Journal of the Canadian Historical Association
Revue de la Société historique du Canada
Volume 23, numéro 2, 2012
Sommaire (10 articles)
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History, Interactive Technology and Pedagogy: Past Successes and Future Directions
Stephen Brier
p. 1–20
RésuméEN :
Based on a keynote presentation at the 2012 Canadian Historical Association conference, this paper surveys the state of digital technology and its impact on academic publication and teaching in the contemporary university. Focusing on the dramatic rise of the Digital Humanities in the last few years, the paper examines alternative forms of peer review, academic scholarship and publication, and classroom teaching as they have been reshaped by the adoption of a variety of digital technologies and formats, including open-access, online peer reviewing, use of databases and visualization techniques in humanities work, online journal publication, and the use of blogs and wikis as teaching tools. Examining the digital production and education work of the American Social History Project at CUNY, which he co-founded, and the Interactive Technology and Pedagogy doctoral certificate program that he heads at the CUNY Graduate Center, the author discusses a range of digital projects and approaches designed to improve the quality of teaching and learning in college classrooms.
FR :
Tiré du discours liminaire présenté à la Réunion annuelle de la Société historique du Canada en 2012, cet article présente un aperçu de l’état de la technologie numérique et de son influence sur la publication et l’enseignement dans le monde universitaire contemporain. S’intéressant plus particulièrement au développement fulgurant des sciences humaines numériques au cours des dernières années, cet article analyse l’impact de l’adoption d’une panoplie de technologies numériques (incluant le libre accès, l’évaluation par les pairs en ligne, l’utilisation de bases de données et d’imagerie mentale en sciences humaines, la multiplication des revues électroniques ainsi que l’utilisation des blogues et wikis comme outils pédagogiques) sur l’évaluation par les pairs, sur la recherche scientifique et la publication universitaire, ainsi que sur l’enseignement. Étudiant la production numérique et les travaux de l’American Social History Project de CUNY, qu’il a participé à créer, et le programme doctoral en Interactive Technology and Pedagogy, qu’il a dirigé à la faculté des études supérieures de CUNY, l’auteur discute de divers projets de numérisation et de différentes approches conçus pour améliorer la qualité de l’enseignement dans les salles de cours collégiales et universitaires.
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Mining the ‘Internet Graveyard’: Rethinking the Historians’ Toolkit
Ian Milligan
p. 21–64
RésuméEN :
“Mining the Internet Graveyard” argues that the advent of massive quantity of born-digital historical sources necessitates a rethinking of the historians’ toolkit. The contours of a third wave of computational history are outlined, a trend marked by ever-increasing amounts of digitized information (especially web based), falling digital storage costs, a move to the cloud, and a corresponding increase in computational power to process these sources. Following this, the article uses a case study of an early born-digital archive at Library and Archives Canada – Canada’s Digital Collections project (CDC) – to bring some of these problems into view. An array of off-the-shelf data analysis solutions, coupled with code written in Mathematica, helps us bring context and retrieve information from a digital collection on a previously inaccessible scale. The article concludes with an illustration of the various computational tools available, as well as a call for greater digital literacy in history curricula and professional development.
FR :
Dans cet article, l’auteur soutient que la production d’une grande quantité de sources historiques numériques nécessite une réévaluation du coffre à outils des historiennes et des historiens. Une troisième vague d’histoire informatique, marquée par un nombre toujours croissant d’informations numérisées (surtout dans le cadre d’Internet), la chute des coûts d’entreposage des données numériques, le développement des nuages informatiques et l’augmentation parallèle de la capacité d’utiliser ces sources, bouleverse déjà la pratique historienne. Cet article se veut une étude de cas basée sur ces observations. Il étudie plus particulièrement un projet de numérisation de Bibliothèque et Archives Canada — les Collections numérisées du Canada — pour éclairer certains défis ci-haut mentionnés. Un ensemble de solutions prêtes à utiliser pour l’analyse de données, jumelé avec un code informatique écrit en Mathematica, peut contribuer à retracer le contexte et à retrouver des informations à partir d’une collection numérique précédemment inaccessible aux chercheurs étant donné sa taille. L’article se termine par une présentation des différents outils informatiques accessibles aux historiens ainsi que par un appel à l’acquisition d’une plus grande culture numérique dans les curriculums en histoire et dans le développement professionnel des historiens.
