Historical Papers
Communications historiques
Volume 14, numéro 1, 1979 Saskatoon 1979
Sommaire (14 articles)
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Presidential Address: History and Nationality in Canada: Variations on an Old Theme
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“Thunder Gusts”: Popular Disturbances in Early French Canada
Terence Crowley
p. 11–32
RésuméFR :
L'auteur se penche sur les quelques occasions où les habitants de la Nouvelle-France se sont regroupés ou assemblés pour manifester collectivement bien que cela ait été illégal à l'époque. En général, ces démonstrations avaient lieu en temps de disette et de cherté des prix — particulièrement pendant les années 1704 à 1717 et 1757 à 1759 — mais il arrivait également qu'on s'assemble pour protester contre les corvées, ou encore, pour faire part de son mécontentement à l'égard de certaines mesures politiques ou religieuses.
Ces contestations se déroulaient sensiblement de la même façon et pour les mêmes raisons qu'en France sauf qu'elles étaient, ici, à la fois moins fréquentes et moins violentes. On s'assemblait dans un but précis, on s'armait souvent et on proférait parfois des menaces mais, plus souvent qu'autrement, on se dispersait après avoir été entendu ou lorsque les soldats étaient appelés sur les lieux. Il faut dire que les autorités étaient indulgentes à l'égard des participants, probablement parce qu'elles considéraient ces attroupements comme quasi légitimes.
Cette forme de contestation diminua pendant les trois premières décennies du régime britannique ; cependant, on trouva quand même moyen de résister à l'enrôlement dans la milice durant les années 1764, 1775 et 1794 de même qu'à la loi sur les chemins en 1796. Ceci se manifestant dans certaines des paroisses qui avaient fomenté des démonstrations populaires sous le régime français, l'auteur suggère qu'il y a là une tradition de contestation transmise d'une génération à l'autre. En somme, si les assemblées populaires ont, un peu partout, secoué la société au dix-huitième siècle, au Québec, elles n'ont pas suscité de changements radicaux avant l'avènement du dix-neuvième.
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Homeland to Hinterland: Political Transition in Manitoba, 1870 to 1879
Gerald Friesen
p. 33–47
RésuméFR :
Bien que la crise ministérielle de 1879 ne constitua qu'un bref moment d'instabilité politique au Manitoba, elle mit à jour les tensions existantes dans la société de l'époque. Jusqu'à date, on y a surtout vu une manifestation de l'animosité francophone-anglophone puisqu'elle mettait aux prises le premier ministre, John Norquay, et son bras droit canadien-français, Joseph Royal. Sans nier qu'il y ait une part de vérité dans cette assertion, l'auteur propose une nouvelle interprétation des faits beaucoup plus axée sur le problème des Métis, sur la place de Norquay dans la politique manitobaine et sur la question du rôle du système fédéral des partis dans la province du Manitoba.
Cette ré-interprétation d'un épisode mineur dans la politique provinciale implique également que soit modifiée l'approche de l'histoire domestique de l'ouest canadien. Au temps où la politique nationale était à la base de la pensée historique, c'est l'aspect animosité francophone-anglophone qui était mis en lumière et 1870 apparaissait comme la plaque tournante dans l'histoire du Manitoba. Maintenant qu'on s'applique à mieux tenir compte de la dimension culturelle, la crise ministérielle apparaît comme étant issue des nombreux changements qui s'opérèrent à l'époque aux niveaux du système des salaires, de la mesure du temps, du marché du travail et du concept de propriété. Conséquemment, 1870 ne constitue plus un point tournant ; il s'intègre plutôt dans une période de transition, couvrant les années 1840 à 1890, où la société d'alors cède le pas à une société capitaliste et industrielle.
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Canadian Families in Cultural Context: Hypotheses from the Mid‑Nineteenth Century
Chad M. Gaffield
p. 48–70
RésuméFR :
Cet article s'inscrit dans le cadre de l'histoire de la famille au Canada et remet en question certains stéréotypes concernant les familles canadiennes francophones et anglophones. Il s'attache tout particulièrement aux cantons d'Alfred et de Caledonia situés dans le comté de Prescott où les deux groupes sont bien représentés.
Les hypothèses qui y sont émises résultent d'une étude systématique des recensements de 1851, 1861 et 1871 et d'une lecture attentive des sources qualitatives disponibles. Elles concernent la dimension culturelle de l'histoire de la famille et touchent à trois éléments spécifiques : fonction de la famille et organisation domestique, structure familiale et composition du ménage, perspectives familiales en termes de terre et d'évaluation du sol.
