Enfances, Familles, Générations
Numéro 29, 2018 Les temps des familles Sous la direction de Benoît Hachet et Gilles Pronovost
Sommaire (13 articles)
Les temps des familles
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Le travail du temps dans les familles contemporaines
Benoît Hachet
RésuméFR :
Cadre de la recherche : L’intérêt renouvelé de la sociologie pour les dimensions temporelles de l’activité sociale offre des perspectives éclairantes sur le fonctionnement des groupes familiaux. Le temps social dominant impose un cadre pour la coordination des activités des différents membres des familles, et, comme durée, il offre la possibilité de narrations multiples et de projections variées dans l’à venir. Pour les familles, le temps est à la fois une contrainte et une ressource.
Objectifs : L’introduction de ce numéro sur « les temps des familles », dont le pluriel veut souligner l’irréductibilité du temps à une seule dimension, pose une double question. Comment les temps construisent les familles ? Comment les familles construisent leurs temps ?
Méthodologie : Sont recensés dans cette introduction des travaux qui relèvent de la sociologie du temps dans ce qu’ils peuvent éclairer les pratiques des familles, aussi bien dans une perspective synchronique que diachronique, pour l’ensemble du groupe, ou pour certains de ses membres.
Résultats : Les temporalités de la scolarité, comme celles de l’activité professionnelle constituent des cadres socio-temporels qui s’imposent à toutes les familles, aussi bien dans la nécessité de construire une organisation calendaire adaptée, que dans la préparation du futur. Les niveaux d’adaptation aux contraintes sociales et physiques du temps varient selon les milieux sociaux et selon le genre. Les femmes ont un rôle privilégié dans l’organisation du temps familial et dans la transmission des savoirs faire temporels.
Conclusions : Le temps n’est pas un milieu extérieur dans lequel se déploient les activités des individus et les familles. Les acteurs familiaux travaillent leurs différents temps, ensemble ou de façon séparée, pour remplir des objectifs de reproduction, physique, familiale ou sociale, de façon stratégique et planifiée, ou opportuniste et dispersée. Les temps des familles ne sont pas seulement subis, ils sont agis.
Contribution : En plus d’être une contribution à une analyse temporelle des dynamiques familiales, cette introduction ouvre des pistes peu explorées sur les manières dont les familles travaillent les différents temps qui les façonnent.
EN :
Research Framework : The renewed interest of sociologists for the temporal aspects of social activity offers enlightening perspectives on the functioning of family groups. Social time imposes a framework for the coordination of activities by differing family members, and, like a timespan, it offers the possibility of multiple narrations in the ‘future’. For families, time is both a constraint as well as a resource.
Objectives : The introduction of this issue of “Family Times” uses the plural to highlight the irreducibility of time to a single dimension, which also begs two questions. How Does Time Build Families ? How Do Families Build Time ?
Methodology : The discussions raised in the introduction to this work show that the sociology of time can shed light on family practices, using both a synchronic and diachronic approach, for the entire group as well as for its constituting members.
Results : The temporality of education, like professional activities, constitute a socio-temporal framework which is imposed on families as well as the necessity of building an adapted organizational calendar to best prepare for the future. Adoption levels vary according to social and physical constraints of time depending on gender and social environments. Women play a key role in the organization of family time and the transmission of temporal know how.
Conclusions : Time is not an external environment wherein individual and familial activities occur. Family members work time differently, whether separately or together, they fulfil the objectives of reproduction and physical and social aims in a manner which is either strategic and well-planned or opportunistic and scattered. Family time is not only experienced, it is also acted upon.
Contribution : In addition to making a contribution to the temporal analysis of family dynamics, this introduction opens rarely explored pathways into how families work the different times that shape them
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Working with time in contemporary families
Benoît Hachet
RésuméEN :
Research Framework: The renewed interest of sociologists for the temporal aspects of social activity offers enlightening perspectives on the functioning of family groups. Social time imposes a framework for the coordination of activities by differing family members, and, like a timespan, it offers the possibility of multiple narrations in the ‘future’. For families, time is both a constraint as well as a resource.
Aims: The introduction of this issue of “Family Times” uses the plural to highlight the irreducibility of time to a single dimension, which also begs two questions. How Does Time Build Families? How Do Families Build Time?
Methodology: The discussions raised in the introduction to this work show that the sociology of time can shed light on family practices, using both a synchronic and diachronic approach, for the entire group as well as for its constituting members.
Results: The temporality of education, like professional activities, constitute a socio-temporal framework which is imposed on families as well as the necessity of building an adapted organizational calendar to best prepare for the future. Adoption levels vary according to social and physical constraints of time depending on gender and social environments. Women play a key role in the organization of family time and the transmission of temporal know how.
Conclusions: Time is not an external environment wherein individual and familial activities occur. Family members work time differently, whether separately or together, they fulfil the objectives of reproduction and physical and social aims in a manner which is either strategic and well-planned or opportunistic and scattered. Family time is not only experienced, it is also acted upon.
Contribution: In addition to making a contribution to the temporal analysis of family dynamics, this introduction opens rarely explored pathways into how families work the different times that shape them
FR :
Cadre de la recherche : L’intérêt renouvelé de la sociologie pour les dimensions temporelles de l’activité sociale offre 101des perspectives éclairantes sur le fonctionnement des groupes familiaux. Le temps social dominant impose un cadre pour la coordination des activités des différents membres des familles, et, comme durée, il offre la possibilité de narrations multiples et de projections variées dans l’ à venir. Pour les familles, le temps est à la fois une contrainte et une ressource.
Objectifs : L’introduction de ce numéro sur « les temps des familles », dont le pluriel veut souligner l’irréductibilité du temps à une seule dimension, pose une double question. Comment les temps construisent les familles ? Comment les familles construisent leurs temps ?
