Volume 48, numéro 2, automne 2016 Sociologie narrative : le pouvoir du récit Narrative sociology: the power of storytelling Sous la direction de Jean-François Laé, Annick Madec et Numa Murard
Sommaire (18 articles)
Première partie : récits publics, biens du commun / Public Accounts, common goods
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La sociologie narrative : un artisanat civil
Annick Madec
p. 23–43
RésuméFR :
Cet article propose une discussion sur la sociologie narrative ainsi que deux courts récits. La construction des récits respecte les traditions de la discipline en posant comme grilles de lecture de la réalité sociale des connaissances accumulées par les sciences sociales et en mobilisant les outils classiques de la sociologie. L’enquête est au coeur de cette manière de pratiquer le métier de sociologue. Mais la narration respecte aussi une autre tradition qui est celle, propre à l’espèce humaine, celle d’échanger oralement, civilement, sur ses expériences. La sociologie narrative s’inscrit dans une longue tradition, celle de la pensée qui rend compte du réel par l’écriture.
EN :
This article presents a discussion on narrative sociology as well as two short stories. The construction of the stories complies with the discipline’s traditions by using knowledge accumulated by social sciences as a reading grid of social reality and mobilizing the classic tools of sociology. Investigating is at the heart of this way of practicing sociology. But storytelling also follows another tradition, which is specific to the human species : that of orally and civilly exchanging on one’s experience. Narrative sociology is part of the long tradition of thinking on reality through writing.
ES :
Este artículo propone una discusión acerca de la sociología narrativa así como de dos cortos relatos. La construcción de estos relatos respeta las tradiciones de la disciplina, a partir de una lectura de la realidad social, de los conocimientos acumulados por las ciencias sociales y utilizando las herramientas clásicas de la sociología. La investigación constituye el centro de esta manera de practicar el oficio de sociólogo. Pero la narración respeta igualmente otra tradición propia de la especie humana : intercambiar de forma oral, civilmente, acerca de sus experiencias. La sociología narrativa se inscribe en una larga tradición, aquella del pensamiento que da cuenta de lo real a través de la escritura.
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L’introuvable authenticité du récit ouvrier
Corinne Grenouillet
p. 45–62
RésuméFR :
Partant de la définition de l’authentique écrivain prolétarien donnée par Henry Poulaille dans les années 1930, cet article s’interroge sur la pérennité et la validité d’une telle conception aujourd’hui. Il est demandé à l’auteur ouvrier de raconter, de témoigner — et cette demande sociale, parfois explicitée, est tout d’abord replacée dans « l’ère du témoin » ou du « storytelling ». Or, il s’avère d’une part que la plupart des récits ouvriers publiés au tournant du xxie siècle privilégient d’autres configurations que l’agencement narratif, qu’ils mêlent discours et récit, choisissant d’autres formes que le récit (le journal, le fragment, le portrait par exemple). La lisibilité et la diffusion éditoriale de ces récits exigent d’autre part l’intervention de passeurs : sociologues, journalistes, enseignants, hommes et femmes de l’ombre éditoriale, sans lesquels ils restent lettre morte, ce qui invalide l’idée d’une production spontanée ou totalement originale.
EN :
Starting with Henry Poulaille’s 1930s definition of the genuine proletarian writer, this article questions the durability and validity of such a concept today. The worker writer is called upon to narrate, to bear witness—and this social request, which is sometimes spelled out, is first put back in “the age of the witness” or “the age of storytelling”. But it turns out, on the one hand, that most worker stories published at the turn of the 21st century favour other configurations than the narrative arrangement ; they mix discourse and stories, choosing other forms instead of the story (such as the diary, the fragment, the portrait). On the other hand, the readability and dissemination of these stories require the support of smugglers : sociologists, journalists, teachers, the men and women of publishing who work in the shadows, without which these stories remain useless, a fact that invalidates the idea of a spontaneous or fully genuine production.
ES :
Partiendo de la definición del “auténtico” escritor proletario, desarrollada por Henry Poulaille en los años 1930, este artículo se interroga acerca de la perennidad y validez de tal concepción en la actualidad. Al autor obrero se le pidió relatar, dar su testimonio —y esta solicitud social, a veces explícita, es inicialmente relocalizada en “la era del testimonio” o de la narrativa (storytelling). Ahora bien, por una parte, la mayoría de los relatos obreros publicados a inicios del siglo xxi privilegian configuraciones diferentes a la narrativa, donde mezclan discursos y relatos, escogen formas diferentes al relato (por ejemplo, el periódico, el fragmento, el retrato). La legibilidad y la difusión editorial de estos relatos exigen, por otra parte, la intervención de algunos intermediarios : sociólogos, periodistas, educadores, hombres y mujeres a la sombra editorial, sin los cuales serían letra muerta, lo que invalidaría la idea de la producción espontánea o totalmente original.
