Volume 86, numéro 3, septembre 2010
Sommaire (4 articles)
Articles
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Y a-t-il plus de pauvreté au Québec qu’au Canada?
Sami Bibi et Jean-Yves Duclos
p. 277–318
RésuméFR :
Nous analysons l’évolution de la pauvreté au Québec et au Canada de 1996 à 2005 ainsi que les effets des principaux impôts et transferts aux particuliers sur cette pauvreté. Cette analyse complète les évaluations habituelles de la pauvreté faites par Statistique Canada, l’Institut de la statistique du Québec et le ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale du Québec. Des tests de robustesse sont effectués pour traiter du problème important du choix du seuil et de l’indice de pauvreté. Les résultats montrent que le classement des provinces canadiennes en termes de pauvreté absolue et relative dépend du seuil et de l’indice de pauvreté retenus. Nos méthodes préférées d’évaluation et de comparaison de la pauvreté indiquent que le Québec n’affiche en général pas plus de pauvreté absolue ou relative que les autres provinces, et que la pauvreté au Québec est statistiquement et robustement inférieure à celle de la Colombie-Britannique, de l’Ontario et du reste du Canada.
EN :
We analyze the evolution of poverty in Quebec and in Canada from 1996 to 2005 and the effects of major elements of the personal tax and transfer system on poverty. This analysis complements the usual estimates of poverty made by Statistics Canada, l’Institut de la Statistique du Québec and the ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale. Robustness tests are conducted to address the important problem of the choice of the poverty line and of the poverty index. The results show that the ranking of provinces in terms of absolute and relative poverty depends on both the line and the index chosen. Our preferred methods of evaluation and comparison of poverty indicate that Quebec does not usually show more absolute and relative poverty than other provinces, and that poverty in Quebec is robustly and statistically lower than in British Columbia, Ontario and the rest of Canada.
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Pourquoi les enfants africains quittent-ils l’école? Un modèle hiérarchique multinomial des abandons dans l’éducation primaire au Sénégal
Abdoulaye Diagne
p. 319–354
RésuméFR :
Dans cet article nous analysons les abandons dans l’éducation primaire au Sénégal à l’aide de modèles hiérarchiques généralisés en utilisant des données issues d’une enquête longitudinale de 1996 à 2001 et d’une enquête rétrospective de 2003 sur les ménages des mêmes élèves. Les résultats font apparaître la plus forte exposition au risque de décrochage scolaire des élèves issus de groupes exerçant certaines activités professionnelles. Les résultats confirment aussi que les filles sont plus victimes de l’abandon scolaire que les garçons. L’existence dans la famille d’enfants fréquentant le collège ou le lycée exerce un effet favorable sur la rétention des élèves à l’école. Les autres résultats confirment l’influence positive de la disponibilité des livres sur la rétention des élèves et l’effet négatif qu’exerce un niveau d’échec scolaire élevé ou la rareté de l’offre éducative dans la communauté. Enfin, les abandons précoces frappent davantage les filles que les garçons, mais l’existence d’une proportion importante de filles dans la première année d’études réduit la probabilité d’abandonner. Les politiques éducatives disposent ainsi de nombreux leviers pour réduire fortement les décrochages scolaires.
EN :
In this paper, we develop and estimate generalized hierarchical models of dropping out in Senegalese primary education using individual level data for an entire cohort of children 1996 to 2001 and a 2003 retrospective survey in the households of the same cohort of pupils. The model’s estimates imply that children of households belonging to some socio professional groups are more exposed to dropping out. The results confirm also that probability for girls to leave school is higher than that of boys. The presence in the household of youths attending secondary school has a positive impact on the retention of children in primary school. Others results are the positive influence of book availability and the negative impact of rare education supply in the community. Girls have a higher probability to be an early leaver but a high proportion of girls in the first primary school year reduces this probability.
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Prix des actifs et politique monétaire : enjeux et perspectives après la crise financière de 2007-2009
Entela Myftari et Sergio Rossi
p. 355–383
RésuméFR :
La crise financière de 2007-2009 a remis en question le comportement que doit adopter la banque centrale pour limiter les fluctuations des prix des actifs, qui exercent des effets aussi bien sur les activités de production que sur l’économie dans son ensemble. Malgré la multitude des analyses, aucun consensus n’a encore été trouvé à ce jour sur l’attitude que doit adopter l’autorité monétaire pour influencer ces phénomènes et assurer la stabilité macroéconomique. Cela s’explique entre autres par la complexité du sujet traité ainsi que par l’importance des anticipations et des interactions des acteurs sur les marchés financiers en ce qui concerne l’évolution des prix des actifs.
