Volume 51, numéro 3, 2015 La corde bouffonne. De Banville à Apollinaire Sous la direction de Arnaud Bernadet et Bertrand Degott
Sommaire (9 articles)
Présentation
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Poésie lyrique et caricature dans les Odes funambulesques de Théodore de Banville
Barbara Bohac
p. 27–52
RésuméFR :
Refusant de voir dans les Odes funambulesques de Théodore de Banville une poésie préoccupée avant tout de la forme et cherchant à divertir le lecteur, cet article montre la force corrosive du projet banvillien : composer un « pamphlet » en vers contre une société bourgeoise dont les maîtres mots sont Argent, Réalisme et Prose, et faire de la poésie l’instrument d’une communion fraternelle rassemblant les hommes autour de valeurs spirituelles. Pour se faire écouter de ses contemporains autant que pour échapper à la platitude de son temps, Banville s’inspire de l’art des caricaturistes. Il leur emprunte des types qui tirent leur puissance de leur dimension synthétique ; il ridiculise les figures de l’autorité littéraire, sociale et politique au moyen de la charge ; il soulève masques et faux nez pour dévoiler le vrai visage d’une société se livrant à tous les excès en un carnaval débridé. La parodie discrédite les clichés et poncifs par lesquels cette société idéalise des réalités médiocres et prosaïques. La folie apparente de l’ode funambulesque cache ainsi une protestation contre l’époque. Comme chez Gavarni ou Daumier, la peinture des travers de la société contemporaine s’élève au-dessus de la banalité. La métamorphose féerique et comique des êtres grâce aux images, aux rimes, à l’intertexte, transporte le lecteur dans un monde où le rêve l’emporte sur la trivialité. L’ivresse des rythmes et des rimes « sauvages », libérés des règles étroites, dote l’univers quotidien d’une magie hyperbolique. Surtout, en créant une harmonie neuve et allègre, aisée à mémoriser, l’ivresse lyrique se propage aux lecteurs et les invite à communier dans une nouvelle manière de voir et de sentir.
EN :
Often seen as merely a poetical work that priorizes the reader’s entertainment, Odes funambulesques by Théodore de Banville is much more a corrosive project. In this article I argue that the author aims to compose a “pamphlet” in verse which targets the core values of the bourgeois society (from money to realism and prose) and to make of poems a way to bound people together in a spirit of universal brotherhood. As much in order to be heard by his contemporaries as to escape from the mundane, Banville takes his inspiration from the art of caricature. He borrows from its social types whose success lies in their power to capture the essence of different classes of people. He ridicules figures of literary, social and political authority by exaggerating their salient features. He takes off pantomime masks in order to reveal the true face of a society. The parody brings to light the commonplaces and stereotypes used by that society to idealize mediocre and humdrum realities. The apparent madness of the ode funambulesque leads thus to a protest against times. As with Gavarni or Daumier, the representation of the faults of contemporary society goes beyond the banal. The comic metamorphosis of beings through image, rhyme, and intertext transports the reader into a world where dream prevails over triviality. The drug-like effect of the rhythms and the “rimes sauvages,” freed from strict rules, clothes the everyday universe in a hyperbolic magic by creating a new and joyful harmony, which is easy to commit to memory. The lyric intoxication extends to the reader and invites him to experience a new way of seeing and feeling.