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Le rappeur (et le) sociologue
Mathieu Marquet
p. 63–76
RésuméFR :
Il ne faut pas, lorsqu’on étudie le rap, y voir un seul matériau sociologique et oublier qu’il s’agit d’une création artistique. Toutefois, de nombreux textes, notamment quand ils sont à dimension autobiographique, sont source de connaissance. Les rappeurs produisent en effet, par des récits rimés, du savoir et des analyses sur des lieux, des modes de vie, des situations et des ressentis, souvent rattachés aux mondes et expériences minoritaires. Le traitement et la définition de ces sujets sont généralement réservés aux groupes et individus légitimés à s’exprimer dans l’espace public : politiques, journalistes ou scientifiques jouissent en quelque sorte d’un monopole sur la question, qui s’accompagne d’un rejet des compétences et des savoirs profanes. Les rappeurs semblent alors résister au risque d’aliénation que comporte la délégation de leur expérience ou de leur parole (à un chercheur, par exemple) : parlant par eux-mêmes (et souvent d’eux-mêmes), ils contredisent ou complètent les sociologues, dialoguent avec eux, parfois même s’y associent. Apporter ainsi des éléments de compréhension et d’analyse du monde social dans et par la chanson permet alors de multiplier les lieux de fabrication du savoir, d’en démocratiser la production et la diffusion.
EN :
When rap music is studied, it is a mistake to see it only through a sociological point of view and forget that it is first and foremost an artistic creation. However, many texts are a source of knowledge and in particular those which are tinged with an autobiographical aspect. Indeed, rap singers’s rimed stories are a means to construe and know more about places, lifestyles, situations and feelings, which are often related to worlds and experiences that belong to a minority. In general, only groups and individuals that are legitimate to express their opinion in the public space tackle the treatment and the definition of these topics — politicians, journalists or scientists have a monopolistic position as regards these topics and reject competences and sources of knowledge that come from laypersons. There seems to be then no risks of alienation at all for rap singers — risks that are inherent in the delegation of one’s experience or one’s word (to a researcher for example). Rap singers talk by themselves (and often about themselves), they dispute or corroborate sociologists’s ideas, talk to them, and sometimes even work with them. Bringing thus elements that help understand and analyse the social world in and by songs enables the multiplication of the places of knowledge production and a wider access to its production and dissemination.
ES :
Cuando se estudia el rap, en éste no debe verse tan sólo un material sociológico y olvidar que se trata de una creación artística. No obstante, numerosos textos, particularmente cuando éstos son de carácter autobiográfico, son fuente de conocimiento. En efecto, los raperos se expresan por medio de relatos rítmicos, del saber y del análisis acerca de los lugares, de los modos de vida, de las situaciones y de lo experimentado, con frecuencia asociados a mundos y experiencias minoritarias. El tratamiento y la definición de estos temas están generalmente reservados a los grupos e individuos legitimados para expresarse en el espacio público : políticos, periodistas o científicos que, en cierta forma, gozan de un monopolio del tema, acompañados de un rechazo de las competencias y de los saberes profanos. Los raperos parecen entonces resistir al riesgo de la alienación que conlleva delegar su experiencia o su palabra (por ejemplo, a un investigador) : hablando por ellos mismos (y, con frecuencia, acerca de ellos mismos), contradiciendo o complementando a los sociólogos, dialogando con ellos, a veces inclusive asociándose con ellos. De esta manera, contribuir a comprender y analizar el mundo social a través de la canción y por medio de ella, permite entonces multiplicar los lugares de fabricación del saber, así como democratizar la producción y la difusión.
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Les hobos américains, au croisement des écritures
Alice Béja
p. 77–94
RésuméFR :
Comment comprendre le lien entre les sans-abris d’aujourd’hui et les vagabonds de la fin du xixe siècle aux États-Unis ? La figure du hobo, icône culturelle américaine, se construit au tournant du xxe siècle à travers une hybridation des écritures, au carrefour entre littérature, témoignage et sociologie. À travers un panorama des écrits de et sur les vagabonds, de Josiah Flynt à Jack Kerouac, en passant par Jack London et Nels Anderson, cet article cherche à analyser la manière dont le personnage du hobo est idéalisé, mythifié, s’éloignant progressivement aussi bien de la critique du capitalisme qu’il incarne à ses débuts que des réalités de la vie des personnes à la rue depuis les années 1970. À la « culture hobo » du début du xxe siècle, caractérisée par des lieux (la Hobohème analysée par Anderson), des pratiques et des engagements spécifiques, se substitue une image de l’individu — masculin, blanc, hétérosexuel — qui part sur la grand-route en quête d’aventure. Les déterminants sociologiques et économiques de la condition du vagabond sont mis de côté ; le romantisme du personnage du hobo lui ôte sa portée contestataire en même temps qu’il relègue les sans-abris contemporains au statut de victimes.