Il appert donc, à l'examen des sources, qu'on retrouve chez les familles anglophones et francophones beaucoup plus de similitudes que de différences ; de fait, elles sont très semblables en tout ce qui concerne les deux premiers éléments et ce n'est qu'en regard de la terre qu'elles diffèrent sensiblement, les anglophones préférant les terres hautes et sèches et les francophones les terres basses et humides. Bien que ces constatations se rapportent aux seuls cantons d'Alfred et de Caledonia, on tient ici constamment compte du plus vaste environnement que constitute la vallée de l'Outaouais.
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The Family Economy and Work in an Industrializing City: Montreal in the 1870s
Bettina Bradbury
p. 71–96
RésuméFR :
Durant les années 1870, Montréal est une ville en transition ; depuis deux décennies déjà, elle se fabrique un nouveau profil géographique et on assiste à une réorganisation du monde du travail qui va modifier les bases mêmes de la vie familiale. Cet article se propose d'examiner l'économie familiale dans deux quartiers distincts de la ville — Sainte-Anne qui est déjà fortement industrialisé et Saint-Jacques qui est demeuré beaucoup plus artisanal — dans le but de mieux cerner la relation qui existe entre la famille et l'organisation des moyens de production.
Selon l'auteur, cette relation est complexe et bi-dimensionnelle. D'une part, la nature du travail disponible va déterminer quels membres de la famille sont plus susceptibles de travailler et ceci peut varier d'un quartier à l'autre ; d'autre part, la démographie et les attitudes culturelles des familles montréalaises vont tout également influencer les moyens de production. Ainsi, parce qu'il y a un grand nombre de femmes et d'enfants disponibles, les industries du textile et de la chaussure atteignent une place de choix dans l'économie de la ville ; par contre, le fait que tant de femmes et d'enfants travaillent dans ces industries fait baisser le salaire et nuit à la main-d'oeuvre spécialisée.
Dans la plupart des familles ouvrières, l'insuffisance des salaires, le chômage saisonnier et le surplus de main-d'oeuvre vont faire en sorte qu'il faudra plus d'un travailleur par famille pour assurer la subsistance. Règle générale, on semble avoir préféré mettre les garçons au travail plutôt que les femmes et les filles ; dans le quartier Sainte-Anne, il n'y a que les veuves et les femmes seules qui ont un emploi alors que dans Saint-Jacques, les femmes qui travaillent le font à la maison de par le système du travail au noir. Il arrive également, dans le cas des familles qui n'ont encore que de très jeunes enfants, qu'on tente de boucler le budget en prenant des pensionnaires ou en logeant avec la parenté. En somme, dans la ville qui s'industrialise, le cycle de la vie familiale, la disponibilité du travail et les valeurs culturelles ont, tour à tour, contribué à façonner tant la structure de la maisonnée que le modèle du travail familial.
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Feudal Constraint and Free Consent in the Making of Marriages in Medieval England: Widows in the King’s Gift
Sue Sheridan Walker
p. 97–110
RésuméFR :
Les documents administratifs et légaux de l'Angleterre médiévale attestent que le seigneur recevait des compensations financières en conséquence des droits qu'il détenait sur le mariage de ses vassaux, de leurs héritiers et de leurs veuves. C'est particulièrement sur le problème du remariage de ces dernières que cet article se penche. L'auteur se demande si ces droits laissaient une place au libre choix de la veuve, si la coutume anglaise a évolué dans le même sens que le droit canon en ce qui a trait au libre consentement des époux, et, si les querelles découlant de ces droits concernaient plus l'aspect de la taxation que celui des droits fondamentaux de la personne.
Il semble bien qu'au cours du treizième siècle, les veuves jouissaient effectivement du droit de choisir leur époux. Evidemment, elles devaient satisfaire aux droits du seigneur mais ces droits étaient maintenant beaucoup plus perçus comme une forme de revenus que comme le privilège de désigner l'époux. Plusieurs veuves, il est vrai, n'achetaient pas leur droit au libre choix et continuaient de laisser au seigneur le soin de leur attribuer un nouvel époux ; par contre, plusieurs autres se mariaient sans permission quitte à payer ensuite l'amende imposée ; enfin, il arrivait aussi qu'une veuve consente à se faire enlever, peut-être dans le but d'éviter la sanction pécuniaire. Somme toute, les veuves étaient maintenant maîtresses de leur remariage même si elles devaient pour cela offrir une compensation financière. La Grande Charte, en insistant sur le libre consentement, s'harmonisait fort bien avec le droit canon et anticipait ainsi la pratique future.
