Volume 37, Number 2, 2015
Table of contents (13 articles)
Articles
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La patrimonialisation du pire a-t-elle des vertus véritatives et préventives ? Le Dôme d’Hiroshima comme lieu de « dé-mémoire »
Robert Belot
pp. 3–28
AbstractFR:
Le classement au patrimoine mondial de l’Humanité du Dôme de Genbaku (Hiroshima), en 1996, s’inscrit dans une tendance à distinguer un patrimoine du pire, comme Auschwitz, au nom de ses vertus supposément véritatives, éducatives et préventives. Pourtant, Barack Obama, premier président américain à se rendre sur les lieux du drame, déplorait le 26 mai 2016 « l’absence de perspective historique » de ce lieu de mémoire qui ne permettait pas une « compréhension » adéquate de la « tragédie d’Hiroshima ». La démarche patrimoniale pourrait-elle avoir pour effet pervers de déshistoriser ce qu’elle est censée mémorialiser, constituant ainsi un patrimoine sans mémoire, voire contre l’histoire ? Une stratégie de l’évitement et de l’innocentement aurait-elle transformé le Dôme en « lieu de dé-mémoire » ? C’est une manière de questionner le rôle de l’UNESCO dans les processus de construction des narrations patrimoniales et d’interroger les rapports complexes qu’entretiennent la mémoire, l’histoire et le patrimoine.
EN:
The classification of the Genbaku Dome (of Hiroshima) as World Heritage in 1996 is part of a trend to distinguish heritage of the worst, like Auschwitz, for its supposedly true, educational and cautionary virtues. During Barack Obama’s visit to the site on May 26, 2016, the first American president to do so, he deplored the “lack of historical perspective” at this place of memory which failed to give an adequate “understanding” of the “tragedy of Hiroshima.” Is it possible that the declaration as heritage could have the perverse effect of de-historicizing a site when the intention is to memorialize, thus creating a heritage which holds no memory and, in fact, militates against history? Has a strategy of avoidance and vindication perhaps transformed the Dome into a “place of un-remembrance?” This is one way of questioning the role of UNESCO in the process of building heritage narratives and the complex relationships which exist among memory, history, and heritage.
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Children’s Dances at First Nation Powwows in Atlantic Canada: A Preliminary Inquiry
Janice Esther Tulk
pp. 29–52
AbstractEN:
In this article, based on ethnographic research conducted at Mi’kmaw powwows throughout Atlantic Canada between 2004 and 2010, I will begin to address the lacuna in literature on First Nation children’s dances. I will describe the various children’s dances observed at powwows in Eastern Canada, as well as songs that are specifically used for children’s dances, contextualizing them within the traditional powwow event and in relation to emcee stage talk. I will also illuminate the socio-cultural functions of children’s dance at powwows and the relationship between dance and play. Finally, by focussing specifically on the living dance tradition of Mi’kmaq at cultural events in the Atlantic provinces, I will elucidate some of the forces that act upon informal culture, shaping and re-shaping it through time. This approach will highlight the relationship between popular culture and tradition in this context, revealing the emergent nature of lived traditions.
FR:
Dans cet article, qui se base sur une recherche ethnographique menée dans des powwows Mi’kmaw à travers le Canada atlantique entre 2004 et 2010, j’aborde tout d’abord les lacunes dans le recherche sur les danses d’enfants des Premières nations. Je décrirai par la suite les diverses danses d’enfants observées dans les powwows de l’Est du Canada, ainsi que les chansons spécialement utilisées dans les danses pour enfants, en les contextualisant dans le cadre de l’évènement traditionnel du powwow et en relation avec la performance sur scène. Je vais également mettre en lumière les fonctions socioculturelles de la danse des enfants aux powwows et la relation entre la danse et le jeu. Enfin, en se concentrant spécifiquement sur la tradition de la danse vivante des Mi’kmaq lors d’événements culturels dans les provinces de l’Atlantique, je vais explorer certaines des forces qui agissent sur la culture informelle, et la façonnant et la redéfinissant temporellement. Cette approche met en évidence le rapport entre la culture populaire et la culture traditionnelle tradition dans ce contexte, en révélant le caractère émergent des traditions vivantes.
