Nouvelle Revue Synergies Canada
Numéro 17, 2023 Perspectives sociolinguistiques variationnistes du français en situation de contact des langues
Mélanges en hommage à Alain Thomas
Sommaire (12 articles)
Présentation / Presentation
Articles / Articles
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Sur la variabilité du rythme phonétique en français ontarien minoritaire
Svetlana Kaminskaïa
p. 1–16
RésuméFR :
Le français ontarien minoritaire montre régulièrement une réduction de la variation sociolinguistique. Ici, nous examinons la variation du rythme phonétique dans deux styles, chez deux sexes et des locuteurs d’âges différents, avec la longueur des énoncés et le débit d’articulation pris en compte. L’objectif est d’observer l’étendue de la variabilité rythmique en fonction de l’ensemble des facteurs sociaux et linguistiques, ce qui constitue l’originalité de cette étude. En utilisant les mesures rythmiques VarcoV et nPVI-V, nous avons trouvé que le rythme plus régulier est propre aux participants plus âgés et au style plus formel. Le rythme plus régulier est aussi associé aux énoncés plus courts et à un débit plus rapide. De tous les facteurs examinés, celui du sexe n’a pas été confirmé. Nos résultats montrent, d’un côté, que le français ontarien minoritaire suit les tendances communes propres à d’autres langues et variétés du français. De l’autre côté, on y observe des traits particuliers qui fournissent de nouveaux détails à son portrait phonétique et suggèrent des pistes de futures analyses impliquant la langue dominante.
EN :
Ontario French spoken in a minority setting regularly shows a sociolinguistic discontinuity. This article examines rhythmic variation across two styles, two genders, and different ages, with the length of interpause intervals and articulation rate taken into consideration. The main objective is to observe the extent of rhythmic variability using series of social and linguistic factors, which constitutes the originality of the proposed analysis. Applying rhythm metrics VarcoV and nPVI-V, we observed that a more regular rhythm characterizes the speech of older participants and a more formal style. Shorter utterances and faster speech also have more regular rhythm. Among all factors, only gender was irrelevant. Our results show that rhythmic variation in minority Ontario French follows other languages and varieties of French; they also present new details to the phonetic description of this variety.
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Rythme prosodique dans le français et l’anglais des francophones du Nord-Est de l’Ontario
Jeff Tennant et Damaris Holmes
p. 1–25
RésuméFR :
Cet article présente les résultats d’une étude du rythme prosodique du français et de l’anglais de Franco-Ontariennes et Franco-Ontariens de deux municipalités situées dans le Nord-Est de la province, Kapuskasing (francophones en situation locale majoritaire) et Timmins (francophones en situation locale minoritaire). Les données ne montrent pas une rythmicité plus accentuelle dans le contexte minoritaire de Timmins par rapport au contexte majoritaire de Kapuskasing. Ainsi, nos résultats ne soutiennent pas l’hypothèse d’une influence de l’anglais là où le contact du français avec cette langue est plus intense. En outre, les valeurs des mesures rythmiques révèlent que les francophones maintiennent une différence claire entre la rythmicité plutôt syllabique de leur français et la rythmicité plutôt accentuelle de leur anglais, résultat qui n’appuie pas l’hypothèse d’une convergence dans le rythme des deux langues en contact.
EN :
This article presents the results of a study of prosodic rhythm of the French and English of Franco-Ontarians in two municipalities located in the Northeast of the province, Kapuskasing (francophones in a local majority context) and Timmins (francophones in a local minority context). The data do not show a more stress-timed rhythm in the minority context of Timmins in comparison with the majority context of Kapuskasing. Thus, our results do not support the hypothesis of an influence of English where the contact of French with that language is more intense. Furthermore, rhythm metric values demonstrate that Francophones maintain a clear difference between the rather syllable-timed rhythm of their French and the rather stress-timed rhythm of their English, a result that does not support the hypothesis of a convergence in rhythm patterns between the two languages in contact.
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Regional variation in high vowel deletion in New Brunswick French: Preliminary observations
Wladyslaw Cichocki
p. 1–15
RésuméEN :
This paper presents findings of a descriptive study that suggest that the deletion of high vowels, a process that is generally associated with Laurentian French, may have begun to spread across francophone regions of New Brunswick. The study examines the pronunciation of /t, d/ + /i, y/ sequences in a small number of lexical items, with a focus on vowel deletion. Based on acoustic phonetic analyses of sentences read by 136 speakers from the five main French-speaking regions in New Brunswick, results indicate that /i, y/ deletion rates are relatively high in the NorthWest, a region that is located adjacent to Quebec, but lower in other regions, with the lowest rates occurring in the SouthEast. Deletion rates are significantly higher among younger speakers than older speakers, indicating that this may be a sound change in progress. The results highlight an interaction between high vowel deletion and /t, d/ affrication. These preliminary observations provide guidelines for future dialectological and phonetic research on this process.
