FR :

À l’échelle mondiale, la pandémie de la COVID-19 a affecté de manière disproportionnée les migrants en termes de risque d’infection, de santé mentale, de processus d’immigration et d’accès aux services de santé et sociaux et aux ressources de soutien. Face à la COVID-19, les organismes communautaires et les établissements du réseau public de services de santé et services sociaux du Québec ont réagi en adaptant leurs pratiques et en offrant davantage de services à distance. Ils ont joué un rôle central dans la prévention et le traitement des infections à la COVID-19 et ils ont oeuvré en matière de protection sociale. Ce numéro thématique offre une réflexion approfondie des chercheurs de l’Institut universitaire SHERPA de Montréal sur les expériences des migrants pendant la pandémie de COVID-19 au Québec et sur la valorisation d’innovations dans les services communautaires et institutionnels mises en oeuvre.

EN :

This article describes the labour conditions of asylum seekers and other precarious migrant workers before and during the pandemic. Although this group’s labour conditions were already precarious prior to the pandemic, we show how those conditions worsened during the COVID crisis because of their racialized condition and precarious migratory status. We also discuss the systemic impacts these negative conditions had on their personal lives, families and communities in spite of measures implemented by the provincial and federal governments. The article describes the resilience and resistance shown through the actions of grassroots community organizations, with immigrant and migrant members denouncing the hardships in their working environments and their community life. A mixed-methods research approach was used to collect and analyze both quantitative and qualitative data. The discussion and conclusions recognize the crucial social contributions of precarious immigrants, highlighting both their individual and political and collective resistance to their racialized condition and the negative effects they suffered during the pandemic.

FR :

Selon les plus récentes estimations, la Loi sur l’assurance maladie laisse 50 000 à 70 000 migrants sans assurance médicale au Québec. L’accès aux soins de santé dans la province canadienne est, entre autres, lié au statut migratoire. Avant la pandémie, diverses barrières à l’accès aux soins (administratives, économiques, linguistiques, culturelles, etc.) avaient été identifiées. En tant que déterminant social de la santé, l’accès discriminatoire aux soins de santé nuit à la santé de ces migrants. Dans le contexte de la crise sanitaire liée à la COVID-19, les inégalités sociales en santé ont semblé s’intensifier pour les personnes issues des diverses communautés migrantes vivant à Montréal et ailleurs dans le monde. Grâce à un projet de recherche qualitatif, nous explorons dans cet article comment la position sociale, en particulier le statut migratoire, se traduit dans l’expérience vécue pendant la pandémie de COVID-19 pour les personnes migrantes sans assurance médicale vivant à Montréal. Pour atteindre cet objectif, nous avons mené des entretiens semi-structurés auprès de 19 personnes lors de la première et de la deuxième vague de pandémie (août 2020 à octobre 2020). Nos résultats suggèrent que le statut migratoire, à l’intersection avec le revenu, les conditions de travail et les rapports de genre, joue un rôle déterminant sur l’expérience vécue des participants avant et pendant la pandémie. Cela met en lumière l’urgence de mettre en place des politiques publiques plus inclusives pour assurer l’accès à l’aide sociale et à l’assurance médicale afin de remédier aux inégalités sociales en santé auxquelles sont confrontées les personnes migrantes sans assurance médicale vivant au Québec.

FR :