Méthodologie : Sont recensés dans cette introduction des travaux qui relèvent de la sociologie du temps dans ce qu’ils peuvent éclairer les pratiques des familles, aussi bien dans une perspective synchronique que diachronique, pour l’ensemble du groupe, ou pour certains de ses membres.
Résultats : Les temporalités de la scolarité, comme celles de l’activité professionnelle constituent des cadres socio-temporels qui s’imposent à toutes les familles, aussi bien dans la nécessité de construire une organisation calendaire adaptée, que dans la préparation du futur. Les niveaux d’adaptation aux contraintes sociales et physiques du temps varient selon les milieux sociaux et selon le genre. Les femmes ont un rôle privilégié dans l’organisation du temps familial et dans la transmission des savoirs faire temporels.
Conclusions : Le temps n’est pas un milieu extérieur dans lequel se déploient les activités des individus et les familles. Les acteurs familiaux travaillent leurs différents temps, ensemble ou de façon séparée, pour remplir des objectifs de reproduction, physique, familiale ou sociale, de façon stratégique et planifiée, ou opportuniste et dispersée. Les temps des familles ne sont pas seulement subis, ils sont agis.
Contribution : En plus d’être une contribution à une analyse temporelle des dynamiques familiales, cette introduction ouvre des pistes peu explorées sur les manières dont les familles travaillent les différents temps qui les façonnent.
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Emploi du temps, résultats scolaires et bien-être chez les adolescents. Quel rôle pour les parents ?
Jiri Zuzanek, Margo Hilbrecht et Gilles Pronovost
RésuméFR :
Cadre de recherche : L’écart générationnel grandissant entre les parents et adolescents a retenu l’attention des chercheurs depuis les années 1920. L’augmentation de cet écart a souvent été attribuée au rôle croissant des médias et des pairs dans la vie des adolescents.
Objectifs : Les changements dans le rôle joué par les parents, les médias et les pairs dans la vie des adolescents sont examinés à la lumière de leur gestion du temps. Les données sur l’emploi du temps documentent le rôle déclinant des parents, mais montrent également que des stratégies constructives de la gestion du temps peuvent aider les parents à conserver et à renforcer leur rôle dans le développement intellectuel et affectif de leurs adolescents.
Méthodologie : Les données proviennent de l’Enquête sociale générale menée par Statistique Canada (ESG) (1986 à 2005) et de l’Enquête ontarienne sur l’emploi du temps et le bien-être des adolescents de 2003 (OATUS). Les relations entre l’utilisation du temps des adolescents et le bien-être émotionnel sont contrôlées pour l’âge, le sexe et les antécédents familiaux.
Résultats : Malgré l’élargissement de l’écart de communication et d’attitude entre les adolescents et les parents au cours des dernières décennies, la situation n’est pas irrémédiable. Les analyses des données d’OATUS suggèrent que les stratégies indirectes, soulignant l’importance des routines et des relations familiales, ont des impacts plus importants sur les performances scolaires et la qualité de vie des adolescents que les règles domestiques, les interventions verbales ou les contrôles comportementaux sporadiques.
Conclusions : La conservation de l’influence parentale sur les adolescents s’effectue peut-être davantage par « osmose » des valeurs et des habitudes. En effet, le partage des valeurs familiales, des activités communes et la capacité parentale à servir de modèle joue un rôle important dans l’influence des structures de motivation des adolescents.
Contribution : Les résultats de cette recherche appuient le fait que les performances scolaires et le bien-être émotionnel des adolescents sont fondés sur leurs routines comportementales et l’efficacité des interventions des parents.
EN :
Research framework : The widening generation gap between parents and teens has occupied researchers’ attention since the 1920s. The expansion of this gap has been often attributed to the growing roles of mass media and peers in teens’ lives.
Objectives : Changes in the role played by parents, mass media and peers in the lives of teens are examined through the lens of time use. Time use data document the declining role of parents, but also show that constructive time use strategies can help parents to retain and enforce their role in teens’ intellectual and emotional development.
Methodology : Data are taken from the Canadian General Social Surveys (1986 to 2005) and the 2003 Ontario Experience Sampling Survey of Adolescents’ Time Use and Well-Being. Relationships between teens’ time use and emotional well-being are controlled for age, gender, and family background.
Results : Although the communication and attitudinal gap between teens and parents widened during the past decades, the situation is not irremediable. Analyses of OATUS data suggest that indirect strategies, emphasising the importance of time use routines and habitual inter-family relationships, affect teens’ academic performance and quality of life more profoundly than household rules, verbal interventions, or sporadic behavioural controls.
Conclusion : Perhaps the most powerful but underestimated leverage that parents have to protect their share of influence on teens is the social ‘osmosis’ of family values and practices. The seemingly imperceptible sharing of family values, joint activities, and parental ability to serve as a model play an important role in affecting teens’ motivational structures.
Contribution : The proposition that teens’ academic performance and emotional well-being are grounded in their behavioural routines, and that the effectiveness of parents’ interventions depends to a large extent on their ability to redress these routines or habits is supported by research findings.
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La gestion du temps à l’épreuve de la formation professionnelle initiale en Suisse : le poids des dispositions héritées de la socialisation familiale
Guillaume Ruiz
RésuméFR :
Cadre de la recherche : A partir d’une recherche en cours sur les transformations des temporalités des jeunes en formation professionnelle initiale en Suisse, cette contribution aborde l’influence des dispositions découlant de la socialisation familiale en matière de gestion du temps lors de l’entrée en apprentissage et l’incidence de la socialisation professionnelle sur ces dispositions.
Objectifs : Deux hypothèses structurent l’article. La première postule que les dispositions temporelles acquises durant la socialisation familiale influencent activement la capacité à organiser son temps durant la formation tandis que la seconde soutient que la socialisation professionnelle initiale participe à les transformer.
