Résumés
Résumé
L’objectif de cette étude est d’analyserempiriquement, dans un échantillon de 281 apprentis enformation professionnelle suivant des cours de mathématiques,les relations entre les habiletés dans le domaine duraisonnement numérique, les perceptions de soi et de latâche, les buts de compétence, ainsi que lesstratégies d’apprentissage. Des analyses de cheminementmontrent que les divers buts de compétence sont préditsde manière différentielle par les perceptions de soi etde la tâche. En outre, les buts de compétence exercent unrôle médiateur dans la relation entre les perceptions dela tâche et de soi et les stratégiesd’apprentissage. Finalement, l’instrumentalitéperçue et l’anxiété ont des effets directset indirects sur la mobilisation de stratégiesd’apprentissage. Les résultats sont discutésà la lumière des théories motivationnelles et del’apprentissage autorégulé ainsi que par lacomparaison avec d’autres études empiriques.
Mots-clés :
- apprentissage autorégulé,
- motivation,
- stratégies d’apprentissage,
- mathématiques
Abstract
This article presents an analysis of 18 articles of empiricalqualitative studies in education utilizing the interview and publishedbetween 2006-2009 in Revue des sciences de l’éducation.The aim is to describe the methodological precisions given by theresearcher in the articles and analyze them in comparison with theprescriptions about the interview found in manual and normativeguidelines. The findings include : a marked use of semi-direvtedinterviews, that objectives, research context, participants, andanalysis procedures lack precision,while abstracts are presentedaccording to the norms of La Revue,. The authors note that scientificand ethical considerations are lacking. Finally, questions about thisportrait in regard to the validity of the data and the resultsincluding adequate conduct of interviews and methodologicalconsiderations in qualitative research are presented.
Keywords:
- interview,
- qualitative research,
- empirical studies,
- documentary analysis,
- Revue des sciences de l’éducation
Resumen
El objetivo de este estudio es analizar empíricamente, con unamuestra de 281 alumnos en formación profesional tomando clasesde matemáticas, las relaciones entre las habilidades en elárea del razonamiento numérico, las percepciones de simismo y de la tarea, los objetivos de competencia así como lasestrategias de aprendizaje. Unos análisis de recorridoprofesional muestran que los diversos objetivos de competencia sonpredichos de manera distinta por las percepciones de si mismo y de latarea. Además, los objetivos de competencia juegan un papelmediador en la relación entre las percepciones de la tarea y desi mismo y las estrategias de aprendizaje. Por terminar, lainstrumentalidad percibida y la ansiedad tienen efectos directos eindirectos sobre la movilización de estrategias de aprendizaje.Se analizan los resultados a la luz de las teorias motivacionales y delaprendizaje autoregulado y comparándoles con otros estudiosempíricos.
Palabras clave:
- aprendizaje autoregulado,
- motivación,
- estrategias de aprendizaje,
- matemáticas
Corps de l’article
1. Introduction
L’apprentissage autorégulé peut être défini comme un processus actif et constructif par lequel les apprenants établissent des buts pour leur apprentissage, réalisent le monitorage, le contrôle ainsi que la régulation de leurs cognitions, motivations et comportements, et cela, tout en étant guidés et contraints par leurs buts et les caractéristiques contextuelles de l’environnement (Pintrich, 2000a). L’élève qui autorégule parfaitement son apprentissage se perçoit comme agent de ses comportements, pense que l’apprentissage est un processus proactif, s’auto-motive et utilise des stratégies d’apprentissage qui lui permettent d’obtenir les résultats scolaires qu’il se fixe. Former des enfants et adolescents afin qu’ils aient, une fois adultes, la capacité d’apprendre de manière autorégulée est aujourd’hui un objectif majeur des programmes d’enseignement (Boekaerts, 1997 ; De Corte, Mason, Verschaffel et Depaepe, 2011). Être capable de s’autoréguler durant l’apprentissage est en effet une aptitude essentielle, en ce qu’elle permet, à court terme, de favoriser l’acquisition de compétences et de connaissances, les élèves qui s’autorégulent étant capables de gérer eux-mêmes leur apprentissage. À long terme, cette aptitude débouche sur l’apprentissage autonome, mis en oeuvre dans la vie adulte et professionnelle (Brühwiler et Biederman, 2005 ; Cosnefroy, 2010).
Pour comprendre l’aptitude à l’autorégulation, on ne peut pas faire l’économie de l’étude des liens entre les stratégies que les élèves mobilisent pour apprendre et leurs motivations. En effet, les aspects cognitifs et motivationnels sont interdépendants et doivent être analysés conjointement si l’on ambitionne de comprendre comment les élèves autorégulent leur apprentissage (Pintrich, 1999 ; Zimmerman et Labuhn, 2012). Deux aspects majeurs de l’apprentissage autorégulé, d’une part, les croyances motivationnelles (telles que la valeur de la tâche, les buts de compétence ou le sentiment d’efficacité ; voir Murphy et Alexander, 2000) et, d’autre part, les stratégies d’apprentissage (telles que la répétition et l’élaboration), sont régulièrement articulés dans les recherches, sans toutefois être liés aux habiletés cognitives des apprenants (telles que les habiletés verbales et numériques). Or, dans une même classe, les apprenants ont des habiletés qui peuvent différer passablement, ce qui devrait être considéré dans l’analyse de leur autorégulation. Les croyances motivationnelles des apprenants dans le cadre scolaire ou de formation ont été décrites à l’aide de divers cadres théoriques, parmi lesquels nous retenons la théorie Expectancy-Value (Eccles et Wigfield, 1995) et le modèle des buts de compétence (Pintrich, 2000b) décrits plus bas. Chacune de ces théories offre une perspective singulière et pertinente sur la motivation à apprendre, et les recherches indiquent que les buts, la valeur de la tâche et la perception des compétences jouent tous un rôle quantitativement et qualitativement important dans l’engagement des élèves. Cependant, les deux théories n’ont habituellement pas été considérées de manière conjointe afin d’étudier leurs relations avec les stratégies d’apprentissage, ce qui limite notre compréhension des relations entre croyances motivationnelles et autorégulation. L’intégration des construits issus des deux théories fournirait une description plus riche et complète de la façon dont les croyances motivationnelles sont interarticulées et de leur association commune aux stratégies d’apprentissage (Conley, 2012 ; Lens, 1996 ; Liem, Lau et Nie, 2008).
L’apprentissage autorégulé a été étudié chez des élèves et étudiants de multiples niveaux scolaires fréquentant principalement des cursus d’études à temps plein. Nous ne disposons toutefois que de peu d’information sur l’apprentissage autorégulé chez les apprentis de la formation professionnelle initiale, dont la responsabilité de formation est partagée entre école professionnelle et entreprise formatrice. Il s’agit, d’une manière générale, d’une population largement négligée dans la recherche en psychologie de l’éducation, alors même que ce type de formation est de plus en plus valorisé dans de multiples systèmes éducatifs (Achtenhagen et Grubb, 2001). Ainsi, la présente étude vise à analyser, chez des apprentis en formation professionnelle, les relations entre les croyances motivationnelles (selon les théories Expectancy-Value et celle des buts de compétence), les stratégies d’apprentissage et les habiletés en raisonnement numérique. L’étude est réalisée dans le contexte des cours de mathématiques appliquées à leur profession (description plus bas), qui ont pour objectif l’apprentissage de notions mathématiques dans leur contexte d’application à la profession apprise.
