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Dans son ouvrage Les erreurs dans les cartes, Furst (2021) cherche à déconstruire l’idée, aujourd’hui largement répandue, que les cartes sont exactes et conformes à la réalité. À travers de nombreux exemples anciens et actuels, il fournit aux consommateurs de cartes que nous sommes des clés pour appréhender de façon plus critique ces objets.

Il ne faut pas penser que les erreurs que l’on retrouve dans les cartes sont toutes le fruit d’oublis. Certes, certaines de ces erreurs sont le résultat d’un déficit de connaissances. En revanche, d’autres sont commises volontairement dans le but de transmettre un message reflétant les objectifs et intentions du cartographe. Enfin, d’autres résultent des codes, normes, conventions et traditions cartographiques qui guident la fabrication des cartes. Ainsi, comme l’écrit Furst, toutes les cartes sont fausses à un certain degré, puisqu’elles trient, synthétisent et simplifient un espace « dont la complexité se prête mal à la représentation exhaustive » (p. 9).

Il semble que l’ouvrage de Furst ne soit pas d’abord destiné à des gens oeuvrant dans le monde de l’éducation. Néanmoins, il est d’un intérêt certain pour ces personnes, puisqu’il est écrit avec un souci de vulgarisation. Sa construction rend facile la compréhension des concepts et idées qui y sont présentés. Chaque double page traite d’un thème en lien avec un type particulier d’erreur que l’on peut retrouver sur une carte. Les thèmes sont variés : fluctuations des frontières selon les États, les cartes de propagande, l’inexactitude des mesures, le passage de la sphère au plan, les contrées mythiques et bien d’autres. Furst s’appuie sur des cas particuliers pour bâtir son propos, lequel se présente souvent sous la forme d’une carte « erronée ». Puisque les cartes sont datées, les cas qu’elles appuient sont temporellement situés, alors que la plus ancienne carte reproduite date de la fin du 2e siècle. Le lecteur constate donc aisément que l’inexactitude des cartes est un phénomène qui traverse les époques.

Certains enseignants seront peut-être hésitants à aborder cette vision critique des cartes avec leurs élèves, surtout les plus jeunes. L’ouvrage n’est pas pour autant sans intérêt pour les enseignants travaillant auprès de jeunes adolescents, notamment pour montrer l’évolution de notre connaissance du monde ou mieux présenter certains contextes historiques, comme l’époque dite des « grandes découvertes ». Il est plus facile d’envisager l’utilisation en classe d’extraits de cet ouvrage avec des étudiants plus âgés (fin du secondaire ou postsecondaire), en particulier pour constater le caractère partiel et partial des cartes.

Seront déçus par la lecture de cet ouvrage ceux qui rechercheraient un texte rigoureusement référencé. Malgré la présence d’une bibliographie, l’ouvrage s’éloigne de ce à quoi l’on peut s’attendre d’une publication scientifique « classique ». En revanche, la force du livre de Furst est qu’il est accessible à un public qui n’a pas besoin de connaitre de fond en comble la cartographie. Il regorge d’exemples réels et impressionne par la qualité technique remarquable des images qu’on y retrouve.