Méthodologie : Méthodes mixtes articulant la passation d’un questionnaire (n =523) et 28 entretiens auprès de jeunes inscrits dans deux formations différentes : les médiamaticiens et les assistants en soins et santé communautaire.
Résultats : Selon l’origine sociale, le genre, le parcours scolaire ou encore le style éducatif des parents, les apprentis n’ont pas les mêmes ressources pour gérer leur temps lors de l’entrée en apprentissage. Par ailleurs, la socialisation professionnelle n’a qu’une incidence limitée sur les dispositions temporelles des apprentis. Elles sont davantage renforcées qu’infléchies, surtout pour ceux qui témoignent déjà de bonnes capacités organisationnelles.
Conclusion : Les dispositions temporelles héritées de la socialisation primaire affichent une grande résistance au changement et lorsque des transformations opèrent, c’est surtout en fin de formation.
Contribution : Cette contribution permet de mieux connaître la transmission de certaines dispositions temporelles dans le cadre familial, de mieux comprendre les enjeux auxquels les apprentis doivent faire face durant les premiers mois de leur formation professionnelle et d’apporter des éléments supplémentaires à la compréhension des temporalités des jeunes.
EN :
Research Framework: This contribution is based on an ongoing research project on the time management of youths doing an apprenticeship in Switzerland. It presents how the time management dispositions inherited from familial socialization affect the way apprentices face the changes they experience during training. Additionally, we also studied the impact of the professional socialization process on time management dispositions.
Objectives : Two different hypotheses are explored. The first assumes that time management dispositions inherited from familial socialization influences the subject’s ability to organize time during their apprenticeship. The second posits that professional socialization transforms these dispositions.
Methodology : We used mixed methods including a questionnaire survey (n =523) and 28 interviews with apprentices in two different types of training : mediamaticians and social care workers.
Results : Apprentices manage their time differently depending on their social origins, their gender, their school career and their parents’ educational style. Furthermore, professional socialization has a limited influence on the apprentices’ time management dispositions. These dispositions are are strengthened rather than transformed, especially for the subjects who possessed strong time organization skills at the beginning of their apprenticeships.
Conclusion : Time management dispositions inherited from primary socialization are quite stable. If any transformations appear, they mostly occur at the end of the apprenticeship.
Contribution : This paper allows for a better understanding of time management dispositions inherited from family, improved identification of the challenges apprentices face at the beginning of their training and it provides additional knowledge about the time management of young people.
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Apprendre l’usage du temps dans les familles cadres : Une enquête en immersion
Annabelle Ponsin
RésuméFR :
Cadre de la recherche : Les pratiques de gestion de parents cadres expriment la normativité des rationalités managériales. Celles-ci renvoie à des raisonnements gestionnaires transversales (sphères privées ou publiques, familiales ou professionnelles, de loisirs) qui dessinent des rapports à soi, aux autres, et au monde (Le Texier, 2016). L’articulation des temps quotidiens (Kaufmann, 1992) et des trajectoires de vie (Bessin 2009) permet de saisir les rapports de classe, d’âge et de genre (Le Feuvre, 2006) en jeu dans ces processus. Les normes temporelles y sont « bricolées » et continuellement rejouées (Canguilhem, 1943 ; De Certeau 1994).
Objectifs : J’observe la manière dont ces « temporalités managériales » sont modelées, intériorisées et transmises par les membres du couple (dans leurs vies professionnelles, parentales, conjugales), les enfants (dans leur socialisation, leur scolarité, leur mobilité) et les collectifs familiaux (dans leurs modes de gestion quotidienne).
Méthodologie : L’approche qualitative s’amorce par une immersion. En tant que baby-sitter, je remplis un triple rôle : fonctionnel (pour coordonner les activités), éducatif (pour socialiser les enfants à l’enchainement de ces activités) et affectif (pour temporiser les cadences de ces rythmes). Cette immersion se complète par un dispositif d’entretiens et de carnets de bord personnalisés.
Résultats : Ces foyers sont des interfaces, semi-ouvertes, de flux. La place que j’y prends est charnière pour comprendre le rôle nodal des mères et des normes éducatives dans la production, la diffusion, l’intériorisation et l’invisibilisation des normes temporelles.
Conclusion : Les « modalités de construction » de ces temporalités (Elias, 1997) informent des normativités managériales qui se logent dans nos modes d’être et nos co-constructions intimes.
Contribution : L’immersion dans ces territoires temporels, que j’apprivoise, est une clef pour saisir ces processus en leur cœur. Par un retour réflexif sur ma pratique itérative, cet article souligne les co-constructions familiales de normes temporelles managériales.
EN :
Research framework: In families where the parents are senior executives, parental management practices are excellent illustrators of normative managerial rationalities. The application of traversal management reasoning (whether private, public, professional, family or leisure), influences the relationship with the self, with others, and the entire world (Le Testier, 2015). Their articulation of daily time (Kaufman, 1992) and life trajectories (Bessin, 2009) makes it possible to understand the relationship between class, age and gender (Fleuve, 2006) and how temporal standards are continuously shaped (Canguilhem, 1943; De Certeau 1994).
Objectives: I observed the manner in which these “managerial temporalities” are formed, interiorized and passed on by the couple in their professional , parental and marital lives; the children, in their socialization, schooling and travels; and the within the entire family itself through daily organization.
Methodology: This work takes a qualitative approach that started with immersion. As a baby-sitter, I assumed a triple role: functional (coordinating activities), educational (socializing with the children through a succession of activities) and emotional (temporizing the impacts of these rhythms). This immersion was complemented by private interviews and personalized logbooks.