FR :
Cet article présente les résultats d’une étude descriptive qui suggèrent que la syncope des voyelles hautes, un phénomène généralement associé au français laurentien, a commencé à se répandre à travers les régions francophones du Nouveau-Brunswick. Cette étude examine la prononciation des voyelles /i/ et /y/, et notamment les chutes vocaliques, dans les suites /t, d/ + /i, y/ qui se trouvent dans un nombre restreint d’items lexicaux. À partir de l’analyse acoustique de données extraites de phrases lues par 136 locuteurs natifs provenant des cinq principales régions francophones du Nouveau-Brunswick, les résultats montrent que les taux de chute de ces voyelles sont relativement élevés dans le Nord-Ouest, région adjacente au Québec, mais qu’ils sont moins élevés dans les autres régions, les taux les moins élevés se trouvant dans le Sud-Est. Les locuteurs jeunes ont des taux de chute plus élevés que les locuteurs âgés, ce qui semble suggérer que ce phénomène est un changement linguistique en cours. Les résultats montrent une interaction intéressante entre la syncope vocalique et l’assibilation de /t, d/. Ces observations préliminaires proposent des avenues à explorer dans les études à venir portant sur les aspects dialectologiques et phonétiques de ce processus.
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S’il y a du monde qui vient fumer ils vont dehors : l’accord verbal de nombre avec les collectifs singuliers à Welland (Ontario) entre 1975 et 2015
Francoise Mougeon, Raymond Mougeon et Katherine Rehner
p. 1–11
RésuméFR :
Notre étude porte sur l’accord verbal de nombre avec le sujet lorsque celui-ci réfère à des groupes humains désignés par des noms morphologiquement singuliers mais sémantiquement pluriels (i.e., noms collectifs). Elle examine la variation entre l’accord au singulier, conforme à l’usage standard, ou au pluriel, typique de l’usage vernaculaire. Notre recherche s’appuie sur des données d’entrevues recueillies au sein de la minorité francophone de Welland (Ontario), d’abord en 1975 et quarante ans plus tard. Nous mesurons la variation dans le temps ainsi que l’impact de facteurs linguistiques et extralinguistiques tels que : i) le type de nom collectif (le monde, du monde, tout le monde, famille, parenté, nom d’entreprise ou compagnie); ii) l’absence/présence de quantificateur devant le collectif; iii) l’appartenance socioéconomique, le sexe et le niveau de bilinguisme des locuteurs. Notre étude comble une lacune car, excepté la recherche de Tristram (2017), les travaux sur l’accord verbal de nombre avec les sujets collectifs n’ont pas examiné cet aspect du français selon une perspective sociolinguistique variationniste.
EN :
This study examines verbal number agreement with subjects referring to human groups designated by morphologically singular but semantically plural nouns (i.e., collective nouns). It examines standard agreement in the singular versus vernacular agreement in the plural (e.g., ils engagent du monde qui dit pas un mot d’anglais vs je pense que ce sont du monde qui sont jaloux). The study draws on interview data from Welland Ontario’s French-speaking minority, collected in 1975 and again forty years later. It examines variation across time and measures the impact of linguistic and extra-linguistic factors: i) the type of collective noun (le monde, du monde, tout le monde, famille, parenté, name of a company or enterprise) and the absence/presence of a quantifier; and ii) speakers’ socioeconomic background, gender, and level of bilingualism. This study joins Tristram (2017) in providing a sociolinguistic variationist perspective on verbal number agreement with collective subjects.
