Volume 47, numéro 1-2, 2020
Sommaire (6 articles)
Editorial
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Geoscience in the Time of Covid
Andrew Kerr
p. 1–4
A Tribute
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Maarten de Wit: 1947-2020
Andrew J. Hynes et Bastien Linol
p. 5–6
Andrew Hynes Series: Tectonic Processes
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Proterozoic–Paleozoic Sedimentary Rocks and Mesozoic–Cenozoic Landscapes of the Cape Mountains Across the Kango Complex Reveal ‘More Gaps Than Record’ from Rodinia and Gondwana to Africa
Maarten J. de Wit, Bastien Linol et Vhuhwavhohau Nengovhela
p. 7–58
RésuméEN :
The Kango (Cango) region flanks the northern margins of the Klein Karoo and the Cape Mountains across the Western Cape Province of South Africa. It preserves a condensed Proterozoic–Paleozoic stratigraphy exposed via a Mesozoic–Cenozoic morphology with a present Alpine-like topography. Its rocks and landscapes have been repeatedly mapped and documented for the past 150 years. Over the last 25 years, we remapped and dated a central-eastern section of this region. The subvertically bedded and cleaved rocks reveal an 8–10 km thick stratigraphy covering more than 700 million years between ca. 1200 and 500 Ma with several unconformities and disconformities. At ca. 252 Ma, during the Cape orogeny, this Kango Complex was deformed along thrusts and sub-isoclinal folds producing steeply dipping phyllites and slates. It was uplifted by 3–5 km during the Kalahari epeirogeny between 140 and 60 Ma while eroding at ca. 100–200 m/m.y. (120–80 Ma). During the Cenozoic, the rate of uplift decreased by an order of magnitude and today is ca. 0.4–0.7 m/m.y. across steep slopes and canyons in contrast to the Himalayas where erosion rates are about hundred times faster. A recent publication about this central-eastern section of the Kango region disputes the existence of regional isoclinal folds and suggests that deposition of the oldest sedimentary successions, including carbonate rocks of the Cango Caves (limestone-marble with enigmatic microfossils) was simple, continuous and restricted to between ca. 700 and 500 Ma, decreasing earlier estimates of the stratigraphic age range by 60–80%. Similarly, recent interpretations of the complex landscapes link the northern contact between the Kango and Table Mountain rock sequences to Quaternary faults. We present a new geological database, mapped between 1:500 and 1:10,000 scales, and twelve stratigraphic sections with younging directions linked to structural and isotopic data that support repetitions along regional isoclinal folds and thrust zones of the Kango sequences during the Permo–Triassic Cape orogeny, and geomorphic data that link the origin of its landscapes to weathering and erosion during the Cretaceous–Cenozoic Kalahari epeirogeny. During its evolution, the Kango Basin directly flanked both Grenvillian and Pan-African Mountain systems. But, at an average sedimentation rate of ca. 1 mm/70 years (0.014 mm/year) and with present low erosion rates (0.005 mm/year), there is likely more time missing than preserved of the tectono-erosion across these different regions of Rodinia and Gondwana before Africa emerged. To further evaluate the geodynamic significance of these time gaps requires more field mapping linked to new transdisciplinary geosciences.
FR :
La région du Kango (Cango) flanque les marges nord du petit Karoo et des montagnes du Cap dans la province du Western Cape en Afrique du Sud. Elle préserve une stratigraphie condensée protérozoïque–paléozoïque exposée via une morphologie mésozoïque–cénozoïque avec une topographie actuelle de type alpin. Ses roches et ses paysages ont été cartographiés et documentés durant les 150 dernières années. Au cours des 25 dernières années, nous avons re-cartographié et daté une section du centre-est de cette région. Les roches litées de manière subverticale et clivées révèlent une stratigraphie de 8 à 10 km d'épaisseur couvrant plus de 700 millions d'années entre environ 1200 et 500 Ma avec plusieurs non-conformités et disconformités. À 252 Ma, au cours de l'orogenèse du Cap, ce Complexe du Kango s'est déformé le long de chevauchements et de plis isoclinaux produisant des schistes à fort pendage. Il a été soulevé de 3 à 5 km au cours de l'épirogenèse du Kalahari entre 140 et 60 Ma, tout en s'érodant à 100–200 m/m.a. (120–80 Ma). Pendant le Cénozoïque, le taux de soulèvement a diminué d'un ordre de grandeur et il est aujourd'hui d'environ 0,4 à 0,7 m/m.a. à travers des pentes abruptes et des canyons, contrairement à l'Himalaya où les taux d'érosion sont environ cent fois plus rapides. Une publication récente sur cette section du centre-est de la région du Kango conteste l'existence de plis