2. Contexte théorique
Depuis les travaux de Pintrich, Smith, Garcia et McKeachie (1993) sur l’apprentissage autorégulé, opérationnalisé par le Motivated Strategy for Learning Questionnaire (MSLQ), les liens entre croyances motivationnelles et stratégies d’apprentissage ont suscité un intérêt certain chez les chercheurs et ont ainsi été largement étudiés. Nous disposons aujourd’hui de passablement de connaissances sur ces liens et sur leur importance dans le fonctionnement motivationnel et cognitif des apprenants (Berger, 2012 ; Büchel, Berger et Kipfer, 2011 ; Elliot, McGregor et Gable, 1999 ; Lens, Simons et Dewitte, 2002 ; Pintrich, 1999 ; Pintrich et De Groot, 1990 ; Schiefele, 2009). Différentes théories de la motivation en contexte scolaire ont servi de cadre conceptuel pour définir les composantes des croyances motivationnelles. Nous retenons, pour cette étude, la théorie Expectancy-Value d’Eccles et Wigfield (1995) et celle des buts de compétence (par exemple, Pintrich, 2000b), car elles offrent deux perspectives complémentaires sur la motivation et affectent conjointement la mobilisation des stratégies d’apprentissage (Liem et collab., 2008).
Selon le modèle Expectancy-Value d’Eccles et Wigfield (1995), les attentes de succès (expectancy) et la valeur de la tâche (ou de la matière ; les deux dénominations sont ici utilisées comme synonymes) détermineraient directement la quantité d’effort, les choix ainsi que la persévérance en situation d’apprentissage. Les attentes de succès et la valeur de la tâche seraient déterminées par une série d’autres facteurs, notamment contextuels (ex. : l’attitude des parents). Les attentes de succès concernent le concept de soi relatif à ses compétences ainsi que le sentiment d’efficacité personnelle, qui peut être résumé par le terme compétence perçue. La valeur de la tâche est multicomponentielle. Elle inclut notamment l’intérêt individuel, soit le plaisir tiré de la réalisation de la tâche (motivation de type intrinsèque) et l’instrumentalité perçue, qui concerne le degré auquel la tâche est considérée comme utile pour le futur de l’élève (motivation de type extrinsèque).
Les buts de compétence sont définis par Pintrich (2000b) comme l’orientation générale de l’élève vers la tâche ou la situation. Ils incluent diverses croyances au sujet des objectifs, de la compétence, du succès, de l’effort ou encore des erreurs. Dans ses développements actuels, la théorie comprend quatre types de buts : les buts de maîtrise se réfèrent au développement des compétences et connaissances, et comportent l’idée de progression dans le domaine concerné. Les élèves qui adoptent ce type de buts se perçoivent comme compétents s’ils maîtrisent les savoirs de la matière concernée. Les buts de performance sont adoptés par des élèves qui se pensent compétents s’ils obtiennent des résultats meilleurs que leurs camarades ou qui impressionnent leur entourage. Chacun de ces deux buts se décline selon la distinction fondamentale de motivation d’approche ou d’évitement. Ce sont ainsi quatre types de buts qui forment le cadre conceptuel des buts de compétence dans le modèle adopté par la majorité des chercheurs (Elliot et McGregor, 2001 ; Pintrich, 2000a). Il est supposé que le type de but adopté par l’élève crée un cadre de référence à l’aide duquel l’élève interprète, réalise des expériences et agit dans les situations d’apprentissage (notamment quelles stratégies d’apprentissage il mobilise ; Elliot et collab., 1999 ; Pintrich, 2000a, 2000b). Certains chercheurs ont proposé un élargissement théorique par l’inclusion de buts de compétence supplémentaires, notamment les buts de maîtrise-défi (challenge mastery goals) et les buts d’évitement du travail (Grant et Dweck, 2003 ; Nicholls, 1989). Les buts de maîtrise-défi se réfèrent au désir de se confronter à des tâches difficiles. Les élèves qui adoptent ces buts recherchent des tâches qui mobilisent leurs compétences et connaissances (Grant et Dweck, 2003). Ces buts permettent de distinguer les élèves qui ont simplement le désir de comprendre et de maîtriser les tâches (buts de maîtrise classiques) de ceux qui cherchent des tâches stimulantes qui leur demandent de surmonter des difficultés. Nicholls (1989) a proposé les buts d’évitement du travail comme dimension motivationnelle. Ces buts seraient poursuivis par les élèves qui se sentent compétents lorsqu’ils réussissent avec facilité et qui désirent par conséquent réussir avec le moins d’efforts possible.
Les stratégies d’apprentissage se réfèrent aux actions intentionnelles, mobilisées pour faciliter l’acquisition, la compréhension ainsi que le transfert des nouvelles connaissances et compétences (Weinstein, Husman et Dierking, 2000). Trois classes majeures de stratégies sont fréquemment distinguées : la répétition, l’élaboration et les stratégies métacognitives. La répétition consiste à mémoriser les informations en les répétant de diverses manières (par exemple, en les recopiant à plusieurs reprises). L’élaboration consiste à rechercher l’établissement de liens entre les connaissances à acquérir et celles déjà acquises afin de donner du sens aux nouvelles informations. Les stratégies métacognitives consistent, d’une part, à anticiper et à planifier la résolution d’une tâche ; d’autre part, elles consistent à réaliser un monitorage de l’exécution de la tâche et des vérifications des résultats (Pintrich, 1999, 2000a). Les stratégies de répétition débouchent sur un apprentissage superficiel et faiblement transférable. Dans ce cas, la rétention n’est pas assurée sur le long terme. Au contraire, les stratégies d’élaboration et métacognitives débouchent sur un apprentissage plus profond, qui facilite le transfert, la compréhension ainsi que la rétention à long terme des informations (Weinstein et collab., 2000).
Les relations entre stratégies d’apprentissage et performances ont été étudiées à de multiples reprises. Par exemple, Pintrich et ses collaborateurs (1993) ont rapporté des corrélations significatives entre les notes obtenues en fin de semestre par des étudiants dans divers programmes de premier cycle universitaire (Bachelor) et l’utilisation de stratégies d’élaboration (r = 0,22 ; p < 0,001) ainsi que métacognitives (r = 0,30 ; p < 0,001). Au contraire, les stratégies de répétition n’étaient pas significativement associées aux notes (r = 0,05). L’analyse des données de l’étude Programme for International Student Assessment (PISA : Organisation de coopération et de développement économiques, 2003b), pour la Suisse, révèle que les stratégies de répétition sont associées négativement au niveau de compétence de l’élève en mathématiques, alors que les stratégies d’élaboration et métacognitives ne sont pas associées à ces compétences (Brühwiler et Biederman, 2005). Si l’on s’intéresse aux préférences stratégiques des élèves (c’est-à-dire la tendance à choisir un type de stratégies plutôt qu’un autre) et que l’on utilise pour cela des scores ipsatifs, d’autres relations entre stratégies et compétences apparaissent. Rappelons que les scores ipsatifs permettent de standardiser les réponses des participants afin de les exprimer en tant que préférence entre plusieurs options et ainsi réduire les effets des biais de réponse. Pour les stratégies d’apprentissage, les scores ipsatifs ont été calculés en soustrayant, pour chaque participant, la moyenne de tous les items mesurant les stratégies d’apprentissage de la moyenne des items mesurant chaque type de stratégie. Ainsi des scores moyens ont été calculés pour chacun des trois types de stratégies et corrigés pour la tendance globale à accepter tout item sur les stratégies d’apprentissage indépendamment de sa signification. Les scores ipsatifs représentent ainsi le choix relatif d’une stratégie plutôt que des autres.
