Volume 77, numéro 3, septembre 2001
Sommaire (7 articles)
Articles
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Immigration, langues et performance économique : le Québec et l’Ontario entre 1970 et 1995
Gilles Grenier
p. 305–338
RésuméFR :
Cette étude contribue à deux courants de littérature relativement distincts : l’intégration économique des immigrants et les liens entre les attributs linguistiques et les revenus au Canada. L’analyse porte sur deux provinces canadiennes, le Québec et l’Ontario, et utilise les microdonnées des cinq recensements canadiens de 1971, 1981, 1986, 1991 et 1996. L’échantillon est divisé entre les non-immigrants et les immigrants (et parmi ces derniers entre ceux originaires de l’Europe et des États-Unis et ceux originaires du reste du monde) et entre les personnes parlant le français, l’anglais ou une autre langue à la maison. Dans un premier temps, on fait des comparaisons de traitements et salaires moyens en fonction des attributs de langue et d’immigration. On constate que les revenus relatifs des immigrants ont diminué dans le temps. Par ailleurs, les francophones ont amélioré leur situation économique, à la fois chez les immigrants et les non-immigrants, mais sans rattraper totalement les anglophones. Les personnes parlant des langues autres que l’anglais ou le français ont en général des revenus assez faibles. Dans un deuxième temps, on estime des régressions de gains pour voir les effets nets des attributs d’immigration et de langue. Les écarts entre francophones et anglophones sont plus faibles quand on ne considère que les effets nets, et en Ontario, ils sont même nuls ou en faveur des francophones. Une question intéressante concerne la performance économique des immigrants au Québec en fonction de leurs choix linguistiques. Les résultats montrent que les immigrants qui parlent français s’intègrent aussi bien que ceux qui parlent anglais. Malgré cela, il n’y a pas suffisamment d’immigrants qui s’intègrent à la communauté francophone pour assurer le maintien du poids démographique du français. L’auteur suggère que la politique canadienne d’immigration tienne compte de l’équilibre linguistique entre le français et l’anglais.
EN :
This study contributes to two relatively distinct streams of literature: the economic integration of immigrants and the links between language attributes and earnings in Canada. The analysis is done with two Canadian provinces, Québec and Ontario, and uses micro-data from the five Canadian censuses of 1971, 1981, 1986, 1991 and 1996. The sample is divided between the non-immigrants and the immigrants (and among the latter between those originating from Europe and the United States and those originating from the rest of the world) and between the individuals speaking French, English or another language at home. In a first stage of the analysis, comparisons of mean wages and salaries are done in relation to immigration and language attributes. It is observed that the relative wages of immigrants have decreased over time. Francophones have improved their economic position, both among immigrants and non-immigrants, but without catching up completely with Anglophones. People who speak at home another language than French or English have in general relatively low incomes. In a second stage of the analysis, earnings regressions are estimated to see the net effects of immigration and language attributes. Earnings gaps between Anglophones and Francophones are lower when only net effects are considered, and in Ontario they are even null or in favour of Francophones. An interesting question concerns the economic performance of immigrants in Québec in relation to their language choices. The results show that immigrants who speak French do as well as those who speak English. In spite of that, not enough immigrants assimilate to the Francophone community to maintain the demographic weight of the French language. The author suggests that the Canadian immigration policy take into account the linguistic balance between French and English.
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Équilibres et stabilité de la corruption dans un modèle de croissance : l’effet de la rémunération des politiciens
Bruno Ventelou
p. 339–356
RésuméFR :
L’article part du principe suivant : la corruption « politique » renvoie à un problème de contrôle du contrôleur (il n’y a pas d’institutions hiérarchiques supérieures au sommet de l’État), ce qui crée un risque d’équilibres multiples : soit la corruption reste limitée, le cadre institutionnel relativement stable, et le contrôle possible, soit, au-delà d’un seuil, l’ensemble s’écroule, pour créer une « trappe de corruption » où les difficultés s’accumulent. Le modèle proposé s’inspire de cette réflexion, en empruntant une méthodologie propre à l’analyse économique des conflits sociaux. Sur la base d’une endogénéisation politico-économique de la survie électorale des gouvernements, il retrouve bien, dans une première étape, un résultat d’équilibres multiples concernant la corruption, l’instabilité politique et la croissance (avec la possibilité d’une « trappe de corruption » comme équilibre bas). La seconde étape exploite le cadre préalablement construit : il permet de tester une intuition, selon laquelle de — bonnes — stratégies de rémunération des politiciens permettent de limiter la corruption.