isoclinaux régionaux et suggère que le dépôt des plus anciennes successions sédimentaires, y compris les roches carbonatées des Grottes du Cango (marbre calcaire avec des microfossiles énigmatiques) était simple, continu et limité entre environ 700 et 500 Ma, diminuant les estimations antérieures de la tranche d'âge stratigraphique de 60-80%. De même, des interprétations récentes des paysages complexes relient le contact nord entre les séquences rocheuses du Kango et de Table Mountain à des failles quaternaires. Nous présentons une nouvelle base de données géologiques, cartographiée à des échelles entre 1:500 et 1:10,000, et douze coupes stratigraphiques avec des directions de superposition liées à des données structurales et isotopiques qui concordent avec les répétitions le long des plis isoclinaux régionaux et des zones de chevauchement des séquences du Kango pendant l’orogenèse permo–triassique du Cap, et des données géomorphiques qui relient l'origine de ses paysages à l’altération et à l'érosion au cours de l'épirogenèse du Kalahari au Crétacé–Cénozoïque. Au cours de son évolution, le bassin du Kango flanquait les systèmes montagneux grenvillien et panafricain. Mais, à un taux de sédimentation moyen d’environ 1 mm/70 ans (0,014 mm/an) et avec les faibles taux d'érosion actuels (0,005 mm/an), il manque probablement plus d’enregistrements de la tectonique et érosion de ces différentes régions de Rodinia et Gondwana avant l'émergence de l'Afrique que ce qui est actuellement préservé. Pour évaluer la signification géodynamique de ces intervalles de temps manquant, il faut d’avantage de cartographie de terrain associée à de nouvelles géosciences transdisciplinaires.
Commentary
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Anthropocene: Transdisciplinary Shorthand for Human Disruption of the Earth System
Emlyn Koster
p. 59–64
RésuméEN :
Increasingly, deliberations to potentially add the Anthropocene to the Geological Time Scale in recognition of humanity’s environmental impacts and stratigraphic record are attracting interest from non-geological disciplines and the news media. The 35 member Anthropocene Working Group, a constituent body of the International Commission on Stratigraphy, recently concluded that the worldwide fallout of radionuclides from atomic bomb testing in the mid-20th century best defines the base of the Anthropocene. With a search for the optimal ‘golden spike’ locality in progress as a key step toward any ratification by the International Union of Geological Sciences, there are widely held views outside of geological circles that the Anthropocene is already designated as an epoch. Regardless of its eventual formal or informal standing, this article opines that the term Anthropocene has become valuable shorthand for recognizing humanity as the dominant species which, in a geological nanosecond, has extensively detached itself from the Earth System, endangering the future of both. Accordingly, this article urges the entire geological profession to engage with the work of the Anthropocene Working Group and, as the originator of the term, to coalesce its activities with those of other disciplines concerned with environmental health and linked human health challenges.
FR :
De plus en plus, les délibérations visant à éventuellement ajouter l'Anthropocène à l'échelle du temps géologique en reconnaissance des impacts environnementaux de l'humanité et des données stratigraphiques suscitent l'intérêt des disciplines non géologiques et des médias. Les 35 membres du Groupe de travail sur l'Anthropocène, un organe constitutif de la Commission internationale de stratigraphie, ont récemment conclu que les retombées mondiales des radionucléides résultant des essais de bombes atomiques au milieu du XXe siècle définissent le mieux la base de l'Anthropocène. Avec la recherche de la localité de référence optimale du « clou d'or » en cours comme étape clé vers toute ratification par l'Union internationale des sciences géologiques, il existe des opinions largement partagées en dehors des cercles géologiques selon lesquelles l'Anthropocène est déjà désigné comme une époque. Indépendamment de sa position finale formelle ou informelle, cet article estime que le terme Anthropocène est devenu un raccourci précieux pour reconnaître l'humanité comme l'espèce dominante qui, dans une nanoseconde géologique, s'est largement dissocié du système terrestre, mettant en danger l'avenir des deux. Par conséquent, cet article exhorte l'ensemble de la profession géologique à s'engager dans les travaux du Groupe de travail sur l'Anthropocène et, en tant que créateur du terme, à fusionner ses activités avec celles d'autres disciplines concernées par la santé environnementale et les défis liés à la santé humaine.