La pandémie de COVID-19 a eu de nombreux impacts sur les personnes réfugiées pour de nombreuses raisons : elles sont plus à risque de contracter la COVID-19 et de la transmettre (par exemple : forte représentativité dans les services essentiels, conditions de logement et utilisation des transports en commun), elles ont vu leur santé mentale fragilisée en raison des effets de certaines mesures sanitaires (par exemple : isolement social, résurgence de traumatismes passés, difficultés d’accès à des banques alimentaires). Cette population étant reconnue pour son moindre accès aux services de santé et sociaux, il importe de considérer, en contexte de pandémie, que la situation des personnes réfugiées devient un enjeu de santé publique. À leur arrivée au Québec, les personnes réfugiées réinstallées bénéficient d’une évaluation de leur bien-être et de leur état de santé physique, offerte par les équipes de santé des réfugiés dans chacune des 14 villes d’accueil de la province. Dans le contexte de la COVID-19, ces équipes de santé des réfugiés ont dû réajuster leurs activités puisque les arrivées de personnes réfugiées ont été suspendues. Cet article présente une analyse exploratoire des réflexions et des actions spécifiques de l’équipe de santé des réfugiés de la ville de Québec, qui a affiché une diversité d’initiatives. Les quatre entrevues semi-dirigées auprès de professionnelles de l’équipe visaient à documenter les changements amenés par la pandémie dans les activités de l’équipe. Les participantes ont expliqué s’être basées sur leur expérience auprès de cette population pour mettre en place des appels téléphoniques à visée préventive, tant sur les plans de la COVID-19 que des défis psychosociaux. Elles ont également collaboré avec les organismes et la direction de santé publique afin d’organiser la vaccination contre la COVID-19 à même leurs locaux. Finalement, elles ont assuré un mandat élargi auprès des personnes migrantes à statut précaire.

EN :

Prior studies on the impacts of the COVID-19 pandemic on migrants with precarious immigration status (refugees, asylum seekers, and undocumented migrants who arrived in a host country fewer than five years ago) have shown that they have been disproportionately affected by the pandemic because of their migration and socioeconomic status. Across the world, support systems for these marginalized migrants at local levels had to be reinvented to face the pandemic and ensure continuity of services. The objective of this systematic review was to provide a portrait of the interventions that were set up to address underserviced and marginalized migrants’ needs in Western countries during the pandemic and to categorize them by area of intervention. We identified peer-reviewed papers published in English and French between March 2020 and February 2022 in MEDLINE, Embase, PubMed and Web of Science. We included original research studies, commentaries, essays and editorials. For grey literature, we searched in Google Scholar and the websites of major health organizations and institutions that worked with underserviced and marginalized migrants. We also consulted the articles’ list of references. We included 31 publications: 15 peer-reviewed articles and 16 grey literature documents. Our results indicated that in order to address vulnerable newcomers’ needs, support systems intervened in the following areas: immigration, health and social services; raising awareness about COVID-19, food security, primary and secondary basic needs; and mental health and control of COVID-19 infection in settings with high concentrations of underserviced and marginalized migrants. Selected interventions adopted a collaborative approach between actors in different sectors. Most of the interventions were carried out by community-based organizations. Our scoping review highlights the role of community-based organizations in improving the living conditions of migrants with precarious immigration status during the pandemic and emphasizes the relevance of intersectoral collaboration as a strategy to respond effectively to the needs of underserviced and marginalized migrants in times of crisis.

EN :

The use of visual methods as a research tool has increased worldwide, along with the need to understand the nuanced and contextual benefits, challenges, and risks of their use. Based on participatory approaches, visual methods can offer an adaptable, interactive, and critical way of engaging with refugee young people, making research more accessible and representative. In Montreal, the COVID-19 pandemic forced programs, services and research involving refugee young people to adapt to meet the needs of this population while respecting physical distancing guidelines. Little is known about the strengths and challenges of using visual methods in the context of physical distancing, especially with refugee young people. In this paper, we describe some of the strengths and challenges of using photo journals, a form of visual methods, with refugee young people (11-17 years old) to document their experiences participating in Say Ça!, a Montreal community-based mentoring program, during the pandemic. Six young people participated in photo journals and individual interviews, and 11 volunteers participated in focus group discussions. The journals prompted young people to describe themselves, their favourite moments at Say Ça! and moments when things did not go as planned. In the findings, we describe opportunities and challenges of using photo journals to engage migrant young people in research during the pandemic. Photo journals facilitated building a rapport with young people, overcoming communication challenges, ensuring valid consent throughout the study, and addressing power dynamics between participants and researchers. Challenges included recruitment, confidentiality, and study logistics. In this paper, we present key lessons learned from using photo journals as a method to capture the perspectives of refugee young people. We argue that by including the views of service users, programs may gain a richer understanding of the elements that contribute to refugee young people wellbeing and, ultimately, help improve community-based support for this population in Montreal and other welcome programs.

