afin de doter la fransaskoisie d’une mission, d’une vision d’avenir et d’un premier plan quinquennal » (ACFC, 1996). Les communautés francophones ont une longue tradition de tenir des États généraux pour dresser un état des lieux des préoccupations de leurs membres et pour définir un plan d’action pour l’avenir (voir notamment Martel, 1998 ; Thériault et Laniel, 2016).

L’ACFC embauche une firme pour mener des consultations aux niveaux communautaire, régional et provincial dans le but de préparer un document de travail pour les États généraux. Ces consultations révèlent que les membres de la communauté continuent à viser plusieurs des objectifs qui ont longtemps été au coeur du projet politique fransaskois : « offrir à la communauté, prise dans son ensemble, le moyen de décider de ses priorités et des moyens pour les atteindre ; créer un sens d’identité communautaire plus fort […] rehausser le statut de notre gouvernance communautaire » (ACFC, 1998 : 5). Alors qu’ils attribuent un poids important aux institutions qui livrent des services, les membres de la communauté rejettent l’idée que le projet politique fransaskois – voire ses aspirations collectives – s’exprime par l’entremise d’organismes communautaires qui oeuvrent dans divers secteurs d’activités (Dubois, 2014). Au-delà de la livraison de services, les Fransaskois expriment un désir collectif de se gouverner (ACFC, 1997). En particulier, ils souhaitent prendre des décisions autonomes quant à l’avenir de leur communauté par l’entremise d’un « gouvernement démocratique et efficace » (ACFC, 1997 ; 1998).

À cette fin, les membres de la communauté définissent le mandat suivant lors des États généraux de 1997 :

La Fransaskoisie s’engage à éliminer l’assimilation en assumant le mandat de créer une gouvernance démocratique et efficace, de se doter d’organismes et d’institutions pour répondre aux besoins de la collectivité, d’implanter les buts stratégiques et les plans d’action annuels de la collectivité pour atteindre zéro degré d’assimilation et d’obtenir la pleine application de nos droits constitutionnels.

ACFC, 1997

Et pour ce faire, les membres mettent sur pied un comité de restructuration qui propose un nouveau modèle de gouvernance pour la communauté.

L’objectif de ce comité est de créer un organisme de gouvernance redevable aux Fransaskois plutôt qu’à l’État. Le rapport du comité de restructuration propose la création d’un « gouvernement fransaskois » qui placerait le pouvoir entre les mains de la communauté, prise dans son ensemble, plutôt qu’entre les mains des organismes, comme c’était le cas avec la structure de plus en plus bureaucratique de l’ACFC. Selon le comité, « [l]a notion centrale du modèle que nous proposons réside dans le fait que le droit de vote n’est pas rattaché au fait d’être membre d’une ou plusieurs associations, mais plutôt [à] l’appartenance à la communauté » (ACFC, 1998 : 6).

Les membres de la communauté, dorénavant autodéfinis comme « citoyens fransaskois », adoptent une nouvelle structure en 1999 qui est aujourd’hui composée de seize députés élus tous les trois ans qui siègent à l’Assemblée des députés (ACF, 2017). Par le biais d’assemblées régulières qui se déroulent dans différentes communautés, ces députés participent à l’élaboration de politiques et de stratégies visant à réaliser le développement de la communauté en collaboration avec les organismes fransaskois. Ils participent aussi à l’élaboration, par l’entremise du Comité d’évaluation et de recommandations sur le financement, d’un budget communautaire qui répond aux objectifs de la communauté. Alors que les décisions liées au financement relèvent ultimement de l’État, ce comité émet des recommandations au gouvernement fédéral au nom de l’ensemble de la communauté à partir d’un processus consultatif et démocratique. Un ancien président de l’ACF croit que la démocratisation des processus décisionnels a permis aux citoyens fransaskois de jouer un rôle accru dans la gouvernance de leur communauté[24]. De l’avis de plusieurs leaders, la mise sur pied d’institutions démocratiques qui répondent aux aspirations des Fransaskois a mené à diverses initiatives qui favorisent l’autonomie de la communauté[25].