EN :
What is the link between the homeless of today and the hobos of the end of the 19th century in the United States ? The hobo character, an American cultural icon, came into existence at the turn of the 20th century through the hybridization of different writing genres, at a crossroads between literature, testimonies and sociology. Through an overview of the writing by and on hobos, from Josiah Flynt to Jack Kerouac, including Jack London and Nels Anderson, this article seeks to analyze the way in which the hobo character was idealized, given a mythical status, and then gradually removed from the criticism of capitalism it embodied in its first years as well as from the actual living conditions of street people since the 1970s. The early 20th century “Hobo culture”, featuring places (Hobohemia analyzed by Anderson), practices and specific commitments is replaced by the figure of an individual—male, white, heterosexual—who goes on the road in search of adventure. The sociological and economic determinants of the hobo’s condition are set aside ; the romanticism of the hobo character negates his dissenting nature and at the same time confines today’s homeless people to the status of victims.
ES :
¿Cómo comprender el vínculo existente entre los destechados de hoy día y los vagabundos de finales del siglo xix en Estados Unidos ? La figura del hobo (vagabundo), icono cultural estadounidense, se construye a finales del siglo xx a través de una hibridación de las escrituras, en el cruce de caminos entre la literatura, los testimonios y la sociología. A través de un panorama de obras escritas acerca de los vagabundos, de Josiah Flynt a Jack Kerouac, pasando por Jack London y Nels Anderson, este artículo busca analizar la manera como el personaje del vagabundo es idealizado y mitificado, alejándose progresivamente tanto de la crítica del capitalismo que encarna en sus inicios, como de las realidades de la vida de las personas de la calle desde los años 1970. A la llamada “cultura hobo” de comienzos del siglo xx, caracterizada por lugares (la hobohemia, analizada por Anderson), prácticas y luchas específicas, la sustituye una imagen del individuo “masculino, blanco, heterosexual” que parte en búsqueda de aventuras. Las determinantes sociológicas y económicas de la condición del vagabundo se colocan a un lado. El romanticismo del personaje del vagabundo le transfiere su actitud anti-establecimiento, al mismo tiempo que relega a los destechados contemporáneos al estatus de víctimas.
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Circulation, échanges et mises en scène des récits d’enfants placés
Émilie Potin
p. 95–117
RésuméFR :
Comment sont réceptionnés les récits par les lecteurs ? Cet article prétend traiter cette question à partir de l’analyse des formes de réception des publications liées à une enquête sociologique sur les placements d’enfants. L’auteure rend compte d’échanges avec des lecteurs et montre le continuum entre la narration sociologique et les enquêtes menées par les personnes concernées : les récits publicisés appellent d’autres récits. Dans la perspective d’un rapport réversible entre connaissance et reconnaissance, l’article invite à remettre en question le pouvoir des récits pour les lecteurs et le pouvoir des retours des lecteurs pour l’analyse sociologique. Les formes de mobilisation des récits par les lecteurs montrent que la narration sociologique participe au dialogue social en exposant des situations singulières pour mieux les inscrire dans la dialectique du social entre eux et moi ; eux et nous ; avant et aujourd’hui ; ici et là-bas. Les récits donnent du pouvoir collectif quand ils permettent de se relier à d’autres en montrant les logiques afférentes à l’institution du placement et ainsi replacer les responsabilités individuelles dans les responsabilités collectives.
D’un point de vue méthodologique, l’expérience-enquête sur les réceptions relève d’une analyse a posteriori des interactions qui ont pris la forme de correspondance numérique, de communication téléphonique, de rencontre virtuelle et réelle.
EN :
How do readers receive narratives ? This article sets out to look at this issue by analyzing the ways in which publications related to a sociological survey on child placement are received. The author reports on exchanges with readers and shows the continuum between sociological narration and enquiries made by the involved individuals : the advertised narratives give rise to other narratives. In the perspective of a reversible relation between knowledge and recognition, the article encourages the questioning of the power of narratives for readers and the power of reader feedback for sociological analysis. The readers’ forms of narrative mobilization show that sociological narration participates in the social dialogue by shedding light on unique situations in order to better include them in the social dialectic of “them and me” ; “them and us” ; “before and now” ; “here and there.” The narratives provide collective power when they make it possible to relate to others by showing the accompanying logic of the placement institution and in this way frame individual responsibilities within collective responsibilities. From a methodological point of view, the experiment-survey on receptions is part of an after-the-fact analysis of different types of interaction such as emails, phone calls, and virtual and face-to-face meetings.