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Perspectives intergénérationnelles de l’emprunt à l’anglais chez les francophones du Nord-Est ontarien
Julie Boissonneault
p. 1–25
RésuméFR :
Dans un article paru en 2013, Alain Thomas faisait état de la perception qu’avaient des francophones du Nord-Est ontarien de l’utilisation des emprunts lexicaux à l’anglais. Ses résultats révèlent des différences intergénérationnelles, ce qui corrobore les tendances observées dans d’autres enquêtes auprès des francophones ontariens. Le glissement vers l’anglais n’est cependant pas régulier et l’anglicisation semble plus intense chez les locuteurs nés entre 1940 et 1960. Dans sa conclusion, Thomas exprimait le souhait que son enquête soit reproduite à plus grande échelle et que l’effet de la concentration des francophones dans les communautés soit vérifié. Ce texte y donne suite par une analyse de corpus auprès de 120 francophones nés entre le 19e et le 21e siècle et habitant diverses communautés du Nord-Est ontarien. L’analyse, qui s’inscrit dans une approche de synchronie dynamique, vise d’abord à dégager la présence de lexèmes empruntés à l’anglais en fonction des années de naissance des locuteurs, puis à comparer les probabilités d’usage des emprunts à celles des variantes françaises équivalentes. Puisque les communautés à l’étude varient de franco-minoritaires à franco-majoritaires, les indices d’usage sont ensuite vérifiés afin de cerner l’importance de cette variable dans le processus d’anglicisation.
EN :
In a paper published in 2013, Alain Tomas studied how French speakers from Northeastern Ontario perceived the use of loanwords from English. His results revealed intergenerational differences, thus corroborating the trends observed in other studies of Francophones in Ontario. However, the shift towards English is not regular and seems more intense among speakers born between 1940 and 1960. In his conclusion, Thomas expressed the wish that his investigation be reproduced on a larger scale and that the effect of the concentration of Francophones in the communities be verified. This paper follows both of these wishes through the analysis of a corpus of 120 French-speakers, born between the 19th and 21st century, living in Northeastern communities. The analysis subscribes to a dynamic synchrony approach. Its aim is threefold. First, it will analyze lexical items borrowed from English over generations and then compare the use of these loanwords with those of their French equivalencies. Given that the concentration of Francophones varies among the communities under study, this variable too will be verified.
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Ok Francis lis l’autre strophe mon grand: Teachers’ in-class use of nominal address forms with their students
Katherine Rehner, Raymond Mougeon et Françoise Mougeon
p. 1–11
RésuméEN :
This study examines variation in the address forms teachers use in class with their students. It draws on a corpus collected in French-medium secondary schools in Ontario, Canada. The study provides a taxonomy of the nominal address forms used, along with frequency counts and dispersion rates. This includes forms used to address: i) the entire class (e.g., tout le monde ‘everyone’, guys, and les élèves ‘students’); ii) a group of students (e.g., ceux-celles/les gens, etc. + qui ‘those/the people, etc. + who’, les filles ‘girls’, and les gars ‘boys’); and iii) individual students (e.g., first names, first and last names, Monsieur ‘Sir’, Madame ‘Ma’am’, Mademoiselle ‘Miss’, ma belle ‘my dear’, mon grand ‘big guy’). The study examines the discursive functions associated with these address forms (e.g., positive relational functions like ‘praising’ and ‘encouraging’ are associated with terms of affection). The study concludes by highlighting the contribution its findings make to Francols’ (2010) calls for further research on the topic.
FR :
Cette étude examine les variations dans les formes d’adresse que les enseignants utilisent en classe avec leurs élèves. Elle s’appuie sur un corpus collecté dans les écoles secondaires de langue française de l’Ontario, au Canada. L’étude fournit une taxonomie des formes d’adresses nominales utilisées, ainsi que les décomptes de fréquence et les taux de dispersion. Cela inclut les formulaires utilisés pour s’adresser : i) à la classe entière (par exemple, tout le monde « tout le monde », les gars et les élèves « étudiants ») ; ii) un groupe d’étudiants (ex. : ceux-celles/les gens, etc. + qui « ceux/les gens, etc. + who », les filles « filles » et les gars « garçons ») ; et iii) des étudiants individuels (par exemple, prénoms, prénom et nom, Monsieur « Monsieur », Madame « Ma’am », Mademoiselle « Miss », ma belle « ma chère », mon grand « grand gars »). L’étude examine les fonctions discursives associées à ces formes d’adresse (par exemple, les fonctions relationnelles positives comme « féliciter » et « encourager » sont associées à des termes d’affection). L’étude conclut en soulignant la contribution de ses conclusions aux appels de Francols (2010) à des recherches plus approfondies sur le sujet.
