Archivaria
The Journal of the Association of Canadian Archivists
Numéro 94, fall–winter 2022 Toward Person-Centred Archival Theory and Praxis Sous la direction de Jennifer Douglas, Mya Ballin, Jessica Lapp et Sadaf Ahmadbeigi
Sommaire (12 articles)
Articles
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Always Coming Home: Territories of Relation and Reparative Archives
Kim Christen, Josiah Blackeagle Pinkham, Cordelia Hooee et Amelia Wilson
p. 24–62
RésuméEN :
This article contributes to person-centred archival praxis and methodology by providing a reparative theoretical framework based in Indigenous relationships to kin, territories, material belongings, and systems of knowledge to unsettle standard archival practices. By foregrounding the stories of Indigenous archivists and practitioners, through their own narratives, we build on Indigenous theory as story work to interrogate archival systems, workflows, and policies that continue to replay settler-colonial tactics of removal and epistemic violence. In order to restructure archival practices, we suggest that institutions need to build relationship infrastructures that allow for respectful archival listening, shared stewardship, and return practices that go beyond mere exchange. Instead, to centre Indigenous knowledge systems and practices, archival practices must not only acknowledge territorial, intellectual, and cultural sovereignty but must also enact mechanisms for their realization.
FR :
Cet article contribue aux praxis et méthodologies archivistiques centrées sur les personnes en offrant un cadre théorique réparateur basé sur la relationnalité autochtone envers les proches, le territoire, les affaires matérielles, et les systèmes de connaissances afin de déconstruire les pratiques archivistiques normatives. En mettant de l’avant des récits provenant d’archivistes et practicien.ne.s autochtones – à travers leur propre cheminement – nous nous appuyons sur les théories autochtones comme un travail narratif en interrogeant les systèmes, l’organisation du travail, et les politiques archivistiques qui reproduisent les tactiques du colonialisme d’occupation de suppression et de violence épistémique. Dans un objectif de restructuration des pratiques archivistiques, nous suggérons que les institutions doivent ériger des infrastructures basées sur la relationnalité afin de permettre une écoute archivistique respectueuse, une intendance partagée et un retour aux pratiques qui vont au-delà du simple échange. En outre, afin de positionner les systèmes de connaissances et pratiques autochtones au coeur des pratiques archivistiques, celles-ci ne doivent pas seulement reconnaître la souveraineté territoriale, intellectuelle, et culturelle autochtone; elles doivent forger des mécanismes pour leur réalisation.
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A Framework for Person-Centred Recordkeeping Drawn through the Lens of Out-of-Home Child-Care Contexts
Elizabeth Lomas, Elizabeth Shepherd, Victoria Hoyle, Anna Sexton et Andrew Flinn
p. 64–93
RésuméEN :
This article examines the concept of co-created and person-centred recordkeeping and the needs for this in out-of-home child-care contexts, drawing out a recordkeeping framework. The article uses the research of the UK MIRRA (Memory – Identity – Rights in Records – Access) project as its critical evidence base. MIRRA is a participatory research project, hosted at the Department of Information Studies at University College London (UCL) since 2017, which places Care Leavers as co-researchers at the heart of the work. The study has gathered evidence from care-experienced people, social workers, archivists, records managers, and researchers. The case context of care-experienced people provides a powerful focus for shifting views of records creation and ownership. Care-experienced people across the globe are situated within organizational systems that act as surrogate parents, but where the children or young people are often powerless to co-create and store their own memories, which would enable them to forge positive identities and revisit these through time. Positive and holistic life story narratives are rarely found. In addition, children’s care records are often accessible to care-experienced people only through legislative processes and without critical support. This research reframes the recordkeeping model, placing the care-experienced person at the heart of the process in order to ensure the co-creation of records and the maintenance of identity through time. The research acknowledges the complex and sometimes conflicting needs of diverse actors in children’s recordkeeping, including social workers, archivists, records managers, and researchers. It rethinks the actors’ relationships and responsibilities around the records and systems, drawing out a framework that makes explicit the value of active person-centred recordkeeping.