Il s’avère que plus le niveau de compétence d’un élève est élevé, plus celui-ci aura tendance à privilégier l’utilisation de stratégies métacognitives par rapport à d’autres stratégies. Au contraire, les élèves les moins compétents privilégient l’utilisation de stratégies de répétition au détriment d’autres types de stratégies (Organisation de coopération et de développement économiques, 2003b). En bref, ces résultats suggèrent que différentes stratégies d’apprentissage seraient liées de manière différentielle à la performance et aux compétences.
Les croyances motivationnelles sont associées aux stratégies d’apprentissage utilisées par les élèves. Étant donné que l’application de ces stratégies est une activité qui requiert des efforts (par exemple, de la concentration) et du temps, les élèves qui attribuent plus de valeur au domaine concerné auront tendance à utiliser plus de stratégies. Au contraire, les élèves qui ne sont pas incités à s’autoréguler n’utiliseront que peu de stratégies si le domaine n’est pas valorisé. Selon Wigfield, Hoa et Klauda (2008), la valeur attribuée à une tâche favorise (ou non) l’utilisation de stratégies d’apprentissage et module l’engagement cognitif de l’élève dans la tâche ainsi que sa régulation. En outre, d’après les résultats d’une étude menée avec le Motivated Strategy for Learning Questionnaire administré à 173 élèves d’une moyenne d’âge de 12 ans, les stratégies d’apprentissage jouent un rôle médiateur dans les relations entre croyances motivationnelles et performances scolaires (Pintrich et De Groot, 1990). En effet, les stratégies sont significativement corrélées aux notes et à la valeur de la tâche, mais cette dernière n’est pas directement liée aux notes. Plusieurs chercheurs ont mis en évidence des relations positives entre la compétence perçue et l’utilisation de stratégies d’apprentissage (Berger et Karabenick, 2011). Elliot et ses collaborateurs (1999) ont montré que les différents buts de compétence sont liés de façon cohérente aux stratégies d’apprentissage chez des étudiants universitaires. Les buts de maîtrise prédisent l’utilisation de stratégies impliquant un traitement profond (stratégies métacognitives et stratégies d’élaboration). Les buts de performance-approche prédisent un traitement de surface (par exemple, par répétition) et les buts de performance-évitement permettent de prédire négativement un traitement profond et positivement un traitement de surface, ainsi que la tendance à être désorganisé dans son travail. Pintrich et ses collaborateurs (Wolters, Yu et Pintrich, 1996) ont par exemple montré que des élèves adolescents qui adoptaient des buts orientés vers la maîtrise déclaraient une utilisation plus fréquente de stratégies d’élaboration et de stratégies métacognitives en comparaison des élèves dont les buts étaient orientés vers la performance. Dans l’étude de Grant et Dweck (2003), les buts de maîtrise et de maîtrise-défi étaient positivement corrélés à l’utilisation de stratégies de traitement profond, alors que les buts de performance étaient négativement liés à ce même type de stratégies. L’étude de Vrugt et Oort (2008) a encore une fois corroboré l’association positive entre les buts de maîtrise et les stratégies métacognitives ainsi que d’élaboration. Par contre, des relations positives ont été rapportées entre les buts de performance-approche et tous les types de stratégies (autant de surface que profondes). Finalement, les buts d’évitement du travail sont, comme l’ont décrit Dowson et McInerney (2001), liés à un faible niveau d’ambition de réussite, à des comportements d’évitement, à des affects négatifs, ainsi qu’à un engagement cognitif faible, comme la mobilisation de stratégies d’apprentissage superficielles (par exemple, répétition).
Bien que les résultats de ces recherches aient éclairé notre compréhension des liens entre croyances motivationnelles et fonctionnement cognitif, les théories Expectancy-Value et des buts de compétence ont rarement été associées afin de former un modèle plus complet des relations entre croyances motivationnelles et application de stratégies d’apprentissage (Liem et collab., 2008). Or, l’association de ces deux théories permettrait une compréhension plus affinée des croyances motivationnelles, étant donné qu’une théorie unique n’offre qu’un éclairage partiel sur la motivation à apprendre (Conley, 2012 ; Lens, 1996). L’articulation des buts de compétence avec les composantes de la valeur de la tâche et des attentes de succès apporterait des informations quant aux liens empiriques entre ces deux approches théoriques, aux relations de chacune de ces approches avec les stratégies d’apprentissage ainsi qu’à un éventuel rôle médiateur des buts de compétence (Elliot et Thrash, 2001) dans les relations entre les perceptions de soi et la valeur de la tâche ainsi que les stratégies d’apprentissage.
Ce rôle médiateur est justifié par le présupposé théorique selon lequel les buts de compétence seraient, parmi les croyances motivationnelles considérées dans cette étude, les variables explicatives les plus proches des processus d’apprentissage et de ceux de résolution de problème. En effet, selon Elliot et Thrash (2001), bien que les antécédents des buts, par exemple les désirs, les valeurs, les besoins ou les motifs, fournissent de l’énergie au comportement, ils ne fournissent pas pour autant de lignes directrices quant à la façon de réaliser ces désirs, soucis, besoins ou motifs activés. Ces lignes directrices sont données par les buts adoptés par les individus. Ces buts les aident à guider et à diriger leur comportement, notamment en situation d’apprentissage (Schutz, 1991). Ils serviraient ainsi de médiateur aux effets des variables relatives à la perception de soi (par exemple, la perception de ses compétences), à la perception des tâches (notamment la valeur attribuée à la tâche) et à l’affect (par exemple, l’anxiété) sur la mobilisation de stratégies d’apprentissage.
Les objectifs de la présente recherche sont d’analyser empiriquement 1) les relations entre les habiletés dans le domaine du raisonnement numérique (c’est-à-dire la capacité de raisonner avec des nombres, de manipuler des relations numériques et de traiter intelligemment un matériel quantifié (Bennett, Seashore et Weshman, 2002, p. 6), 2) les perceptions de soi et de la tâche (valeur de la tâche), 3) les buts de compétence ainsi que 4) les stratégies d’apprentissage.
Le contexte est celui de la formation professionnelle initiale de type dual, impliquant un partage des tâches de formation entre l’entreprise (trois ou quatre jours par semaine) et le centre de formation professionnelle (un à deux jours par semaine). Dans le cadre de leur formation, les apprentis suivent des cours de mathématiques professionnelles, c’est-à-dire qu’ils étudient des notions mathématiques dans leur contexte d’application à la profession apprise. Il s’agit d’une application pragmatique des mathématiques par laquelle les apprentis apprennent des procédures et des formules utiles dans l’exercice de la profession. Des notions fondamentales d’algèbre sont également révisées durant ces cours. À titre d’exemple, le plan de formation des apprentis boulangers-pâtissiers-confiseurs (formation de trois ans ; Office fédéral de la formation et de la technologie, 2010) stipule que ceux-ci seront, à la fin de leur formation, capables de réaliser correctement des calculs simples en rapport avec la profession dans les domaines suivants :
calcul du temps et des quantités dans le cadre de recettes et de la production ;
calcul des volumes et des surfaces dans le cadre de recettes et de la production ;
calcul des températures dans le cadre de la production ;
calculs nets et bruts dans le cadre de la fabrication de produits ;
calcul de la valeur nutritive et énergétique, et déclaration des produits.
De plus, les apprentis seront capables d’expliquer les résultats de calculs en rapport avec la profession et d’indiquer les conséquences qui en résultent pour leur travail et pour l’entreprise.
