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Est-ce que l’école doit instruire ou socialiser les élèves ? Ce collectif tente de répondre à cette question. La première partie, comprenant neuf chapitres, soulève plutôt un débat entre divers points de vue théoriques au sujet des notions de socialisation et d’instruction. En voici d’ailleurs un bref résumé. Le chapitre 1 montre que la responsabilité pédagogique est maintenant une question de culture de masse. Le chapitre 2 indique que l’apprentissage est séparé du quotidien, ce qui préparerait à la compétition individuelle, mais peu à la vie collective. Le chapitre 3 expose qu’une possible évolution de la dyade instruction/socialisation dépendrait de la différence entre les tâches enseignantes au primaire et au secondaire, du statut de professionnalité et du curriculum adopté. Le chapitre 4 apporte une critique de l’éducation thérapeutique proposée au chapitre 6. Le chapitre 5 montre l’importance de saisir ce qui se joue dans la reconnaissance de l’élève et de l’enseignant concernant l’instruction et la socialisation. Le chapitre 6 explique le phénomène de  psychologisation individualisante de la vie humaine qui se traduirait, dans les écoles, sous la forme d’une éducation thérapeutique. Le chapitre 7 stipule que la notion d’estime de soi ne devrait pas être appréhendée par une éducation thérapeutique, mais par une reconnaissance construite collectivement. Le chapitre 8 traite du type de socialisation que l’enseignement devrait prioriser : former les élèves pour le collectif ou l’individuel. Enfin, le chapitre 9 propose une reconstruction des pratiques éducatives qui se traduisent par quatre compétences complexes à développer dans une praxis éducative. Pour sa part, la seconde partie, comprenant 11 chapitres, aborde la question sous un angle interculturel en s’appuyant sur des dimensions empiriques propres aux pays étudiés.

Les forces de ce collectif résident certainement dans la manière plurielle d’aborder les notions de socialisation et d’instruction sous des angles sociologiques, anthropologiques, historiques, géographiques, multiculturels, etc. L’ouvrage apporte une fine compréhension des enjeux actuels qui se posent dans les institutions scolaires concernant les fonctions de socialisation et d’instruction. Il montre également l’importance de poursuivre des recherches en éducation pour repenser aux pratiques enseignantes. Quant aux faiblesses, elles se retrouvent essentiellement dans l’ordre selon lequel les chapitres sont présentés. À cet effet, les chapitres 6 et 7, rédigés par Lenoir, sont cités à plusieurs reprises dans les autres chapitres et il aurait été facilitant pour la compréhension de certains passages de les lire au tout début du collectif. Enfin, cet ouvrage aurait très bien pu être publié en deux tomes en séparant les deux parties.

Néanmoins, je recommande la lecture de ce collectif qui suscite plusieurs débats autour des fonctions que l’école devrait prioriser dans sa mission éducative. Il s’avère particulièrement judicieux pour la formation initiale à l’enseignement afin d’éveiller des prises de conscience par rapport à la manière de concevoir l’éducation, la socialisation ou l’instruction. Pour terminer, cet ouvrage deviendra certainement un incontournable pour la recherche en éducation et les domaines connexes en sciences sociales, qui s’intéressent à une reconstruction des pratiques enseignantes.