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Madness in the Archives: Anonymity, Ethics, and Mental Health History Research
David Wright et Renée Saucier
p. 65–90
RésuméEN :
Historians have long been vexed by the challenges of using patient records as primary sources. Lurking behind the many methodological and interpretative challenges are ethical questions involving the status and identity of the dead patient. What rights do the deceased maintain over their medical records? What ethical obligations do researchers have in analyzing these historical records and, in particular, to preserving the anonymity of patients? Do professional duties diminish the further back one goes in time? Do patients suffering from mental distress differ from other “medical” patients in the ethical regard owed to them? Now that we know about the care of the mentally ill outside of formal institutions during the era of the asylum, is there something intrinsically different about the status of individuals once they entered formal institutions? Or do the designations of “lunacy” or “idiocy” on extramural death certificates or in census enumerators’ schedules oblige a similar professional discretion? Is the concern over confidentiality giving way to a new emphasis on returning names (and agency) to vulnerable groups in the past? This paper explores these questions, ones that lie at the heart of what we do as historians of disability, medicine, and society.
FR :
Les historiens ont longtemps été contrariés par les défis que représente l’utilisation de dossiers médicaux comme sources historiques. Des questions éthiques concernant le statut et l’identité de patients décédés se profilent derrière de nombreuses questions méthodologiques et plusieurs problèmes d’interprétation. Quels droits ont les personnes décédées sur leur dossier médical? Quelles sont les obligations éthiques des chercheurs dans l’analyse de ces dossiers et, en particulier, leur devoir quant à la protection de l’anonymat des patients? Est-ce que les responsabilités des chercheurs diminuent à mesure qu’ils reculent dans le temps? Est-ce que les patients souffrant de troubles mentaux doivent être traités différemment par les chercheurs pour des raisons éthiques? Maintenant que les traitements offerts aux patients atteints de troubles mentaux à l’extérieur des asiles sont connus, est-ce qu’il y a une différence fondamentale entre le statut de ces patients et ceux qui sont institutionnalisés? Est-ce que la désignation de personnes comme étant « lunatiques » ou « idiotes » dans les certificats de décès ou les recensements demande une discrétion similaire? Est-ce que les préoccupations par rapport à la confidentialité sont en train de s’estomper face à l’importance de redonner aux personnes vulnérables leur individualité et de reconnaître leur agentivité? Cet article explore ces questions fondamentales pour les historiens de l’invalidité, de la médicine et de la société.
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Reflections on Asylum Archives and the Experience of Mental Illness in Paris
Patricia E. Prestwich
p. 91–110
RésuméEN :
This article is a personal reflection on the challenges and rewards of doing research on the social history of mental illness and health. The author uses her experiences with the archives of a Parisian psychiatric hospital to discuss some ways of dealing with an overwhelming mass of archival material and the inevitable frustrations and silences that result from trying to do history from the patient’s point of view. The importance of such archival research on mental illness is discussed within the context of a long history of French efforts to provide health care for “citizen-patients.” The article argues that such archives not only provide a wealth of material on the history of illness but that they offer important perspectives on other political and social issues, including the development of the welfare state, the maintenance of public order, and the varied experiences of citizenship.
FR :
Cet article se veut une réflexion personnelle sur les défis et les plaisirs de faire de la recherche en histoire sociale de la santé et de la maladie mentale. Faisant appel à son expérience dans les archives d’un hôpital psychiatrique parisien, l’auteure discute de différentes méthodes disponibles pour étudier une énorme masse de matériel archivistique ainsi que pour aborder les frustrations et les silences rencontrés par les historiens lorsqu’ils tentent d’étudier l’histoire selon le point de vue des patients. L’importance de la recherche en archives portant sur la santé mentale est abordée dans le contexte de la longue histoire des efforts français pour prodiguer des soins aux « patients-citoyens ». L’auteure soutient que ces archives donnent aux historiens non seulement une grande quantité de matériel pour étudier l’histoire de la santé, mais offrent aussi de nouvelles perspectives pour comprendre des enjeux politiques et sociaux, incluant le développement de l’État-providence, le maintien de l’ordre public ainsi qu’une variété d’expériences de la citoyenneté.