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Pourquoi les Roumains ne sont-ils pas devenus un peuple slave ? Essai sur la place des Slaves médiévaux dans l’historiographie nationale roumaine (XVIIe siècle - début du XXe siècle)
Iurie Stamati
pp. 53–80
AbstractFR:
Le XVIIIe siècle marque le début de la construction des nations modernes. C’est à ce moment que les lettrés des quatre coins de l’Europe se sont mis à construire des passés pour ces nations. Les nouveaux panthéons nationaux se remplissent vite d’ancêtres glorieux choisis parmi les tribus de l’Antiquité et du Moyen Âge, mais aussi d’ennemis cruels auxquels ils ont dû faire face. La présente étude examine la place attribuée aux anciennes tribus slaves dans l’histoire de la nation roumaine par les lettrés roumains à partir du XVIIe siècle et jusqu’au début du XXe siècle. Nous exposons comment les enjeux politiques et culturels de la société roumaine, les profils personnels (l’origine, la prédilection pour certains courants de pensée, etc.) de ceux qui ont contribué à la rédaction de l’histoire nationale roumaine, ainsi que la professionnalisation de l’historiographie sous l’égide du paradigme positiviste ont déterminé la façon dont les lettrés roumains ont traité ces tribus.
EN:
The 18th century marks the beginning of modern nation building. It is at that moment that scholars from the four corners of Europe set about building pasts for these nations. The new national pantheons filled quickly with glorious forebears, chosen from among the tribes of ancient history and the Middle Ages, but also with cruel enemies whom they had to face. This study will examine the place attributed to the former Slavic tribes in the history of the Romanian nation by learned Romanians from the 17th century onward and up to the beginning of the 20th century. We show how the political and cultural issues of Romanian society, the personal profiles (the origin, the preference for certain modes of thinking, etc.) of those who contributed to the writing of Romanian national history, as well as the professionalizing of historiography, under the auspices of the positivist paradigm, determined the manner in which Romanians scholarship has treated these tribes.
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Le ministère du Patrimoine canadien et la « mosaïque du développement durable » : retour sur un défi à demi relevé
Benoit Vaillancourt
pp. 81–102
AbstractFR:
Cet article examine la place accordée à la culture dans les stratégies de développement durable du ministère du Patrimoine canadien depuis la fin des années 1990. Il part du constat que de nombreux textes internationaux soulignent l’apport de la culture à un développement durable, mais que sa reconnaissance dépend aussi des politiques particulières des États et des institutions. À cet égard, le cas du ministère du Patrimoine canadien est révélateur des limites de la perspective canadienne, puisqu’après s’être impliqué dans l’étude et la promotion des enjeux sociaux et culturels du développement durable, il s’en est désengagé peu à peu sous le coup de nouvelles directives fédérales. Afin d’éclairer la position du ministère dans cette affaire, l’article commence par retracer son histoire institutionnelle, dissipant ainsi un flou terminologique qui entoure les mots « patrimoine » et « culture » depuis sa création, et plus encore depuis sa séparation d’avec Parcs Canada. Une seconde partie présente cette séparation comme un facteur déterminant dans la réorientation de son approche au développement durable étant donnés les liens forts entre l’environnement d’une part, et les espaces naturels et les lieux historiques sous la responsabilité de Parcs Canada d’autre part. À partir de stratégies triennales et d’autres documents officiels, la dernière partie résume les démarches successives du ministère et fait ressortir la difficulté à rendre opérationnelle l’articulation entre le développement durable et la culture.
EN:
This paper focuses on the emphasis placed on culture in Canadian Heritage’s sustainable development strategies since the late 1990’s, acknowledging that although many international documents recognize the importance of culture to sustainable development, its actual recognition also depends on state and institutional policies. In this respect, the Canadian Heritage case shows the limitations of Canada’s perspective as the Department, after being involved in the study and promotion of social and cultural aspects of sustainable development, progressively pulled back following new federal guidelines. In order to understand where the Department stands on this issue, the paper begins with an overview of its history, addressing the vagueness that surrounds the terms “heritage” and “culture” since its creation, and particularly since its separation from Parks Canada. The second part describes the separation as an important factor in the Department’s re-evaluation of its approach to sustainable development given the strong connection between the environment and the natural areas and historic sites under the supervision of Parks Canada. Using sustainable development strategies and other official documents, the final part summarizes the Department’s actions and highlights the difficulty in operationalizing the links between sustainable development and culture.