L’échec à ces cours représente, pour une partie des élèves, une cause d’abandon lors de la première année de la formation (Berger, 2008). Les croyances motivationnelles des apprentis sont plutôt défavorables pour les matières ou tâches de type scolaire (par exemple, l’enseignement de culture générale), mais favorables pour les cours directement liés à la profession qu’ils apprennent (Cretten, Lens et Simons, 2001 ; Gurtner, Monnard et Gorga, 2002 ; Prenzel, Kramer et Drechsel, 2002). Certains cours, tels que les mathématiques professionnelles, se situent entre les domaines scolaires et professionnels. En effet, les notions sont présentées dans une salle de classe, mais elles sont spécifiquement utiles pour la profession apprise. L’instrumentalité perçue est ainsi un élément fondamental parmi les croyances motivationnelles des apprentis (Lens et collab., 2002 ; Nuttin, 1980). Les apprentis ont réalisé un choix de profession et vont s’engager dans l’apprentissage de notions qui sont utiles à l’exercice de cette profession, ce qui met au deuxième plan les notions (présentées par exemple dans les cours de culture générale) qui ne présentent pas cette utilité.
2.1 Questions de recherche
En regard des éléments théoriques et des constats de recherche rapportés ci-dessus, les questions suivantes sont posées dans cette étude :
Comment les habiletés en raisonnement numérique et les perceptions de la tâche et de soi sont-elles liées aux buts de compétence ?
Comment les buts de compétence expliquent-ils l’utilisation de stratégies d’apprentissage ?
Les buts de compétence exercent-ils un rôle médiateur dans la relation entre les perceptions de la tâche et de soi et les stratégies d’apprentissage ?
2.2 Hypothèses de recherche
Un modèle illustrant les hypothèses est représenté à la figure 1. Ces hypothèses sont fondées sur les éléments théoriques et les résultats de recherches empiriques rapportés plus haut. La première hypothèse est que les habiletés numériques sont associées positivement à la compétence perçue (Bandura, 2003/1997 ; Eccles et Wigfield, 1995) et à l’intérêt individuel, mais négativement à l’anxiété. De plus, les habiletés sont liées aux buts de compétence de manière indirecte, par l’intermédiaire des perceptions de la matière et de soi.
La deuxième hypothèse est que les buts de maîtrise et de maîtrise-défi ont un effet positif sur les stratégies d’élaboration et les stratégies métacognitives. En revanche, les buts de performance-évitement et d’évitement du travail ont un lien positif avec les stratégies de répétition (Elliot et collab., 1999 ; Linnenbrink et Pintrich, 2000 ; Pintrich, 1999). Les buts d’évitement du travail pourraient même être liés négativement avec les stratégies d’élaboration et les stratégies métacognitives (Dowson et McInerney, 2001).
La troisième hypothèse est que les buts de compétence jouent un rôle médiateur dans la relation entre les perceptions de la matière et de soi (instrumentalité perçue, intérêt individuel, compétence perçue et anxiété) et les stratégies d’apprentissage (d’élaboration, métacognitives et de répétition). Ainsi les buts sont les déterminants les plus directs de la mobilisation des stratégies (Elliot et Thrash, 2001 ; Schutz, 1991).
Les covariances entre résidus (les liens entre les variables à une même étape du modèle) ne sont pas représentées dans la figure 1 pour des raisons de lisibilité. Toutefois, des covariances sont attendues à chaque niveau du modèle, c’est-à-dire entre les différentes croyances motivationnelles, entre les différents buts de compétence et entre les différents types de stratégies. Ces covariances entre résidus ne sont cependant pas le point d’intérêt majeur de cette étude qui se concentrera sur la signification statistique et les poids de régression (tailles d’effet) des chemins afin d’apporter des réponses aux questions de recherche.
3. Méthodologie
3.1 Sujets
Les participants sont 281 apprentis en première année de formation professionnelle initiale de type dual. Ils fréquentent divers centres de formation professionnelle en Suisse romande. En accord avec les directeurs d’écoles professionnelles, les apprentis ont été sélectionnés dans des formations couvrant chacun des neuf domaines de la formation professionnelle en Suisse, ainsi que chacun des six niveaux d’exigences intellectuelles des formations définis dans la classification de Stalder (2005). Cette classification a été réalisée par des professionnels de l’orientation scolaire et professionnelle en Suisse. Ils ont estimé sur une échelle de 1 (exigences très faibles) à 6 (exigences très élevées) le niveau d’exigence intellectuelle d’un grand nombre de formations professionnelles initiales. Cela nous a permis de constituer un échantillon représentatif des apprentis de première année. L’échantillon est constitué de deux tiers d’hommes (64,4 %) et de deux tiers de Suisses (67,6 %). Le français est la langue parlée en famille par la majorité des participants (86,8 %). Leur âge moyen est de 18 ans et 7 mois, avec un écart type de 2 ans et 7 mois.
3.2 Instrumentation
Tous les construits ont été évalués en référence aux mathématiques professionnelles. Tous les items, qui figurent en annexe, devaient être évalués sur une échelle de type Likert à 7 points (1 = Pas du tout comme moi ; 7 = Tout à fait comme moi). Les dimensions mesurées par les instruments ont été vérifiées par des analyses factorielles confirmatoires qui sont présentées en détail ailleurs (Berger, 2008).
Perceptions de la matière et de soi. La compétence perçue a été mesurée par cinq items tirés de la traduction française du Self-Description Questionnaire II (Guérin, Marsh et Famose, 2003). L’intérêt individuel a été mesuré par trois items tirés du même instrument (Guérin et collab., 2003). L’utilité perçue a été mesurée par quatre items se référant à la valeur instrumentale des mathématiques. L’anxiété a été mesurée par six items inspirés de l’étude PISA (Organisation de coopération et de développement économiques, 2003a) et de Pelgrims (2006).
Les buts de compétence. Les buts de maîtrise ont été évalués par quatre items, les buts de maîtrise-défi par trois items, les buts de performance-approche par six items, les buts de performance-évitement par sept items et les buts d’évitement du travail par trois items.
Les stratégies d’apprentissage. Les stratégies de répétition ont été mesurées par quatre items, les stratégies d’élaboration par sept items et les stratégies métacognitives par quatorze items. Les items sont inspirés de l’étude PISA (Organisation de coopération et de développement économiques, 2003a).
Les habiletés en raisonnement numérique. Ces habiletés ont été mesurées par le sous-test Raisonnement numérique de la traduction française du Test d’aptitudes différentielles (Bennett et collab., 2002). Ce sous-test comprend 25 items à choix multiples qui concernent l’arithmétique, la capacité d’estimation des résultats et la capacité à raisonner avec des chiffres.
3.3 Déroulement
Les données ont été recueillies par l’auteur (le chercheur) et une étudiante de maîtrise lors de deux périodes de cours consécutives habituellement consacrées à l’enseignement de la culture générale. Toutes les informations ont été récoltées de manière collective.