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Pain in Medieval and Modern Contexts
Donna Trembinski
p. 111–141
RésuméEN :
Intellectual historians of the High Middle Ages have generally argued that scholastic medicine had little influence on the study of theology in medieval universities, especially in the thirteenth century. Yet three chairs of theology at the University of Paris in the early 1200s had previous careers as physicians. Their extant work suggests that they did turn to their medical roots to explicate theological problems, sometimes rarely, as in the work of Guerric of St. Quentin, but sometimes more often as in the work of Roland of Cremona. Indeed Roland’s work on human and divine emotions, including his discussions of sadness and pain, demonstrates that Roland was dedicated to integrating his medical learning into his theological arguments and to ensuring that the positions of his medical training were in agreement with the theological arguments he made. A short conclusion suggests historiographical reasons for why the medical influence on early Parisian theological treatises has generally been overlooked, pointing to the separate nature of study of mind and body that has occurred since the rise of Cartesian dualism in the seventeenth century.
FR :
Les historiens intellectuels du Moyen Âge ont généralement soutenu que la médecine a eu peu d’influence sur l’étude de la théologie dans les universités médiévales, surtout au treizième siècle. Pourtant, trois professeurs de théologie à l’Université de Paris au début du treizième siècle avaient initialement pratiqué la médecine. Leurs travaux suggèrent qu’ils se sont servis de leur expérience médicale pour expliquer des problèmes théologiques. Certains l’ont fait plus rarement, pensons à Guerric de Saint-Quentin, alors que d’autres l’ont fait plus souvent, pensons à Roland de Crémone. Les travaux de ce dernier portant sur les émotions divines et humaines, incluant ses réflexions sur la peine et la douleur, démontrent la volonté de l’auteur de lier ses connaissances médicales et ses arguments théologiques. L’article s’intéresse aussi aux raisons qui expliquent que l’influence de la médecine sur les théologiens parisiens médiévaux n’ait pas été étudiée par les historiens. L’auteure explore alors la séparation qui s’est opérée entre l’étude de l’esprit et celle du corps lors de l’avènement de la pensée cartésienne au dix-septième siècle.
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In the Borderlands of Periodization with “The blythnes that hes bein”: The medieval / early modern boundary in Scottish history
Mairi Cowan
p. 142–175
RésuméEN :
The conventional placement of the boundary between “medieval” and “early modern” periods in Scottish history has obscured our understanding of certain developments in fifteenth- and sixteenth-century Scotland. This paper proposes a reconsideration of periodization so that the fifteenth and sixteenth centuries be examined against the backdrop of early modern (rather than medieval) historical scholarship, and not only in the context of Europe but also in the more expansive field of Atlantic history. With such a shift in periodical alignment, several features become more apparent including a change to religious culture in connection with the Catholic Reformation, an increase in social discipline that helped shape the Protestant Reformation, and early participation in the Atlantic slave trade.
FR :
La séparation traditionnelle entre le Moyen Âge et les Temps modernes dans l’historiographie écossaise a nui à notre compréhension de certains développements qui se sont produits en Écosse aux quinzième et seizième siècles. Cet article propose de revisiter cette périodisation. Il suggère d’étudier les quinzième et seizième siècles écossais dans le cadre de l’époque moderne (plutôt que médiévale) ainsi que dans le contexte de l’histoire atlantique, un champ d’étude très dynamique, plutôt que dans le seul cadre européen. En opérant un tel changement dans la périodisation, plusieurs caractéristiques deviennent plus apparentes, incluant une transformation dans la culture religieuse en lien avec la Réforme catholique, une augmentation de la discipline sociale qui a aidé à façonner la Réforme protestante ainsi qu’une participation précoce des Écossais à la traite des esclaves dans le monde atlantique.