Sur le vif
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Alain Thomas, un linguiste face au déclin anticipé des langues et des parlers minoritaires
François Paré
p. 1–10
RésuméFR :
Alain Thomas appartient à une importante génération de chercheurs qui, dès le milieu des années 1980, tente de témoigner, par la conduite d’enquêtes sur le terrain, de l’évolution des langues minoritaires et des parlers régionaux tant au Canada qu’ailleurs dans le monde. Ce chapitre s’intéresse aux travaux de Thomas dans ces années 1990-2010 où le linguiste semble de plus en plus préoccupé par le déclin du français en Ontario. Alors qu’il s’était largement rallié aux conclusions de Raymond Mougeon sur la stabilité relative des langues en contact, celui-ci s’inquiète de plus en plus de l’avenir des différences linguistiques face à la domination de l’anglais. Ses écrits, durant ces années où les contextes sociolinguistiques évoluent, révèlent, par-delà l’analyse méticuleuse des données recueillies, le souci croissant du chercheur, plus que jamais attentif aux communautés qu’il étudie, de rendre compte des mécanismes déstructurants qui contribuent au dépérissement éventuel de la francophonie canadienne.
EN :
Alain Thomas belongs to an important generation of researchers who, from the middle of the 1980s, tried to bear witness, through the conduct of field surveys, to the evolution of minority languages and regional dialects both in Canada and elsewhere in the world. This chapter focuses on the work of Thomas in the years 1990-2010 when the linguist seems increasingly concerned about the decline of French in Ontario. While he had largely agreed with the conclusions of Raymond Mougeon on the relative stability of languages in contact, he is increasingly concerned about the future of linguistic differences in the face of the domination of English. At a time when sociolinguistic contexts are changing, Thomas’s writings reveal, beyond the meticulous analysis of the data collected, the growing concern of the researcher, more than ever attentive to the communities he studies, to account for the de-structuring mechanisms that contribute to the possible decline of French-speaking communities in Canada.
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Alain Thomas et le Salon du Livre de Toronto : entretien avec Valéry Vlad
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Alain / Marcel et la musique
Stephanie Nutting et Joubert Satyre
p. 1–10
RésuméFR :
Ce texte écrit à quatre mains est un témoignage sur les goûts musicaux d’Alain. Le professeur de linguistique, rigoureux et méthodique, était aussi un mélomane averti et un bon accordéoniste. Comme pour faire la distinction entre l’ordre apollinien qui régit la linguistique et l’effusion dionysiaque qui caractérise l’univers des notes, il se métamorphosait en Marcel chaque fois qu’il interprétait sur son instrument les chansons du répertoire français et international. Ce texte retrace non seulement son parcours musical, mais aussi des événements qui ont dû jouer un rôle fondamental dans son éveil à la musique. La première partie parle de ses goûts musicaux, en particulier, de sa passion pour Georges Brassens et Boris Vian. Il y est aussi question de son engouement pour les balades haïtiennes et brésiliennes ainsi que pour la musique classique. La deuxième partie rapporte une prestation du musicien dans le cadre d’un cours sur la chanson.
EN :
This co-written text is a testimony to Alain’s musical tastes. The rigorous and methodical professor of linguistics was also a well-informed music lover and a passionate accordionist. The Apollonian order that governs linguistics was counterbalanced by the Dionysian effusion that characterizes the musical world. Alain metamorphosed into Marcel every time he played his instrument. We retrace not only his formative years as a musician, but also the events that must have played a fundamental role in his awakening to music. The first part centers on his musical tastes, in particular his passion for Georges Brassens and Boris Vian. It also evokes his love of Haitian and Brazilian ballads as well as classical music. The second part conveys to the reader what it was like to attend a performance given by Alain/Marcel as a guest lecturer and musician in the context of a university French course.
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Deux nouvelles
Alain Thomas
p. 1–8
RésuméFR :
Ces deux nouvelles publiées à titre posthume témoignent de l’intérêt d’Alain Thomas pour le vécu des Français pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans « Sursis », un aimable facteur partage son appréciation d’être en vie à la suite des traumatismes endurés et « Les Pieds vers la France » relate, du point de vue de Daniel Thomas, le père de l’auteur, son évasion d’un camp de prisonniers de guerre allemand.
EN :
These two short stories published posthumously testify to Alain Thomas’ interest in the experiences of the French during the Second World War. In "Sursis" an amiable postal carrier shares his appreciation for being alive after the trauma he endured and "Les Pieds vers la France" recounts, from the point of view of Daniel Thomas, the author’s father, his escape from a German POW camp.
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Publications d’Alain Thomas