Result: The homes visited are semi-open interfaces that are in a state of flux. I took a transitional place to better understand the focal role of mothers and the educational standards used for the production, diffusion, the interiorization as well as the invisibilisation of their temporal norms.
Conclusion: The “methods of construction” used for these temporalities (Elias, 1997) informs us of managerial norms that are applied to our way of being and our intimate co-constructions.
Contribution: The immersion that I’m undertaking in temporal territories is key to understanding the core of these processes. Through the means of a reflective look on my iterative practices, this article underlines the familial co-constructions of managerial temporal norms.
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Les cheffes d’entreprise et jeunes entrepreneures de Lomé (Togo) : des « superwomen » de la double journée de travail professionnel et domestique ?
Charlotte Vampo
RésuméFR :
Cadre de la recherche : Le Togo, pays à forte tradition commerciale, présente un taux élevé d’activité des femmes. Celles-ci sont encouragées à entreprendre et disposent librement de leurs revenus. Parallèlement, elles ont la charge quasi intégrale du travail domestique. Si la plupart d’entre elles sont cantonnées aux activités informelles, certaines cheffes d’entreprise ont réussi à se faire une place dans la capitale dans des secteurs émergents de l’économie formelle. L’enquête porte sur ces archétypes de l’émancipation féminine par le travail, qui ont fait des études supérieures et qui sont dans des associations qui promeuvent l’entrepreneuriat des femmes et leur empowerment.
Objectifs : Cet article explore la manière dont elles adhèrent à la division sexuelle du travail (DST) traditionnelle. Il questionne les ressources dont elles disposent pour gérer leur quotidien entre contraintes familiales et obligations professionnelles dans le but de discuter les reconfigurations dans les rôles genrés.
Méthodologie : Pour ce faire, la réflexion s’appuie sur des terrains ethnographiques réalisés à Lomé au cours des cinq dernières années. Une micro-analyse des rapports de genre est privilégiée dans le souci d’appréhender les itinéraires de réussite des entrepreneures dans une approche relationnelle. Le matériel empirique se compose d’entretiens, d’observations en entreprises et en dehors de celles-ci, de discussions informelles et d’un questionnaire sur la répartition des dépenses et des tâches au quotidien.
Résultats : Les résultats indiquent que la conciliation travail professionnel-travail domestique est considérée comme un devoir de femme mariée. La principale ressource dont disposent ces femmes pour s’organiser est le transfert des charges domestiques sur d’autres femmes autant au domicile que dans l’entreprise.
Conclusions : L’adhésion à la DST est déterminée par la place occupée par le mariage dans la réussite et par des enjeux de reconnaissance sociale associés au rôle reproducteur des femmes. Les cheffes d’entreprise de Lomé ne pourraient pas être les superwomen qu’elles essayent d’être sans le recours à d’autres femmes.
Contribution : L’accès des femmes à des postes à fortes responsabilités ne modifie pas complètement les rôles de genre si l’on se penche spécifiquement sur la division sexuelle du travail. La reconfiguration des rapports de genre est partiellement dépendante de l’empowerment économique des femmes. Toutefois, la négociation sociale du statut de cheffe d’entreprise se fait dans la transgression des normes de genre mais surtout dans la perpétuation d’un ordre inégalitaire de genre qui accompagne paradoxalement les changements. Cet article nous invite à reconsidérer l’empowerment comme un processus socio-politique à la fois individuel et collectif.
EN :
Research Framework : Togo is a country with a strong trade tradition and a high female labor participation rate. Women are encouraged to become entrepreneurs and they are free to make use of their revenue. At the same time, they bear a heavier burden than men in terms of work/life balance since they are responsible for virtually all domestic work. While most women are confined to informal sectors of activity, some businesswomen in Lomé have managed to be active in emerging areas of the formal economy. This investigation is about the women who seem to be an archetype for women emancipating themselves through work. These are the women who studied at universities and belong to associations that promote female entrepreneurship and empowerment.
Objectives : The article explores the way these women fit within the gendered division of labor. It investigates the tools women use to manage everyday lives filled with familial constraints and professional obligations.
Methodology : This study is based on ethnographic fieldwork conducted in Lomé over five years. A micro-analysis of gender relations was applied to reveal the trajectories of success in these female entrepreneurs by taking a relational approach. The empirical material was gathered using interviews and observations in and outside of businesses, as well as informal discussions and through the use of a questionnaire about expenses and tasks.
Results : The results show that the work/family balance is seen as the duty of married women. The most common solution to this problem is transferring the care work to other women at home and at their places of work.
Conclusions : The study highlights that women adhere to the gendered division of labor because of social standards regarding marriage and due to issues of social recognition associated with the female reproductive role. The businesswomen of Lomé may be regarded as “superwomen” however, to reach this brass ring, they must shift some of their burden onto other women.
Contribution : The fact that women have access to high responsibility jobs hasn’t completely changed traditional gendered roles. The reconfiguration of gender relations depends on the economic empowerment of women. However, the social negotiation of a company manager’s status is made by transgressing gender norms but also by perpetuating the inequality of order. This article invites us to see empowerment as a sociopolitical process which is both individual and collective.
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L’expérience des femmes quadragénaires en AMP : les seuils de la temporalité procréative, de la fertilité et de l’infertilité en question
Manon Vialle
RésuméFR :
Cadre de la recherche : Le recul de l’âge à la première maternité dans les sociétés euro-américaines conduit de plus en plus de femmes à se tourner vers l’assistance médicale à la procréation (AMP) en raison d’une infertilité liée à l’altération « naturelle » de leur réserve ovarienne. En France, elles sont prises en charge en insémination ou fécondation in vitro intraconjugale jusqu’à 43 ans, mais le recours à l’autoconservation ou au don d’ovocytes pour pallier cette infertilité considérée comme non « pathologique », ne leur est pas permis. De ce fait, dès lors que l’altération de leur réserve ovarienne est trop importante, leur prise en charge est arrêtée.