FR :
Cet article, en élaborant un cadre d’archivage, examine le concept de co-création et de préservation d’archives basée sur les personnes. Il souligne la nécessité de ce concept dans le contexte de la garde d’enfants hors domicile. L’article utilise la recherche du projet UK MIRRA (Mémoire – Identité – Droits aux documents – Accès) comme fondement critique d’analyse. MIRRA est un projet de recherche participatif chapeauté depuis 2017 par le Department of Information Studies at University College London (UCL). Ce projet positionne ceux et celles ayant quitté les institutions de « soins » comme étant des co-chercheurs.euses se trouvant au coeur de la recherche. L’étude a recueilli des preuves provenant de personnes qui ont été présentes dans ces institutions, de travailleurs.euses sociaux.ales, d’archivistes, de gestionnaires de documents et de chercheurs.euses. Le contexte de l’étude de cas de personnes évoluant dans les milieux de soins offre une démonstration éloquente des changements de perspectives face à la création et la possession des documents. Les personnes ayant vécu dans les milieux de soins à travers la planète sont positionnées à l’intérieur de systèmes organisationnels qui agissent comme parents de substitution. Toutefois, les enfants et les jeunes se trouvent souvent impuissants pour façonner leurs propres récits et mémoires. Cette dimension leur permettrait de se construire des identités et de les revisiter à travers le temps. Des histoires de vie positives et holistiques sont largement absentes. De plus, les dossiers des enfants se trouvant dans les institutions de soins sont souvent accessibles à celles et ceux-ci seulement qu’à travers des procédés légaux et sans soutien critique. Cette recherche recadre le modèle de gestion des archives en positionnant la personne présente dans les milieux de soins au coeur des procédés afin d’assurer la co-création des documents et le maintien de leur identité à travers le temps. La recherche reconnaît les besoins complexes et parfois conflictuels des divers acteurs.trices impliqué.e.s dans la gestion des documents des enfants, entre autres les travailleurs.euses sociaux.ales, les archivistes, les gestionnaires de documents et les chercheurs.euses. Elle repense alors les relations et les responsabilités des différents acteurs.trices concernant les documents et les systèmes, en développant un cadre qui rend explicite la valeur active des personnes impliquées dans la portée des archives.
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Convenient Fires and Floods and Impossible Archival Imaginaries: Describing the Missing Records of Children's Institutions
Nicola Laurent, Cate O’Neill et Kirsten Wright
p. 94–119
RésuméEN :
This article concerns one notable feature of narratives around child welfare records: the prevalence of stories of records destroyed in natural disasters. These stories have the power to rouse strong emotions for people who grew up in institutional “care.” Care Leavers, many of whom have a justifiable lack of trust in institutions and authority as a result of their childhood experiences, are skeptical about the supposed loss of their records in fires and floods. They remain suspicious that the records do exist but are being withheld to protect the reputations of the institutions. This article considers Gilliland and Caswell’s notion of “archival imaginaries” in the context of missing, lost, or inaccessible child welfare records in Australia. The authors argue for an approach to describing these records that is not only person centred but also trauma-informed. The article presents two case studies that demonstrate the potential of applying this approach when describing records supposedly destroyed by fires and floods. Descriptions need to document the full story of the records, whether they materially exist or not, in a way that validates and acknowledges Care Leavers’ strong feelings about records and demonstrates archival organizations’ commitment to remediating the damage and hurt caused by past practices.
FR :
Cet article concerne une caractéristique notable des récits entourant les dossiers de la protection de l’enfance : la prédominance des histoires de documents détruits à la suite de désastres naturels. Ces récits ont le pouvoir d’attiser des émotions fortes pour les personnes ayant grandi dans ces institutions de « soins ». Les personnes ayant quitté ces institutions – dont beaucoup ont un manque de confiance justifiable envers les institutions et l’autorité à la suite d’expériences vécues à l’enfance – sont sceptiques concernant la présumée perte de leurs documents à la suite de feux et d’inondations. Elles demeurent également méfiantes lorsque les documents existent bel et bien, mais quand leur accès est restreint pour protéger la réputation des institutions. Cet article utilise comme trame de fond la notion d’« imaginaires archivistiques » développée par Gilliland et Caswell dans le contexte de dossiers de protection de l’enfance en Australie qui sont disparus, perdus, ou inaccessibles. Les autrices plaident pour une approche de description de ces documents qui n’est pas uniquement centrée sur les personnes, mais également informée par les traumatismes. Cet article présente deux études de cas qui démontrent le potentiel d’application de cette approche lors de la description de documents soi-disant détruits par le feu ou lors d’inondations. Les descriptions doivent documenter l’histoire complète des archives, qu’elles existent matériellement ou non, d’une manière qui valide et reconnaît les sentiments des personnes qui ont quitté les institutions de « soins ». De plus, ces descriptions doivent démontrer l’engagement des organisations archivistiques afin de remédier aux dommages et blessures causés par les pratiques antérieures.