ES :
¿Cómo reciben los lectores las narraciones ? Este artículo trata este asunto a partir del análisis de las formas de recepción de las publicaciones asociadas a una investigación sociológica acerca de la ubicación de menores. La autora da cuenta de intercambios con lectores y presenta la secuencia entre la narración sociológica y las investigaciones realizadas por las personas concernidas : las narraciones publicadas provocan otras narraciones. En la perspectiva de una relación reversible entre conocimiento y reconocimiento, este artículo invita a cuestionar el poder de las narraciones en los lectores y el poder de las reacciones de los lectores en el análisis sociológico. Las formas de movilización de las narraciones por parte de los lectores muestran que la narración sociológica participa en el diálogo social, exponiendo situaciones singulares para inscribirlas más adecuadamente en la dialéctica de lo social, entre “ellos y yo”, “ellos y nosotros”, “antes y ahora”, “aquí y allí”. Las narraciones otorgan un poder colectivo cuando éstas permiten asociarse a otras, mostrando las lógicas aferentes a la institución de la ubicación y así relocalizar las responsabilidades individuales en las responsabilidades colectivas. Desde un punto de vista metodológico, esta experiencia-investigación acerca de las formas de recepción depende de un análisis a posteriori de las interacciones que han tomado la forma de correspondencia numérica, de comunicación telefónica, de encuentro virtual y real.
Deuxième partie : récits du réel, formes narratives / Real stories, narrative forms
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Ferme ta caisse !
Jean-François Laé
p. 121–130
RésuméFR :
Le récit est une arme pour combattre le chiffre, pour redonner de la chair aux mots et aux gens. Pour autant, quel type d’attention voulons-nous poser ? Par les variations de sens, par le soulèvement des émotions, la narration exerce sur la pensée une force réflexive : un trait interprétatif, une préhension singulière, une posture sociale. Sa qualité sensible forme une modalité transmissible : une ambiance au travail, des bruits et des échos sur « les cheffes », des sentiments de crainte, des flashs sur les relations d’assujettissement. Une sociologie publique est à ce prix : faire passer un sens accessible à tous.
Dans le récit qui suit, je me suis attaché aux récits de trois jeunes filles en stage dans un supermarché du nord de Paris. Comment entrer « dans la place » ? En usant du « je », comme si nous étions à l’intérieur, nous nous heurtons aux clients, à leurs paniers ; aux caddies, à leurs achats ; au travail domestique, au nettoyage ; aux landaus des mères, aux promenades dans les rayons. Dans les coulisses, sans une parole ni un regard, les caissières se reposent et se surveillent. Énervement, fatigue, insulte, affolement, tandis que déjà la terrifiante voix de la cheffe hurle « aux caisses ».
EN :
Storytelling is a weapon to fight numbers, to give back flesh to words and people. But what do we want to focus on ? Through variations of meaning, by evoking emotions, narration exerts a reflexive force on thought : an interpretative feature, a particular insight, a social posture. Its sensitive quality embodies a communicable modality : an atmosphere at work, noises and echoes on the “bosses”, feelings of fear, flashes on relations of subjugation. This is the price of public sociology : to transmit meaning that is accessible to all. In the following narrative, I have followed the stories of three young women interns working in a northern Paris supermarket. How can one “get in” ? If we speak in the first person singular, “I”, as if we were inside, we offend the customers, their baskets ; shopping carts, their purchase items ; domestic work, cleaning ; the landau of mothers, the strolls in the aisles. In the wings, without a word or a gaze, the cashiers are resting and watch over each other. Irritation, fatigue, insults, panic, while the terrifying voice of the boss is already screaming, “Go back to work.”
ES :
La narración es un arma para combatir las cifras, para darle carne a las palabras y a la gente. No obstante, ¿qué tipo de atención deseamos darle ? Por medio de variaciones de sentido y de la insurrección de las emociones, la narración ejerce una fuerza reflexiva sobre el pensamiento : un rasgo interpretativo, una aprehensión singular, una postura social. Su calidad sensible da forma a una modalidad transmisible : un ambiente en el trabajo, ruidos y ecos acerca de los sentimientos de temor, destellos acerca de las relaciones de sometimiento. Una sociología pública conlleva ese precio : alcanzar un sentido accesible para todos. Este texto toma los relatos de tres chicas jóvenes en el contexto de una pasantía en un supermercado al norte de París. ¿Cómo entrar “en el lugar” ? Utilizando el “yo”, como si estuviésemos al interior, nos chocamos con los clientes, con sus cestos, con los ayudantes, sus compras, con el trabajo doméstico, la limpieza, los coches de las madres, las circulaciones entre las estanterías. Sin palabras ni miradas, las cajeras descansan y se vigilan. Ansiedad, cansancio, insultos, aturdimiento, mientras se escucha la temible voz de la jefa gritar “a sus cajas”.
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D’amour ou de raison ? Récit d’un mariage mixte en milieu pauvre
Fabien Deshayes
p. 131–153
RésuméFR :
Cet article narre un mariage mixte dans des familles pauvres, entre une femme française âgée de 60 ans et un homme algérien âgé de 44 ans, qui se sont connus quelques mois avant cette union. Des préparatifs à la cérémonie en passant par les conséquences de cette alliance sur le groupe familial, nous suivons chronologiquement les épreuves administratives que doit traverser le couple ainsi que les jugements des proches sur cet événement. En recueillant la parole des divers protagonistes concernés par ce mariage, ce texte souligne les bouleversements qu’il provoque. Cette union a des effets sur les équilibres antérieurs et modifie sensiblement la place des hébergés qui vivent dans l’appartement du couple ainsi que celle des proches. Ceux qu’il s’agissait d’épauler hier reculent dans la hiérarchie et se voient contraints d’envisager de nouvelles protections. Avec cette union, c’est tout le paysage des liens interpersonnels qui se recompose. L’étude ethnographique du mariage permet de lever le voile sur l’ampleur des liens d’interdépendance qui caractérisent les milieux pauvres, que ce soit par l’intermédiaire de transferts économiques, d’hébergements ou par tout un ensemble de services rendus.
