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Cet ouvrage rassemble les communications présentées lors du symposium « L’éducation, la religion et la science », organisé à la Faculté d’éducation de l’Université du Québec à Montréal en mai 2008. De nouvelles contributions ont également été ajoutées.
La première partie aborde un sujet délicat : comment répondre aux questions des enfants sur la mort. Ces derniers peuvent faire en effet, et parfois très tôt, l’expérience de la disparition d’un proche ou d’un animal familier. Contrairement à certaines idées reçues, les enfants sont à même de comprendre le caractère inévitable, irrévocable et universel de la mort. Comment, alors, leur en parler, et quelles réponses apporter à leurs interrogations ? Si les réponses possibles diffèrent et reflètent en particulier les convictions spirituelles et philosophiques des familles, les auteurs conseillent judicieusement aux éducateurs – parents et enseignants – d’éviter de mentir et recommandent, au contraire, de tenir aux enfants un discours aussi informé que possible tout en demeurant respectueux de leurs émotions. Cette partie de l’ouvrage comporte nombre de réflexions riches d’enseignements sur le développement psychologique des jeunes enfants ; toutefois, on peut s’interroger sur la pertinence d’y inclure certains témoignages personnels.
Les auteurs de la seconde partie du livre défendent avec vigueur le projet d’une éducation morale s’appuyant sur des valeurs présentées comme universelles (honnêteté, respect, responsabilité, coopération, mais aussi reconnaissance, générosité et bonté). Résistant à la tentation de l’endoctrinement, cette éducation évite toute référence à une religion, mais encourage le développement chez les enfants de la pensée critique et du jugement, de la capacité de raisonner afin de devenir des êtres autonomes. On peut observer que ces visées rejoignent celles du nouveau cours d’éthique et de culture religieuse au Québec, qui valorisent également l’autonomie et le jugement critique, mais aussi la réflexion et l’action responsables des élèves, tout en favorisant le respect mutuel et la compréhension de l’autre par la pratique du dialogue.
La troisième et dernière partie concerne l’enseignement de la science. Elle permet d’aborder le débat sur le créationnisme, connu également sous l’expression intelligent design, qui s’est développé ces dernières années aux États-Unis et au Canada, et qui oppose, tout particulièrement dans l’espace scolaire, les partisans de la théorie évolutionniste aux tenants d’une création de nature divine. La question est de savoir s’il est nécessaire de discuter de la théorie du créationnisme dans les cours de science. Si les auteurs s’accordent sur le fait qu’il n’est pas obligatoire d’en parler, ils reconnaissent cependant l’intérêt d’avoir, avec des étudiants plus âgés, des discussions sur les relations entre science et religion, voire de développer une « pédagogie de la croyance et du doute », qui peut se révéler particulièrement féconde pour la réflexion personnelle.
L’intérêt de cet ouvrage est qu’il permet de dépasser l’opposition souvent simpliste entre religion et science. En effet, il donne la parole à des croyants et des incroyants, et montre qu’il existe des discours dogmatiques, souvent imprégnés d’ignorance, aussi bien chez certains religieux que chez certains scientifiques. Le postulat des auteurs est que la religion n’est nécessaire pour parler ni de la mort, ni de l’éducation morale, ni de la science. Peut-être, mais la connaissance des discours religieux peut enrichir grandement la réflexion sur ces divers sujets, à condition bien entendu qu’elle se fasse dans le respect des différentes opinions. Le mérite de ce livre est d’ouvrir de nombreuses pistes de réflexion, mais aussi d’action, par le partage d’expériences pédagogiques, sur des thèmes sensibles de la pratique éducative et autour desquels les débats sont loin d’être terminés.