Objectifs : Dans ce contexte, cet article propose de questionner les seuils de la temporalité procréative, de la fertilité et de l’infertilité féminine tels qu’envisagés par le modèle bioéthique français de l’AMP, en particulier la façon dont l’infertilité – en tant que phénomène biologique « normal » ou « pathologique » – est appréhendée pour penser le seuil du permis et de l’interdit en France.
Méthodologie : Nous nous appuyons pour cela sur une étude des expériences et vécus de femmes quadragénaires en AMP à partir d’une enquête sociologique par entretiens qualitatifs réalisée auprès de 23 femmes âgées de plus de 40 ans, confrontées à une altération de leur réserve ovarienne et prises en charge au sein de deux centres d’AMP marseillais.
Résultats : L’enquête permet de préciser les profils et trajectoires biographiques des femmes de plus de 40 ans en AMP, ainsi que leurs vécus de l’infertilité liée à l’âge. Une diversité de raisons expliquant la temporalité de leur projet parental apparaît, liée aux injonctions de la « norme procréative » comme aux évolutions sociodémographiques conduisant au rajeunissement des classes d’âge. Dans ce contexte, la découverte de leur infertilité attribuée au vieillissement fait l’objet d’une surprise, elle apparaît en écart profond avec leur « sentiment de jeunesse », tant sur le plan physiologique, psychologique que social.
Conclusions : Nous montrons que les trajectoires et expériences de l’infertilité liée à l’âge dont témoignent les femmes interrogées mènent à appréhender autrement les seuils de la temporalité procréative par-delà la seule dimension biologique représentée en AMP par la capacité ovarienne, et à prendre plus largement en compte le corps dans son ensemble, ainsi que les dimensions sociales, relationnelles et temporelles de l’infertilité.
Contribution : La recherche présentée dans cet article permet de mettre à distance la façon dont la notion même d’infertilité est appréhendée par le cadre légal, médical et plus largement social. Loin d’apparaître comme un fait figé et strictement biologique, l’étude des pratiques dévoile ici la complexité de cette notion et remet en question les oppositions normal/pathologique et social/biologique dans la façon d’appréhender l’infertilité en France.
EN :
Research Framework : There has been a significant increase in age of first maternities in Euro-American societies. This has increasingly led women to turn to assisted reproduction technology (ART) to help with infertility caused by the “natural” alteration of their ovarian reserve. In France, women are treated using insemination or in-vitro fertilization up to the age of 43, but the use of self-preservation or oocyte donation to overcome a form of infertility that is not considered “pathological” is not allowed. When the alteration of their ovarian reserve is considered too significant, treatment is stopped.
Objectives : This article studies the thresholds of female reproductive temporality, fertility and infertility as envisaged by the French bioethical model (ART). In particular, it looks at the way infertility – as a “normal” or “pathological” biological phenomenon – is addressed and how this threshold determines permission and restriction in France.
Methodology : Our work is founded on a study of the experiences of women in their forties and ART using a qualitative sociological survey that includes interviews of 23 women over the age of forty from two ART clinics in Marseille who were confronted with an alteration of their ovarian reserve.
Results : This research allowed us to identify the profiles and biographical trajectories of these women, as well as their experiences with age-related infertility. A variety of reasons explain the time frames for becoming a parent at a later age, and these reasons are all linked to social injunctions of “reproductive norms” as well as the socio-demographic changes that led to the rejuvenation of this age group. For these women, discovering that their infertility was age-related was a surprise. It came as a surprising contradiction to their physiological, psychological and social “feeling of youth”.
Conclusions : We show that the trajectories and experiences of age-related infertility experienced by the women interviewed led to a different understanding of the threshold of reproductive temporality. This threshold clearly falls beyond the solely biological aspects represented by ART and ovarian capacity. It must also take into account broader notions of the body as a whole and the social, relational and temporal aspects of infertility.
Contribution : The research presented in this article allows us to separate the way in which the notion of infertility is addressed and understood from a legal, medical and, more broadly, social perspective. Far from being set in stone and strictly biological in nature, the study of these practices reveals the complexity of this notion and it reflects upon the opposition between what is considered normal versus pathological and the social versus biological aspects of the way infertility is addressed in France.
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Bifurcations conjugales, remises en couple et place de l’enfant : donner du temps au temps, pour inventer d’autres configurations familiales
Catherine Négroni
RésuméFR :
Cadre de la recherche : De nombreux travaux se sont intéressés à la complexité des familles recomposées ; cependant, on compte moins de recherches qualitatives sur les bifurcations conjugales et les configurations familiales post-rupture visant à éclairer l’incidence des enfants dans la remise en couple des parents.
Objectifs : Le présent article interroge les temporalités recomposées et, plus particulièrement, les temps synchrones et asynchrones des rôles parentaux et conjugaux, comment la famille se défait et se recompose à travers le rôle et la place de l’enfant dans les remises en couples.
Méthodologie : L’enquête qualitative a été réalisée dans une ville moyenne de France, auprès d’hommes et de femmes en situation de post-rupture. Nous avons recueilli trente récits de vie, soit seize récits de femmes, onze récits d’hommes et trois entretiens de personnes en couple homoparental.
Résultats : Nos principaux résultats font état de parcours de remise en couple assez différenciés, en regard du capital économique et social acquis, de la catégorie socio-professionnelle, du genre, mais aussi en fonction de la place et de l’âge des enfants. Les remises en couple sont genrées. Les temps de remise en couple sont plus longs pour les femmes lorsqu’elles ont la garde principale des enfants. L’âge à la séparation est apparu déterminant dans les parcours de remise en couple des femmes.