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“They Weren’t Necessarily Designed with Lived Experiences of Disability in Mind”: The Affect of Archival In/Accessibility and “Emotionally Expensive” Spatial Un/Belonging
Gracen Brilmyer
p. 120–153
RésuméEN :
Using semi-structured interviews with disabled archival users and building on the emerging field of critical access studies, this article illustrates the ways in which archival spaces and their in/accessibility affectively impact disabled people. Interviewees describe how they experience barriers to accessibility not only at a basic, architectural level – of not being able to get into a building or archives room – but also through archives’ policies and expectations regarding the ways in which archival work is done. The way that accessibility is implemented, even beyond legal compliance, greatly impacts the extent to which disabled researchers feel they belong in archival spaces. Inaccessibility, this research shows, produces a sense of unbelonging; the deprioritization of disability both as a subject or organizing category and as an identity of a potential researcher, shows disabled people that they do not belong in archival spaces, and this is further complicated for multiply marginalized disabled people. By examining the multifaceted ways that disabled people experience inaccessibility, this article focuses on the “emotionally expensive” aspects of inaccessibility to emphasize the ways in which barriers compound and accumulate and can prevent disabled people from accessing our own histories. These findings demonstrate how central accessibility is to disabled people’s lives: it is almost impossible to talk about our experiences of archival materials and history without discussing how we navigate the multiple barriers to accessing them.
FR :
Utilisant des entrevues semi-structurées avec des utilisateurs.trices avec incapacité et construisant sur le domaine émergent des études critiques de l’accès, cet article illustre les manières dont les espaces archivistiques et leur in/accessibilité ont un impact sur les personnes avec incapacité. Les personnes interrogées décrivent comment elles expérimentent les obstacles à l’accessibilité, pas uniquement au niveau de l’architecture des bâtiments et de la difficulté d’accès aux édifices et aux salles de consultation, mais également en ce qui concerne les politiques archivistiques et les attentes face aux procédés et pratiques archivistiques. Au-delà des balises légales, la manière dont l’accessibilité est mise en oeuvre a un impact significatif sur la mesure dans laquelle les chercheurs.euses se sentent les bienvenu.e.s dans les espaces archivistiques. Cette recherche démontre que le manque d’accessibilité produit un sentiment où les personnes avec incapacité ne se sentent pas accueillies. La dépriorisation de l’incapacitisme, à la fois comme sujet ou catégorie organisationnelle, ainsi que comme un marqueur identitaire des chercheurs.euses potentiel.le.s, démontre que les personnes avec incapacité ne sont pas considérées et n’ont pas leur place dans les lieux archivistiques. Ce constat est complexifié davantage pour les personnes avec incapacité multimarginalisées. En examinant les facettes multiples qu’expérimentent les personnes avec incapacité, cet article met l’accent sur la portée émotionnelle de l’inaccessibilité en évoquant les manières dont les barrières se constituent et s’accumulent. L’article souligne ainsi que ces barrières empêchent les personnes avec incapacité d’accéder à leurs propres histoires. Les résultats de la recherche démontrent comment l’accessibilité est au coeur de la vie des personnes avec incapacité. Il est pratiquement impossible de parler de nos expériences avec le matériel archivistique et de nos récits sans discuter de la manière que l’on doit naviguer les multiples barrières qui empêchent leur accès.