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Of Chiefs and Kings: Wendat and British diplomatic traditions, 1838 to 1842
Annette de Stecher
pp. 103–130
AbstractEN:
“Of Chiefs and Kings” is about the role of Wendat diplomatic traditions, explored through documentary and pictorial evidence and the arts of ceremonial dress. I will describe diplomatic interactions between Wendat and British communities between 1838 and 1842, through which the Wendat affirmed commitments of military and civilian support and asserted a continued Wendat presence in their traditional territories. By their dynamic public representation of Indigenous identity, they denied the romanticized notion of the vanishing race, deeply rooted in the popular imagination. These events marked a particular moment within a Wendat history of diplomatic engagement and intercultural exchange with European leaders, extending back to the early seventeenth century.
Wendat and British first-hand accounts furnish perspectives of individual members of each community, while Wendat elders’ recollections of ceremonial traditions give important community knowledge of the significance of these events to the Wendat, at an important time in the history of Wendake and Lower Canada.
FR:
Cet article porte sur le rôle des relations diplomatiques Wendat, analysées par le biais de documents écrits et iconographiques et de l’art des tenues de cérémonie. Il décrit les interactions diplomatiques entre les communautés Wendat et britanniques entre 1838 et 1842, lors desquelles les Wendat ont affirmé leurs engagements pour un soutien civil et militaire et ont assuré une présence continue dans leurs territoires ancestraux. Par une représentation dynamique de leur identité publique indigène, ils sont allés en contradiction avec l’image romantisée et profondément enracinée dans l’imagination populaire d’une race en disparition. Ces événements ont marqué un moment particulier dans l’histoire des Wendat et de leurs engagements diplomatiques et échanges interculturels avec les dirigeants européens, qui remontent au début du XVIIe siècle.
Les témoignages d’époque des Wendat et des Britanniques apportent des regards de la part de membres individuels de chaque communauté, tandis que les souvenirs des anciens Wendat sur les traditions cérémoniales entretiennent un savoir collectif sur l’importance de ces événements pour les Wendat, à un moment important de l’histoire de Wendake et du Bas-Canada.
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Médiations alimentaires et écologie de l’attention à l’Exposition universelle de Milan, 2015
Van Troi Tran
pp. 131–160
AbstractFR:
Dans le cadre de l’exposition universelle de Milan de 2015 dont le thème était « Nourrir la planète, énergie pour la vie », plusieurs pays, organisations non gouvernementales et entreprises ont profité de l’occasion pour mettre en valeur leurs produits, leurs spécialités, leurs cultures gastronomiques et leurs initiatives en développement durable. Cet article explore comment le contexte de l’exposition universelle, en tant qu’événement international, affecte les modes de valorisation des patrimoines et des cultures alimentaires, dans une situation de concurrence pour l’attention d’un public massif. Ainsi, paradoxalement, autant les promoteurs du Slow Food devaient accélérer leurs services pour répondre aux besoins de la clientèle, les entreprises de « fast food » devaient, à l’occasion de l’Exposition, mettre de l’avant les atouts qualitatifs de leurs produits plutôt que l’efficacité. L’article examine donc plus généralement quels peuvent être les effets d’une mondialisation intensive sur les pratiques de médiation alimentaire pour un public submergé d’informations.
EN:
At the 2015 Milan World Expo, whose theme was «Feeding the Planet, Energy for Life,» several countries, non-governmental organizations and companies took the opportunity to showcase their products, culinary specialties, gastronomic cultures and initiatives in sustainable development. This article explores how the context of the Universal Exhibition, as an international event, affects the modes of valuing culinary cultures and heritage, in a situation of competition for the attention of a massive public. Paradoxically, as the promoters of Slow Food had to accelerate their services to meet the needs of the visitors, fast food companies had to put forward the qualitative assets of their products rather than their effectiveness. The article therefore examines more generally the effects of intensive globalization on practices of mediating food for a public overloaded with information.