Cet article propose une analyse des instruments et de la stratégie de politique monétaire qu’une banque centrale doit mettre en oeuvre pour atteindre ses objectifs. Dans une situation inflationniste, l’autorité monétaire doit intervenir dans la sphère financière afin de limiter les effets négatifs d’une augmentation marquée des prix des actifs réels ou financiers. Notre analyse porte plus particulièrement sur les avantages et les inconvénients de deux propositions. La première préconise la mise en oeuvre d’une politique monétaire préventive et restrictive face aux évolutions boursières. Elle se caractérise par une concrétisation facile et présente un avantage majeur en ce qu’elle contribue à limiter l’optimisme des intervenants sur les marchés financiers. Néanmoins, cette politique peut être désapprouvée au vu de ses répercussions sur l’ensemble de l’économie réelle, en particulier sur la production et l’emploi. Sur ce point, la seconde proposition, qui consiste en l’obligation faite à tout intermédiaire financier de détenir à la banque centrale des réserves suffisantes en fonction de ses propres actifs, présente un avantage, mais tout au plus théorique. Cette proposition se heurte en effet à des difficultés pratiques, notamment à la nécessité d’instaurer un important système de contrôle juridique et administratif.
EN :
The 2007-2009 financial crisis has raised again the question about the policy stance central banks ought to adopt in order to limit fluctuations in asset prices, which affect production activities and the economy as a whole. Despite the relevant number of analyses, no consensus has been reached yet on the attitude a central bank has to adopt to influence these phenomena and thus contribute to macroeconomic stability. This does not come as a surprise, considering both the complexity of the subject matter and the importance of agents’ expectations and interactions with regard to asset price evolution on financial markets.
This article proposes an analysis of the monetary policy strategy and instruments that central banks have to put into practice in order to attain their goals. In an inflationary environment, monetary authorities ought to intervene in the financial sphere to limit the negative effects of any important increase in the prices of real or financial assets. Our analysis focuses on the pros and cons of two propositions. The first proposition suggests a preventive and restrictive monetary policy with respect to asset prices. It is characterised by an easy implementation and has a major advantage, because it contributes to limit agents’ optimism on financial markets. Nevertheless, such a policy can be inappropriate in light of its effects on the economic system as a whole, in particular as regards production and employment. In this respect, the second proposition, which consists in requiring from any financial intermediary that it has an amount of central bank reserves high enough with respect to its own assets, offers an advantage that is at best theoretical. This proposition raises in fact a number of practical issues, and notably the need to provide an important control system at the legal and administrative level.
L’économique en perspective
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Le financement des entreprises en démarrage et en croissance : le point de la situation
Jean-Marc Suret
p. 385–411
RésuméFR :
Le financement des entreprises en croissance demeure un problème très important qui, dans de nombreux pays, dont le Canada, met en jeu des politiques publiques multiples et des montants considérables. Les résultats des efforts des pouvoirs publics ne semblent cependant pas toujours être à la hauteur des attentes. En avril 2010, un symposium sur la finance entrepreneuriale et le capital de risque a rassemblé, à Montréal, 60 experts venus de 18 pays. Nous résumons ici les présentations, discussions et propositions faites lors de cette activité. Nous avons choisi trois dimensions particulièrement importantes du point de vue des politiques publiques au Canada. La rentabilité de l’industrie du placement privé et du capital de risque est faible et les investisseurs institutionnels en ont pris conscience. Les émissions initiales sont en forte diminution, ce qui limite les possibilités de sortie très profitable du capital de risque. La conception et l’implantation de politiques publiques en faveur du capital de risque sont difficiles.
EN :
In several countries including Canada, public policies related to the financing of emerging companies involve numerous programs and large amounts of money. Major problems remain in this area, and government efforts are not always successful. In April 2010, a symposium entitled “Entrepreneurial finance and Venture capital” was organized in Montréal, drawing about 60 researchers from 18 countries. We summarize several presentations, keynote addresses and panel session discussions. We select the most relevant work from the point of view of Canadian public policies about small business finance. Three important conclusions emerged. First, the rate of return of private equity and venture capital is low; institutional investors are now reluctant to invest in this asset class. Second, the increasing rarity of IPOs (initial public offering) is likely to limit the more profitable exits in the venture capital industry. Third, conceiving and implementing public policy that favours small business finance is a challenging task.