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Archival Harm Reduction: A Theoretical Framework for Utilizing Harm-Reduction Concepts in Archival Practice
Krystal Payne
p. 154–181
RésuméEN :
Canadian archives arose from and help maintain white supremacist and settler-colonial frameworks. The inequitable power relations that exist in archives and archival practices contribute to the harms done to Indigenous people and communities; they do so through the ongoing entrenchment of settler colonialism and the participation in extractive colonialism that occur within the processes of archiving and through the systemic racism that comes along with these processes. This article lays out the beginnings of a theoretical framework for an archival harm-reduction approach for managing records by, about, and for Indigenous people and communities that are held in settler archival institutions and managed by settler archivists. Built upon an explicit acknowledgement of the harm that can occur within archives and through archival practices, and connecting public health harm-reduction concepts with Indigenous scholars’ ideas around relationality and power, this framework conceptualizes a process for shifting archival power by building relationships to ensure that the people and communities that records are about or from whom records originate are meaningfully involved in the stewardship of such records. The core harm- reduction concept of involving people and communities as the experts in their own lives (and records) is extended to archival practice – touching on topics such as consent, agency, autonomy, and social justice as well as on practices that are community-based, participatory, and reparative – helping to further articulate a person-centred archival theory and practice and illuminating the fact that settler archives cannot simply redescribe their way out of white supremacy.
FR :
Les archives canadiennes découlent et contribuent au maintien de la suprématie blanche et des balises du colonialisme d’occupation. Les relations de pouvoir inéquitables existantes dans les archives et dans les pratiques archivistiques contribuent aux dommages causés aux populations et communautés autochtones. Cela se traduit à travers les particularités dynamiques du colonialisme d’occupation et grâce à des procédés d’archivage ancrés dans un racisme systémique qui façonnent le colonialisme d’extraction. Cet article étale les débuts d’un cadre théorique axé sur une approche de réduction des torts en lien avec les archives produites par, sur, et pour les personnes et communautés autochtones se trouvant dans les institutions archivistiques coloniales et gérées par les archivistes-colons. Érigé à partir d’une reconnaissance explicite des torts qui peuvent émerger dans les archives et dans les pratiques archivistiques, en plus d’associer des concepts de la réduction de risques pour la santé avec les notions de relationnalité et de pouvoir mis de l’avant par des concepts académiques autochtones, ce cadre de référence conceptualise un processus dédié à faire pivoter les pouvoirs archivistiques en développant des relations qui assurent que les personnes et les communautés représentées et concernées par les archives sont impliquées de manière significative dans l’intendance des documents. Le principe de base qui positionne les personnes et les communautés concernées comme les experts de leur propre vie (et leurs documents) est alors prolongé dans la pratique archivistique. En évoquant des sujets tels le consentement, l’agentivité, l’autonomie, la justice sociale ainsi que des pratiques ancrées dans les communautés, de manière participative et réparatrice, ce cadre de réduction des torts contribue à l’articulation d’une théorie et des pratiques archivistiques centrées sur les personnes. Par le fait même, l’article souligne que les archives coloniales ne peuvent simplement qu’effectuer de la redescription archivistique et ainsi penser se distancer de la suprématie blanche.
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Gossip as Practice, Gossip as Care: Affective Information Practices in the Archives
Emily Guerrero
p. 182–202
RésuméEN :
Often seen as suspect and untrustworthy, gossip as it is currently conceptualized comes from historic attempts by people who have experienced social marginalization to share information, build stronger relationships, and assess a dominant narrative against lived experience. In this article, I will be outlining how gossip has animated my archival work at the Crista Dahl Media Library and Archives, an artist-run centre in Vancouver, BC, and using the Crista Dahl Media Library and Archives as a case study. Several distinct uses of gossip emerge: these include offering space for archives workers to connect and build solidarity, opening up new avenues for reassessing what we consider to be relevant information in archival description, providing strategies for navigating sensitive information within collections, and acting as an alternative to narratives of trauma when considering archival silences. Drawing on practice theory and studies of community archives and deeply influenced by an ethos of transformative justice, this project is connected to the growing body of scholarly work that examines information and memory work through the lens of affect theory and a feminist ethics of care. This work contributes to the articulation of person-centred archival praxis by theorizing gossip as a tactic of care that trains the ear to better notice the experiences, complaints, and contributions of the people surrounding the records at hand.