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Icons in Motion: Sacred Aura and Religious Identity in Late Tsarist Russia
Chris J. Chulos
p. 176–211
RésuméEN :
Throughout Russian Orthodox history the icon has been an important part of the visual and emotional experience of the faithful. Icons that exhibited wondrous powers inspired pilgrimages to their shrines and requests for temporary visitations to local communities hoping that this mobile sacred aura would protect against epidemics or crop failure. As Russia’s autocracy began the long process of modernization in the 1860s and 1870s, loans of wondrous icons became increasingly commonplace as newly literate peasants read about these sacred images in the emerging religious and secular press. Faced with the untested medical and agricultural practices that were being brought to the countryside by educated outsiders, peasant believers supplemented these new techniques with processions honoring wondrous icons. In this way wondrous icons served as important bridges between traditional and modern life as they provided spiritual, physical, and psychological comfort to believers in an uncertain and changing world. For communities whose visitation requests were denied and for believers who wanted their own personal reminder of sacred aura, mass icon reproduction filled this need as millions of copies were manufactured and distributed for free or at negligible cost. The rise in requests for icon visitations and the proliferation of cheaply produced sacred images troubled Church authorities who, facing growing criticism from secular and revolutionary activists and the new religious toleration law of 1905, struggled to bring these popular forms of folk piety within the institutional and bureaucratic structure of Orthodoxy without dampening religious fervor. As spiritual essence emanated from shrines to local communities of believers through visitations and reproductions believers were reminded of the fundamental cultural fragments that bound them together as members of the same faith and as inheritors and creators of modern Orthodox experience as Russia became increasingly modern, secular, and revolutionary.
FR :
Les icônes ont constitué une partie importante de l’expérience visuelle et émotive de la foi orthodoxe russe. Les icônes réputées avoir des pouvoirs extraordinaires inspiraient des pèlerinages aux sanctuaires les possédant. Parallèlement, des communautés locales tentaient de les faire venir temporairement dans leur village dans l’espoir que l’aura sacré dégagé par ces icônes les protégerait des épidémies et des mauvaises récoltes. Alors que la Russie autocratique commençait à se moderniser dans les années 1860 et 1870, le prêt de ces icônes est devenu de plus en plus commun. Les demandes affluaient de plus en plus au fur et à mesure que les paysans alphabétisés lisaient à propos de ces images sacrées dans la presse religieuse et séculière. Les paysans croyants juxtaposaient les processions honorant les icônes merveilleuses aux nouvelles pratiques médicales et agricoles, encore non testées, apportées dans les campagnes par des spécialistes de l’extérieur. À leur façon, ces images saintes ont servi de pont entre la vie traditionnelle et la vie moderne en donnant un réconfort psychologique, physique et spirituel aux croyants dans un monde en constante mutation. La reproduction et la distribution de millions de copies de ces icônes à peu de frais répondaient au désir des croyants de posséder un objet rappelant l’aura sacré des icônes. L’augmentation des requêtes pour la visite des icônes et la prolifération d’images sacrées bon marché ont troublé les autorités ecclésiastiques. Ces dernières ont tenté d’intégrer ces formes de piété populaire dans le cadre des structures bureaucratiques et institutionnelles de l’Église orthodoxe, sans amenuiser la ferveur populaire. Cette intégration s’est faite alors que les activistes révolutionnaires et laïques critiquaient de plus en plus l’Église dans le cadre de la tolérance religieuse acquise en 1905. Comme l’essence spirituelle émanant des sanctuaires se trouvaient transportée dans les communautés locales visitées par les icônes ou par leurs reproductions, les croyants se voyaient rappeler l’importance de ces fragments culturels qui unissaient les membres d’une même foi, les fondateurs et les héritiers de l’expérience orthodoxe russe moderne alors que la Russie devenait de plus en plus moderne, laïque et révolutionnaire.