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Un singe à Cythère : Verlaine et la fête galante
Sébastien Mullier
p. 53–75
RésuméFR :
Banville déclarait dans Odes funambulesques : « Il ne serait pas impossible d’imaginer une nouvelle langue comique versifiée, appropriée à nos moeurs et à notre poésie actuelle, et qui procéderait du véritable génie de la versification française en cherchant dans la rime elle-même ses principaux moyens comiques. » De la peinture de Watteau à sa critique d’art, notre ambition est de montrer comment, pour Verlaine, cette entreprise anachronique et donc ironique qu’est la composition d’une fête galante en plein xixe siècle s’inscrit dans la continuité d’un art identifié comme spécifiquement français et spirituel, mais aussi d’un genre humoristique des arts décoratifs : de Watteau et du xviiie siècle, Verlaine a peut-être moins pris pour modèle la fête galante que la singerie, cette peinture grotesque et rocaille où abondent singes musiciens, singes peintres et singes funambules. En plaçant le singe lascif de « Cortège » au centre d’une étude de Fêtes galantes, nous tentons d’étudier comment Verlaine a rêvé la pratique de la versification française comme la gestuelle comique, équivoque et sensuelle d’un singe funambule. Nous nous efforçons de définir les enjeux secrets de pratiques chères à un poète dont Lepelletier notait la physionomie « babouinesque » : certes la rime mais aussi l’autoparodie, cette manière de se singer soi-même. Nous inscrivons le parti rocaille de Fêtes galantes dans un débat historique contre le modèle hugolien et romantique des héritiers de 1793 : nous érigeons ainsi le singe verlainien en figure du fondement de l’Art pour l’Art, ce qu’Edgar Poe avait appelé « principe poétique ».
EN :
Banville wrote in Odes funambulesques: “it is not impossible to imagine a new versified comic language adapted to our mores and to the poetry of the day, a language which would derive from the true genius of French versification, the rhyme itself being the source of its main comic devices.” By examining Watteau’s paintings and the comments of art critics, my goal is to show how, for Verlaine, to compose a fête galante in the Nineteenth Century—an anachronistic and therefore ironic enterprise—is consistent with an art identified as specifically French and witty, but also with a humorous genre in decorative arts. What indeed inspired Verlaine in Watteau’s works and in the Eighteenth Century more generally may not have been the fête galante but the singerie, that grotesque, rococo painting genre staging monkeys dressed up as musicians, painters and funambulists. By focusing my study on the lascivious monkey in “Cortège,” which is a part of Fêtes galantes, I try to analyze how Verlaine envisioned the practice of French versification as the comic, equivocal and sensuous style of a monkey walking on a tightrope. I attempt to define the secret stakes of practices to be found in the work of a poet whose “baboon-like” appearance was underlined by his friend and biographier Lepelletier—rhymes but also self-parody, a way of aping one’s own self. I examine the rococo dimension of Fêtes galantes in the context of a historical debate against the Hugolian, romantic model of the heirs to 1793. As a consequence, I consider Verlaine’s monkey the symbol of the founding principle of “art for art’s sake,” what Edgar Poe termed “the poetic principle.”
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Le comique en vers chez Rostand : le sous-rire du lecteur
Bertrand Degott
p. 77–97
RésuméFR :
Peu enclin aux formulations théoriques, Edmond Rostand doit beaucoup à Hugo mais aussi à Banville, dont il est l’héritier le plus populaire mais aussi le plus controversé. Notre projet est ici d’étudier les modalités du comique versifié dans son théâtre et dans sa poésie. Rostand traite la rime avec une virtuosité rare, notamment dans son théâtre où il demeure fidèle au vers traditionnel jusqu’à la mièvrerie ; ces tendances vont au reste s’affirmant à mesure que l’oeuvre progresse, au point d’hypertrophier la manière funambulesque. Toutefois, Rostand étant d’abord un élégiaque, sa poésie réserve au comique un usage plus mesuré. Au rire du spectateur de théâtre nous pouvons alors opposer le sous-rire du lecteur, conséquent à l’usage du vers.
EN :
Little inclined to theoretical formulations, Edmond Rostand owes a lot to Hugo but also to Banville, of whom Rostand is the most popular but also the most controversial heir. Our purpose here is to study the modalities of the versified comic in his drama and poetry. Rostand handles rhyme with rare brio, in particular in his drama where he remains faithful to traditional verse, sometimes to the point of insipidity. Such trends were to assert themselves as his work progressed, resulting in a noticeable hypertrophy of the funambulesque. However, Rostand being at first an elegiac, his poetry resorts to the comic in a more moderate way. To the laughter of the spectator in the theatre we can thus oppose the verse-induced sub-laughter of the reader.