EN :
This article tells the story of a mixed marriage in two poor families, between a 60-year-old French woman and a 44-year-old Algerian man who met a few months before tying the knot. From the preparations to the ceremony and including the effects of this alliance on the family group, we chronologically follow the bureaucratic hardships the couple must endure as well as the opinions of their relatives regarding this event. By collecting the words of the different players involved in this marriage, the text underlines the disruptions it has caused. This union has impacts on past arrangements and has considerably changed the position of the lodgers who live in the couple’s apartment as well as that of their relatives. Those who yesterday enjoyed support are now pushed down the hierarchical ladder and are forced to consider seeking new protections. With this union, the entire landscape of interpersonal relationships is reconfigured. The ethnographic study of marriage sheds light on the importance of relations of interdependence in poor environments, whether it is through economic transfers, lodging or a whole set of provided services.
ES :
Este artículo narra un matrimonio mixto entre dos personas pertenecientes a familias pobres, una mujer francesa de 60 años y un hombre argelino de 44 años, quienes se conocieron algunos meses antes de su unión. De los preparativos de la ceremonia a las consecuencias de esta alianza en el grupo familiar, hacemos un seguimiento cronológico de las dificultades administrativas que atraviesa la pareja, así como de los juicios de los parientes acerca del evento. Luego de documentar el discurso de los protagonistas concernidos por este matrimonio, el texto subraya los serios malestares que éste provoca. Esta unión tiene efectos sobre los equilibrios anteriores y modifica sensiblemente el lugar de quienes se encontraban albergados en el apartamento de la pareja, así como la vida de los parientes. Quienes ayer buscaban darse apoyo, retroceden en la jerarquía y se ven forzados a hacer frente a nuevas formas de protección. Esta unión lleva a una recomposición de todos los vínculos interpersonales. El estudio fotográfico del matrimonio permite revelar la amplitud de los vínculos de interdependencia que caracterizan los sectores pobres, ya sea a través de transferencias económicas, del alojamiento como tal, o por medio de un conjunto de servicios ofrecidos.
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Une fonctionnaire au travail
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Ce que la bande dessinée nous apprend de l’écriture sociologique
Pierre Nocerino
p. 169–193
RésuméFR :
La bande dessinée est un outil largement utilisé pour la diffusion des savoirs scientifiques vers un public élargi. Si la bande dessinée a été mobilisée dans plusieurs initiatives visant à vulgariser la sociologie, il est possible d’accentuer la collaboration entre ces deux disciplines. La bande dessinée s’apparente effectivement à une écriture spécifique, comparable et substituable à l’écriture textuelle classiquement utilisée en sciences sociales. Plus que de la vulgarisation, il est possible de s’essayer à une véritable sociologie dessinée. À partir d’une expérimentation de retranscription d’observations ethnographiques en bande dessinée, l’article décrit en quoi le changement de médium dans la restitution d’enquête nécessite une adaptation de la part du chercheur, qu’il soit auteur (soumis à de nouvelles règles d’écriture) ou lecteur (se heurtant à des informations inhabituelles). L’usage de la bande dessinée dans un texte universitaire, en bouleversant les habitudes d’écriture et de lecture, permet donc des gains de réflexivité importants sur chacune des étapes de l’enquête (récolte, analyse et restitution des données). Plus généralement, cette expérience incite à s’interroger sur l’intérêt qu’auraient les chercheurs à assumer la dimension narrative de leurs textes universitaires, notamment en vue de s’assurer la compréhension (et donc l’évaluation) par leurs pairs.
EN :
Comic strips are widely used to spread scientific knowledge to larger audiences. While they have been harnessed in several initiatives to popularize sociology, there is room to increase the collaboration between the two disciplines. Indeed, in social sciences, the comic strip can be considered a specific form of writing, comparable to and substitutable for classical text writing. Going beyond popularization, attempts to create a genuine drawn sociology become possible. Based on an experiment in which ethnographic observations were transcribed in a comic strip, the article describes how changing the medium used in reporting an investigation requires that the researcher make adaptations, whether it is as the author (new writing rules) or reader (required to decipher unusual information). By upsetting both writing and reading habits, the use of comic strips in scholarly texts therefore allows major reflexivity gains in each of the research’s steps (data collection, analysis and reporting). More generally, this experiment raises questions regarding the interest of researchers in taking on the narrative dimension of their academic texts, particularly to ensure the understanding (and therefore evaluation) of their peers.