3.4 Méthode d’analyse des données
Des analyses de cheminement (en anglais path analysis, méthode de la famille de modèles d’équation structurelles : Bollen, 1989) ont été utilisées afin de tester le modèle d’hypothèses représenté à la figure 1. Ces analyses ont été réalisées avec le logiciel Mplus 5.0 (Muthén et Muthén, 1998-2007). Les modèles ont été estimés en utilisant une procédure d’estimation robuste quant aux déviations de la normalité dans les distributions (Méthode robuste du maximum de vraisemblance, en anglais : Robust Maximum Likelihood). Le résultat du test d’adéquation χ2 a été corrigé selon la procédure de Satorra-Bentler (Satorra et Bentler, 2001). La proportion de données manquantes, pour les items, est inférieure à 5 %, ce qui est considéré comme acceptable (Tabachnick et Fidell, 2007). De ce fait, toutes les analyses ont été conduites selon la procédure du maximum de vraisemblance à information complète (en anglais : Full Information Maximum Likelihood), qui est la méthode la plus efficace pour estimer des modèles d’équations structurelles en présence d’un taux raisonnable de données manquantes (Enders, 2006). L’erreur de mesure dans les scores a été fixée dans le modèle de cheminement en utilisant la formule (1 - α) × s2 (Bollen, 1989). Ces corrections permettent de tenir compte de la fidélité des scores et d’obtenir ainsi des paramètres plus précis. La procédure pour parvenir au modèle final de résultats était la suivante. Premièrement, le modèle a été testé tel que postulé à la figure 1. Deuxièmement, des chemins théoriquement cohérents qui permettaient au modèle de mieux s’ajuster aux données ont été ajoutés. Finalement, les chemins statistiquement non significatifs (au seuil de signification statistique de 0,05) ont été supprimés. Soulignons que les chemins sont désignés ci-après comme des effets au sens statistique du terme. De plus, nous utilisons les verbes prédire, dépendre et affecter pour exprimer les relations entre variables indépendantes et dépendantes, et cela, sans sous-entendre une relation de cause à effet.
3.5 Considérations éthiques
À la suite d’une présentation des objectifs de l’enquête, les enseignants ont quitté la salle de cours afin que les apprentis se sentent libres de répondre comme bon leur semblait. Il a été indiqué aux participants que toutes les informations seraient traitées de manière strictement confidentielle. La participation à l’étude était annoncée comme facultative et n’entraînait aucune conséquence sur les résultats scolaires. De plus, il a été précisé aux élèves que leurs réponses ne seraient pas communiquées à leurs enseignants ni à leurs parents.
4. Résultats
Les statistiques descriptives ainsi que les indices de consistance interne des scores d’échelle sont rapportés dans le tableau 1.
Les corrélations bivariées entre les scores d’échelle figurent dans le tableau 2.
En nous fondant sur le modèle d’hypothèse présenté dans la figure 1, nous avons réalisé une analyse de cheminement. Les résultats du modèle final sont présentés à la figure 2. L’adéquation de ce modèle aux données est bonne (χ2(52) = 63,26, p = 0,14). Soulignons que les buts de performance-approche ont été exclus du modèle, car ils n’étaient significativement prédictifs d’aucune variable et ne jouaient donc aucun rôle dans le modèle. Les résultats relatifs à chacune des questions de recherche sont décrits ci-après.
4.1 Les relations entre les habiletés en raisonnement numérique, les perceptions de soi et de la tâche ainsi que les buts d’accomplissement
En ce qui concerne les habiletés en raisonnement numérique, il s’avère qu’elles sont prédictives de l’intérêt individuel (poids de régression β = 0,16), de la compétence perçue (β = 0,38) ainsi que de l’anxiété (β = -0,38). Le seul chemin significatif entre les habiletés en raisonnement numérique et les buts d’accomplissement consiste en une relation négative (β = -0,17) avec les buts d’évitement du travail.
Les buts d’accomplissement sont prédits de façon différente au moyen des variables liées à la valeur de la tâche, au moyen de la compétence perçue et au moyen de l’anxiété. Les buts de maîtrise sont significativement prédits par l’instrumentalité perçue (β = 0,31), l’intérêt individuel (β = 0,47) ainsi que l’anxiété (β = 0,29) ; cela explique 42 % de la variance du score des buts de maîtrise. Les buts de maîtrise-défi sont également fortement prédits par l’intérêt individuel (β = 0,53), mais ils dépendent aussi de la perception des compétences (β = 0,23). Ces deux variables expliquent 46 % de la variance du score de ces buts. Les buts de performance-évitement sont fortement prédits par l’anxiété (β = 0,47), mais aussi affectés par l’intérêt de manière positive (β = 0,28). Au contraire, les buts d’évitement du travail sont dépendants de l’intérêt (β = -0,21) et de l’anxiété (β = 0,19). Les parts de variance expliquées dans les scores de ces deux derniers buts sont respectivement de 21 % et 17 %.
4.2 La prédiction des stratégies d’apprentissage par les buts d’accomplissement
Les buts de maîtrise prédisent la mobilisation de stratégies métacognitives (β = 0,31) et de répétition (β = 0,23), mais ils ne prédisent pas significativement l’utilisation de stratégies d’élaboration. Les buts de maîtrise-défi affectent le recours aux stratégies d’élaboration (β = 0,39) et aux stratégies métacognitives (β = 0,16). Tant les buts de performance-évitement que les buts d’évitement du travail sont prédictifs de la mobilisation de stratégies de répétition pour l’apprentissage de la matière (β = 0,12 et β = 0,20 respectivement).
Les buts d’accomplissement ne sont pas les seules variables qui permettent de prédire les différentes stratégies d’apprentissage. En effet, chacune des stratégies est prédite par l’anxiété et cela, de manière positive (plus l’anxiété est élevée, plus les diverses stratégies sont mobilisées). Par conséquent, cette dernière exerce non seulement un effet indirect sur les stratégies d’apprentissage par l’intermédiaire des buts d’accomplissement, mais aussi un effet direct. En outre, l’instrumentalité joue un rôle en soi : non seulement, elle n’est pas significativement liée au niveau de raisonnement numérique mais, en plus, elle a un lien direct (c’est-à-dire non médiatisé par les buts d’accomplissement) avec les stratégies d’élaboration (β = 0,26).
Les stratégies de répétition sont liées non seulement aux buts théoriquement les plus défavorables (performance-évitement et évitement du travail), mais aussi aux buts de maîtrise (β = 0,23). Ce résultat conduit à penser que les élèves orientés vers la maîtrise utilisent les stratégies de répétition, et non les stratégies d’élaboration. Par contre, les élèves orientés vers la maîtrise-défi recourent aux stratégies d’élaboration et non aux stratégies de répétition. Ainsi, ces deux types de buts de maîtrise diffèrent quant à leurs conséquences.
4.3 Le rôle médiateur des buts d’accomplissement
Le rôle médiateur des buts d’accomplissement postulé est partiellement confirmé (voir le résumé des effets directs et indirects sur les buts dans le tableau 3).
Les compétences en raisonnement numérique, l’intérêt individuel et la compétence perçue n’ont aucun effet direct sur les stratégies d’apprentissage, mais uniquement des effets indirects médiatisés par les différents buts de compétence. Au contraire, l’instrumentalité perçue et surtout l’anxiété montrent des effets directs et indirects relativement conséquents (entre β = 0,21 et β = 0,36) sur les stratégies d’apprentissage. Les effets indirects de l’intérêt individuel sur les stratégies d’élaboration et les stratégies métacognitives sont modérés (respectivement β = 0,21 et β = 0,23), tout comme l’effet indirect de l’anxiété sur les stratégies de répétition (β = 0,17). Il est ainsi question d’une médiation partielle de l’effet des perceptions de soi et de la tâche sur les stratégies d’apprentissage par l’intermédiaire des buts de compétence. Les effets indirects du raisonnement numérique sur les stratégies d’apprentissage sont de taille négligeable.