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Le petit vers bouffe de Jarry et le poème
Armelle Hérisson
p. 99–116
RésuméFR :
À côté d’Ubu, des Minutes de sable mémorial et de ses grands romans, Alfred Jarry est le librettiste d’une douzaine d’opérettes-bouffes destinées à Claude Terrasse. En 1906, il place trois de ces opérettes, avec de petits Ubu, dans une collection qu’il intitule Théâtre mirlitonesque, semblant affirmer leur statut mineur. Il est vrai que les opérettes et les chansons ubuesques sont pleines de vers qu’on peut regarder comme « mauvais », qui mettent la règle métrique et les principes de la bienséance et du bon goût à distance. Ce sont les vers bouffons d’une poésie qui se nourrit de jeux de mots, parfois grossiers, où la définition de la rime frôle celle du calembour, modèle de comique sans esprit. Pourtant, c’est à un renversement des échelles de valeurs que Jarry invite en associant étroitement, dans son discours critique, le mirliton, l’écriture bouffe et l’idée de la poésie. Et si le vers mirlitonesque n’était pas « mauvais », mais seulement autre, et doté de pouvoirs de représentation supérieurs ? Et si le rire « bouffe » était le signal de sa haute qualité poétique ? L’élection du calembour au titre de figure emblème d’un dire poétique nouveau par Jarry n’est pas une boutade. Elle implique un point de vue sur le langage, où l’écho est signifiant. Elle tend à découvrir, sous couvert de poésie pour rire, une nouvelle idée du poème, conçu comme une petite machine à créer de drôles de rapports.
EN :
Alongside Ubu, Minutes de sable mémorial and his great novels, Alfred Jarry also wrote the librettos of a dozen comic operas for Claude Terrasse. In 1906, he put three of these operettas with short Ubu pieces into a collection that he called Théâtre mirlitonesque, a title that seems to confirm their status as minor literature. It is true that the operettas and the Ubu songs are full of lines that might be considered “bad,” departing from the poetic metre and the principles of decency and good taste. These are comic verses that feed on wordplays (some of them coarse), for which the definition of rhyme comes close to pun as the lowest form of wit. And yet, in his critical writings, Jarry draws a close parallel between the swazzle, comic writing and the idea of poetry, inviting the reader to admit a switch of conventional values. What if this verse were not “bad” but simply different, and endowed with superior powers of representation? What if the belly-laugh were an indicator of its high poetic quality? Jarry’s choice of the pun as the emblematic figure of a new poetic diction is a serious issue. It implies a view on language in which echoes are meaningful. It leads to the discovery, in the guise of humorous verse, of a new idea of what a poem is—a little device designed to create unexpectedly weird connections between words.
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Apollinaire, la rime et le rire. « Ça a l’air de rimer »
Philippe Wahl
p. 117–142
RésuméFR :
Guillaume Apollinaire apparaît comme un passeur entre deux siècles, mais aussi entre deux âges de la poésie. Son lyrisme offre un versant ludique à registres multiples (humour, ironie, comique), qui interroge la relation entre poésie et rire dans le contexte moderniste du jeune xxe siècle, entre tradition de l’esprit fumiste et essor du surréalisme. On propose quelques repères dans son parcours sous l’angle des formes poétiques, et plus particulièrement de la rime, lieu d’élection de l’équivoque. Ses textes manifestent des tensions entre héritage et subversion à travers diverses figures littéraires : la réception contrastée des Parnassiens Banville et Coppée, mais aussi la veine ironique d’Allais et Jarry, qu’Apollinaire oriente vers l’autodérision dans le conte « Le poète assassiné ». Sa création poétique oscille entre « l’Ordre » et « l’Aventure », du souvenir de la rime équivoque au déploiement du calembour comme principe dynamique du vers libre. Le choix des trois pièces poétiques mineures retenues par Breton dans son Anthologie de l’humour noir apporte un éclairage sur l’ambivalence de la postérité d’Apollinaire.