ES :
Las historietas constituyen una herramienta ampliamente utilizada para la difusión de saberes científicos en un amplio público. Si las historietas han sido movilizadas en varias iniciativas buscando vulgarizar la sociología, es posible acentuar la colaboración entre éstas dos disciplinas. Las historietas están relacionadas efectivamente con una escritura específica, comparable a la escritura textual a la cual puede reemplazar, utilizada clásicamente en las ciencias sociales. A partir de una experiencia de retranscripción de observaciones etnográficas en forma de historietas, este artículo describe en qué medida el cambio de medio para la restitución de la investigación necesita una adaptación por parte del investigador, ya sea que se trate del autor (sometido a nuevas reglas de escritura) o del lector (confrontado a informaciones inhabituales). La utilización de la historieta en un contexto universitario trastorna los hábitos de escritura y de lectura, permitiendo importantes ganancias en materia de reflexión acerca de cada una de las etapas de la investigación (recolección de información, análisis y restitución de datos). Más generalmente, esta experiencia invita a interrogarse acerca del interés que tendrían los investigadores de asumir la dimensión narrativa de sus textos universitarios, principalmente con miras a asegurar la comprensión (y, con ella, la evaluación) de sus pares.
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L’animale, cinq jours à Athènes : avril 2015
Troisième partie : récits profanes, discours savants / Profane stories, academic discourse
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Un régime d’impersonnalité : à la découverte du style des carnets d’un maçon breton
Jean-Yves Trépos
p. 211–235
RésuméFR :
Des carnets de travail, tenus par un maçon entre 1928 et 1952, ont taraudé l’imagination sociologique de son fils, obligeant ce dernier à réviser à plusieurs reprises, sur une période de quarante ans, le cadre de leur analyse. L’article fait le récit des trois principales phases que cette obstination a connues, chacune révélant après coup ses limites et sa nécessité : la première traitait les carnets comme des matériaux pour une anthropologie des tâcherons, la deuxième valorisait la technique des relevés comme force intégratrice du travail et de son environnement, la troisième trouvait dans la posture d’effacement de l’écrivant la caractéristique d’une ontologie stylistique. Le sociologue opiniâtre et admiratif est ainsi passé des énonciateurs aux énoncés et des énoncés à l’énonciation. Mais s’il a fini par rendre justice aux carnets, il s’en faut de beaucoup qu’il ait réussi à mettre fin aux interrogations que nourrit encore leur existence comme collection.
EN :
Working notebooks, held by a French mason between 1928 and 1952 have haunted the sociological imagination of his son, during more than forty years, forcing him to frequently revise the frame of their analysis. The paper is an account of the three main steps whereby this perseverance was performed : the first one took the notebooks as materials to build an anthropology of piece-workers masons, the second gave great value to the capacity of the field data sampling to embed both the work and his environment, the third deemed the erasure of the writer as a characteristics of his stylistic ontology. The tenacious sociologist with his admiring gaze moved thus from the enunciators to the statements, and from the statements to the enunciation. But, if he succeeded to ensure justice to his inherited notebooks, he remains far from finding satisfactory answers to the questions their existence as a collection still generates.
ES :
Los diarios de trabajo escritos por un obrero entre 1928 y 1952 golpearon la imaginación sociológica de su hijo, obligándolo a revisar en varias ocasiones y durante un periodo de 40 años, el marco de su análisis. Este artículo narra las tres principales fases de esta empresa obstinada, cada una de las cuales revela sus límites y necesidades : la primera trata los diarios como materiales para una antropología de los trabajadores a destajo ; la segunda valoriza la técnica de las declaraciones como una fuerza integradora del trabajo y su entorno ; la tercera ve en la postura de la eliminación del escritor características propias de una ontología estilística. El sociólogo, obstinado y admirativo, pasa así de los enunciadores a los enunciados y de los enunciados a la enunciación. Pero, si finalmente logra hacer justicia a los diarios, se requiere mucha para poner fin a las interrogaciones que aún nutren su existencia como colección.
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« La galère commence » : narrations d’adolescentes sur les réseaux sociaux
Pauline Beunardeau
p. 237–259
RésuméFR :
Ils ont troqué la plume des générations précédentes contre un clavier d’ordinateur. Le phénomène connaît il y a quatre ans une explosion, à tel point qu’actuellement, plusieurs centaines de récits de vie — des « chroniques », les appelle-t-on — se disputent la popularité sur la toile. Âgés de 16 à 24 ans, les « chroniqueuses » et, en moindre proportion, les « chroniqueurs » de Facebook, célèbre site de réseautage social, se saisissent de cet espace numérique pour rédiger et publier leur histoire. Suivis par des milliers de fans, ils s’attachent à relater la vie quotidienne dans le décor des cités.
Pour ces jeunes issu·e·s de quartiers populaires, l’expérience d’écriture et de lecture participe de l’expérience de la « galère », autant que d’un travail réflexif sur celle-ci. Après avoir clarifié la nature de ces entreprises narratives, l’article propose donc d’explorer l’une d’entre elles, afin d’appréhender par la lecture romanesque la « galère » vécue au féminin.