5. Discussion des résultats
5.1 Les effets des habiletés en raisonnement numérique et des perceptions de la tâche et de soi sur l’adoption des buts d’accomplissement
Nos résultats révèlent que les compétences en raisonnement numérique prédisent une part significative de la variance dans les scores relatifs à l’intérêt individuel, à la compétence perçue (Bandura, 1997/2003), à l’anxiété (Viau, 1995) et aux buts d’évitement du travail. Par contre, ces habiletés ne sont pas liées directement aux stratégies d’apprentissage ni aux buts de maîtrise et performance. Ainsi, les résultats suggèrent une certaine indépendance des croyances motivationnelles et des stratégies quant aux habiletés des élèves.
Les divers buts d’accomplissement sont prédits par des perceptions de la tâche et de soi qui diffèrent. En effet, les buts de maîtrise-défi sont partiellement dépendants de la compétence perçue, mais indépendants de l’anxiété. À l’inverse, les buts de maîtrise sont indépendants de la compétence perçue, mais ils dépendent de l’anxiété et de l’instrumentalité. Ces résultats suggèrent que les apprentis qui adoptent des buts qui ressortent comme étant les plus favorables (car promoteurs de la mobilisation des stratégies d’élaboration et métacognitives) ressentent non seulement un intérêt individuel pour la matière, mais aussi de bonnes compétences et une faible anxiété.
Les buts de performance-évitement sont positivement liés à l’intérêt individuel, alors que les buts d’évitement du travail y sont négativement associés. En outre, parmi les buts de compétence, seuls ces derniers sont prédits par les habiletés numériques. Les deux buts sont finalement dépendants de l’anxiété (Linnenbrink et Pintrich, 2000). Les parts de variance expliquée dans les scores de buts de performance-évitement et évitement du travail sont faibles en comparaison de l’explication des buts de maîtrise et maîtrise-défi. Cette observation laisse supposer que des facteurs que nous avons négligés dans la présente étude jouent un rôle important dans l’adoption des buts de performance-évitement et d’évitement du travail. En outre, la compétence perçue a un effet sur l’adoption d’un seul type de buts : les buts de maîtrise-défi. Il semble que ces buts soient liés à la conjonction de la compétence perçue et de l’intérêt individuel. En comparaison, les buts de maîtrise ne sont pas dépendants de la perception des compétences, mais bien de l’intérêt individuel, de l’instrumentalité perçue ainsi que de l’anxiété.
En résumé, les perceptions de la tâche et de soi mènent, selon les résultats de notre modèle de cheminement, à l’adoption de buts d’accomplissement qui diffèrent et qui ont des conséquences sur la mobilisation de stratégies d’apprentissage (Liem et collab., 2008). Ainsi, nos résultats offrent une description riche de l’articulation des construits des théories Expectancy-Value et des buts d’accomplissement (Conley, 2012).
5.2 Les effets des buts d’accomplissement sur la mobilisation de stratégies d’apprentissage
Les buts de compétence ont chacun des effets spécifiques sur les stratégies. Les buts de maîtrise permettent de prédire significativement le recours aux stratégies métacognitives et aux stratégies de répétition. Si cette première prédiction n’est pas étonnante étant donné qu’elle a été observée dans d’autres études (Grant et Dweck, 2003 ; Pintrich, 1999 ; Vrugt et Oort, 2008), la seconde prédiction est inattendue. En effet, celle-ci suggère que l’adoption des buts de maîtrise peut mener à l’utilisation de stratégies de répétition quand il s’agit d’apprendre ou de réviser des mathématiques. Le résultat peut être expliqué comme suit. Étant donné que la très grande majorité des élèves de la présente étude adoptent ce type de buts, il est probable que ces derniers ne permettent pas véritablement de discriminer les élèves dont les buts sont favorables à l’apprentissage par rapport à ceux dont les buts ne sont pas favorables. Ce seraient les buts de maîtrise-défi qui permettraient cette discrimination. Ainsi, les buts de maîtrise ne seraient pas seulement liés à la mobilisation de stratégies considérées comme efficaces, mais également à des stratégies généralement moins efficaces en termes de compréhension et de transfert. L’association observée entre buts de maîtrise et stratégies de répétition pourrait être attribuée aux spécificités de notre population d’intérêt, qui adopte largement des buts de maîtrise étant donné que ces élèves sont en formation par choix et non en scolarité obligatoire.
Les buts de maîtrise-défi sont significativement prédictifs tant des stratégies d’élaboration que des stratégies métacognitives. Ces deux liens étaient attendus. L’hypothèse était que l’adoption de ces buts mènerait à l’utilisation de stratégies d’apprentissage en théorie efficaces (Grant et Dweck, 2003). En comparaison des buts de maîtrise, les buts de maîtrise-défi semblent donc, dans notre échantillon, promoteurs d’un apprentissage en profondeur. Tant les éléments théoriques que les possibilités de comparaison avec d’autres études empiriques manquent toutefois pour discuter plus en détail les effets des buts de maîtrise-défi.
Les buts de performance-approche n’ont pas été retenus dans les résultats du modèle de cheminement parce qu’ils n’étaient prédictifs d’aucun des trois types de stratégies d’apprentissage. Il semble que ces buts soient, d’une part, peu adoptés par les élèves de la population d’intérêt et qu’ils ne soient pas, d’autre part, liés à l’utilisation de stratégies pour étudier. Il se pourrait toutefois que ces buts permettent de prédire d’autres aspects d’importance liés à l’apprentissage tels que le fait de demander de l’aide de manière opportune (Elliot et Moller, 2003). Cependant, ces variables ne faisaient pas partie de la présente étude.
L’adoption de buts de performance-évitement est faiblement prédictive d’une seule variable : l’utilisation de stratégies de répétition. Cela corrobore les liens déjà observés entre ces buts et ces stratégies (Elliot et Moller, 2003 ; Elliot et collab., 1999 ; Pintrich, 1999). Ainsi, les buts de performance-évitement sont liés au recours à des stratégies promouvant un apprentissage superficiel et faiblement transférable. Les buts d’évitement du travail jouent un rôle similaire. Ils prédisent également les stratégies de répétition (Dowson et McInerney, 2001). Par conséquent, ces deux types de buts, bien que non fondés sur des perceptions similaires, ont des effets proches.
Les résultats de la présente étude indiquent que favoriser l’autorégulation de l’apprentissage passe par la promotion de buts de maîtrise-défi et, dans une certaine mesure, de buts de maîtrise. Les buts de performance et d’évitement du travail ont, comme d’autres études l’ont montré, des effets qui sont soit nuls soit indésirables (Weinstein et collab., 2000).
5.3 Le rôle médiateur des buts d’accomplissement dans la relation entre la perception de la tâche et de soi et la mobilisation de stratégies d’apprentissage
Les résultats indiquent une médiation partielle des effets des perceptions de la tâche et de soi sur la mobilisation de stratégies d’apprentissage : les effets de l’intérêt et de la compétence perçue sont entièrement médiatisés par les buts, alors que les effets de l’anxiété et de l’instrumentalité sont partiellement médiatisés. En d’autres termes, l’anxiété et l’instrumentalité ont des effets, tant directs qu’indirects, sur la mobilisation des stratégies.
Selon les résultats de notre modèle de cheminement, l’intérêt individuel et la compétence perçue, souvent décrits comme favorisant directement l’autorégulation de l’apprentissage (Berger et Karabenick, 2011 ; Schiefele, 2009), n’agiraient que de manière indirecte sur la mobilisation des stratégies d’apprentissage. Ainsi, les buts constitueraient une concrétisation de ces perceptions sous la forme de lignes directrices guidant l’autorégulation (Elliot et Thrash, 2001 ; Liem et collab., 2008 ; Schutz, 1991).
