TTR
Traduction, terminologie, rédaction
Volume 20, Number 1, 1er semestre 2007 TTR a 20 ans I TTR Turns 20 I Guest-edited by Annick Chapdelaine
Table of contents (13 articles)
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Présentation
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Translation, Interpretation, and Common Meaning: Victoria Welby’s Significal Perspective
Susan Petrilli
pp. 13–98
AbstractEN:
As she worked through the nineteenth century Victoria Welby elaborated a fascinating theory of translation based on her theory of sign and meaning, which she designated with the term significs. This means to say that, on the one hand, Welby’s theory of translation took account of the vastness and variety of the world of signs, therefore of the unbounded nature of translative-interpretive processes which cannot be limited to the mere transition from one language to another. The condition for interlingual translation in the human world is the larger context where translative processes converge with life processes and maybe push beyond in what would seem to be an unbounded cosmic dimension. On the other hand, that Welby should have related her translation theory to her theory of sign and meaning also implies that she founded her translation theory in a theory of value recognizing the inevitable importance of the latter when translating within a single language as much as across different languages in a plurilingual and intercultural world. Ultimately, in the properly human world, to translate means to interpret, that is, to translate transfiguring and transvaluating significance.
FR:
Au XIXe siècle, Victoria Welby élabore une remarquable théorie de la traduction et propose pour cette nouvelle conception du signe et du sens le terme signifique. D’une part, cette théorie de la traduction explore le vaste monde du signe de même que la nature insondable des processus de traduction et d’interprétation qui, bien évidemment, ne peuvent se résumer à une simple transposition d’une langue à une autre. En effet, la traduction interlangue s’inscrit dans un contexte où les circonstances actuelles font en sorte que le cours de la vie et les processus de traductions convergent, nous propulsant au-delà de ce qui pourrait sembler être une dimension cosmique sans frontière. D’autre part, en établissant un rapport entre sa théorie de la traduction et sa théorie du signe et du sens, Welby laisse entendre que sa théorie de la traduction est aussi créée à partir d’une théorie des valeurs, reconnaissant l’importance de cette dernière en traduisant, au sein d’un univers plurilingue et interculturel, autant dans une même langue que dans des langues différentes. Dans un monde qui est propre à l’être humain, traduire, c’est interpréter, c’est-à-dire transfigurer et transvaluer la signifiance.
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Langue et imaginaire
Christine Klein-Lataud
pp. 99–111
AbstractFR:
Cet article explore, à partir de romans et d’essais (en particulier ceux de Ferenc Karinthy, Nancy Huston, Julia Kristeva, Claude Esteban), certaines créations imaginaires suscitées par la relation du sujet avec sa ou ses langues. Une première partie s’attache au fantasme de la langue hermétiquement étrangère puis, pôle opposé, à celui de la « panglossie » où toute langue apparaît comme connue. La deuxième partie est centrée sur la problématique langue maternelle / langue étrangère et sur l’expérience du sujet bilingue, problématique du déchirement, susceptible cependant de trouver éventuellement une résolution sur le plan de la création.
EN:
This article will explore imaginary creations that are informed by the relationship of the subject to his or her language(s). Examples will be drawn from novels and essays by authors such as Ferenc Karinthy, Nancy Huston, Julia Kristeva and Claude Esteban. The first part of the article explores a vision of language as hermetically foreign and then moves on to the polar opposite, a “panglossic” image, in which all languages appear to be known. The second part of the article centres on the first-language/foreign-language problematic—the experience of the bilingual subject, who is torn between two languages, a problematic which can, however, find its resolution in the creative process.
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Translation as Social Action: Brecht’s ‘Political Texts’ in Greek
Dimitris Asimakoulas
pp. 113–140
AbstractEN:
This paper places an influential anthology of Brecht’s texts in the context of the Greek junta (1967-1974). Drawing on the sociological work of Pierre Bourdieu, it shows how the text constitutes an euphemisation of the power of a politically active publisher who opposed the regime with what came to be seen as ‘social art’ by various agents of the publishing field at the time. It also demonstrates how the tactical presentation of the material in the anthology helps map the oppression of the Nazi rule onto the junta while identifying a ‘plural-self’ that opposes symbolic and physical violence.