EN :
The phenomenon appeared four years ago, to the point that currently, hundreds of life stories — named « chronicles » — are circulating on the Internet. The authors, aged between 16-25 years old, are using Facebook, the famous social network website, to write and publish their stories. Followed by thousands of fans, they are trying to relate their life in the hood. For those young people from poor neighborhoods, writing and reading experience is part of the experience of « the thug life », as well as a reflexive work on it. After clarifying the nature of these narrative undertakings, this article proposes to explore one of them, in order to understand the specific way girls live the « thug life ».
ES :
Cambiaron la pluma de las generaciones precedentes por el teclado de un computador. Hace cuatro años el fenómeno constituye una explosión, a tal punto que, actualmente, varios centenares de relatos de vida —llamados “blogs (bitácoras electrónicas)”— se disputan la popularidad en las redes sociales. Entre 16 y 24 años de edad, las “blogueras” y, en una menor proporción, los “blogueros” de Facebook, célebre sitio de las redes sociales, se toman este espacio digital para redactar y publicar sus historias. Seguidos por miles de admiradores, éstos se dedican a relatar la vida cotidiana en medios urbanos. Para estos jóvenes, provenientes de barrios populares, la experiencia de la escritura y la lectura hace parte de la experiencia de la “supervivencia”, así como de un trabajo reflexivo acerca de ésta. Después de haber aclarado la naturaleza de estas empresas narrativas, este artículo propone explorar una de ellas, con el fin de aprehender por medio de la escritura romanesca, la “supervivencia”, a partir de una experiencia femenina.
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De quelques usages sociologiques des récits en édition numérique
Claudine Dardy
p. 261–283
RésuméFR :
Le site éditeur Raconter la vie a constitué en deux ans d’existence une collection de six cents récits. L’abondance narrative ainsi suscitée déploie une mosaïque faite des fragments de vies multiples qui peut se prêter au regard sociologique au gré des angles de vue décelant tel ou tel motif ou thème. On peut encore s’essayer à identifier des types de récits : témoignage, récit de vie sociale ou même performance artistique. On a choisi, par l’enquête, de rencontrer quelques protagonistes de cette scène numérique, à commencer par la web éditrice pivot du site, ses collaborateurs, dits éditeurs communautaires, et les auteurs. L’intention était de situer la production de ces récits et leur proposition à l’édition numérique au regard des pratiques d’écriture et de lecture de leurs auteurs, prenant acte d’une culture de l’écrit, voire d’une culture littéraire en référence. Les auteurs évoquent des pratiques variées des carnets personnels à l’expérience d’ateliers d’écriture, en passant par les écrits professionnels. Beaucoup sont habiles à utiliser les ressources du numérique, blog, réseaux, plateforme. L’ombre d’une maison d’édition traditionnelle prestigieuse, l’engagement d’un professeur au collège de France, la compétence éditoriale — double lecture des textes, aide à la mise en forme technique — servent un désir latent de publication largement partagé par les auteurs. De quoi, pour ces derniers, se concevoir comme auteurs amateurs et caresser l’espoir d’une reconnaissance d’écrivain. À défaut d’impulser un impossible parlement des invisibles, le site éditeur préserve la forme narrative en même temps qu’il promeut une figure d’auteur amateur. Il pourrait s’apparenter à un atelier d’écriture grand format aux prismes du numérique ; on y est privé d’une sociabilité de lectures partagées mais autorisé aux jeux d’identités multiples, celles de ces personnages et auteurs appelés à raconter le roman vrai de la société et si fort en quête d’éditeurs.
EN :
The Raconter la vie publishing site has amassed a collection of six hundred narratives over its two years of existence. The large number of stories it has encouraged in this way presents a mosaic made up of fragments of numerous lives that can be the object of sociology from different angles focused on a specific pattern or topic. One can still try to identify types of narratives : testimonies, social life stories or even artistic performances. Through a survey, we have chosen to meet some of the main actors of this digital stage, starting with the site’s linchpin, the web editor, her contributors, called community editors, and the authors. Our goal was to examine the production of these stories and the proposal of their digital publication with respect to the authors’ writing and reading practices, taking into account a writing culture, or even the reference of a literary culture. The authors discuss a variety of practices from personal diaries to the experience of writing workshops and professional writing. Many of them are adept at using digital resources : blogs, networks and platforms. The support of a renowned traditional publisher, the commitment of a Collège de France professor, the editorial team’s competency—with double reading of manuscripts and help with technical layout—serve the authors’ widely shared latent desire to be published. Something that would help them consider themselves amateur authors and cherish the hope of being recognized as writers. Failing to promote an impossible parliament of invisible authors, the publisher’s site preserves the narrative form and at the same time supports the figure of the amateur author. It could be likened to a king size writing workshop with prisms of the digital world in which we are deprived of the sociability of shared readings, but allowed to play multiple identity games, those of characters and authors called upon to tell society’s genuine story and who are so strongly seeking publishers.