EN :
This article intends to deal with "political" corruption. The particular problem is that, by definition, there is no hierarchical institution (superior to the top level of the State) which is able to control the last controller. The politico-economic model proposed in this article tries to challenge the problem, using a methodology derived from the economic analysis of social conflicts. Based on a voting mechanism of control, the model gives two equilibria: a "good one" (high growth, political stability, low corruption) and a "bad one" (the opposite...). Conditions for controlling corruption are then studied: a political wages strategy added to the voting mechanism gives better solutions.
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Imperfection du marché du capital et investissement des exploitations agricoles
Catherine Benjamin et Euan Phimister
p. 357–383
RésuméFR :
Le but de notre article est de rechercher les déterminants des décisions d’investissement des exploitants agricoles français en présence d’imperfections du marché du capital. Les contraintes d’accès au marché du crédit qui semblent jouer un rôle croissant en France sont prises en compte en intégrant des coûts de transaction associés aux emprunts et en définissant un plafond d’endettement. L’introduction de ces imperfections conduit à la simultanéité entre les décisions financières et les décisions d’investissement de l’exploitation. Un des résultats du modèle est de montrer que, pour comprendre les variations du taux d’investissement, il est nécessaire de différencier les exploitations ayant contracté des emprunts sur deux années successives. Le modèle est estimé sur données de panel en utilisant la méthode des moments généralisés. Le modèle n’est pas rejeté par les données pour le sous-échantillon des exploitations où le chef d’exploitation a une formation générale, le sous-échantillon des grandes exploitations.
EN :
This article looks for the determinants of the investment decisions for French farmers in presence of imperfections of the capital market. The access constraints to the credit market which seems to play a growing role in France are taken into account by integrating transaction costs associated with borrowings and by defining restrictions on credit. One result of the model is that it is necessary to differentiate farms according to their borrowing behaviour to understand the variations of the rate of investment. This model has been tested and estimated with french farm level panel data using Generalised Method of Moments. The results indicate that the model using the perfect capital market assumption is rejected. In contrast, the equations using the sample selection rule from the theoretical model are not rejected for big farms and for farms which are conducted by farm operators who have a high general education level.
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Électricité en Afrique et performance productive : une évaluation par les frontières
Lucile Hofman et Patrick Plane
p. 385–408
RésuméFR :
Au milieu des années quatre-vingt, les sociétés africaines d’électricité se sont engagées dans des programmes de réforme ayant pour objet d’améliorer leur efficience productive. Douze de ces réseaux sont étudiés dans cet article. Des frontières de production paramétriques sont d’abord estimées sur données de panel. La société ivoirienne, dont la privatisation a été effectuée en 1990, révèle que cette réforme institutionnelle a aidé à accroître la performance productive tandis que le même résultat a été difficile à obtenir lorsque l’opérateur est resté totalement public.
Une analyse plus détaillée du cas ivoirien est ensuite réalisée en considérant des frontières de type DEA. Des indices de Malmquist non paramétriques sont calculés. Ils prennent en compte les dimensions économiques et sociales de l’activité du service public. L’output multiple est notamment mesuré par l’électricité produite (kWh) et le nombre de consommateurs. Une diminution de la productivité totale des facteurs (PTF) est mise en évidence, dont l’effet est principalement imputé au mouvement de l’efficience technique. On conclut sur le rôle potentiel de la régulation publique pour faciliter la compatibilité entre l’accès au service universel et l’objectif de profit.
EN :
In the mid 1980's, African electric companies embarked on reform programmes, intending to improve their productive efficiency. Twelve of these networks are studied in this paper. At fïrst, parametric production frontier models are estimated on panel data. The Ivorian company, the management of which was privatised in 1990, reveals that this institutional reform helped to increase the productive performance while the same result proved to be difficult to reach where the operator remained fully government-owned.