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Haugwitz, Kaunitz, and the Structure of Government in Austria under Maria Theresia, 1745 to 1761
Franz A.J. Szabo
p. 111–130
RésuméFR :
On analyse ici la nature des différends qui opposèrent les deux plus importants ministres de l'impératrice Marie Thérèse, le comte Friedrich Wilhelm Haugwitz et le prince Wenzel Anton Kaunitz. Ce faisant, on remet également en question la thèse généralement acceptée selon laquelle Kaunitz, ministre des affaires extérieures, commença à s'intéresser aux affaires intérieures et aux nouvelles structures administratives mises en place par Haugwitz quand ses mesures diplomatiques s'avérèrent inefficaces lors de la guerre de Sept Ans.
Cet article affirme plutôt que Kaunitz agissait en raison d'un principe, celui de la primauté des affaires intérieures ou domestiques, et que, de plus, il avait toujours été préoccupé par les problèmes domestiques de la monarchie. Les différends entre Haugwitz et Kaunitz en ce qui concerne les réformes intérieures se manifestèrent, de fait, dès 1747 et étaient issus d'une conception différente du gouvernement. Haugwitz s'inscrivait dans la tradition prévalant en Europe centrale et il avait consciemment modelé son programme de réformes sur l'exemple prussien alors que Kaunitz, imbu des Lumières, préconisait une conception plus moderne de l'état où l'administration bureaucratique centrale doit céder le pas à la séparation des pouvoirs. Au fond, bien que ces deux hommes furent tous deux de fervents protagonistes de l'absolutisme, ils s'opposèrent aux niveaux de la fin et des moyens. Les préoccupations de Haugwitz demeurèrent toujours axées sur l'aspect économique alors que celles de Kaunitz se voulaient plus éminemment sociales.
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“A Mighty Impartial Personage”: Disraeli’s Entry into the Tory Party
William A. Hayes
p. 131–146
RésuméFR :
A la lumière de certaines sources récemment mises à jour, l'auteur se propose de jeter un nouveau regard sur les débuts de la carrière politique de Benjamin Disraeli, c'est à dire sur les années qui précèdent son affiliation au parti conservateur. Si les historiens ont perçu le caractère désordonné et quelque peu excentrique de ces années comme étant tout simplement imputable à l'opportunisme de Disraeli, on estime ici que cet opportunisme doit être qualifié et que l'évolution qu'il a subit au cours de ces premières années a été vitale dans l'option apparemment abrupte qu'a prise Disraeli en faveur de ce parti.
Ces années ont, de fait, été des plus utiles. Les premières défaites ont vite instruit l'homme des enjeux de la politique et elles l'ont incité à réviser sa stratégie en fonction de buts à plus long terme ; de plus, il appert que, même si Disraeli a d'abord brigué les suffrages en tant que radical, il fut toujours, jusqu'à un certain point, un conservateur déguisé. Enfin, l'auteur souligne que, contrairement à ce que l'on a toujours cru, sa décision de se joindre aux conservateurs a été antérieure au manifeste de Peel et qu'elle n'a rien à voir avec les changements qui se sont opérés par la suite au sein du parti.
En somme, Disraeli s'est joint au parti de Wellington et de Lyndhurst et non à celui de Peel. Sa décision reflétait son désir de réintégrer une idéologie avec laquelle il avait des affinités ; elle manifestait sa confiance dans le futur et témoignait du mûrissement de sa perception d'un parti politique.
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Oppositions and Coalitions: James Gardiner and Saskatchewan Provincial Politics, 1929 to 1934
Norman Ward
p. 147–163
RésuméFR :
James Gardiner devint le premier chef de gouvernement en Saskatchewan à perdre le pouvoir alors que le parti libéral qu'il dirigeait détenait le plus grand nombre de sièges. Après sa défaite, en 1929, il mit un temps considérable à déterminer la meilleure ligne de conduite à suivre pour son parti : il devint chef de l'Opposition en choisissant de l'être sans s'allier à aucun autre des partis en cause.