Conclusions : Ce travail questionne la parentalité en regard de la remise en couple : comment le couple parental continue-t-il d’exister en dépit de la cessation du couple conjugal ?
Contribution : Dans une approche qualitative, cette étude analyse les reconfigurations familiales post-rupture et montre que la parentalité vient entrechoquer la conjugalité dans des configurations familiales constamment renégociées.
EN :
Research Framework: Many works have looked into the complexity of step families. However, far less qualitative research has delved into conjugal bifurcations and post-break-up family configurations to shed light on the incidence of children in rebuilt families.
Objectives: This article seeks to question recomposed temporalities and, in particular, the synchronous and asynchronous times of parental and conjugal roles as well as how the family comes undone and rebuilds itself through the role and the place of the child in a rebuilt family.
Methodology: The qualitative investigation was conducted in France in a mid-sized city with men and with women in post break-up situations. We collected 30 life stories: 16 women’s narratives, 11 men’s narratives and 3 interviews with same-sex couples.
Results: Our work studied the paths taken in the rebuilding of differentiated families in terms of acquired economic and social capital, socio-professional groups and gender as well as the situation and age of the children. The rebuilt families were gendered. For women, the time it took to re-enter ‘couplehood’ were generally longer, especially when they were the primary residence of the children. The age at which they were separated also seemed to be a determining factor in the rebuilding of families for women.
Conclusions: This work questions parenthood, how the parental couples continue to exist in spite of a separation of the initial family compared to entering into a new union.
Contribution: Taking a qualitative approach, this study analyzed family reconfiguration post break-up and showed how parenthood collides with conjugality in constantly renegotiated family configurations.
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La mise à l’épreuve des cadres temporels de la recomposition familiale : les effets de la naissance d’un enfant commun en famille recomposée
Justine Vincent
RésuméFR :
Cadre de la recherche : Cet article s’appuie sur une recherche sociologique portant sur les naissances en familles recomposée. Il prend pour point de départ la tension à laquelle sont confrontées ces familles, qui doivent composer avec la recherche d’un recommencement pour le nouveau couple et la prégnance d’un passé non partagé, que les enfants des précédentes unions incarnent symboliquement et physiquement.
Objectifs : La question du temps est essentielle pour comprendre ce qui se joue dans le processus de recomposition familiale et se pose avec d’autant plus acuité qu’elle met en jeu la définition des liens de parenté. Un projet d’enfant commun semble marquer le point d’orgue de ce souhait de nouveau départ et contribuer à écrire une histoire commune pour les protagonistes de la recomposition familiale.
Méthodologie : A partir d’entretiens menés en France auprès de 7 hommes et 9 femmes à la tête d’une famille recomposée et ayant eu avec leur conjoint actuel un nouvel enfant, nous souhaitons interroger l’effet de la naissance d’un enfant commun sur les cadres temporels de la recomposition familiale.
Résultats : Si la naissance d’un enfant commun forge un temps mémoriel à charge forte affective, et permet de projeter un maintien des liens quoiqu’il advienne du nouveau couple, elle confronte aussi les nouveaux parents à l’impossible jonction de leurs trajectoires antérieures distinctes. Cette désynchronisation pèse dans les négociations et distingue hommes et femmes, ainsi que déjà-parents et primo-parents. Par ailleurs, une fois l’enfant né, sa présence ininterrompue au sein du foyer recomposé face aux allées et venues des enfants issus d’une autre union, fait office de rappel de l’atypique de la situation familiale des protagonistes.
Conclusion : Un véritable agencement et un travail réflexif sont opérés pour rythmer au mieux la vie quotidienne du foyer recomposé, déjà confronté, à ses prémisses, à un cycle de vie familiale inhabituel.
Contribution : En filigrane, semblent émerger des normes de « bonne » temporalité de recomposition.
EN :
Research framework: This article is based on a sociological study focusing on birth within blended families. It stems from the tension these families are experiencing — the need to reconcile the search for a new beginning of a new couple and the weight of a past they didn’t share. This issue is embodied, symbolically and physically, by children from previous unions.
Objectives: The question of time is essential to understanding what is at stake in the process of family blending. This issue also becomes increasingly important in that it puts kinship ties into play. A common child is often the focus of this desire to start over and contributes to writing a common story for the stakeholders within a reconstituted family.
Methodology: Drawing from interviews conducted in France with seven men and nine women in stepfamilies who had a new child with their current partner, we seek to analyze the effect that the birth of a common child had on timeframes of blending families.
Results: While the birth of a common child creates a memory with a high emotional charge, it is a way of maintaining links within the new couple regardless of its outcome. It also leads the new parents to face the unattainable connection of their previous distinct trajectories. This gap influences negotiations and sets apart men and women, as well as parents who already have a child versus first-time parents. Furthermore, once the child is born, their continuous presence within the blended household, in contrast to the children born from other relationships who travel back and forth, is a reminder of how non-standard the family situation has become.
Conclusion: Substantial reorganization and reflection are put into establishing daily life in a blended household ; especially given that it has already undergone a seismic shift in the cycle of family life at home.
Contribution: From this research on the timelines of blending families, the question of when is the “right time” is further explored.
Hors-thème
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L’infidélité conjugale : individualisation de la vie privée et genre
Marie-Carmen Garcia
RésuméFR :
Cadre de la recherche : Cet article propose un approfondissement des thèses de l’individualisation de la vie privée comme explication de l’infidélité conjugale. Il propose une analyse tenant compte des milieux sociaux où se diffusent prioritairement les représentations du « soi authentique » (les classes intermédiaires-supérieures ») et du genre.
Objectifs : L’objectif principal de ce texte est de montrer que l’individualisation de la vie privée et le modèle de l’amour romantique trament les doubles vies, mais que celles-ci prennent appui sur un modèle familial traditionnel porté par les hommes.