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“Buried Alive”: Experience, Memory, and the Interwar Publishing of the Egyptian Expeditionary Force in Postwar Britain, 1915-1939
Justin Fantauzzo
p. 212–250
RésuméEN :
Over 450,000 British soldiers fought as part of the Egyptian Expeditionary Force during the First World War. Between 1915-1918, they fought their way across the Sinai Peninsula, into southern Palestine, captured Jerusalem, and overran the Turkish Army, leading to the surrender of the Ottoman Empire in October 1918. Despite being the war’s most successful sideshow, the Egypt and Palestine campaign struggled to gain popular attention and has largely been excluded from First World War scholarship. This article argues that returning soldiers used war books to rehabilitate the campaign’s public profile and to renegotiate the meaning of wartime service in interwar Britain. The result of sporadic press attention and censorship during the war, the British public’s understanding of the campaign was poor. Periodic access to home front news meant that most soldiers likely learnt of their absence from Britain’s war narrative during the war years. Confronting the belief that the campaign, prior to the capture of Jerusalem, was an inactive theatre of war, British soldiers refashioned themselves as military labourers, paving the road to Jerusalem and building the British war machine. As offensive action intensified, soldiers could look to the past to provide meaning to the present. Allusions to the campaign as a crusade were frequently made and used to compete with the moral righteousness of the liberation of Belgium.
FR :
Plus de 450 000 soldats britanniques ont participé à la force expéditionnaire égyptienne durant la Première Guerre mondiale. Entre 1915 et 1918, ils ont combattu dans la péninsule du Sinaï, puis envahi le sud de la Palestine, conquis Jérusalem et défait l’armée turque, ce qui a mené à la reddition de l’Empire ottoman en octobre 1918. Malgré les nombreuses victoires remportées par les soldats britanniques, les campagnes d’Égypte et de Palestine n’ont pas marqué l’imagination populaire en Grande-Bretagne, pas plus qu’elles n’ont retenu l’attention des historiens de la Grande Guerre. L’attention sporadique que ces campagnes ont obtenue durant la guerre ainsi que la censure expliquent le peu de connaissances des Britanniques par rapport à ces campagnes. De plus, les nouvelles du front européen étant omniprésentes durant la guerre, les exploits des soldats en Égypte et en Palestine sont passés inaperçus en Grande-Bretagne. Cet article soutient que les soldats ayant participé à ces campagnes ont utilisé des livres de guerre pour réhabiliter l’image publique de ces campagnes et pour renégocier la signification du service militaire dans la Grande-Bretagne de l’entre-deux-guerres. Devant lutter contre la croyance populaire voulant que la campagne égyptienne n’avait guère été active avant la conquête de Jérusalem, les soldats britanniques se sont dépeints comme des travailleurs militaires ayant pavé la voie vers Jérusalem et construit la machine de guerre britannique. L’augmentation du nombre d’offensives militaires leur a permis d’utiliser le passé pour donner un sens au présent. La campagne a souvent été présentée comme une croisade dont la valeur morale se comparait à celle ayant justifié la campagne de libération de la Belgique.
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The Unlikely Barrèsian Inheritance of Albert Camus
Christopher Churchill
p. 251–297
RésuméEN :
This essay examines the considerable intellectual debt left-wing Albert Camus owed to one of the most unlikely of sources: far-right intellectual Maurice Barrès. Before achieving fame in France as an existential writer, he developed as a settler intellectual in colonial Algeria. The far-right exerted a profound influence on settler intellectual communities in Algeria. Many of Camus’s colleagues and friends were deeply inspired by Barrès. He was as well. Examining Camus’s complex intellectual debts to Barrès requires both a contextualization of his development as an intellectual in both Algeria and France, as well as a textual analysis of what he indeed assimilated from this icon of the far right. Camus’s attempts to wed Barrèssian fantasies of collective solidarization to his liberal political commitments risked leaving him at an impasse; however, wedding these sometimes conflicting approaches also allowed for a much broader engagement with his texts from a variety of political positions. As he confided to his mentor Jean Grenier: “I like my ideas on the left and my men on the right.”
