Corps de l’article
Depuis l’année 2003, les éditions Athéna publient l’annuaire Guide du maintien de la paix, un ouvrage qui trace le portrait des opérations de paix réalisées par les différentes organisations internationales. Au long de ces onze éditions, le Guide a préservé sa structure bien réussie qui est divisée en deux parties. La première partie est un ouvrage collectif qui regroupe sept chapitres à propos d’un thème pertinent pour les opérations de paix à l’année de référence du Guide. La deuxième partie compose une base de données sur toutes les opérations de l’année en question.
Les deux premiers chapitres du Guide sont consacrés à deux sujets importants de la mission des Nations Unies en République démocratique du Congo (rdc) – la monusco (Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo), la plus vaste et coûteuse opération de l’histoire de l’onu. Après de successifs échecs des missions de l’onu en rdc au cours des 15 dernières années, le Conseil de sécurité a approuvé l’emploi d’une brigade d’intervention qui opère depuis juin 2013. Cette brigade étant dotée d’un armement robuste pour faire face aux groupes armés de la région et de drones de surveillance pour détecter le trafic illégal d’armes et les déplacements des groupes armés, sa mise en place constitue une mesure audacieuse. Les chapitres initiaux du Guide abordent, respectivement, les enjeux de cette monusco renforcée et les défis associés à l’utilisation des drones de surveillance. La monusco plus robuste et ayant recours aux drones constitue une mesure polémique et qui risque de menacer l’impartialité des Casques bleus en rdc.
Le troisième chapitre du Guide décrit les problèmes de l’« architecture internationale » de paix et de sécurité à la lumière du conflit au Mali. Il met en évidence les tensions entre les acteurs internationaux qui ont géré la situation au Mali, notamment entre les pays et les organisations régionales de l’Afrique et l’onu. Le manque de coordination et de consensus entre ces acteurs a causé un retard de plus d’un an pour mettre en place au Mali une opération avec de dispositifs sécuritaires capables de stabiliser le pays.
Sortant des missions en Afrique, le texte suivant du Guide fait une analyse du processus de state-building (reconstruction de l’État) mis en place par l’onu à Haïti à la suite du séisme qui a secoué le pays en 2010. À partir des leçons tirées des missions de reconstruction du Timor oriental et du Kosovo, le chapitre propose quelques pistes de réflexion pour Haïti afin de privilégier le développement économique et social durable du pays. Cela évitera la création d’un lien continu de dépendance locale à l’égard de la mission, permettant au pays de réduire son besoin d’aide internationale sans tomber dans une nouvelle crise.
Le cinquième chapitre du Guide est consacré à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (finul). Créée en 1978 pour préserver la stabilité au sud du Liban, la finul a vu son mandat renforcé en 2006. Cependant, surtout en raison de l’impuissance de l’armée libanaise et de la prépondérance des forces armées du Hezbollah dans la région, la finul se trouve limitée à un rôle secondaire, celui d’essayer de diminuer les tensions locales.
La première partie du Guide se termine par deux textes consacrés aux opérations de maintien de la paix de l’Union européenne. Le premier de ces textes expose l’évolution des dix ans d’opérations de maintien de la paix de l’Union européenne (2003 à 2013). Malgré les disparités d’intérêts et de capacités parmi les membres de l’Union quant à leur participation aux opérations de paix et la lourdeur du processus décisionnel pour créer les opérations, le bilan des dix ans reste positif. Durant cette période, l’Union a mené 34 interventions, y compris la Mission de surveillance en Géorgie (msue), objet du dernier chapitre du Guide. En tant que mission civile d’observation, la msue a un pouvoir très limité. Les entités indépendantistes en Géorgie refusent l’accès à la mission européenne, car ils la considèrent comme étant pro-Géorgie et non pas impartiale. Dans ce contexte, le rôle de la msue se résume à entraver la reprise des hostilités et à encourager la coopération entre les parties au conflit.
La deuxième partie du Guide décrit d’abord la chronologie bien détaillée des opérations du maintien de la paix du 1er septembre 2012 au 31 août 2013. Divisée par organisations internationales, cette chronologie expose les principaux faits survenus ou liés à chaque opération de paix en vigueur au moins pendant une partie des 12 mois en question. Cette riche base de données est complétée par 24 tableaux statistiques qui recouvrent diverses questions sur les opérations de paix : le budget de chaque opération, la quantité du personnel employé selon sa catégorie, les pertes en vies humaines, la contribution par pays en ce qui concerne le personnel et le budget des opérations, etc.
Seul annuaire francophone consacré aux opérations de paix, le Guide présente un riche contenu grâce à sa structure. L’ouvrage combine une présentation assez détaillée de chaque opération de paix avec l’étude de thématiques mises en évidence lors de l’édition de l’ouvrage. Cette fusion entre la description de faits, la présentation de chiffres et la réflexion sur de grands sujets de l’actualité fait du Guide un outil important, aussi bien pour les chercheurs que pour les praticiens des opérations du maintien de la paix.