Méthodologie : Nous avons réalisé trente-neuf entretiens biographiques enregistrés d’une durée de trois à six heures. Nous avons retenu des personnes qui ont ou ont eu une relation extraconjugale de plus de deux ans, de manière régulière. Une analyse de blogues a également été réalisée.
Résultats : Les logiques sociales de l’extraconjugalité se rapprochent de celles des séparations aux mêmes âges et dans les mêmes milieux sociaux. Cependant, les ressorts des parcours conjugaux caractérisés par une liaison clandestine durable sont singuliers en termes de genre.
Conclusions : La quête d’un « soi authentique » dans les relations clandestines existe chez les hommes et les femmes. En revanche, ces dernières adhèrent prioritairement au modèle contemporain de l’amour romantique alors que les hommes sont, eux, porteurs d’un modèle familial traditionnel qui suppose l’indissolubilité de la famille. Dans ces liaisons qui durent plusieurs années, les représentations des femmes tendent à se rapprocher de celles des hommes.
Contribution : Cet article contribue à un approfondissement des analyses – rares – de l’infidélité conjugale. Il montre que l’individualisation qui prévaut à la quête de « soi » dans un amour hors du couple officiel est genrée.
EN :
Research framework : This article expands our knowledge of the individualization of privacy as an explanation for conjugal infidelity. Its analysis takes into account social circles where the upper-intermediate class of the "authentic self" and gender representations are revealed.
Objectives : The main objective of this work is to show how the individualization of private lives and the romantic love model fosters a double-life based on a traditional family model which is largely borne by men.
Methodology : We conducted thirty-nine recorded biographical interviews ranging in length from one to three hours. We interviewed individuals who have, or had, regular extra-marital relationships for more than two years. An analysis of blogs was also conducted.
Results : The social logic of extramarital affairs is close in nature to divorce in terms of age groups and social surroundings. However, the results of extra-marital affairs characterized by sustained clandestine liaisons are singular when it comes to gender.
Conclusion : The quest for an "authentic self" in clandestine relationships is real for both men and women. However, the latter adhere more to the contemporary model of romantic love while men prefer the familial and traditional model–meaning the indivisibility of the family. In relationships which last over a period of many years, women’s representations are closer to those of men.
Contribution : This article contributes to expanding the rare analyses of conjugal infidelity. It shows how a gendered individualization prevails as a "self-quest" in extra-marital love affairs.
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Personnes âgées atteintes de trouble neurocognitif : vécu des proches aidants lorsque le besoin de protection juridique est envisagé
Dominique Giroux et Maude Carignan
RésuméFR :
Cadre de la recherche : Plusieurs études rapportent que le soutien aux aînés en perte d’autonomie est principalement assuré par les proches aidants. En présence d’une personne atteinte de trouble neurocognitif, le questionnement sur la sécurité et le besoin de protection survient fréquemment. Tout au long de l’évolution de la maladie, les proches aidants sont appelés à jouer divers rôles. Cela peut s’avérer difficile pour des personnes n’ayant pas toujours les connaissances requises pour ce faire.
Objectifs : Une étude a été réalisée afin de documenter les difficultés vécues par les proches aidants en présence d’un questionnement sur l’inaptitude ainsi que leurs attentes.
Méthodologie : Une étude qualitative comprenant cinq rencontres de groupes a été réalisée avec trois catégories de participants : 1) aînés ; 2) proches aidants ; 3) membres d’organismes de protection des droits des aînés.
Résultats : Les résultats mettent en lumière trois principales difficultés rencontrées : 1) fluctuation des symptômes ; 2) acceptation de la maladie et du rôle de proche aidant ; 3) augmentation du fardeau et du sentiment d’épuisement. Un élément important ressort aussi : les proches aidants se sentent insuffisamment informés pour assurer adéquatement leur rôle. Cette réalité influence le fardeau ressenti puisqu’ils se retrouvent souvent démunis face à une situation pour laquelle ils ne sont pas toujours bien préparés.
Conclusions : Les professionnels de la santé et des services sociaux doivent être sensibilisés à cette réalité, afin de mieux outiller les proches de personnes ayant reçu un diagnostic de trouble neurocognitif pour qu’ils puissent agir de façon plus proactive relativement à l’évolution de la maladie.
Contribution : À notre connaissance, aucune étude similaire n’a été réalisée auparavant.
EN :
Research framework : Several studies report that support for seniors with loss of autonomy is mainly provided by caregivers. Following a diagnosis of dementia, questions about safety and the need for legal protection are commonplace. Throughout the course of the disease, caregivers are called upon to play various roles and this can be difficult, especially if they don’t have the knowledge required to meet these needs.
Objectives : A study was conducted to document the difficulties experienced by caregivers following a competency assessment and to create a better understanding of their reported expectations.
Methodology : Five focus groups were conducted with three categories of participants : 1) seniors ; 2) caregivers ; 3) members of seniors' rights organizations.
Results : The results of this work highlight three main difficulties : 1) the fluctuation of symptoms ; 2) the acceptance of illness and the role of caregiver ; 3) an increased burden and the feeling of exhaustion. Another important element also emerged : caregivers feel that they are not sufficiently informed to fully assume their role. This reality influences their perceived burden since they often find themselves helpless in the face of a situation for which they are not well prepared.
Conclusions : Health and social services professionals need to be made aware of this reality to better prepare the caregivers of people diagnosed with dementia so that they can be more proactive as the disease progresses along its course.
Contribution : To our knowledge, no similar study has ever been done.