Au cours des années qui suivirent, toutefois, les circonstances furent telles qu'il dût, en deux occasions, considérer la possibilité d'une coalition avec M.J. Coldwell et ses partisans. De plus, en 1932, il fut également sollicité par le gouvernement de J.T.M. Anderson en vue d'une coalition qui aurait permis à trois libéraux, dont Gardiner, de siéger au Cabinet. Cependant, rien dans tout cela ne cadrait avec la conception qu'entretenait Gardiner du rôle de chef de l'Opposition. Pour lui, ce rôle sous-entendait, à la fois, la préservation du système parlementaire et le maintien de celui des partis.
Cette politique s'avéra d'ailleurs d'une grande importance dans l'histoire des partis politiques en Saskatchewan et pour le sien en particulier. Le talent qu'il mit à y maintenir une organisation politique vigoureuse, et ce, en dépit du fait qu'il était démuni de toutes les ressources financières dévolues au parti au pouvoir, fit en sorte que, dès 1934, la coalition qui gardait Anderson au pouvoir fut non seulement défaite mais détruite.
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An Authorative Voice: the Reorientation of the Canadian Farmers’ Movement, 1935 to 1945
Ian MacPherson
p. 164–181
RésuméFR :
L'agriculture canadienne a subit de multiples transformations depuis le siècle dernier ; divers organismes ont tour à tour jalonné l'éveil de la conscience rurale qu'on observe dans la deuxième moitié du dix-neuvième siècle de même qu'ils ont caractérisé le militantisme qui se manifeste au début du vingtième. Les années trente verront ce mouvement adopter une orientation beaucoup plus axée sur les problèmes du marché et, en 1935, on fonde la Canadian Chamber of Agriculture. C'est sur les activités qui ont marqué la première décennie de cette association que se penche l'auteur de cet article.
Un des premiers objectifs de cet organisme fut d'établir de solides structures régionales-provinciales. La Chambre préconisait la mise sur pied d'un marché ordonné, l'instauration de services sociaux adéquats en milieu rural, l'amélioration du système de crédit en vigueur et l'élaboration d'une politique nationale convenable en matière d'agriculture. Au cours de la deuxième grande guerre, l'association eu gain de cause sur plusieurs points. Cependant, en cours de route, le mouvement se transforma peu à peu en groupe de pression et perdit graduellement son aspect propagandiste. On semblait désormais accepter que, bien qu'il soit maintenant plus clairement défini, le rôle de l'agriculture était appelé à diminuer dans la vie canadienne.
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Europeans and Amerindians: Some Comparative Aspects of Early Contact
Olive Patricia Dickason
p. 182–202
RésuméFR :
Les nations européennes qui tentèrent d'établir un empire dans le nouveau monde partagèrent la même attitude fondamentale même si leurs façons de traiter les Amérindiens ont différé. Toutes et chacune croyaient qu'en tant que nation chrétienne elles avaient un droit d'hégémonie sur les terres et les peuples non-chrétiens, voire même, dans le cas des Amériques, elles considéraient qu'elles n'avaient pas à tenir compte des désirs des autochtones.
Le fait d'établir une suzeraineté supposait, cependant, qu'une entente quelconque s'établisse entre les Européens et les Amérindiens, qu'il s'agisse d'une « conquête » ou d'un « accord » obtenu plus ou moins volontairement. Assez curieusement, on appela ces ententes des « traités ». Certains furent écrits à l'européenne, d'autres furent conclus à l'amérindienne et certains empruntèrent aux deux façons. Règle générale, l'Espagne n'eut recours au traité écrit que vers la fin du 18e siècle et le Portugal, lui, ne l'utilisa que très rarement. La France préféra presque toujours la manière amérindienne sauf dans les cas où la contrepartie était alliée à d'autres nations européennes. L'Angleterre, de son côté, opta très tôt pour le contrat écrit de même que la Hollande qui fut la première à acheter les terres qu'elle occupait, établissant ainsi un genre de titre de propriété.
Malgré ces diverses façons de faire, les nations européennes restèrent constantes dans leur attitude première et, en aucun temps, n'acceptèrent-elles les Amérindiens en tant que peuples souverains dans la famille des nations ; de même, elles ne les considérèrent jamais comme ayant un statut social correspondant aux leurs. C'est cette attitude, bien plus que la bonté ou la cruauté, qui a profondément affecté la situation de l'Amérindien à mesure que l'Européen s'emparait des Amériques.
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