FR:
Le présent article situe une importante anthologie des textes de Brecht dans le contexte de la junte grecque (1967-1974). Il est possible d’observer, en s’appuyant sur les travaux du sociologue Pierre Bourdieu, comment peut se manifester dans le texte une euphémisation du pouvoir, soit une forme de contestation du régime qui à l’époque était considérée par de nombreuses maisons d’éditions comme un « art social ». L’article met aussi en lumière la présentation stratégique de l’anthologie qui, en identifiant « une pluralité identitaire » s’élevant contre la violence physique et symbolique, parvient à nous aider à nous représenter l’oppression nazie dans la junte.
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Perspectives transhistoricistes
Alexis Nouss
pp. 141–170
AbstractFR:
Les modes du traduire sont liés à des époques mais autant aux philosophies de l’histoire qu’elles accueillent. Parmi celles-ci, le transhistoricisme représente la position visant à établir un dialogue entre des historicités distinctes et distantes, reprenant du passé ce qui semble encore actuel et projetant son éclairage sur le monde traduit et le monde traduisant. Cet article en prolonge diverses perspectives à partir de données philosophiques et littéraires, notamment une réhabilitation traductologique de l’empathie et une reconsidération de la fonction du sacré.
EN:
Translating modes are linked to historical periods as well as to connected philosophies of history. Among them transhistoricism aims to create a dialogue between distant historical situations, keeping from the past what is still relevant and enlightening both translated and translating worlds. This paper presents several philosophical and literary perspectives on transhistoricism, revisiting the notions of empathy and sacredness and their application for translation studies.
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Translation and the Changing Profession: A Cross-Disciplinary Perspective
Candace Séguinot
pp. 171–191
AbstractEN:
Disciplines that deal with the selection, dissemination, and translating of information have had to adapt to changes that have come with the adoption of new technology. On the one level there has been a reflection in research on the responsibilities and relevance of the discipline itself and the professions associated with it. The “communication” professions have also shown a concomitant movement toward contracting rather than salaried positions, and so both the day-to-day organization of work and the institutionalized practices of entering the workforce, gaining experience, and being promoted have changed. Power relations inherent in organizational structures change as the organization of work changes, and the intrinsic values associated with professions that produce knowledge products change with reorganization as well. While technology has challenged all communication professions with change, the responses across these fields have been very different. This paper is about those differences in translation and disciplines close to translation. How has each discipline adapted (or not) to changes in the way its profession has evolved, and what does current research say about these transformations?
FR:
L’avancement technologique a grandement influencé les disciplines qui doivent sélectionner, propager et traduire l’information. Sur le plan de la recherche, on peut constater la présence de nombreuses réflexions quant à la responsabilité et à la pertinence de la traduction et de ses professions connexes. Désormais, dans le grand domaine des communications, on choisit de travailler à contrat plutôt qu’en entreprise, ce qui entraîne de nombreux changements, que ce soit dans l’organisation de l’emploi du temps ou dans les possibilités d’avancement traditionnelles telles que les promotions basées sur l’ancienneté. Ces changements remettent en question les relations de pouvoirs propres aux structures organisationnelles de même que les valeurs intrinsèques que l’on associe à ces professions. Bien que toutes les professions qui transmettent un savoir et produisent de l’information aient été influencées par l’avancement technologique, la réponse à ces changements n’est pas la même pour l’ensemble du domaine. Cet article s’intéresse à ces différences. Les disciplines doivent-elles, elles aussi, faire face au changement à mesure que les professions évoluent? La recherche s’interroge-t-elle, à l’heure actuelle, sur ces transformations?
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“I believe that my two tongues love each other cela ne m’étonnerait pas”: Self-Translation and the Construction of Sexual Identity
Rainer Guldin
pp. 193–214
AbstractEN:
In this paper I would like to explore the work of five bilingual writers focusing on the different narratives they develop in their use of (self-)translation as a textual strategy to fashion a sexual persona. Julia(e)n Green’s Le langage et son double/The Language and its Shadow and Louis Wolfson’s Le Schizo et les langues create narratives of severance and disjointing. The self-translational activity is used here to create perfectly separated spheres of (sexual) identity. Raymond Federman’s A Voice within a Voice and Christine Brooke-Rose’s Between, on the other hand, develop narratives of merging and mixing. The self-translating activity is viewed as a constant shifting and moving of sexual roles taking place in a sphere outside the conscious control of the writer. The final part of the paper will be dedicated to a discussion of Abdelkebir Khatibi’s Amour bilingue that fictionalizes the functioning of bilingualism and self-translation in terms of sexual roles, introducing, this way, a post-colonial dimension missing in the other texts.