FR :
Souvent perçu comme suspect et indigne de confiance, le potinage, comme il est présentement conceptualisé, provient de tentatives historiques de gens ayant vécu de la marginalisation sociale pour partager de l’information, développer des relations plus fortes, et évaluer et confronter des récits dominants face aux expériences vécues. Dans cet article, je vais décrire comment le potinage a animé mon travail archivistique à la Crista Dahl Media Library and Archives, un centre d’artistes autogéré de Vancouver, en Colombie-Britannique. La Crista Dahl Media Library and Archives est ainsi utilisée comme étude de cas. Plusieurs formes distinctes de potinage émergent : celles-ci se traduisent par offrir un espace de rencontre et d’échange aux archivistes afin de construire des liens de solidarité, ouvrir de nouvelles avenues afin de réévaluer ce qui est considéré comme de l’information pertinente aux descriptions archivistiques, offrir des stratégies afin de naviguer à travers l’information sensible dans les collections et, dans un dernier temps, agir comme alternative aux récits de traumatismes lorsque l’on considère les silences archivistiques. En se basant sur les théories de la pratique, les études théoriques de l’archivistique communautaire, et profondément influencé par les énoncés de la justice transformative, ce projet s’inscrit dans la lignée du nombre croissant de travaux scientifiques qui examinent l’information et le travail de mémoire à travers une perspective des théories de l’affect et de l’éthique féministe du care. Ce travail contribue à l’articulation d’une praxis archivistique centrée sur les personnes, en théorisant le potinage comme une tactique de soins qui entraîne l’écoute vers les expériences, les plaintes et les contributions des personnes associées aux documents à portée de main.
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Evidence of Jorge: Documentary Traces of a Forced Disappearance in Colombia
Natalia Bermúdez Qvortrup et Marta Lucía Giraldo
p. 204–230
RésuméEN :
Jorge Soto Gallo disappeared on July 15, 1985, during a trip from Medellín to Bogotá in Colombia. Jorge is one of the thousands of disappeared people in Colombia whose families are still searching for answers, yet Jorge’s life and disappearance have been memorialized and recorded through his sister’s work of preserving, cultivating, and activating his personal archive. During recent decades, families of disappeared persons have begun to assemble folders that carry the evidence of disappearances. This article explores the personal archive of Jorge Soto Gallo with the aim of understanding a recordkeeping practice carried out by families and communities, which focuses on disappeared persons and often leads to a broad repertoire of political activism in defence of human rights. We ask, Which records are included, how are they brought together during these periods of upheaval, what do they mean, and what role do they play? We argue that creating and preserving these archives of enforced disappearance act as liberatory memory work (LMW) and as instincts of the families against forces of impunity and oblivion. We show that LMW is a living reality in Colombia that operates on a person-centred level, going beyond transitional justice frameworks, and turning victims into recordkeepers providing the possibility of historical accountability for future generations.
FR :
Jorge Soto Gallo est disparu le 15 juillet 1985 lors d’un voyage entre Medellín et Bogotá, en Colombie. Jorge est l’un des milliers de personnes disparues en Colombie dont les familles cherchent toujours des réponses. Toutefois, la vie et la disparition de Jorge ont été commémorées et documentées par le travail de préservation, d’engagement et d’activisme de sa soeur. Au cours des dernières décennies, les familles de disparu.e.s ont commencé à regrouper des dossiers qui portent l’évidence de disparitions. Cet article explore les archives personnelles de Jorge Soto Gallo avec comme objectif de comprendre une pratique de collection d’archives entreprise par les familles et communautés, qui met l’accent sur les personnes disparues. Cette pratique conduit souvent à un activisme politique se portant à la défense des droits de la personne. Nous demandons alors: Quels documents sont inclus? Comment sont-ils regroupés dans ces périodes de bouleversements? Que signifient-ils et quel rôle jouent-ils? Nous soutenons que l’action de créer et de préserver ces archives de disparition par la force agit comme un travail de mémoire libérateur et se produit instinctivement pour les familles se trouvant en opposition face aux forces d’impunité et de l’oubli. Nous démontrons que le travail de mémoire libérateur centré sur les personnes est une réalité vivante en Colombie. Ce travail va ainsi plus loin que le cadre de justice transitionnelle. La transformation des victimes en archivistes offre des possibilités de responsabilité historique pour les générations futures.