Cependant, le rôle important que joue l’anxiété dans le modèle constitue un résultat inattendu. Cette émotion permet de prédire significativement, tant directement qu’indirectement, l’utilisation des stratégies d’apprentissage. De manière indirecte, l’anxiété permet de prédire l’adoption de buts de performance-évitement et de buts d’évitement du travail qui, à leur tour, permettent de prédire la mobilisation de stratégies de répétition. Ces liens étaient attendus, car la notion d’évitement est liée à l’anxiété, comme l’ont soutenu plusieurs chercheurs (Elliot et Pekrun, 2007 ; Linnenbrink et Pintrich, 2000) et comme cela a été montré dans plusieurs études empiriques (par exemple, Elliot et collab., 1999). D’autre part, l’anxiété permet de prédire l’adoption de buts de maîtrise qui sont, eux, prédictifs des stratégies de répétition et des stratégies métacognitives. Ce lien entre anxiété et buts de maîtrise est inattendu, et il semble qu’aucune recherche n’ait révélé une telle association. En effet, ces buts sont théoriquement et empiriquement associés à des émotions positives (Pekrun, Elliot et Maier, 2006 ; Elliot et Pekrun, 2007). Relevons que la corrélation entre ces deux construits est, bien que significative, relativement faible. De plus, les résultats indiquent des effets directs de l’anxiété sur les stratégies d’apprentissage. Ainsi, ce serait l’anxiété et non la compétence perçue qui serait liée à la mobilisation des stratégies d’apprentissage, ce qui va à l’encontre des résultats habituellement observés (Pintrich, 1999). Il apparaît dans les résultats que l’anxiété est directement prédictive de chacun des trois types de stratégies et cela, avec des tailles d’effet moyennes. Autrement dit, l’anxiété ne permet pas de prédire un type de stratégies plus qu’un autre. Deux pistes d’interprétation sont envisageables. Premièrement, il pourrait s’agir d’un biais de désirabilité sociale dans les réponses. Les élèves anxieux pensent qu’ils doivent déclarer, dans leurs réponses aux items, qu’ils font effectivement des efforts (sous la forme de l’application de stratégies pour apprendre) pour réussir ou pour surmonter leurs difficultés. Ainsi, ces élèves surestimeraient leur utilisation de stratégies afin de (se) donner l’image d’élèves qui cherchent à surmonter leurs difficultés. Une seconde interprétation serait que les élèves anxieux sont effectivement plus actifs dans l’utilisation de stratégies d’apprentissage. Nous ne connaissons toutefois pas la manière dont ils appliquent les stratégies concernées (Viau, 1995), ni la qualité de leurs métaconnaissances à propos des stratégies (soit les connaissances qui permettent d’appliquer à bon escient les stratégies). Ces deux interprétations suggèrent que le lien positif entre l’anxiété et chacun des trois types de stratégies d’apprentissage ne serait pas révélateur d’un effet bénéfique de l’anxiété. Il ne s’agit toutefois que d’explications hypothétiques et celles-ci devraient être testées empiriquement.
L’importance du rôle de l’anxiété dans notre modèle hypothétique n’a pas été anticipée. D’autres chercheurs ont observé des corrélations négatives entre l’anxiété et l’utilisation de stratégies d’apprentissage (Wolters, 2003 ; Pekrun, 2006). Par rapport aux liens entre émotions et stratégies d’apprentissage, Pekrun (2006) postule que l’activation d’émotions positives devrait faciliter une utilisation flexible et créative de stratégies d’apprentissage. Selon Pekrun (2006) et Viau (1995), l’activation d’émotions négatives telles que l’anxiété provoquerait l’utilisation de stratégies plus rigides (par exemple, la répétition). Pekrun postule aussi que les émotions négatives seraient négativement corrélées aux stratégies d’autorégulation (dont les stratégies métacognitives), car l’élève se reposerait sur les autres, en particulier les parents et enseignants, pour réguler son apprentissage.
Au-delà des effets directs des buts de compétence, l’instrumentalité perçue a un effet direct sur l’utilisation de stratégies d’élaboration, ce qui corrobore les conclusions de recherches comme celles de Lens et ses collaborateurs (2002). Ce résultat est intéressant, car l’instrumentalité n’est liée ni à la compétence perçue ni aux habiletés numériques. Ainsi, cette perception pourrait être développée chez les élèves, indépendamment de leurs compétences, ce qui serait profitable à la façon dont ils autorégulent leur apprentissage. Par rapport à notre population d’intérêt, il est probable que, parmi les composantes de la valeur de la tâche définies par Eccles et Wigfield (1995), l’instrumentalité perçue soit la plus pertinente (Berger, 2012). En effet, les cours donnés en école professionnelle sont en général valorisés par les apprenants à condition qu’ils aient un lien avec leur réalité professionnelle (Prenzel et collab., 2002). Sur le plan pédagogique, la façon dont les notions mathématiques sont présentées, les exercices d’application proposés ainsi que d’autres pratiques pédagogiques peuvent facilement renforcer la perception d’instrumentalité. Au contraire, il se pourrait que l’intérêt individuel, autre composante de la valeur de la tâche qui joue un rôle important dans la prédiction des stratégies d’apprentissage, soit plus difficilement modifiable chez les apprenants en formation professionnelle. Leur motivation est en effet largement extrinsèque, puisque orientée vers l’apprentissage de savoirs applicables (Cretten et collab., 2001). Signalons encore que l’effet des habiletés sur les stratégies d’apprentissage est médiatisé par les croyances motivationnelles et s’avère très faible.
6. Conclusion
Cet article porte sur l’analyse empirique des liens entre les croyances motivationnelles, les stratégies d’apprentissage et les habiletés d’apprentis dans le cadre des cours de mathématiques professionnelles. Les analyses de cheminement ont apporté des informations riches au sujet de l’effet des croyances motivationnelles sur les stratégies d’apprentissage. Ces analyses montrent, premièrement, que les divers buts d’accomplissement sont prédits de manière différentielle par les perceptions de soi et de la tâche. De plus, le rôle médiateur des buts de compétence dans la relation entre les compétences en raisonnement numérique, les perceptions de la tâche, la compétence perçue et les stratégies d’apprentissage a également été étudié. Selon nos résultats, les buts de compétence jouent un rôle médiateur dans la relation entre les perceptions de la tâche et de soi et les stratégies d’apprentissage. En ce qui concerne les compétences en raisonnement numérique, celles-ci n’ont qu’un effet faible sur les croyances motivationnelles et sont prédictives, de manière indirecte, des stratégies d’apprentissage.
Certes, les conclusions de cette étude sont limitées par le plan corrélationnel : celui-ci ne permet pas de prouver formellement qu’il existe des liens de causalité dans les données. Toutefois, les analyses statistiques indiquent que le modèle de cheminement représente une explication des covariances observées dans les données qui ne peut pas être rejetée (Bollen, 1989). Il est évident que d’autres modèles théoriques, supposant des relations différentes ou ordonnant les variables de manière différente dans le modèle de cheminement pourraient, éventuellement, s’ajuster aux données tout aussi bien que le modèle présenté ici. En outre, à l’exception des habiletés en raisonnement numérique, toutes les données sont de type auto-rapporté, ce qui inclut une part de subjectivité substantielle dans les données. Finalement, bien que les bénéfices relatifs de l’application des diverses stratégies d’apprentissage soient reconnus (par exemple, Pintrich et collab., 1993), le manque de mesure de performance permettant de déterminer les effets des stratégies d’apprentissage dans notre échantillon est une autre limite de la présente étude dont il est important de tenir compte.