FR:
Dans ce texte j’aimerais explorer l’oeuvre de cinq écrivains bilingues, en me concentrant sur les différents récits qu’ils produisent en utilisant l’(auto)-traduction comme stratégie textuelle pour créer une identité sexuelle. Julia(e)n Green (Le langage et son double/The Language and its Shadow) et Louis Wolfson (Le Schizo et les langues) élaborent des récits de séparation et de disjonction. L’auto-traduction est utilisée ici pour générer des sphères sexuelles tout à fait séparées. Raymond Federman (A Voice within a Voice) et Christine Brooke-Rose (Between) par contre développent des récits de fusion et de mélange. On considère que l’auto-traduction, lorsqu’elle entraîne des changements et des revirements au sein des rôles sexuels, évolue dans un espace qui relève de l’inconscient de l’auteur. La partie finale de la présentation est consacrée à la discussion de Abdelkebir Khatibi (Amour bilingue) qui parle du bilinguisme et de l’auto-traduction en termes de rôles sexuels, ajoutant, ainsi, une dimension post-coloniale qui est absente dans les autres textes.
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La traduction des catéchismes et la conquête spirituelle dans la Province du Venezuela
Georges L. Bastin
pp. 215–243
AbstractFR:
En dépit de son rôle primordial dans la construction de l’identité hispano-américaine, tout au long des cinq derniers siècles, la traduction ne fait pas encore l’objet d’une recherche prioritaire. Parmi les périodes les moins étudiées, on trouve la colonisation, du XVIe au XVIIIe siècle, et, parmi les régions les plus oubliées, la Province du Venezuela. Le présent travail vise à mettre au jour les activités langagières les plus significatives de la période coloniale dans cette région et se penche plus particulièrement sur les tâches de traduction (catéchismes et livres de prières) accomplies par les membres des divers ordres religieux chargés par la couronne espagnole d’assurer la conquête spirituelle de l’Amérique. Cette étude de nature descriptive cherche à signaler des pistes de recherche pour l’interprétation du caractère transculturel des échanges entre les colonies américaines et la métropole espagnole.
EN:
In spite of its essential contribution to the formation of Hispano-American identity throughout the last five hundred years, translation has not yet reached the status of a priority research topic. Amongst least studied periods are the 16th and 17th centuries; and the Province of Venezuela lies amongst the most forgotten regions. This research intends to reveal the most significant linguistic activities of this region and particularly focuses on translation tasks—catechisms and prayer books—carried out by members of the various religious orders to whom the Spanish Crown gave the responsibility of spiritually conquering America. This descriptive study aims at pointing on research avenues for the interpretation of the transcultural nature of the relations between American colonies and Spain.
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Acts of Passage: Women Writing Translation in Canada
Alessandra Capperdoni
pp. 245–279
AbstractEN:
This article discusses the relationship of writing and translation in Canadian feminist poetics, specifically experimental. As feminist poetics collapsing the boundaries between theory and creative act, “writing as translation” is a mode of articulation for female subjectivity and a strategy for oppositional poetics. The article engages with the practice of “writing as translation” in the works of two leading avant-garde artists, the francophone Nicole Brossard and the anglophone Daphne Marlatt, located respectively in Montreal and Vancouver. Building on the groundbreaking critical work of Barbara Godard, Kathy Mezei and Sherry Simon, it situates these practices in the socio-political and intellectual context of the 1970s and 1980s, which witnessed the emergence of women’s movements, feminist communities and feminist criticism, and in relation to the politics of translation in Canada. This historicization is necessary not only to understand the innovative work of Canadian feminist poetics but also the political dissemination of a feminist culture bringing together English and French Canada.