Series
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Igneous Rock Associations 25. Pre-Pliocene Andean Magmatism in Chile
Veronica Oliveros, Pablo Moreno-Yaeger et Laura Flores
p. 65–82
RésuméEN :
Andean-type magmatism and the term ‘andesite’ are often used as the norm for the results of subduction of oceanic lithosphere under a continent, and the typical rock formed. Although the Andes chain occupies the whole western margin of South America, the most comprehensively studied rocks occur in the present-day Chilean territory and are the focus of this paper. Andean magmatism in this region developed from the Rhaetian-Hettangian boundary (ca. 200 Ma) to the present and represents the activity of a long-lived continental magmatic arc. This paper discusses Pre-Pleistocene volcanic, plutonic, and volcano-sedimentary rocks related to the arc that cover most of the continental mass of Chile (between the Pacific coast and the High Andes) between the latitudes of 18° and 50°S. They comprise most of the range of sub-alkaline igneous rocks, from gabbro to monzogranite and from basalt to rhyolite, but are dominated by the tonalite-granodiorite and andesite example members. Variations in the petrographic characteristics, major and trace element composition and isotopic signature of the igneous rocks can be correlated to changes in the physical parameters of the subduction zone, such as dip angle of the subducting slab, convergence rate and angle of convergence. Early Andean magmatic products (Jurassic to Early Cretaceous) are found along the Coastal Cordillera in the westernmost part of the Andes. The rock record of the subsequent stages (Late Cretaceous, Paleocene–Early Eocene, Middle Eocene–Oligocene, Miocene) is progressively shifted to the east, reflecting migration of the magmatic front towards the continent. Tectonic segmentation of the convergent margin, as attested by the magmatic record, may have occurred throughout the Andean life span but it is particularly evident from the Eocene onwards, where the evolution of the northern part of the Chilean Andes (north of 27°S latitude) is very different to that of the southern segment (south of 27°S latitude).
FR :
Le magmatisme de type andin et le terme « andésite » sont souvent les appellations utilisées pour décrire les résultats de la subduction de la lithosphère océanique sous un continent, et la roche typique formée. Bien que la chaîne des Andes occupe toute la marge ouest de l'Amérique du Sud, les roches les plus étudiées se trouvent dans le territoire chilien actuel et sont l'objet de cet article. Le magmatisme andin dans cette région s'est développé depuis la limite rhéto-hettangienne (environ 200 Ma) jusqu'à aujourd'hui et représente l'activité d'un arc magmatique continental persistant. Cet article a pour sujet les roches volcaniques, plutoniques et volcano-sédimentaires du pré-Pléistocène liées à l'arc qui couvrent la majeure partie de la masse continentale du Chili (entre la côte du Pacifique et les Hautes Andes) entre les latitudes de 18° et 50°S. Elles comprennent la majeure partie de la gamme de roches ignées sous-alcalines, du gabbro à la monzogranite et du basalte à la rhyolite, mais sont dominées par des roches de type tonalite-granodiorite et andésite. Les variations des caractéristiques pétrographiques, de la composition des éléments majeurs et traces et de la signature isotopique des roches ignées peuvent être corrélées aux changements des paramètres physiques de la zone de subduction, tels que l'angle de pendage de la plaque plongeante, le taux de convergence et l'angle de convergence. Les premiers produits magmatiques andins (du Jurassique au Crétacé inférieur) se trouvent le long de la Cordillère de la Côte dans la partie la plus occidentale des Andes. La succession de roche des stades suivants (Crétacé supérieur, Paléocène – Éocène inférieur, Éocène moyen – Oligocène, Miocène) est progressivement déplacée vers l'est, reflétant la migration du front magmatique vers le continent. La segmentation tectonique de la marge convergente, comme l'attestent les enregistrements magmatiques, peut avoir eu lieu tout au long de la formation des Andes, mais elle est particulièrement évidente à partir de l'Éocène, où l'évolution de la partie septentrionale des Andes chiliennes (au nord de 27°S de latitude) est très différente de celle du segment méridional (sud de 27°S de latitude).