La crise des années 1990 mène ainsi les Fransaskois à démocratiser les processus et les structures de gouvernance de la communauté afin de favoriser la participation directe de ses membres. Par cette démocratisation, les Fransaskois cherchent non seulement à prendre en main leur avenir, mais à transformer leur rapport de pouvoir vis-à-vis de l’État. Cette transformation suit ce qui est décrit comme le cheminement collectif de la communauté de minorité opprimée à citoyens à part entière (ACF, 2008 : 5). Ce cheminement est en quelque sorte le résultat de diverses stratégies qui ont été proposées par les leaders et adoptées par les membres de la communauté pour pouvoir vivre une vie pleine en français en Saskatchewan. Les discours de la complétude institutionnelle, du développement global et de la gouvernance démocratique participent à une même stratégie qui vise à permettre aux Fransaskois de « faire communauté » autrement dans un contexte majoritairement anglophone. Adopté dans différents moments de crise, chacun de ces discours vise à transformer les rapports de pouvoir pour permettre à la communauté d’exercer un contrôle sur son avenir. Bien que la communauté fransaskoise demeure « petite », le discours de ses leaders suggère que la prise de pouvoir par la participation démocratique des membres lui a permis d’exercer un certain pouvoir sur son avenir.

Conclusion

Selon Joseph Yvon Thériault et Martin Meunier, les communautés francophones en situation minoritaire n’ont jamais abandonné « l’intention vitale du Canada français » de vivre autrement sur le continent anglo-américain (Thériault, 2008 : 360 ; Thériault et Meunier, 2008 : 207). L’examen des aspirations collectives des Fransaskois confirme que leurs revendications vont au-delà de la protection de la langue, au-delà de la survivance linguistique. Pour les Fransaskois, la communauté représente « une unité complète de civilisation composée de personnes, de familles et d’institutions qui sont à l’origine de systèmes, d’agences et d’organisations qui travaillent ensemble avec comme objectif commun de veiller au bien-être de tous » (ACF, 2008 : 8). Dans le contexte fransaskois, la volonté de « faire communauté » s’exprime par différents types de revendications articulés dans le contexte de divers moments de crise qui ont remis en question la relation entre la communauté et l’État. Les discours de la complétude institutionnelle, du développement global et de la gouvernance démocratique représentent ainsi trois axes de revendications, qui se recoupent et se chevauchent par moments, pour contribuer à permettre aux Fransaskois de prendre en main leur avenir et d’augmenter leur pouvoir vis-à-vis de l’État.

Le déséquilibre de pouvoir entre l’État et les minorités tend vers la continuité (path dependency) dans la mesure où les institutions sont ancrées dans le passé. Alors que des points tournants présentent une ouverture au changement, Lecours (2002 : 9) rappelle que le changement sociopolitique s’effectue lentement et graduellement puisqu’il s’inscrit dans un processus d’évolution qui favorise la reproduction institutionnelle. La communauté fransaskoise, comme d’autres communautés francophones en milieu minoritaire, demeure « petite » face à l’État canadien anglodominant. Or, la présente étude démontre que les membres de cette communauté ont adopté divers discours dans le but d’exercer le pouvoir nécessaire pour s’inscrire dans une intention qui lui est propre. Alors que le pouvoir qu’exerce la communauté fransaskoise est fortement conditionné par le contexte institutionnel, le cadre socio-historico-institutionnel rappelle que le pouvoir des membres de la communauté n’est pas évacué. Au contraire, les leaders soutiennent que la communauté réussit à exercer un certain pouvoir sur son avenir dans la présence d’institutions capables de répondre aux aspirations de ses membres.

Les revendications des leaders fransaskois depuis la rupture du Canada français expriment une volonté persistante de transformer les rapports de pouvoir pour permettre à la communauté non seulement de résister à l’imposition de l’anglodominance, mais d’exercer – à sa façon – un contrôle sur son avenir. Dans l’absence de la capacité d’orienter leur destin, Thériault et Meunier (2008) considèrent que les communautés francophones en situation minoritaire sont vouées à la précarité. Or, la survivance des minorités dépend non seulement de leur gain de pouvoir (empowerment) vis-à-vis de l’État, mais aussi de leur gain de pouvoir vis-à-vis de leurs membres et de leurs voisins anglophones (Gagnon, 2014). Chez les Fransaskois, comme chez les autres communautés francophones en milieu minoritaire, ce pouvoir passe par la gouvernance (Dubois, 2017). Comme le note Rémi Léger (2014 : 26), les communautés francophones en situation minoritaire cherchent le pouvoir nécessaire pour rendre la réalité fidèle à leurs aspirations. Elles veulent ainsi développer des processus et des structures de gouvernance qui permettent la réalisation de leurs objectifs. Les communautés francophones en milieu minoritaire sont en évolution constante en relation avec le contexte institutionnel canadien[26]. Ce n’est qu’en comprenant ce qui demeure constant dans leurs intentions qu’il devient possible de se prononcer sur le devenir des minorités francophones au sein du paysage étatique canadien.