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L'auteur nous propose une édition renouvelée de cette oeuvre parue une première fois il y a vingt ans et vendue à plus de 30 000 exemplaires depuis. Il s'agit donc d'un livre qui a fait ses preuves et qui est utilisé comme manuel de base par différents formateurs et formatrices en relation d'aide. Cette nouvelle édition présente un contenu identique aux éditions précédentes quant au fond, mais dans une forme restructurée en vue de rendre le contenu plus clair. De plus, l'auteur a ajouté une série de questions à la fin de chaque chapitre — questions fort judicieuses par ailleurs — qui aident le lecteur ou la lectrice à poursuivre la réflexion sur un plan plus personnel. Elles démontrent que l'auteur maîtrise très bien tout l'art et les subtilités de la relation d'aide.

En introduction, on situe la relation d'aide dans la vie quotidienne aussi bien qu'au sein d'un travail professionnel. On nous propose des définitions de la psychothérapie et de la relation d'aide. Selon l'auteur, la psychothérapie constitue « une démarche structurée (…) habituellement entre dix et dix-huit mois » (page XVI) alors que la relation d'aide est « souvent informelle et situationnelle (…) déclenchée par un besoin immédiat et d'une durée brève » (page XVII). On ne fait cependant aucune distinction avec le travail social qui, pour sa part, resitue la relation d'aide dans la relation entre la personne et son environnement afin d'améliorer son fonctionnement social.

Le premier chapitre porte sur « la compréhension empathique » comme telle. L'auteur définit l'empathie de manière plutôt classique comme « sentir de l'intérieur » (page 3), ce que Rogers appelait « la capacité de se mettre dans les souliers de l'autre ». Cette façon de faire est centrale pour établir un lien thérapeutique. Elle est fondamentalement axée sur la personne qui consulte dans une perspective qui évite le jugement. Il aurait été intéressant que l'auteur conserve une dimension sociocritique quant aux limites de l'approche empathique. Rappelons que Clark (2000) met en évidence le fait que cette technique porte en elle des éléments implicites qui peuvent représenter autant de préjudices. Par exemple, en étant centrée sur la personne, l'approche empathique omet le contexte sociopolitique. D'autre part, elle positionne l'intervenant ou l'intervenante comme l'expert ou l'experte, celui ou celle qui est capable de comprendre l'autre, alors que ce que porte l'autre se situe parfois aux antipodes des connaissances, des savoirs expérientiels, des valeurs ou autres de l'intervenant ou intervenante. De plus, elle est fondamentalement unidirectionnelle et renforce ainsi l'inégalité entre les deux protagonistes. De même, l'expression des émotions que doit favoriser l'empathie demeure une technique davantage liée à une perspective occidentale, eurocentriste (ou nord-américanocentriste), le plus souvent féminine, beaucoup plus difficile à utiliser avec des hommes plus traditionnels par exemple (Tremblay, 1996; Tremblay et L'Heureux, 2002) ou des personnes issues de certaines cultures.

Au chapitre suivant, l'auteur propose un exercice un peu lourd, mais utile pour bien saisir les principales techniques en usage. Le chapitre 3 reprend les étapes de la relation d'aide : 1) expression, 2) compréhension et 3) scénario de solution (ou action). Il s'agit d'un processus conçu dans la tradition humaniste : partir des émotions, chercher à comprendre le sens du vécu de la personne aidée et enfin élaborer avec elle des scénarios de solutions. Selon Hétu, trois conditions doivent être réunies « pour que l'on puisse vraiment parler de relation d'aide » : 1) la personne aidée doit être consciente de son problème, 2) elle doit consentir à en parler et 3) la personne aidante doit se centrer sur la personne aidée (page 34). Bref, la relation d'aide, selon l'auteur, doit se produire dans un contexte volontaire, plutôt spontané, ce qui n'est pas toujours le cas, particulièrement en travail social. Définir ainsi les conditions de base de la relation d'aide indique implicitement qu'il est impossible d'établir une relation d'aide significative en contexte d'autorité ou avec des personnes non motivées. Or, des approches ont aussi été élaborées pour travailler dans de tels contextes et réussir des expériences d'aide fort intéressantes. Que l'on pense, par exemple, à l'approche de réduction de méfaits, pour ne nommer que celle-là.

Le chapitre 4 traite de la formulation du problème. L'auteur donne de nombreux exemples en ce sens de manière à ce que le client ou la cliente ait du pouvoir, qu'elle ne soit pas identifiée comme simple victime. Il s'agit d'une habileté relativement complexe pour des débutants et des débutantes, mais que Hétu précise et simplifie de manière très utile.

Les chapitres suivants passent les techniques de base en revue : l'utilisation du silence, la reformulation et le reflet, la focalisation, la confrontation, la question fermée, le soutien et l'interprétation. Chaque technique est définie, expliquée et illustrée par des exemples. De plus, l'auteur propose des balises et des repères pour mieux aider à comprendre quand et comment utiliser la technique retenue.

Le chapitre 12 s'attarde à la recherche de solutions, troisième étape du processus proposé. Dans les chapitres suivants, l'auteur discute de questions plus délicates : l'implication personnelle, le contrôle, la résistance et les erreurs fréquentes. Il s'agit ici de résumés très courts de questions souvent très complexes. Par exemple, dans le chapitre sur le contrôle, l'intervention de crise est rapidement abordée, à vrai dire à peine effleurée. Le résumé s'avère beaucoup trop court pour apporter toutes les nuances nécessaires et peut laisser entrevoir à des personnes qui ne sont pas formées adéquatement qu'elles pourraient se permettre d'intervenir en situation de crise sans trop de distinction. Enfin les deux derniers chapitres fournissent un exercice sur les enseignements du volume et sur la formation en relation d'aide.

Somme toute, cette nouvelle édition de l'ouvrage de Jean-Luc Hétu intitulé La relation d'aide constitue un bon résumé des éléments de base en relation d'aide; ils sont présentés de manière succincte et précise par un formateur chevronné. Il s'agit d'un texte de base pour tout clinicien ou toute clinicienne. Il est fort utile pour ceux et celles qui enseignent la relation d'aide. Les débutants et les débutantes y trouveront de nombreux exemples pour illustrer les enseignements qui y sont contenus. Avantage certain, cet ouvrage relativement court et concis est vendu à prix abordable. L'auteur aurait cependant gagné à situer, en quelques paragraphes, la relation d'aide dans une approche un peu plus contemporaine, de nature sociocritique.