ES :
En sus dos años de existencia, el sitio Relatar la vida (Raconter la vie) ha recopilado una colección de seiscientos relatos. La abundancia narrativa así suscitada despliega un mosaico de fragmentos de vidas múltiples que puede prestarse para un análisis sociológico, según las perspectivas subyacentes en tal o cual motivo o tema. Es posible, igualmente, intentar identificar tipos de relatos : testimonios, relatos de vida social e inclusive presentaciones artísticas (performances). Por medio de una encuesta, se decidió entrevistar a algunos protagonistas de esta escena digital, inicialmente a la editora de la página web principal del sitio, luego a sus colaboradores, llamados editores comunitarios, y a los autores. La intención era ubicar la producción de estos relatos y su propuesta editorial digital, en función de las prácticas de escritura y lectura de sus autores, teniendo en cuenta la cultura del escrito, incluso el referente cultural literario. Los autores evocan variadas prácticas de los diarios personales que dan cuenta de la experiencia de los talleres de escritura, pasando además por escritos profesionales. Muchos utilizan hábilmente los recursos digitales, blogs, redes, plataformas. La sombra de una casa editorial tradicional prestigiosa, el compromiso de un profesor del Colegio de Francia, la competencia editorial —una doble lectura de textos, la ayuda técnica— se encuentran al servicio del deseo latente de publicar, deseo ampliamente compartido por los autores. De allí, pensarse como autores aficionados y acariciar la expectativa de un reconocimiento como escritor. A falta de impulsar un imposible parlamento de los invisibles, el sitio editorial preserva la forma narrativa, al mismo tiempo que promueve la figura del autor aficionado. Podría asemejarse a un taller de escritura de gran formato con tecnología digital, privándonos de la socialización de las lecturas compartidas, pero autorizando los juegos de múltiples identidades, aquellas de estos personajes y autores llamados a narrar la verdadera novela de la sociedad, quienes están tras una importante búsqueda de editores.
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Les locataires des HLM à la première personne : le récit comme acte scientifique et politique
Jeanne Demoulin et Paul Morin
p. 285–304
RésuméFR :
Dans le cadre d’une réflexion scientifique globale sur le savoir d’usage fondé sur l’expérience menée au sein d’une infrastructure de recherche insérée dans le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de l’Estrie — Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, une recherche partenariale a été conduite avec le milieu HLM québécois. Elle s’est structurée autour d’une méthodologie originale : la production de récits par des locataires impliqués dans leur milieu de vie. Le pari a été fait que les « présentations de soi » pouvaient être considérées comme autant de pièces qui composent la mosaïque de ce système social et constituaient ainsi un moyen d’enrichir la compréhension du milieu HLM québécois. Tout en donnant à lire des extraits de textes écrits par les locataires, l’article vise à contextualiser leur production et à mettre en évidence les apports et les limites de la démarche engagée. Ce faisant, il montre comment la production de récits peut constituer un acte tant scientifique que politique, qui conduit l’activité de recherche à se situer pleinement dans une dynamique de transformation sociale.
EN :
In a global scientific reflection on knowledge derived from usage based on an experiment carried out within a research infrastructure that is part of the Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de l’Estrie—Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, a partnership research was carried out with the Quebec public housing sector. It was structured around a novel methodology : the production of narratives by tenants who are active in their living environment. The assumption was made that the “self-presentations” could be considered to be pieces that together make up the mosaic of this social system and thus represent a means to enhance the understanding of the Quebec public housing sector. In addition to sharing extracts of works written by tenants, the article seeks to contextualize their production and bring to light the contributions and limits of the initiative that was undertaken. At the same time, it shows how the production of stories can represent a scientific as well as a political act, which makes it possible for the research activity to become an integral part of a social transformation dynamics.
ES :
En el marco de una reflexión científica global acerca del saber basado en la experiencia, realizada por un grupo de investigadores del Centro universitario integrado de salud y servicios sociales de la Estrie, del Centro hospitalario universitario de Sherbrooke, se llevó a cabo una investigación asociativa en el campo de la vivienda social (HLM) de Quebec. La investigación se estructuró alrededor de una metodología original : la producción de narraciones de los residentes implicados en su medio de vida. La hipótesis consistía en que las “presentaciones de sí” podían ser consideradas como piezas de un mosaico de ese sistema social, constituyendo una manera de enriquecer la comprensión del sector de la vivienda social en Quebec. El artículo permite leer fragmentos de textos escritos por los residentes y, a la vez, busca contextualizar su producción y hacer evidente los aportes y los límites de este proceso comprometido. Con esto se muestra cómo la producción de narraciones puede constituir un acto tanto científico como político, el cual sitúa plenamente la actividad de investigación en una dinámica de transformación social.
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Les milieux sociaux dans le roman canadien-français contemporain
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La sociologie, la littérature, le Québec et son identité
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L’« enfant du diable » : un conte moderne