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Classic Rock Tours 4. Long Walks, Lost Documents and the Birthplace of Igneous Petrology: Exploring Glen Tilt, Perthshire, Scotland
Andrew Kerr
p. 83–102
RésuméEN :
The spectacular angular unconformity at Siccar Point is the most famous site associated with James Hutton (1726–1797), but it was not his only place of insight. In 1785, three years before he discovered Siccar Point, Hutton examined outcrops in the still-remote valley of Glen Tilt, in the Scottish Highlands. He documented contact relationships between Precambrian metasedimentary rocks and Paleozoic granite bodies, although he had no knowledge of their true ages. Near to the hunting lodge where he and his colleague John Clerk of Eldin stayed, veins of granite clearly cut through relict bedding in the stratified rocks and disrupt their layering, breaking apart individual strata and leaving fragments (xenoliths) surrounded by granite. Hutton correctly deduced that the granite must originally have been in a ‘state of fusion’ and was forcefully injected into much older ‘schistus’. Such conclusions contravened prevailing ideas that granite bodies formed from aqueous solutions, and also refuted a wider philosophical view that granite and other crystalline rocks were the oldest and first-created parts of the Earth. Hutton’s key outcrops in Glen Tilt are easy to visit, although they do require a long (but easy) roundtrip hike of some 25 km. These are certainly not the most spectacular intrusion breccias that I have ever seen, but they are very instructive, and were very influential, because they sparked a long, and at times acrimonious, debate about the origins of igneous rocks and especially granite. This controversy had many strange twists and turns. These include the disappearance of Hutton’s original manuscript after his death, and its serendipitous rediscovery a century later, and the similar loss and rediscovery of exquisite drawings by John Clerk, almost two centuries after they were first penned. Among the lost drawings is an early example of detailed outcrop-scale mapping, which would become a key field-work technique. Hutton’s vision of granite as the product of hot, liquid material that moved upward in the Earth’s crust (plutonism) eventually prevailed over the idea that crystalline rocks formed from a primordial ocean that once enveloped the Earth (neptunism), but this victory did not come easily or quickly. In another strange twist of history, new evidence from the Cape of Good Hope in South Africa eventually acted to further the plutonist cause. Glen Tilt has changed very little since the time of Hutton, but the observations that were made here, and the long debate that followed, brought fundamental changes in our understanding of the Earth. Although Siccar Point should remain the first entry on the bucket list of any prospective geopilgrim to Scotland, the long and beautiful valley of the River Tilt should also be a priority.
FR :
La spectaculaire discordance angulaire de Siccar Point est le site le plus célèbre associé à James Hutton (1726–1797), mais ce n'était pas le seul lieu qui l’ait inspiré. En 1785, trois ans avant de découvrir Siccar Point, Hutton a examiné des affleurements dans la vallée encore enclavée de Glen Tilt, dans les Highlands écossais. Il a documenté les contacts entre les roches métasédimentaires précambriennes et les corps granitiques du Paléozoïque, bien qu'il ne connût pas leur véritable âge. Près du pavillon de chasse où lui et son collègue John Clerk of Eldin ont séjourné, des veines de granit ont clairement percé le litage relique dans les roches stratifiées et perturbé leur superposition, brisant les strates individuelles et laissant des fragments (xénolithes) entourés de granit. Hutton a correctement déduit que le granit devait à l'origine être dans un « état de fusion » et qu'il avait été injecté de force dans des « schistes » beaucoup plus anciens. De telles conclusions contrevenaient aux idées dominantes selon lesquelles des corps granitiques se formaient à partir de solutions aqueuses et réfutaient également une vision philosophique plus large selon laquelle le granit et d'autres roches cristallines étaient les parties de la Terre les plus anciennes et les premières créées. Les principaux affleurements de Hutton à Glen Tilt sont faciles à visiter, bien qu'ils nécessitent une longue randonnée (mais facile) d'environ 25 km aller et retour. Ce ne sont certainement pas les brèches d'intrusion les plus spectaculaires que je n’ai jamais vues, mais elles sont très instructives et ont eu un rôle très influent, car elles ont déclenché un long débat, parfois acrimonieux, sur les origines des roches ignées et en particulier du granit. Cette controverse a eu de nombreux rebondissements étranges. Ceux-ci incluent la disparition du manuscrit original de Hutton après sa mort, et sa redécouverte fortuite un siècle plus tard, et la perte et la redécouverte similaires de dessins remarquables de John Clerk, près de deux siècles après qu’ils aient été esquissés. Parmi les dessins perdus, se trouve un premier exemple de cartographie détaillée à l'échelle des affleurements, qui deviendra une technique clé de travail sur le terrain.La vision de Hutton du granit en tant que produit d'un matériau chaud et liquide qui s'est déplacé vers le haut dans la croûte terrestre (plutonisme) a finalement prévalu sur l'idée que des roches cristallines se sont formées à partir d'un océan primordial qui enveloppait autrefois la Terre (neptunisme), mais cette victoire n'est pas venue facilement ou rapidement. Dans une autre tournure étrange de l'histoire, de nouvelles preuves provenant du Cap de Bonne-Espérance en Afrique du Sud ont fini par faire avancer la cause plutoniste. Glen Tilt a très peu changé depuis l'époque de Hutton, mais les observations qui ont été faites ici, et le long débat qui a suivi, ont apporté des changements fondamentaux dans notre compréhension de la Terre. Bien que Siccar Point devrait rester en haut de la liste des lieux à visiter de tout visiteur potentiel lors d’un pèlerinage géologique en Écosse, la longue et belle vallée de la rivière Tilt devrait également être une priorité.