A more detailed analysis of the Ivorian case is then implemented by considering DEA frontiers. Non parametric Malmquist indices are calculated taking into account the economic as well as the social dimension of a public utility. The multi-output is measured by the electricity produced (kWh) and the number of consumers. A decrease in the Total Factor Productivity (TFP) is highlighted, that mainly results from the movement of the technical efficiency. We conclude on the potential role of the public regulation for the compatibility of the universal access to the service and the profit objective.
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Évaluation de l’efficience budgétaire des CLSC au Québec à partir de la méthode DEA
Pierre-Yves Crémieux, Denis Gadbois, Brigitte Jaumard, Pierre Ouellette et Tsévi Vovor
p. 409–424
RésuméFR :
Dans cet article, nous présentons les résultats d’une analyse de l’efficience des CLSC à l’aide de la méthode DEA. Ces résultats confirment ceux obtenus avec l’approche économétrique publiés dans un précédent article : (1) les CLSC jouissent de forts rendements d’échelle et des économies de diversification pourraient être réalisées en augmentant la taille et l’éventail des services offerts; (2) les CLSC sont surcapitalisés en bâtiments, en équipement et en médecins; et (3) des économies substantielles de l’ordre de 36 millions de dollars auraient pu être réalisées en modifiant la gestion des 39 CLSC étudiés sans réduire le niveau de soins à la population.
EN :
In this paper, we present the results of an analysis of Québec local health care clinics (CLSC) based on a DEA method. Our results confirm previous results based on econometric methods: (1) increasing returns to scale and scope economies imply that average cost could be lowered through increased scale and scope of the outputs; (2) there is a strong over capitalisation in buildings, equipments and physicians; and (3) substantial cost savings (around 36 millions) could result from improved management.
L’économique en perspective
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Le pass-through du taux de change : un survol de la littérature
David R. Sabiston
p. 425–454
RésuméFR :
À la suite de la disparition du système de Bretton Woods, le taux de change flottant n’a pas joué son rôle prévu d’équilibrage; les balances commerciales des principales nations impliquées dans le commerce n’ont tout simplement pas répondu, selon les attentes, aux appréciations et dépréciations de la monnaie. La piètre valeur prophétique des modèles traditionnels de l’élasticité du taux de change a renouvelé l’intérêt dans le lien théorique entre les taux de change et les prix des biens commerciaux. Cet article présente une étude critique de la nouvelle documentation théorique et empirique portant sur le pass-through du taux de change dans le but de donner une ligne directrice aux recherches ultérieures.
EN :
Following the demise of the Bretton Woods system, the poor predictive value of traditional elasticity models of exchange rates rekindled interest in the theoretical relationship between exchange rates and prices of internationally traded goods. This paper provides a critical survey of the emerging theoretical and empirical literature in exchange rate pass-through with the objective of offering guidance for future research.
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Analyse comparative de la visibilité des articles en économie industrielle : 1991-1998
Jean Mirucki
p. 455–469
RésuméFR :
Cette étude empirique évalue l’importance relative des articles en économie industrielle publiés dans les principales revues scientifiques généralistes ou spécialisées, autant anglophones que francophones, en utilisant le nouveau système de classification du J.E.L. de 1991. Les contributions sont examinées à l’intérieur de deux périodes récentes, 1991-1994 et 1995-1998, et regroupées suivant le type d’article : analyse théorique (L100- L390); politique industrielle (L400-L590); études sectorielles (L600-L990). Un indice de progression vers la spécialisation (IPS) permettrait d’observer l’évolution de la politique éditoriale en rapport avec le thème traité, alors qu’un taux de référence multiple (TRM) révèle les caractéristiques spécifiques aux revues en fonction du type d’article publié.
EN :
This empirical study evaluates the relative importance of articles in industrial organization published in major general or specialized scientific journals, either English or French, using the new 1991 J.E.L. classification system. Contributions are examined within two recent periods, 1991-1994 and 1995-1998, and regrouped according to the type of article : theoretical (L100-L390); industrial policy (L400-L590); industry studies (L600-L990). A specialization progress indicator (IPS) may show the evolution of the editorial policy in relation with the treatment of the subject, while a rate of multiple reference (TRM) reveals the specific characteristics of the journals with respect to the type of article being published.