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Documenting Disappearance: Personal Archives, Life Writing, and the Self in Sri Lanka
Henria Aton
p. 232–257
RésuméEN :
On August 12, 2022, Tamil relatives of those forcibly disappeared during the Sri Lankan Civil War (1983–2009) marked their 2,000th day of public protest. Since these roadside protests began, elderly women and men searching for their loved ones have passed away and transitional justice promises have failed, but the disappeared have not been found. This article examines archives of the disappeared: collections of files, objects, photographs, etc. about missing loved ones. Paradoxically, these archives, as evidence that the disappeared once lived, are at the core of the protests, yet they are still overlooked by the Sri Lankan state. I explore these collections by examining the intersection of critical personal archives, life writing scholarship, and South Asian studies. The emerging field of critical personal archives suits the unique quality of archives of disappearance, their constructed nature, and their underlying intimacy. Life writing scholarship focuses a much-needed critical lens on self-representation, power, and narrative in archives, especially regarding those whose stories are marginalized and/or not deemed archivable. Drawing on semi-structured interviews I carried out with mothers of the disappeared in 2016–2017 and 2022, I analyze these archives using three life writing concepts: relationality, cultural scripts, and autotopography. The result reaffirms the enduring cultural, political, and personal value of archives of the disappeared and calls for reimagining personal archives as politically and emotionally powerful forms of representation that carve space for love and resistance.
FR :
Le 12 août 2022, des familles et proches de Tamouls disparus de force durant la Guerre civile au Sri Lanka (1983–2009) ont marqué leur 2 000ième jour de manifestation publique. Depuis que les manifestations en bordure des routes ont débuté, les ainé.e.s à la recherche de leurs proches sont décédé.e.s et les promesses de justice transitionnelle n’ont pas été tenues puisque les personnes disparues n’ont pas été retrouvées. Cet article examine les archives des disparu.e.s : collections de dossiers, objets, photographies, etc. à propos d’êtres chers disparus. D’une manière paradoxale, ces archives, qui servent d’évidence de la vie des personnes disparues et qui sont au coeur des manifestations, sont pourtant encore négligées par l’état du Sri Lanka. J’explore ces collections en examinant les intersections qui relient les archives personnelles critiques, le genre littéraire de récits vécus et les études d’Asie du Sud. Le domaine émergent des archives personnelles critiques convient pour évaluer les caractéristiques des archives de disparu.e.s, leur formation particulière et leur caractère intime. Le genre littéraire des récits vécus met l’emphase, dans une dimension critique nécessaire, sur des questions d’autoreprésentation, de pouvoir, et de récits dans les archives, particulièrement en ce qui concerne celles et ceux dont les récits ont été marginalisés et/ou jugés non archivables. En me basant sur des entrevues semi-structurées réalisées en 2016–2017 et 2022 avec les mères de personnes disparues, j’analyse ces archives en utilisant trois concepts formant le genre littéraire de récits vécus : relationnalité, scripts culturels et autotopographie. Les résultats de la recherche réaffirment les valeurs culturelles, politiques, et personnelles des archives des disparu.e.s et appellent à réimaginer les archives personnelles comme étant des formes de représentations politiques et émotionnelles qui forgent de l’espace pour l’amour et la résistance.
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Bowline on a Bight: Doing Right by the Records of Lilian Bland
Claire Malek
p. 258–283
RésuméEN :
Focusing on a case study that has at its axis myself and the records of Lilian Bland, I explore person-centred archival theory by engaging primarily with what Sara Ahmed conceptualizes as queer use. I draw on recent archival literature on love and grief, queer theory, feminist theory, anti-colonial methods, and new materialism to propose a radical somatics of critical archival love. I situate my knowledge and power within discourses of social justice, healing, liberatory memory work, and gender and sexuality to reflect on what it means to “do right”: to act ethically and with care toward ourselves and the myriad others we encounter in archival practice, and to be of use to one another.
FR :
En me concentrant sur une étude de cas ayant comme trame moi-même et les archives de Lilian Bland, j’explore la théorie archivistique centrée sur les personnes en engageant principalement avec ce que Sara Ahmed conceptualise comme le queer use. Je puise dans la littérature archivistique récente de l’amour et du deuil, des théories queers et féministes, des méthodes anticoloniales, et du nouveau matérialisme afin de proposer une somatique radicale de l’archivistique critique basée sur l’amour. Je situe mes connaissances et mon pouvoir à travers des discours de justice sociale, de la guérison, du travail mémoriel de libération, et du genre et de la sexualité pour réfléchir à ce que signifie « bien faire » : agir de manière éthique et avec care envers soi-même et la myriade d’autres personnes rencontrées dans le cadre de la pratique archivistique, en plus de se rendre utiles les unes les autres.