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L’expression matérielle québécoise du djembé africain de culture mandingue : étude de la fabrication locale d’un objet mondialisé
Monique Provost
pp. 161–183
AbstractFR:
Le djembé, tambour d’origine mandingue, est un objet culturel africain qui a connu un phénomène de mondialisation dans les années 1990. On le retrouve autant aux États-Unis qu’en Inde ou au Japon; il a même été adopté par certains Autochtones d’Amérique du Nord et il est fabriqué par des artisans québécois. Cet article présente une analyse comparative entre la méthode africaine traditionnelle de fabrication encore pratiquée aujourd’hui au Burkina Faso et la méthode québécoise. Cette comparaison des chaînes opératoires de chacun des artisans, finement illustrées, démontre comment la fabrication locale d’un objet exogène peut refléter les pratiques de la collectivité qui se l’approprie.
EN:
The djembe, a drum of Mandinka origin, is an African cultural object which experienced the globalization phenomenon in the 1990s. It can be found as commonly in the United States as in India or Japan; it has even been adopted by certain native North Americans and is manufactured by Quebec artisans. This article will feature a comparative analysis between the traditional African method of crafting which is still practised today in Burkina Faso and the Quebec method. This comparison of the processes used by each artisan, illustrated in detail, shows how the local production of an exotic object can reflect the practices of the community which adopts it.
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Le studio d’enregistrement comme terrain en ethnomusicologie : propositions théoriques et méthodologiques
Ons Barnat
pp. 185–206
AbstractFR:
À partir des conclusions tirées de notre thèse (consacrée à l’étude du phénomène de l’enregistrement en studio de la paranda garifuna en Amérique centrale), cet article soulève certaines des préoccupations théoriques et méthodologiques qui apparaissent quand l’ethnomusicologue contemporain décide de faire du studio d’enregistrement son principal terrain de recherche. Dans ces studios où se créent les musiques à vendre, des relations de pouvoir se déploient en permanence autour d’un enjeu principal : le contrôle de la manipulation électronique des sons enregistrés. S’il fait office de laboratoire expérimental pour ses acteurs (musiciens, ingénieurs du son, réalisateurs…), le studio d’enregistrement offre à la recherche ethnomusicologique un microcosme au sein duquel un appareillage technique sophistiqué se trouve manipulé en fonction d’interactions entre des individus. En se basant sur une revue de littérature interdisciplinaire, cet article propose une base théorique et méthodologique pour toute recherche ethnomusicologique portant sur le rôle et la place du studio d’enregistrement dans l’analyse de phénomènes musicaux contemporains.
EN:
Drawing from the conclusions of our Ph.D thesis (which studied the phenomenon of studio recording of the garifuna paranda in Central America), this article raises some of the theoretical and methodological concerns that emerge when the contemporary ethnomusicologist decides to make the recording studio his or her main research site. In these studios where music is created, power relations are constantly deployed around a main issue: control over electronic manipulation of recorded sounds. While it acts as an experimental laboratory for its actors (musicians, sound engineers, producers…), the recording studio offers to ethnomusicological research a microcosm in which a sophisticated technical apparatus is manipulated through interactions between individuals. Based on an interdisciplinary literature review, this article will provide a theoretical and methodological basis for any ethnomusicological research that will focus on the role and place of the recording studio in the analysis of contemporary musical phenomena.
Comptes rendus / Reviews
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Noriko T. Reider. Seven Demon Stories from Medieval Japan. (Boulder: 2016, University Press of Colorado. Pp. 292. ISBN: 978-1-60732-489-8.)
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Marie Battiste (ed.). Living Treaties: Narrating Mi’kmaw Treaty Relations. (Sydney, NS: 2016, Cape Breton University Press. Pp. 317, ISBN-13: 978-1-77206-053-9.)
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Deborah Davidson (ed.). The Tattoo Project: Commemorative Tattoos, Visual Culture, and the Digital Archive. (Toronto, ON: 2017, Canadian Scholars’ Press Inc. Pp. 222, ISBN 978-1551309453.)
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Christa J. Jones and Claudia Schwabe (eds.). New Approaches to Teaching Folk and Fairy Tales. (Logan, UT: 2016, Utah State University Press. Pp. 252, ISBN 978-1-60732-480-5.)
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Ursula Kelly (producer). Mentioned in Song: Song Traditions of the Loggers of Newfoundland and Labrador. (St. John’s, NL: 2014, Research Centre for the Study of Music, Media, and Place. MMaP-CD08. Pp. 88, ISBN: 978-0-88901-464-0.)