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Etre un couple gay et adopter un enfant : l’expérience des parents homosexuels en Belgique
Roberta Messina et Salvatore D’Amore
RésuméFR :
Cadre de la recherche : La présente recherche vise à analyser l’expérience de l’adoption homoparentale en Belgique, en mettant en lumière les défis auxquels les homoparents sont confrontés tout au long du processus adoptif ainsi qu’après l’adoption. Les données présentées dans cet article font partie d’une étude cross-nationale plus large menée dans trois pays européens : la Belgique, la France et l’Espagne.
Objectifs : La présente étude vise à répondre aux questions de recherche suivantes :
1. Quels sont les principaux facteurs de stress rencontrés par les couples de même sexe pendant le processus d’adoption en Belgique ?
2. Quelles sont les difficultés et les besoins ressentis par ces parents après l’adoption ?
Méthodologie : L’échantillon se compose de 14 parents adoptifs homosexuels (soit 7 couples gays) résidants en Belgique. Avec chaque couple, nous avons mené des entretiens semi-structurés et vidéo-enregistrés à domicile. Les entretiens ont été entièrement retranscrits verbatim et analysés selon une approche thématique inductive.
Conclusions : Les résultats montrent que les adoptants homosexuels sont confrontés à des nombreux obstacles de nature institutionnelle, tels que le système de « quota gay », la grande quantité de refus des parents de naissance à confier leurs enfants à des couples de même sexe, ainsi que les attitudes « hétérosexistes » au sein des organismes d’adoption. En plus, les participants affirment ne pas se sentir convenablement accompagnés par les acteurs sociaux, dont le bagage théorico-expérientielle sur l’homoparentale serait, d’après eux, déficitaire.
Contribution : Les résultats de cette recherche mettent en lumière deux aspects fondamentaux. Premièrement, l’urgence d’adopter des mesures pour éviter toute forme de discrimination ; deuxièmement, la nécessité d’incrémenter la formation des travailleurs sociaux ainsi que d’adapter le processus d’adoption afin de mieux répondre aux exigences de ces nouvelles réalités familiales.
EN :
Research Framework: This study aims at analyzing the experience of same-sex adoption in Belgium, shedding light on the challenges encountered by sexual minorities during the adoption process and after adoption. Data presented in this article is part of a larger cross-national study conducted in three European countries: Belgium, France and Spain.
Objectives: This study has the purpose of answering the following research questions:
1. What are the main stressors experienced by same-sex couples during the adoption process in Belgium?
2. What are the main difficulties and the needs encountered by these parents after adoption?
Methodology: The sample is composed of 14 sexual minority adoptive parents (7 gay couples) living in Belgium. Semi-structured interviews were conducted with each couple at their home and video-registered. The interview verbatim was transcribed and analysed using an inductive thematic approach.
Conclusions: Results show that same-sex adopters deal with many institutional barriers, such as the “gay quota”, the high refusal rate of birth parents to entrust their children to same-sex couples and the heterosexist attitudes from adoption agencies. Furthermore, participants report that they do not feel adequately supported by social actors, whose theoretical and experiential knowledge concerning same-sex parenting is, according to them, shortcoming.
Contribution: The results of this research highlight two fundamental aspects. First, the urgency of adopting measures to avoid any form of discrimination; secondly, the need to increase the training of social workers and adapt the adoption process to better meet the demands of these new family configurations.
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Y avait-il un père ? Paternité et relations de couple dans les affaires de néonaticides
Laurence Simmat-Durand
RésuméFR :
Cadre de la recherche : Les affaires de néonaticide sont essentiellement connues au travers de la procédure judiciaire qui garde une approche très traditionnelle d’un crime exclusivement féminin et qui ne met en cause que la mère.
Objectifs : Le présent article s’attache à analyser ce qui est décrit de l’attitude du partenaire de la mère vis-à-vis de la paternité, et ce faisant les relations de couple qui y sont attachées.
Méthodologie : À partir de 2306 articles de presse décrivant 357 néonaticides suspectés en France de 1993 à 2012, une analyse thématique a été réalisée, utilisant toutes les mentions au père de l’enfant.
Résultats : Trois grandes tendances ont été mises en exergue : l’homme qui a conçu cet enfant, soit n’est pas envisagé dans ce rôle de père, car il est écarté de la paternité par la mère ou par la justice, soit ne veut pas être père, soit veut être père, mais en est empêché par la mère.
Conclusions : Contrairement à la littérature sur la parentalité aujourd’hui, les affaires de néonaticide mettent en scène une vision stéréotypée où la mère est seule à répondre du désir d’enfant. Ainsi, lors des poursuites judiciaires pour néonaticide, la présence du père est déniée, refusée, que le désir paternel existe ou non.
Contribution : Cet article fait le point sur l’existence donnée au père dans le contexte des poursuites judiciaires des mères à partir d’un corpus de presse concernant 141 mères ayant été poursuivies pour nénonaticide.
EN :
Research Framework: Cases of neonaticide, as described from the legal files, are seemingly exclusively perpetrated by the mother who, in turn, also faces the trial completely alone.
Objectives: This article assesses what is revealed by the partners of these mothers and their ‘attitudes’ about paternity and the way their relationship works as a couple.
Methodology: Using 2,306 press articles describing 357 suspected neonaticides in France from 1993 to 2012, we developed a thematic analysis for the descriptions of the fathers.
Results: Our analysis revealed three main trends: the men who conceived the children either were not considered to play a paternal role because they were deviated from their paternity (by the mothers or by the legal system), that they didn’t want to be the fathers, or that they wanted to be the fathers but were prevented from doing so by the mothers.
Conclusions: In contrast to the literature on parenthood, neonaticide cases present a stereotypical perspective in which mothers alone are responsible for wanting the child. During prosecution for neonaticide, the father’s role is consistently denied and refused, regardless their desire for the child.
Contribution: This article reviews the father’s existence in the context of the legal proceedings of the mothers using a corpus of press concerning 141 mothers who have been pursued on neonaticide.