Deux pistes pour de futures recherches nous semblent prometteuses. Premièrement, il serait pertinent de s’intéresser au contexte d’apprentissage ; par exemple, à la façon dont les élèves perçoivent le climat de classe ou, mieux encore, en observant des interactions enseignant-élèves en classe (Jang, Reeve et Deci, 2010). En effet, le contexte pourrait jouer un rôle significatif dans les perceptions de la tâche, dans les buts d’accomplissement adoptés ainsi que dans les stratégies d’apprentissage mobilisées. L’ajout de variables modélisant le contexte d’apprentissage compléterait la perspective centrée sur l’individu que nous avons adoptée dans la présente étude. Finalement, un plan de recherche longitudinale, incluant, par exemple, trois temps de mesure au cours d’une année scolaire, avec répétition des mesures des croyances motivationnelles et des stratégies d’apprentissage, apporterait des informations sur la dynamique des relations entre ces variables ainsi que des informations sur leur causalité réciproque probable.
Parties annexes
Annexe
Items et échelles
Buts de compétence
Buts de maîtrise
Je veux apprendre autant que possible pendant les cours de maths.
C’est important pour moi de bien comprendre le cours de maths.
Je souhaite maîtriser ce qui est enseigné en maths.
J’apprécie les exercices de maths qui me permettent d’apprendre, même si je fais beaucoup de fautes.
Buts de maîtrise-défi
En maths, j’aime les exercices qui sont plutôt difficiles pour moi.
Je veux être confronté à des problèmes difficiles en maths.
En maths, j’aime les exercices difficiles s’ils me permettent d’apprendre quelque chose.
Buts de performance-approche
Mon but en maths est d’obtenir une meilleure moyenne que la plupart de mes camarades.
J’aimerais montrer à mon enseignant que je suis meilleur que mes camarades.
Je cherche à obtenir les meilleurs résultats de la classe.
En maths, je suis en compétition avec les autres élèves pour obtenir des notes élevées.
C’est important pour moi d’être meilleur que les autres en maths.
Je me sens compétent lorsque je réussis mieux que les autres en maths.
Buts de performance évitement
Mon but est d’éviter d’être parmi les plus nuls.
Je veux éviter que mon prof pense que je suis moins bon que les autres.
Je redoute que mes collègues pensent que je suis moins bon qu’eux.
Mon but est de ne pas paraître stupide en maths.
Mon but est de ne pas avoir la moins bonne note de la classe en maths.
Je veux éviter d’être inférieur aux autres.
Mon but est d’éviter qu’on pense que je suis nul en maths.
Buts d’évitement du travail
En maths, je veux faire le strict minimum pour obtenir une note (évaluation) suffisante.
Mon but est de travailler juste ce qu’il faut pour avoir la moyenne.
Obtenir une note largement supérieure à la moyenne en maths est inutile.
Perceptions de la tâche et de soi
Compétence perçue
J’ai souvent besoin d’aide en mathématiques (R)[*].
J’ai du mal à comprendre tout ce qui contient des mathématiques (R).
J’ai de mauvaises notes aux contrôles de maths (R).
J’ai de bonnes notes en mathématiques.
Je me suis toujours bien débrouillé en mathématiques.
Intérêt individuel
J’aime étudier les mathématiques.
J’attends le cours de mathématiques avec impatience.
Je déteste les mathématiques (R).
Utilité perçue
Pour moi, cela vaut la peine d’étudier les mathématiques, car cela m’aide dans le métier que j’apprends.
Pour moi, cela vaut la peine d’étudier les mathématiques, car cela améliore mes perspectives de carrière professionnelle.
En mathématiques, je vais apprendre beaucoup de choses qui m’aideront à trouver du travail après l’apprentissage.
En mathématiques, je vais apprendre beaucoup de choses qui m’aideront dans la vie de tous les jours.
Anxiété
Je m’inquiète souvent en pensant que j’aurai des difficultés en cours de mathématiques.
Je suis très tendu quand j’ai un devoir de mathématiques à faire.
Je deviens très nerveux quand je travaille à des problèmes de mathématiques.
Je me fais du souci à l’idée d’avoir de mauvaises notes en mathématiques.
J’ai peur de ne pas tout comprendre en maths.
Je me sens mal à l’aise quand je dois faire des mathématiques.
Stratégies d’apprentissage
Stratégies de répétition
Quand j’étudie les mathématiques, j’apprends le plus possible de choses par coeur.
Je refais certains problèmes de mathématiques si souvent que j’ai l’impression de pouvoir les résoudre les yeux fermés.
Pour bien retenir la méthode à suivre pour résoudre un problème de mathématiques, je revois les exemples encore et encore.
Pour apprendre les mathématiques, j’essaie de retenir toutes les étapes de la procédure.
Stratégies d’élaboration
Quand j’apprends des choses en mathématiques, j’essaie d’établir des relations avec des choses apprises dans d’autres matières.
Quand je résous un problème de mathématiques, je réfléchis à la façon dont on pourrait appliquer la solution à d’autres problèmes.
Quand je ne comprends pas quelque chose en mathématiques, je cherche un complément d’information pour mieux cerner le problème.
Je m’aide avec des exemples pour effectuer des nouveaux exercices de mathématiques.
J’essaie de comprendre de nouveaux sujets de mathématiques en les mettant en relation avec des choses que je connais déjà.
Quand je résous un problème de mathématiques, je cherche des liens avec d’autres problèmes.
Quand je résous un problème de mathématiques, je réfléchis comment il pourrait me servir en pratique.
Stratégies métacognitives
Avant de faire un calcul, j’essaie d’estimer le résultat que je vais trouver.
Avant de faire un exercice de mathématiques, je me demande quelles pourraient être les difficultés éventuelles.
Avant de faire un exercice de maths, je fais un plan pour savoir comment je vais faire.
Quand j’étudie les mathématiques, je commence par déterminer exactement ce qu’il faut que j’apprenne.
Quand j’étudie les mathématiques, j’essaie de déterminer ce que je n’ai pas encore compris.
Quand j’étudie les mathématiques pour un contrôle, j’essaie de déterminer quels sont les points les plus importants à apprendre.
Je prends le temps de réfléchir à la façon de résoudre un problème de maths avant de commencer.
Lorsque je fais un long exercice de mathématiques, je vérifie mes calculs au fur et à mesure.
Quand j’ai terminé un exercice de mathématiques, je vérifie mes calculs.
En mathématiques, je me demande si mes réponses ont du sens, si elles sont logiques.
Quand j’étudie les mathématiques, je m’oblige à vérifier si j’ai bien retenu les points sur lesquels j’ai déjà travaillé.
Quand j’ai terminé un exercice, je cherche si j’ai fait des erreurs.
Pendant que je fais un exercice de maths, je vérifie que je fais bien ce qui est demandé.
Après avoir résolu un problème de maths, je me demande si j’ai vraiment répondu à la question.
Le symbole (R) signifie que le score pour l’item concerné est inversé lorsqu’il s’agit de calculer le score d’échelle.
Remerciements
Nous tenons à remercier Delphine Rinaldi Davinroy et ElisabethIssaieva Moubarak-Nahra pour leurs commentaires qui ontcontribué à considérablement améliorer laqualité de cet article.
Note biographique
Jean-Louis Berger est chercheur sénior (senior researcher),à l’Institut fédéral des hautesétudes en formation professionnelle (EHB IFFP IUFFP), en Suisse.
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