FR :

L’augmentation de la population immigrante de la région de Montréal a entraîné une modification du portrait de la clientèle des professionnels en réadaptation auditive. Ceux-ci sont plus souvent amenés à intervenir auprès de familles immigrantes et de leurs enfants, une situation interculturelle qui amène son lot de défis pour les familles immigrantes, mais également pour les professionnels qui interviennent auprès de ces familles. Pourtant, alors que de nombreuses études portent sur le vécu des familles immigrantes, peu d’entre elles portent sur celui des professionnels. Cette recherche exploratoire porte donc sur le vécu des professionnels en réadaptation auditive du programme de déficience auditive pour les enfants jusqu’à 12 ans dans la région de Montréal. Les résultats indiquent que les interventions des professionnels de ce programme ont à coeur de proposer les thérapies les mieux adaptées à leur clientèle. Guidés par les règles des ordres professionnels et par le Code des professions du Québec, ils orientent leurs interventions afin d’amener les parents immigrants à accepter la thérapie proposée et à s’engager dans l’accompagnement de leur enfant, tout en cherchant à développer une collaboration constructive avec la famille. Cette approche entraîne l’émergence de plusieurs noeuds de tension dans leur collaboration avec ces familles : la perception que les professionnels ont de leur rôle et de celui des parents en premier lieu et la négociation identitaire que les professionnels doivent entreprendre pour répondre au mieux aux besoins de ces familles en second lieu. Les auteures proposent finalement quelques recommandations et des pistes pour des recherches futures.

FR :

L’identité collective est reconnue comme un facteur important pouvant contribuer au bien-être mental des individus appartenant à des minorités ethnolinguistiques. Or peu de recherches ont porté sur le cas des jeunes francophones en contexte minoritaire canadien, notamment les francophones du Manitoba. Cette recherche visait donc à analyser la relation entre le bien-être mental des jeunes francophones du Manitoba et trois dimensions de l’identité ethnolinguistique, soit l’attachement à l’identité francophone, l’attachement à l’identité anglophone et la perception de continuité ethnolinguistique. Un total de 545 francophones du Manitoba, âgés de 14 à 25 ans, ont répondu à un questionnaire. Les résultats révèlent que, bien qu’elles soient liées, les trois dimensions de l’identité ethnolinguistique en contexte francophone minoritaire représentent bel et bien des construits distincts. Par ailleurs, chacune de ces dimensions est liée de façon positive au bien-être mental des répondants. En somme, ces résultats illustrent l’importance de maintenir les efforts visant à promouvoir la vitalité ethnolinguistique des communautés francophones minoritaires et à soutenir les jeunes dans leur quête visant à intégrer leurs identités multiples.

FR :

Le besoin de catégoriser les individus afin de concevoir, mettre en oeuvre et évaluer les effets des programmes se confronte d’une part à la multiplicité des identités des individus et d’autre part aux stratégies des individus afin d’éviter une assignation identitaire qui ne corresponde pas, complètement ou en partie, à la réalité de leurs expériences. En employant un cadre d’analyse intersectionnelle, nous documentons les distorsions entre l’auto-identification et la catégorisation d’un échantillon de répondants travaillant dans divers secteurs d’activité. Cette recherche s’inscrit plus largement dans le cadre d’un projet-pilote sur l’expérience d’inclusion dans les organisations. Cet article aborde la nécessité de considérer la multiplicité, la fluidité et l’intersection des identités ainsi que la complexité de la réalité sociale, afin de repenser l’ingénierie de la diversité et dans le but d’étudier les discriminations et les inégalités à partir de l’expérience et des identités vécues des individus.