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Dans ce volume, François-Michel Rigot, religieux et spécialiste de saint Maxime le Confesseur, propose une véritable synthèse retraçant l’origine de la tradition mariale.
La problématique formulée par F.-M. Rigot concerne en premier lieu l’incohérence entre les récits de l’enfance qui donnent une grande importance à Marie et le reste des Synoptiques, dont l’historicité est plus solide, qui n’en fait aucune mention. Elle concerne, en deuxième lieu, la manière dont la Tradition a été amenée à une telle confession de foi mariale. Cette contradiction est évoquée non dans un sens historique mais pour souligner la singularité de l’image de Marie et favoriser une meilleure intelligence de la foi. Les trois parties de cet ouvrage tentent d’élucider ce paradoxe.
La première partie est consacrée à un examen des sources synoptiques et des sources familiales. Le silence sur Marie est interprété comme un mystère lié au silence de Jésus sur sa mission messianique. De même, les récits de l’enfance montrent la part active, responsable et engagée de Marie dans le mystère de l’incarnation. L’auteur présente l’univers johannique comme enveloppé par Marie. L’auteur explore également les thèses allant à l’encontre de la théologie mariale, en soumettant les résultats de sa recherche à la contre-épreuve de ces thèses. L’auteur dégage les incohérences existentielles de ces thèses anti-mariales.
Dans la deuxième partie de l’ouvrage, l’analyse porte sur la littérature judéo-chrétienne, la littérature intertestamentaire des premières générations suivant la période apostolique, la littérature apocryphe ancienne et la littérature patristique. Cette enquête met en lumière la culture originelle favorable à Marie et les raisons des évolutions subséquentes. La redécouverte des documents judéo-chrétiens au xxe siècle est ici d’un apport majeur. Ils font renouer, dans une continuité directe, avec les récits de l’enfance de Jésus, montrant ainsi que la Tradition mariale n’est pas une création tardive. C’est d’ailleurs ce qui fait l’intérêt essentiel de ce volume.
En dernier lieu, l’auteur propose des jalons de réflexion sur des principes de théologie mariale et sur la situation actuelle à la lumière des données de Vatican II. Parce que « la foi chrétienne commence par un événement et en dépend complètement » (p. 453), l’auteur se montre prudent devant les affirmations mariales modernes. C’est toute la question du rapport de l’histoire à la Tradition qui est engagée ici.
L’auteur réussit à apporter de nouvelles réflexions sur la foi mariale, une foi si discrète dans les Évangiles et très éclatante plus tardivement dans la tradition. Il propose des raisons qui justifient le peu de mentions de Marie dans les sources scripturaires et explique comment l’Église a posé les fondements de la tradition mariale. Il éclaire la crise de transmission de cette tradition en la rapportant à la question de l’hellénisation du christianisme.
La méthodologie de travail est justifiée dans la dernière partie de l’ouvrage où l’auteur a choisi de situer la partie théorique de sa recherche. Mais dans les premières pages, l’auteur précise la perspective retenue : « […] nous éviterons le plus possible de nous enfermer dans ce qu’exige une démarche strictement scientifique, à savoir une perspective exclusivement analytique dans un domaine étroitement délimité » (p. 39). En ce sens, l’auteur se laisse guider par des intuitions de la tradition mariale (p. 66). La fiabilité historique des textes néotestamentaires et la confiance dans la Tradition sont deux a priori de cette étude (p. 40-41). Ces a priori ne manqueront pas de refroidir l’intérêt de certains lecteurs. Il faut souligner quand même la qualité de la recherche qui évite les hypothèses trop audacieuses mais n’hésite pas à défendre avec ardeur les thèses mariales. La bibliographie (p. 467-470) est minimale par rapport à l’ampleur de la recherche qui a été menée.
Voici, en somme, une étude qui plaira aux croyants et aux personnes désirant en connaître davantage sur la tradition mariale et ses origines. Les chercheurs y trouveront également des synthèses et des éléments de réflexion utiles.