EN :
Guillaume Apollinaire stands as a ferryman between two centuries and two periods of French poetry. His lyricism reveals playful sides based on different registers (humour, irony, comedy), which question the relationship between poetry and laughter in the modernist context of the new Twentieth Century, from the tradition of l’esprit fumiste to the rise of Surrealism. This paper offers some reference points in Apollinaire’s works through poetic devices, and especially the rhyme as a mark of ambiguity. His texts show tensions between heritage and subversion in connection with outstanding figures of French literature: from the contrasted reception of Parnassians Banville and Coppée to the ironic vein of Allais and Jarry that Apollinaire’s tale Le poète assassiné changes into self-mockery. His poetic creation wavers somewhere between “Order” and “Adventure.” While it is reminiscent of equivocal rhymes in the tradition of French poetry, it further extends the use of pun that turns out to be a dynamic principle of his free verse. Finally, three minor poetic texts kept by Breton in his Anthologie de l’humour noir shed a new light on the ambivalence of Apollinaire’s posterity.
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L’aporie lyrique du comique : éléments de réflexion critique
Arnaud Bernadet
p. 143–164
RésuméFR :
L’un des couples épistémologiques régulièrement invoqué dans la critique littéraire est le rapport entre le « lyrique » et le « comique ». Pourtant présentés comme fondateurs dans l’histoire et la théorie modernes du poème, ces termes constituent peut-être moins un instrument heuristique qu’un véritable lieu commun. L’objectif de cet article est de mettre à l’étude quelques-uns des présupposés qui entourent la notion de « lyrique » en usage dans l’analyse comique du texte poétique. Car entre le « lyrique » et le « comique », c’est le second qui est souvent l’élément marqué, tandis que le premier ressortit plutôt au donné. D’un côté, en soulignant ses composantes pragmatiques et esthétiques, le comique engage une conception résolument hybride et polyphonique du texte ; de l’autre, le lyrique indexe une représentation éclectique, ambiguë, sinon stéréotypée du phénomène poétique.
EN :
The relationship between “lyric” form and “comic” expression is one of the key epistemological couples used in literary criticism. While both are seen as foundational in the modern history and theory of French poetry, these terms may be less of any heuristic interest than of a commonplace conceptual association. My goal here is to critically examine some of the presuppositions that lie in the notion of “lyric” when applied to analyze the comic devices in the poem. Indeed, such an opposition involves categorizing “comic” as the marked term, while “lyric” is considered to be the unmarked term. Although the notion of “comic” opens up a new avenue for the text based on its hybrid and polyphonic forms as much as its pragmatic and aesthetic effects, the notion of “lyric” rather refers to an eclectic, ambiguous, or even stereotyped vision of poetic writing.
Exercices de lecture
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Zola, le réalisme et l’imagination
François-Marie Mourad
p. 167–187
RésuméFR :
Zola, on le sait, réprouve une imagination livrée à elle-même. Une remarque polémique parue dans la presse en 1866 sert de point de départ à une réflexion sur le statut de cette faculté dans la tradition réaliste. Le discrédit zolien radicalise l’opposition entre les usages déréglés de la fiction et les enjeux épistémologiques d’une littérature concernée par le réel. La question est alors d’actualité si l’on en juge par les contrepoints apportés par Balzac, Hugo, Baudelaire, Flaubert, moins réticents sur le principe d’une contribution active de l’imagination au sein même du projet réaliste. Zola précisera sa poétique dans Le roman expérimental (1879). On retient l’idée d’une « déchéance de l’imagination » mais deux nuances essentielles tempèrent ce postulat naturaliste : traquée au sein de l’inventio, l’imagination est recyclée dans la dispositio et l’elocutio ; elle est ensuite hypostasiée dans ce que Zola appelle « le sens du réel », avatar du réalisme tempéramentiel, d’origine romantique, défendu dans Mes haines. En définitive, la position de Zola, quand on la contextualise, qu’on la compare et qu’on la relativise, n’est pas si éloignée d’autres revendications en faveur du réalisme artistique.