FR:
Cet article se penche sur la relation entre l’écriture et la traduction dans la poétique canadienne féministe expérimentale. En tant qu’écriture féministe dissolvant la division entre théorie et création, « l’écriture comme traduction » constitue une pratique d’articulation de la subjectivité au féminin et une stratégie de poétique oppositionnelle. Cet article examine « l’écriture comme traduction » dans l’oeuvre de deux artistes de l’avant-garde qui occupent une place prééminente : la francophone Nicole Brossard et l’anglophone Daphne Marlatt, qui résident respectivement à Montréal et à Vancouver. S’appuyant sur le travail critique innovateur de Barbara Godard, Kathy Mezei et Sherry Simon, ce texte situe ces pratiques dans le contexte sociopolitique et intellectuel des années 1970 et 1980, au moment de l’émergence des mouvements de libération de la femme, des communautés féministes et de la critique féministe, de même que des politiques de la traduction au Canada. Cette historicisation est nécessaire pour mieux comprendre non seulement le travail innovateur de la poétique féministe canadienne, mais aussi la dissémination politique d’une culture féministe qui rapproche les cultures anglophones et francophones du Canada.
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Beyond Translation Proper—Extending the Field of Translation Studies
Karen Korning Zethsen
pp. 281–308
AbstractEN:
Modern society demands many different kinds of translation or translation-like activities which often exceed the boundaries of what translation theory traditionally terms translation proper. Highly functional translations, localisation, précis-writing, expert-to-layman communication, etc. are all part of modern life, but where do such activities fit in theoretically? In this article I shall discuss the fact that despite Jakobson’s classical definition, intralingual translation or rewording is de facto peripheral to translation studies and I shall argue that the relationship between interlingual and intralingual translation is a neglected area of research, as is a thorough description of intralingual translation. Since Jakobson’s definition, general definitions of translation have become less inclusive. This I consider a major setback as there seems to be much to gain theoretically as well as practically by looking for similarities and differences between various kinds of translational activities. With the ulterior motive of putting intralingual translation (back?) on the map of translation studies and to encourage future empirical research within this area I shall argue for a broader perception of translation and consequently of translation studies as a discipline. Inspired by Jakobson (1959), Toury (1995) and Tymoczko (1998, 2005), I shall attempt to draw up an open definition of translation which reflects the many-faceted nature of the phenomenon.
FR:
La société moderne a recours à de nombreuses formes de traductions et activités traductionnelles dérivées qui souvent échappent aux définitions canoniques de la notion de traduction. Les traductions hautement fonctionnelles, la localisation, la contraction, la communication de spécialiste à non spécialiste, etc., sont toutes intégrées à la vie moderne, mais comment ces activités traductionnelles peuvent-elles être intégrées à la théorisation de la traduction? Dans cet article, en dépit de la définition classique de Jakobson, je soutiendrai que l’étude de la traduction intralinguale – ou reformulation – est péripherique à la recherche traductologique; je soutiendrai que le rapport entre traduction inter- et intralinguale est un axe de recherche négligé, tout comme l’est une étude approfondie de la traduction intralinguale elle-même. Depuis Jakobson, les définitions générales de la traduction ont perdu en extensivité. Il s’agit là d’un retour en arrière car il y aurait beaucoup à gagner tant sur le plan théorique que dans la pratique à repérer l’ensemble des points de convergence et de divergence entre les différents types d’activités traductionnelles. En vue de réinsérer explicitement la traduction intralinguale dans le champ de recherche traductologique et d’encourager de futures recherches empiriques dans le domaine, j’argumenterai en faveur d’une définition plus large de la notion de traduction et par extension de la traductologie. Dans la lignée des travaux de Jakobson (1959), Toury (1995) et Tymoczko (1998, 2005), je m’appliquerai à élaborer une définition ouverte de la notion de traduction qui reflète sa nature polyédrique.
Comptes rendus
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Christine Raguet-Bouvard (éd.). Traduire ou Vouloir garder un peu de la poussière d’or... Numéro hors série de Palimpsestes, Les Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2006, 381 p.
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Transalpina : Études italiennes, no 9. La traduction littéraire : des aspects théoriques aux analyses textuelles, textes recueillis et présentés par Viviana Agostini-Ouafi et Anne-Rachel Hermetet, 2006.
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Nigel Armstrong and Federico M. Federici, eds. Translating Voices, Translating Regions. Rome, Aracne, 2006, 421 p.