FR :
Cet article étudie la dette de l’intellectuel de gauche Albert Camus à l’intellectuel de droite Maurice Barrès. Avant de connaître la célébrité en France à titre d’écrivain existentialiste, Camus s’est développé comme intellectuel en Algérie. L’extrême-droite a exercé une profonde influence sur les communautés intellectuelles dans l’Algérie coloniale. Plusieurs amis et collègues de Camus ont été profondément influencés par Barrès, tout comme Camus lui-même d’ailleurs. Étudier la dette intellectuelle de Camus à Barrès demande à la fois de remettre le développement intellectuel de celui-ci dans son contexte historique algérien et français et d’analyser les influences de l’icône de l’extrême-droite sur ses écrits. Les tentatives de Camus de marier les fantaisies de Barrès entourant la solidarisation collective à ses engagements politiques libéraux auraient pu le mener dans une impasse. Néanmoins, aborder simultanément ces approches parfois conflictuelles nous permet d’aborder ses écrits dans un cadre plus large, influencé par une variété de positions politiques. Comme Camus l’a lui-même confié à son mentor Jean Grenier: « J’aime les idées de gauche et les hommes de la droite ».
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Oxfam Aid to Canada’s First Nations, 1962–1975: Eating Lynx, Starving for Jobs, and Flying a Talking Bird
Dominique Marshall et Julia Sterparn
p. 298–343
RésuméEN :
The first project financed by Oxfam Canada after its incorporation in 1962 was an emergency relief operation towards First Nations in Northern Manitoba, which made national headlines. A decade later, Oxfam Canada funded the floating plane of the Yukon Native Brotherhood, to foster communications between distant First Nations communities of the far north. The ship ended up carrying many of the aboriginal politicians who launched the modern round of reclamations for land claims and aboriginal rights. A close study of the actors and ideas at stake shows how the British-born NGO had to face the disapproval of provincial and federal authorities, and of churches traditionally responsible for Indian welfare, for the embarrassment it brought them. As the British and Canadian humanitarians considered the deeper economic, political and cultural stakes of aboriginal hardships, each step of their interventions called for decisions about the extent and the nature of their involvement in Canada’ Indian policy, the new kind of industrial relations brought to the North by large projects of exploitation of natural resources, and the unequal development of the universal welfare state for First Nations. In turn, these external demands revealed and shaped Oxfam’s very structure of governance, and its own internal debates between charity and justice, neutrality and support for movements of colonial liberation, and the often competing goals of large fundraising and education of the Euro-Canadan public about the global South.
FR :
Le premier projet financé par Oxfam Canada après son incorporation en 1962 a été une opération de secours auprès des Amérindiens du nord du Manitoba qui a fait la une des médias nationaux. Une décennie plus tard, Oxfam Canada a financé l’hydravion du Yukon Native Brotherhood qui devait permettre d’établir la communication entre les communautés autochtones isolées du Grand Nord. L’avion a fini par transporter plusieurs politiciens autochtones qui ont initié la première ronde moderne de revendications territoriales. Une étude des acteurs et des idées en jeu démontre comment l’organisation non-gouvernementale d’origine britannique a fait face à la désapprobation des autorités provinciales et fédérales ainsi que des Églises traditionnellement responsables du bien-être des Amérindiens, pour la mauvaise presse qu’elle leur a apportée. Au moment où les humanitaires britanniques et canadiens prenaient en compte les racines des enjeux économiques, politiques et culturels auxquels les Amérindiens étaient confrontés, chacune de leurs interventions soulevait les questions de leur engagement dans la politique autochtone canadienne, des nouvelles relations industrielles imposées par les grands projets d’exploitation des ressources naturelles ainsi que du développement inégal de l’État-providence pour les Premières Nations. Inversement, ces demandes ont à la fois mis en lumière et façonné la structure de gouvernance d’Oxfam, les discussions internes au sujet de la charité et de la justice, de la neutralité et du soutien aux mouvements de libération coloniale ainsi que les objectifs souvent contradictoires entre les levées de fonds de grande envergure et l’éducation du public euro-canadien au sujet de l’hémisphère sud.