EN :
As one knows, Zola disapproved of imagination left unto itself. The starting point of our reflection on the status of imagination in the realist tradition is a polemical remark that Zola wrote in a newspaper in 1866. The disfavour of the imagination that Zola expresses toughens the opposition between the unchecked use of fiction and the epistemological issues raised by a literature concerned with the real. This question was quite topical at the time, as one can see from the counter-arguments made by Balzac, Hugo, Baudelaire, and Flaubert, who were less reluctant to recognize the active role of imagination within the realist project. Zola is more specific about his poetics in Le roman expérimental (1879). Accordingly, one must pay attention to the idea of the “decline of the imagination” (déchéance de l’imagination), but also to two important nuances, whose role is to moderate this realist postulate: tracked down within the notion of invention, imagination is recycled in disposition and elocution and eventually reified through what Zola terms “the sense of the real” (le sens du réel), an aftermath of the “réalisme tempéramentiel,” of Romantic origin, that he supported in Mes haines. All in all, Zola’s position, properly contextualized, compared and put into perspective, is not as remote as one would think from other claims to artistic realism.
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Clown et Masque : deux figures d’altérité dans le roman migrant Le pavillon des miroirs de Sergio Kokis
Marie Pascal
p. 189–204
RésuméFR :
Le pavillon des miroirs, roman autobiographique, présente un peintre écrivant sur son passé et imaginant un avenir meilleur. Au bord de la dépression, évoquant son enfance au Brésil, pays trop coloré et tumultueux, l’exilé se réfugie dans une pyramide et dans une attitude prostrée face à la nécessaire assimilation à un pays d’accueil jamais nommé. Mettant en mouvement non seulement deux attitudes opposées (envers le passé et le futur) mais aussi deux topoï (le Brésil, pays d’origine versus le Canada, pays d’accueil), les figures du clown et du masque sont développées tout au long de ce roman sur l’exil d’un artiste. En effet, Kokis file les métaphores annoncées par l’illustration-couverture et peint des figures de clowns exubérants et choquants, figures d’altérité rejetées par le monde qui les entoure. Parallèlement, les passages sur l’exil tendent à faire naître une figure plus fragile et subtile, celle du masque, discrète figure de l’Autre assimilé. Dans tous les cas, c’est l’Autre, le rejeté, le paria qui est présent et qui, dans ses différences, décrit le sentiment d’étrangeté de l’auteur. C’est par ce tourbillon de paradoxes que Kokis tente de représenter sa théorie artistique ainsi que la manière dont il perçoit la représentation de l’identité.
EN :
Le pavillon des miroirs is an autobiographical novel which represents a painter recounting his past while imagining a better future. On the edge of depression, evoking his Brazilian childhood, which was simultaneously too colourful and tumultuous, the exiled narrator takes shelter in a pyramid and in a prostrate position when faced with assimilation in his country of adoption, which remains unidentified in Kokis’ novel. This novel about the exile of an artist features two pictorial and philosophical figures and also constructs a contrast between two opposed attitudes (towards the past and towards the future), as well as between two opposed topoï (Brazil, the place of the narrator’s past and origin; versus Canada—one supposes—, the place of the present and the narrator’s new home): two specific figures, the clown and the mask, embody the two opposed situations. Indeed, Sergio Kokis develops the metaphors which are visible in the cover illustration of the book and depicts, using long sentences, exuberant and shocking clowns, figures of otherness that are immediately rejected by the world surrounding them. At the same time, some passages are focused on the time spent in exile and tend to give rise to a more fragile and subtle figure, that of the mask, which represents the Other assimilated by a world where he attempts to find another home. In all cases, it is the rejected Other, the pariah, who is present and who metaphorically describes the author’s feeling of being other. Indeed, it is through this cataclysm of opposing meanings and paradoxes that Kokis represents his artistic theory and constructs his own representation of multiple identities.