Comptes rendus

Jacques Lacoursière, Jean Provencher et Denis Vaugeois, Canada-Québec. Synthèse historique, 1534-2010, Québec, Septentrion, 2011, 606 p.[Record]

  • Éric Bédard

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Dans sa note liminaire de Canada-Québec, l’éditeur Gilles Hernan explique qu’il s’agit de la 4e édition de cette synthèse populaire qui fut, pour de nombreux élèves de secondaire 4, un manuel de référence. La première édition remonte à 1968 mais, précise-t-on au début, l’essentiel du contenu daterait de 1983, soit l’époque où le livre paraissait aux éditions du Renouveau Pédagogique. En marge de la page 396, il est toutefois mentionné que le chapitre sur la Grande Guerre « a été rédigée en 1968 », une mention qui instille un doute dans l’esprit du lecteur qui se demandera jusqu’à la fin de sa lecture ce qui date de 1968 et de 1983. Un indice « compromettant » : les notes de bas de pages, qui ne dépassent guère les années 1970 et renvoient notamment aux synthèses des Lionel Groulx, Thomas Chapais, Robert Rumilly et Mason Wade. Dans le corps du texte, l’historien le plus cité est Maurice Séguin, professeur et maître à penser de Denis Vaugeois durant les années 1960. L’historiographie récente, et du reste fort complète, se retrouve aux marges du texte. Ces monographies sont trop brièvement résumées et, la plupart du temps, généreusement complimentées pour leurs qualités. J’aurais pour ma part préféré que ces recherches plus récentes soient intégrées au corps du texte et qu’elles influencent davantage le récit. J’ajoute qu’au strict plan de la présentation, ces notes en marge distraient davantage le lecteur qu’elles ne le guident au travers des trois parties de ce gros livre touffu. Le format retenu par les auteurs – celui d’un manuel « scolaire » – rend la lecture d’une couverture à l’autre laborieuse. Les auteurs n’ont pas vu la nécessité de nous présenter, dans une note introductive, un plan d’ensemble, un fil conducteur qui traduirait quelque chose comme une intention générale, un esprit. Plutôt que d’opter pour une grande trame narrative cramponnée à la chronologie, laquelle verrait les événements s’emboîter les uns dans les autres, les auteurs ont préféré superposer les trames politique, économique et culturelle. Une histoire par tranches, donc, qui distingue des événements, des faits ou des phénomènes souvent très imbriqués. Dans la première partie, la religion est reléguée dans la sphère culturelle alors qu’elle joue un rôle éminemment politique à l’époque de la Nouvelle-France. Tout un chapitre de cette même partie traite des grandes compagnies comme s’il s’agissait d’une dimension économique distincte de la politique. À ces sections thématiques s’ajoutent, dans la dernière partie, des sous-sections géographiques (monde, Canada et Québec), ce qui peut créer des confusions. Dans le chapitre XIV de la dernière partie, par exemple, il est question des conséquences des référendums dans la partie « Canada » alors qu’on ne sait toujours pas que le Québec a tenu une consultation en 1995. Ce manuel impressionne par son exhaustivité. On y retrouve en effet toutes les informations pertinentes sur l’histoire du Canada et du Québec, agrémentées d’images et enrichies de sources d’époque. Très bien faits, les tableaux synchroniques de la fin, qui s’étalent sur 41 pages, seront très utiles à l’étudiant pour situer les grands événements mondiaux, canadiens et québécois. Sur le fond, je me permettrai les remarques suivantes que je voudrais constructives. D’abord, quelques mises en contexte me semblent faire problème. Les auteurs ne situent pas l’épopée mystique de la Nouvelle-France dans le contexte de la grande réforme catholique comme nous y invite l’historienne Dominique Deslandres depuis quelques années. Lorsqu’ils abordent la période Duplessis, il est assez peu question de la guerre froide – ils en traitent curieusement dans le chapitre suivant. Ce contexte international explique pourtant plusieurs décisions du chef de l’Union nationale. …